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à cet effet par l'archevêque de Paris. Port-Royal entra dans de saints transports de joie, et Jacqueline Pascal, retrouvant son ancienne verve, consacra la miraculeuse guérison de sa nièce par une pièce de vers, dont voici un fragment.

Au milieu de l'Auvergne, une enfant de sept ans,
Soit pour son péché propre ou ceux de ses parents,
Ou pour une autre fin, sans qu'ils fussent coupables,
Par l'ordre de Celui qui fait vivre et mourir,
Fut surprise d'un mal si pénible à souffrir,
Qu'elle eût touché le cœur des plus impitoyables.

L'œil de cette petite en imminent danger,
Jetant incessamment une liqueur impure,
Obligeait ses parents à ne rien négliger
Pour arrêter le cours de cette pourriture.
Paris, où tous les arts se savent signaler,
Les voit venir chez elle ou plutôt y voler,
Pour trouver un remède à ce mal qui s'obstine.

Mais n'étant pas un mal facile à secourir,
L'avis des médecins est qu'il ne peut guérir

Sans appliquer le feu jusque dans sa racine.

Je renvoie, pour le reste de ce naïf petit poëme et pour tous les détails du miracle qui en fait le sujet, au mémoire du Recueil d'Utrecht (1). Je me

(1) Recueil d'Utrecht, pag. 281 à 304. Voir aussi Lettres, opusc. et Mém. de madame Périer, de Jacqueline, etc., publiés par M. Faugère, pag. 148 et suiv., pag. 376-385.

bornerai à citer de cette partie du Mémoire le paragraphe suivant.

« M. Paschal fut longtemps dans l'admiration à l'occasion de ce miracle; et il avait une raison d'en être encore plus touché que les autres. Car il paraissait que Dieu l'avait accordé non seulement aux prières et aux besoins de Port-Royal, mais encore à sa foi. Quelques jours devant il eut un entretien avec un homme qui n'avait point de religion, et qui concluait de ce qui se passait dans l'Église qu'il n'y avait point de Providence. « Car, disait-il, il est » évident qu'il n'y a rien de plus injuste que de per>> sécuter comme hérétiques des personnes qui dou>> tent d'un fait non révélé et indifférent à la Reli

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»

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gion, tel qu'est celui de Jansénius. Comment donc, ajoutait-il, si Dieu se mêle de nos affaires, si la Religion est son œuvre par excellence, si l'Église » est le royaume de la vérité, comment peut-il ar>> river que les seuls théologiens qui défendent toute » vérité soient opprimés, excommuniés, et sans >> ressource soit du côté des hommes, soit du côté >> de Dieu qui garde un profond silence?» A ce discours du libertin, M. Paschal répondit sans hésiter, qu'il croyait les miracles nécessaires, et qu'il ne doutait point que Dieu n'en fit incessamment (1). »

(1) Recueil d'Utrecht, pag. 300.

Rapprochez de cette réponse les Pensées de Pascal sur les miracles, quelque magnifique que puisse en être l'expression; mais rapprochez-en surtout sa vision et son amulette, et dites si tout cela ne se tenait pas d'une connexion intime et nécessaire.

NOTE XVIII.

LE PROBABILISME D'ESCOBAR ET DE TAMBOurin.

Bien que Pascal ait consacré la plupart de ses Provinciales à accabler de sa logique passionnée et de son éloquente moquerie le probabilisme inepte et souillé des Escobar et des Tambourin, etc. Page 203.

Il n'est personne qui, dans ces dernières années, n'ait eu l'occasion d'apprécier par de longs extraits les scandaleuses imaginations des casuistes. J'ai voulu aller un peu plus loin, j'ai voulu faire connaissance entière avec un ou deux de ces corrupteurs de conscience, et j'ai choisi parmi eux la réputation la plus proverbiale et le nom le plus ridicule, Escobar et Tambourin. Je ne saurais dire tout ce qu'a soulevé en moi de dégoût la lecture de ces Sommes d'impuretés ineptes, où des confesseurs, des pénitents vont apprendre des turpitudes, se familiariser avec des friponneries, ignorées peut-être dans les plus mauvais lieux. C'est toujours aux titres De matrimonio, luxuriâ, stupro, furto, que se trouve ce qu'il y a de plus fétide et de plus épais dans ces égouts du probabilisme.

:

Le petit ouvrage d'Escobar, le seul que j'aie lu (l'autre a 7 tomes in-folio), est en un volume, et a pour titre Liber theologiæ moralis, viginti quatuor societatis Jesu doctoribus reseratus, quem R. P. de Escobar et Mendoza, vallis oletanus, e societate Jesu theologus, in examen confessariorum digessit; in-12, Lugdini, 1644.

C'est dans ce livre que se trouve (tract. I, ex. VIII, no 102, p. 151) une défense des prêtres S.... que Pascal n'a pas osé rapporter, parce que, ditil, c'est une chose effroyable (VIe Provinciale). Et Pascal n'avait que trop raison. Voici un point de cette défense: « Clericus fæminam in indebito subigens vasi non committit propriè sodomiam quia, licet non servet debitum vas, servat tamen

sexum. »

Le livre de Tambourin (Tamburini), imprimé presque à la fois en Italie, en Allemagne et en France, contient des abominations toutes pareilles. Il est intitulé: Methodus expeditæ confessionis, tum pro confessariis, tum pro pœnitentibus, complectens libros quinque, in quibus omnes ferè conscientiæ casus ad pœnitentiæ sacramentum, quà ministrandum, quà suscipiendum, pertinentes, dilucide ac breviter enodantur; 1 vol. in-16, Coloniæ Agrippinæ, 1658.

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