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Contravention résultant du passage à pied sur des terres

préparées ou ensemencées.

L'allégation d'un fait de chasse ne fait pas disparaître une telle contravention.

Contravention résultant du passage à cheval ou du passage des bestiaux sur les terrains ensemencés.

A quelle prescription est soumise une telle contravention?

- 58. Les ensemencements, qui forment une des branches principales de la production, sont l'objet d'une disposition légale éminemment favorable à l'agriculture.

Dans la crainte que la position peu aisée, trop souvent précaire du cultivateur, ne lui permette pas d'acheter des semences, soit au comptant, soit à crédit, le Code Napoléon déclare que les sommes dues pour semences, seront payées sur le prix de la récolte (1). De cette manière le marchand de graines peut en toute sécurité fournir sa marchandise, et les ensemencements ne peuvent manquer d'être faits en temps utile.

la

59. Mais quel sens doit-on donner aux mots sommes dues pour semences, de l'art. 2102. La loi entend-elle seulement la fourniture des graines propres à l'ensemencement ou au contraire toutes les dépenses faites pour préparation et l'amélioration de la terre? Pourrait-on, par exemple, accorder un privilége pour fournitures d'engrais ? Nous ne le pensons pas. Tout, en matière de privilége, doit être entendu restrictivement, par cette raison qu'accorder un droit de préférence à un créancier, c'est porter préjudice à tous les autres. Or, si l'intérêt de l'agriculture a commandé la disposition de l'art. 2102,

(1) Code Napoléon, art. 2102. Voir nos 63 bis et 163. - Ce privilége est primé par les frais de justice. (Arrêt de cass. du 25 avril 1854, v. no 163.)

c'est seulement pour les semences, sans lesquelles il n'y aurait pas de grains, et pour la récolte, sans laquelle les grains se perdraient sur pied (1). Mais pour tout ce qui est simplement amélioration de la terre, il n'en doit plus être ainsi; les créanciers auxquels préjudicierait le privilége accordé par exemple pour fournitures d'engrais, pourraient à bon droit se plaindre, de voir leur débiteur faire des dépenses considérables, et des essais trop souvent infructueux (2).

60. L'achat des semences, par un cultivateur ou un fermier, n'est pas un acte de commerce.

L'art. 638 du Code, exceptant formellement de la compétence des tribunaux consulaires, « les actions inten«<tées contre un propriétaire, cultivateur ou vigneron, << pour vente de denrées provenant de son cru (3), » il en résulte que toute acquisition nécessaire à la production de ces mêmes denrées, est dépourvue du caractère de commercialité.

On pourrait ajouter que la graine, disparaissant presque complétement dans le phénomène de la production, l'acquisition qu'en fait le cultivateur ne peut être regardée comme acte de commerce, puisque l'art. 632 ne répute tels, « que les achats de denrées et marchandises, pour << les revendre, soit en nature, soit après les avoir travail«<lées et mises en œuvre, ou même pour en louer simple<< ment l'usage. »

61. Mais c'est seulement, bien entendu, de la part

(1) Voir no 162.

(2) La cour de Caen a jugé la question dans le même sens à propos de poudres végétales. (Arrêt 28 juin 1837, Devill. et Carette, 1837, II, 395.)

(3) Voir pour l'application de cet article, nos 191 et suiv.

des propriétaire, cultivateur ou fermier, que l'acte n'est pas commercial.

De la part du marchand de graines à ensemencer, il y a au contraire acte de commerce, puisqu'il fait un trafic. Ainsi le propriétaire, le cultivateur et le fermier, devraient assigner le marchand de graines à ensemencer devant la juridiction consulaire, dans le cas, par exemple, où, s'étant engagé à livrer, dans tel délai, telle quantité de graines, il n'aurait pas fourni; celui-ci ne pourrait au contraire assigner le propriétaire, le cultivateur ou le fermier que devant le tribunal civil, pour obtenir le paiement des graines vendues.

