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aussi; et s

de tout temps, elle a été aheurtée à cela.
TOINETTE, à part.

La bonne bête a ses raisons.

ARGAN.

Elle ne vouloit point consentir à ce mariage; mais je l'ai emporté, et ma parole est donnée.

ANGÉLIQUE.

Ah! mon pere, que je vous suis obligée de toutes

vos bontés!

TOINETTE, à Argan.

En vérité, je vous sais bon gré de cela; et voilà l'action la plus sage que vous ayez faite de votre vie.

ARGAN.

Je n'ai point encore vu la personne; mais on m'a dit que j'en serois content, et toi aussi.

ANGÉLIQUE.

Assurément, mon pere.

ARGAN.

Comment! l'as-tu vu?

ANGÉLIQUE.

Puisque votre consentement m'autorise à vous pouvoir ouvrir mon cœur, je ne féindrai point de vous dire que le hasard nous a fait connoître il y a six jours, et que la demande qu'on vous a faite est un effet de l'inclination que, dès cette premiere vue, nous avons prise l'un pour l'autre.

ARGAN.

Ils ne m'ont pas dit cela; mais j'en suis bien aise, et c'est tant mieux que les choses soient de la sorte. Ils disent que c'est un grand jenne garçon bien fait.

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ANGÉLIQUE.

Oui. Est-ce qu'il ne te l'a dit?

Non vraiment. Qui vous l'a dit à vous?

Monsieur Purgon.

ARGAN.
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ANGÉLIQUE.

Est-ce que monsieur Purgon le connoît?

ARGAN.

La belle demande! Il faut bien qu'il le connoisse,

puisque c'est son neveu.

ANGÉLIQUE.

Cléante, neveu de monsieur Purgon?

ARGAN.

Quel Cléante ? Nous parlons de celui pour qui l'on t'a demandée en mariage.

Hé! oui.

ANGÉLIQUE.

ARGAN.

Hé bien! c'est le neveu de monsieur Purgon, qui est le fils de son beau-frere le médecin, monsieur Diafoirus; et ce fils s'appelle Thomas Diafoirus, et non pas Cléante. Nous avons conclu ce mariage-là ce matin, monsieur Purgon, monsieur Fleurant, et moi; et demain ce gendre prétendu me doit être amené par son pere.... Qu'est-ce! vous voilà tout

ébaubie!

ANGÉLIQUE.

C'est, mon pere, que je connois que vous avez parlé d'une personne, et que j'ai entendu une autre.

TOINETTE.

Quoi! monsieur, vous auriez fait ce dessein burlesque? et, avec tout le bien que vous avez, vous voudriez marier votre fille avec un médecin ?

ARGAN.

Oui. De quoi te mêles-tu, coquine, impudente

que tu es?

TOINETTE.

Mon dieu! tout doux. Vous allez d'abord aux invectives. Est-ce que nous ne pouvons pas raisonner casemble sans nous emporter? Là, parlons de sang froid. Quelle est votre raison, s'il vous plaît, pour un tel mariage?

ARGAN.

Ma raison est que, me voyant infirme et malade comme je suis, je veux me faire un gendre et des

alliés médecins, afin de m'appuyer de bons secours contre ma maladie, d'avoir dans ma famille les sources des remedes qui me sont nécessaires, et d'être à même des consultations et des ordonnances.

TOINETTE.

Hé bien! voilà dire une raison; et il y a plaisir à se répondre doucement les uns aux autres. Mais, monsieur, mettez la main à la conscience: est-ce que vous êtes malade?

ARGAN.

Comment, coquine! si je suis malade! Si je suis malade, impudente!

TOINETTE.

Hé bien! oui, monsieur, vous êtes malade, n'ayons point de querelle là-dessus. Oui, vous êtes fort malade, j'en demeure d'accord, et plus malade que vous ue pensez; voilà qui est fait. Mais votre fille doit épouser un mari pour elle; et, n'étant point malade, il n'est pas nécessaire de lui donner un médecin.

ARGAN.

C'est pour moi que je lui donne ce médecin; et une fille de bon naturel doit être ravie d'épouser ce qui est útile à la santé de son pere.

TOINETTE.

Ma foi, monsieur, voulez-vous qu'en amie je vous donne un conseil?

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TOINETTE.

La raison, c'est que votre fille n'y consentira point.

ARGA

Elle n'y consentira point?

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Votre fille. Elle vous dira qu'elle n'a que faire de monsieur Diafoirus, ni de son fils Thomas Diafoirus, ni de tous les Diafoirus du monde.

ARGAN.

J'en ai affaire, moi, outre que le parti est plus avantageux qu'on ne pense: monsieur Diafoirus n'a que ce fils-là pour tout héritier; et, de plus, monsieur Purgon, qui n'a ui femme ni enfants, lui donne tout son bien en faveur de ce mariage; et monsieur Purgon est un homme qui a huit mille livres de

rente.

TOINETTE.

Il faut qu'il ait tué bien des gens, pour s'être fait

riche.

ARGAN.

Huit mille livres de rente sont quelque chose, sans compter le bien du pere.

TOINETTE.

Monsieur, tout cela est bel et bon: mais j'en reviens toujours là; je vous conseille, entre nous, de lui choisir un autre mari; et elle n'est point faite pour

être madame Diafoirus.

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