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ques sous pavillon anglais, qui arrivaient en plein jour avec des provisions pour les Turcs. Reçues sans défiance, elles vendaient leurs denrées; et comme les mahométans continuaient à se retirer dans la citadelle, dès que la nuit était venue, elles levaient aussitôt l'ancre pour se porter à la plage de Saint-André. Là, elles formaient leurs cargaisons des réfugiés qui se trouvaient au consulat de France et de leurs effets, qui furent ainsi trans

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possible de pénétrer, tant l'air qui en sortait était empoisonné! « J'appelai.... On trouva, hélas! le malheureux domestique, << que je voulais sauver, la tête tranchée dans le lit même où << son cadavre était encore couché. Je rentrai chez moi en me << traînant à peine; des vertiges, accompagnés de vomissements, « une fièvre brûlante, me firent croire que c'en était fait. Je me couchai sur un lit en travers de la porte de ma chambre, afin « de n'être pas surpris par quelque assassin; mais un danger plus grand, celui des malheureux qui me restaient à sauver m'ayant rendu des forces, trois jours après cet évènement j'é« tais rétabli. J'écrivis à M. Condogouri, qui se trouvait à Céphalonie, sa patrie, pour l'informer de l'état de sa maison, en <«<lui annonçant que j'avais sauvé plusieurs paquets de livres et a de papiers que je l'invitais à faire prendre. Peu de jours après <«< il m'envoya un petit brick marchand pour s'en charger; le capitaine me remit une lettre, me montra l'ordre qu'il avait d'embarquer ce qui lui appartenait, et se rendit à la chancellerie « du consulat britannique. Je ne sais ce qui s'y passa; mais il partit sans rien prendre; et il me fit dire, plusieurs mois après, qu'il aurait été perdu s'il avait rempli sa mission. Au mois de « décembre suivant, la chancellerie de Prusse fut brûlée avec le «< consulat de France, dans lequel celle-ci était déposée, par le <«< conseil de ce même hémovore, l'Anglais B...., qui fut l'auteur « de toutes les calamités de Patras. »

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portés à Zante, Ithaque, Céphalonie et Missolonghi.

Il ne restait plus que trois cent quinze personnes à expédier, quand, le 21 avril, une corvette et un transport ottoman débarquèrent cinq cents soldats à Patras. Cette troupe fut aussitôt suivie d'une foule de Turcs de la Romélie et de Chamides Thesprotes conduits par Achmet-Dem, bey de Philatès. Ce dernier était un ami du consul, et il se rendit immédiatement auprès de lui pour se mettre à sa disposition, en lui offrant de planter son baïrac à la porte de l'hôtel de France. Un pareil service aurait été précieux dans un autre moment; mais comme le consul avait éconduit Germanos, il remercia Achmet, en lui disant qu'il ne voulait d'autre protection que celle de la bannière des lis.

A la suite de cette entrevue, Achmet-Dem n'eut pas plus tôt informé Jousouf-Pacha de ce que venait de répondre le consul, que le sérasker envoya à son tour lui offrir une garde. Il savait, disait-il, que des scélérats avaient voulu attenter à sa vie, et il le priait d'accepter le secours de ses Cahouas (1), en lui demandant où se trouvaient les propriétés françaises, afin de faire veiller à leur conservation.

Le consul, qui connaissait le prix d'un pareil intérét, fit répondre au pacha: que Patras, qu'il lui avait promis de sauver, étant réduit en cendres, aucune propriété n'existait plus, et que, par conséquent, toute explication était inutile; que, pour

(1) Huissiers à verge ou bâtonniers.

ce qui le concernait, il se croyait plus fort avec le pavillon de son roi, que lui avec son armée; qu'il fit son devoir, et qu'on jugerait ensuite, qui du pacha, ou du consul de France, avait rempli le

sien.

Jousouf, qui n'avait demandé à connaître les propriétés des Francs que pour les piller, étonné de cette réponse, éprouva un embarras remarquable. Il tremblait d'être dénoncé au sultan ou au divan, qui permettent volontiers le brigandage, pourvu qu'il leur soit profitable; et comme, en pareil cas, celui auquel on demande compte se trouve toujours en deficit devant le tribunal de l'avidité, il craignait la publicité.

