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auxquels donnent lieu les voyages maritimes. Je me suis abstenu de rien reproduire des narrations mensongères que font les marins, et auxquelles les narrateurs eux-mêmes n'ajoutent pas foi. Un récit fidèle, bien que court, est préférable à tout. C'est Dieu qui dirige dans la droite voie. » couru une grande étendue de pays, et observé avec soin les particularités propres à chaque contrée, formaient des témoins respectables, sur l'autorité desquels l'écriyain anonyme avait cru devoir appuyer une partie des détails consignés dans son ouvrage. Or, ce désordre dans la narration des faits est un caractère distinctif des productions littéraires de Massoudi. D'un autre côté, cet écrivain, lorsqu'il parle des Indes et de la Chine, invoque souvent le témoignage de ces mêmes marchands, prétendus auteurs de l'ouvrage traduit par l'abbé Renaudot. On peut donc supposer que les deux narrations des voyageurs arabes ne sont autre chose qu'un fragment d'un des ouvrages de Massoudi. Il est naturel de croire que le récit des prétendus voyageurs arabes formait une partie ou de la seconde édition du Moroudj, ou de l'Akhbar-al-zeman, ou de quelque autre ouvrage de Massoudi. >>

La manière dont Abou-Zeyd s'est exprimé en commençant, et la manière dont il termine le livre, me paraissent donner une idée exacte de l'origine de cette relation et du plan qui a présidé à sa rédaction. Il n'y a véritablement qu'une relation, c'est celle qui a été écrite d'après les récits du marchand Soleyman, et qui était antérieure de plus de soixante ans à Massoudi et à Abou-Zeyd. La deuxième partie, qui est l'ouvrage de celui-ci, n'est qu'une suite de remarques tendant à modifier, à expliquer ou à confirmer le récit du marchand. Voilà d'où est venu le manque d'ordre et de proportion qui se fait sentir dans l'ensemble de la rédaction 1.

1 Yacout, écrivain arabe de la première moitié du XIIe siècle de notre ère, fait mention, dans son grand Dictionnaire géographique, d'un personnage appelé Misar-Abou-Dolaf, fils de Mohalhel, lequeł, l'année 331 de l'hégire (942 de J. C.), accompagna, à leur retour dans leur pays, des députés de l'empereur de la Chine, qui s'étaient rendus à Bokhara, auprès de l'émir

On trouve à la fin du traité ces mots écrits de la main du copiste : « Collationné avec le manuscrit sur lequel cette copie a été faite, au mois de safar de l'année 596 (novembre 1199 de J. C.).» Ces mots prouvent que le manuscrit a été copié vers la fin du XIe siècle de notre ère. Renaudot attribuait au volume un peu plus d'ancienneté; il s'exprime ainsi dans sa préface : « Son antiquité se connaît

samanide. Misar visita successivement la Tartarie, la Chine et l'Inde, et il rédigea une relation de son voyage, que Yakout a reproduite en grande partie dans son dictionnaire. Cazouyny a inséré quelques fragments de la même relation dans son ouvrage intitulé Atsar-al-bilad; mais, autant que je puis en juger par les fragments que je connais, le témoignage de Misar ne mérite pas beaucoup de confiance. Les fragments de la relation de Misar qui nous ont été conservés par Yacout et Cazouyny, viennent d'être publiés par M. Kurd de Schloezer, en arabe et en latin, sous le titre de Abu-Dolef Misaris ben Mohalhal, de itinere asiatico commentarium; Berlin, 1845, in-4°.

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assez par le caractère; mais il y a une marque certaine qu'il a été écrit avant l'an de l'hégire 569, qui répond à celui de J. C. 1173; car on trouve à la fin quelques observations de la même main, touchant l'étendue de Damas et d'autres villes de Syrie, dont Nour-eddin était le maître, et l'écrivain parle du prince comme étant encore vivant. Or ce prince mourut l'année qui vient d'être marquée. » Il est certain que dans le manuscrit on lit ces mots : « Mesure de quelques-unes des villes soumises au prince juste Nour - eddinAboul-Cassem-Mahmoud, fils de Zengui, l'année 564 (1169 de J. C.). » Mais le nom de Nour-eddin est accompagné des mots : « De qui Dieu ait pitié, et dont il illumine la tombe1; » et ces mots prouvent qu'au moment où les observations furent mises

1

Voyez dans la présente édition, pag. 149 du texte. Du reste, les chiffres 564 qui se trouvent dans l'édition manquent dans le manuscrit. La date est seulement marquée une fois et en toutes lettres.

par écrit, Nour-eddin était mort. Il est facile, du reste, de lever cette légère contradiction, en disant que l'état des forteresses, tel qu'il est présenté dans le manuscrit, fut dressé du vivant même de Nour-eddin et par ses ordres, mais que la présente copie ne fut faite qu'environ trente ans après sa mort 1.

Voilà ce que j'avais à dire sur la manière dont cette relation a pris naissance, et sur les circonstances qui ont accompagné sa publication en Europe. Mais cette préface serait incomplète, si on n'y indiquait les connaissances géographiques des Arabes à l'époque où la relation fut rédi

1 Cet état des forteresses commence à la p. 149 du texte imprimé, et se termine à la page 164. On n'en trouvera pas ici la traduction. Ce tableau sort, par son objet, du cercle des matières traitées dans le présent volume; d'ailleurs, une partie des mots est marquée, dans le manuscrit, d'une manière cursive qui est à peu près illisible, et il aurait fallu souvent n'avancer que des conjectures.

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