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62. La bonne qualité de la graine vendue pour semences, a, comme on le comprend, une haute importance, pour la prospérité de la récolte; aussi la justice entend-elle protéger le cultivateur contre les vices cachés de la graine livrée (1). Elle applique à la vente des semences, l'art. 1641 du Code Napoléon, ainsi conçu : « Le vendeur est tenu de la garantie, à raison des << défauts cachés de la chose vendue, qui la rendent im<< propre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent << tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas ac« quise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les « avait connus. »

Cet article est en effet applicable, car si, par suite de sa mauvaise qualité, une graine bonne en apparence, ne pousse pas convenablement, ou ne produit que des épis trop maigres, d'une qualité inférieure, il y a bien là une chose vendue, que son vice caché rend impropre à l'usage auquel on la destinait. Mais pour que la garantie légale

(1) Arrêt de cassation du 22 mars 1853 (Devill. et Carette, 1853, 1r part., p. 480).

soit accordée à l'agriculteur, il faut non-seulement qu'il y ait un vice empêchant l'usage de la chose vendue, mais que ce vice soit caché, c'est-à-dire que l'acquéreur n'ait pas pu s'en apercevoir au moment de la livraison. Dans le cas où ces deux conditions se trouvent réunies, le vendeur est tenu, 1o à la restitution du prix de la chose qui a péri, par suite de son vice caché (1); 2° au remboursement des frais occasionnés par la vente (2); 3° enfin à des dommages-intérêts, mais alors seulement que le vendeur connaissait le vice caché de sa marchandise (3).

63. La graine une fois achetée, le cultivateur l'emploie à l'époque et de la manière qui lui semblent le plus convenables.

La loi qui, violant autrefois il faut bien le dire, le droit de propriété, assignait au cultivateur la culture qu'il devait donner à son champ, a depuis longtemps abandonné ce système, aussi contraire à l'équité que préjudiciable à l'agriculture elle-même. La liberté la plus entière est aujourd'hui laissée à l'homme pratique, de préparer comme il l'entendra la terre destinée à recevoir les ensemencements, et de choisir pour ce dernier travail, le moment que la saison, la température, le climat du pays lui indiqueront comme le plus propice. Le Code rural de 1791, va même jusqu'à décider «< que nulle autorité <«< ne pourra suspendre ou intervertir les travaux de la << campagne dans les opérations de la semence (4). »

65 bis. Pour favoriser la production, le Code Napo

(1) Code Napoléon, art. 1647. (2) Code Napoléon, art. 1646. (3) Code Napoléon, art. 1645.

(4) Loi des 28 septembre-6 octobre 1791 (Code rural), tit. Ier, sect. v, art. 2.

léon accorde, nous l'avons vu (1), un privilége sur le prix de la récolte, à l'égard des sommes dues pour frais de semences et pour les frais de la récolte de l'année (2). Dans ces sommes rentrerait évidemment, selon nous, le salaire des journaliers employés aux ensemencements, sans lesquels il n'y aurait pas de récolte (3).

Nous ne parlons que des journaliers, c'est-à-dire des personnes travaillant à la journée, parce que les gens de service, par exemple les garçons de ferme, se trouveraient privilégiés, non plus en vertu de l'art. 2102, mais en vertu de l'art. 2101, ainsi conçu :

« Les créances privilégiées sur la généralité des meu<«<bles, sont celles ci-après exprimées :

<< 4° Les salaires des gens de service pour l'année échue << et ce qui est dû sur l'année courante. »>

En effet, nous pensons, malgré l'opinion contraire de M. Duranton (4), que les deux priviléges accordés par les art. 2101 et 2102, ne peuvent reposer sur la même tête. Le législateur, après avoir assuré par l'art. 2101 à tous les gens de service le paiement de leur salaire, a voulu, dans l'art. 2102, introduire, dans l'intérêt de l'agriculture, un nouveau privilége en faveur des journaliers qui, n'étant pas protégés par le premier, auraient pu se refuser à travailler pour les cultivateurs insolvables ou même seulement peu aisés.

64. Un arrêt du conseil du 26 mai 1786, défend pour les ensemencements l'emploi de toutes graines renfer

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(3) Mais ce privilége passe après les frais de justice. (Arrêt de cassation du 25 avril 1854.) Voir no 163 en note.

(4) Cours de Code civil, t. XIX, no 99.

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