Déja aussi quelques feux allumés sur le mont Pa nachaïcos annonçaient que les insurgés, qui avaient perdu peu de monde, car les massacres avaient porté sur les innocents Patréens, se ralliaient. Les soldats turcs baissaient le ton, ils n'ignoraient pas que Germanos avait établi son quartier - général à Nézéro, et qu'il pouvait fondre inopinément sur leurs têtes. Enfin, on n'avait pu leur cacher qu'une insurrection qui venait d'éclater sur les confins de la Phocide ne permettait pas au lieutenant du pacha de Nègrepont, de leur envoyer les secours qu'ils lui avaient demandés.

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CHAPITRE VI.

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Insurrection de la Béotie. Diacos délivre les archontes; passe les Turcs au fil de l'épée. -Oracle moderne de Tropho. nius. Chants populaires. - Hymne de Rigas. Confédération des Béotieus. — L'évêque Procope soulève l'Élide. Ses discours prophétiques. Détails. - Martyre d'Anastasie.— Fermeté de Christodoulos. - Suite des affaires de Moldavie Déprédations de Vladimiresco et de Sava.

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et de Valachie.

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Arrivée des Hétéristes. · Entrée de Vladimiresco à Bukarest. Insurgés désavoués. Perfidie des boïards. Leurs malheurs.

Incertitudes d'Hypsilantis. Il arrive

à Kolentina. - Ses craintes. - Défiances entre les chefs Hétéristes. Scission de Vladimiresco. Lâcheté des Moldaves. Trahison de leurs boïards.

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Nous avons raconté dans un des chapitres précédents, comment le troisième satrape de l'île' d'Eubée, sorti de Négrepont pour se rendre au camp impérial de Janina, avait mis à exécution militaire la Béotie saccagée par Pehlévan et Baltadgi, pachas, et y avait laissé son kiaya, afin de percevoir l'impôt concussionnaire qu'il n'avait pu lever. A peine cet exacteur, qui tenait les primats grecs à la chaîne depuis plus d'un mois, eut-il appris l'insurrection de Patras, qu'il fut informé qu'un nommé Diacos, proto-palicare d'Odyssée, s'avançait à la tête de trois cents hommes, résolus de se venger des dévastateurs de la fertile Livadie. Le désespoir les avait armés! Effrayé de

cette nouvelle, et ne se croyant pas en force pour résister, quoi qu'il fût maître du château de Livadie, qui suffisait pour tenir les chrétiens en respect, il se hâta de faire partir son frère avec les trésors pour Nègrepont. Puis à la manière de ceux qui croient épouvanter, par des mesures atroces, ceux qu'ils ont outragés, il fit publier l'ordre du désarmement général des chrétiens, qu'il désignait aux poignards des Turcs, et mit à prix la tête du Palicare, dont le nom seul le faisait trembler.

Diacos, jugeant de l'impuissance du Caïmacan de Nègrepont, par ses menaces, et surtout d'après sa conduite, s'était embusqué sur la route de Thèbes, où il arriva assez à temps pour attaquer le frère de celui qui l'avait proscrit, qu'il fit prisonnier avec une partie de son escorte et ses bagages, qu'il conduisit dans les forêts du Parnasse. Ce coup audacieux étant connu à Livadie, les Turcs irrités assassinèrent plusieurs Grecs. Leur lieutenant tirant les primats du cachot, les menaça de les faire pendre, s'ils n'écrivaient pas à Diacos qu'il eût à relâcher son frère? Ils s'empressèrent de satisfaire à ce commandement, mais de manière à laisser entrevoir la nécessité à laquelle ils étaient réduits.

Au reçu de leur lettre, Diacos, jugeant à propos de les séparer de sa cause, répondit au gouverneur de Livadie: qu'il le rendait personnellement responsable de ce qui arriverait de fácheux aux chrétiens; qu'il consentirait à lui rendre son frère, ainsi que les autres esclaves turcs, pourvu qu'il s'enga

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