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que propres à une ambassade. Remplis de grec et de latin, accoutumés à la dispute, et fort peu intelligens pour l'ordinaire dans tout ce qui n'est point relatif à la littérature, ils sont totalement étrangers aux affaires. Il faut, sans contredit, que l'ambassadeur ait de l'étude, mais il ne faut point qu'il n'ait que de l'étude, qu'il s'y attache uniquement; parce que, dans une trop constante lecture, on contracte une habitude entiérement opposée à l'activité nécessaire à l'ambassadeur, et une humeur contredisante qui rend le caractere fort épineux. C'est l'étude des bonnes lettres qui doit servir de fondement à toute la science de l'ambassadeur; c'est-là, pourvu qu'on ne tombe point dans la critique ni dans le pédantisme, que l'on trouve les principes de l'honnêteté qui doit être la premiere qualité de l'ambassadeur; mais la principale étude doit être celle de l'histoire, dans laquelle doivent êtré compris les mémoires, les instructions, les négociations, et sur-tout les traités. Les auteurs qu'un ambassadeur, et celui qui se destine à l'être, ne sauroient trop consulter et méditer, sont Thucydide, Xénophon, Polybe, Tite-Live, Jules-César, Leibnitz, Velleius-Paterculus, Tacite, Phi

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lippe de Commines, Nicolas Machiavel, Georges Buchanan, Sleidan, Fra-Paolo; l'histoire du président de Thou, celle de Mezerai, celle de la minorité de Louis XIV, Vittorio Siri; les mémoires et négociations du cardinal d'Ossat, du président Jeannin du cardinal du Perron, etc.

SECTION VIII.

Del' Age de l'ambassadeur.

:

POUR être ambassadeur, il faut de la naissance, de l'étude, des connoissances et de grandes qualités, du reste l'âge importe très-peu cependant, quoiqu'il n'y ait ni maximes ni loi à ce sujet, on peut assurer que ce n'est que dans un âge mûr que l'on doit confier à un seigneur, quelque recommandable qu'il soit d'ailleurs un tel emploi. Il est vrai que la prudence, qui doit guider les actions et les démarches de l'ambassadeur, n'est pas toujours le partage de l'âge avancé; mais en général la prudence est l'effet de l'expérience, et ce n'est qu'à un certain âge qu'on a acquis assez de cette expérience, pour se conduire prudemment. C'étoit ainsi que pensoient les Grecs. qui donnoient à leurs ambassadeurs un nom

qui signifioit ancien ou ágé. Philippe de Commines, qui a traité ce sujet, décide làdessus très-sévérement. Il faut, dit-il, se servir de personnes qui ne soient ni trop jeunes ni trop âgées, parce que si les premieres sont sujettes à trop d'emportemens, les autres ont leurs foiblesses, qui sont trèsdangereuses. Toutefois, comme l'excès dé vivacité ou d'étourderie, et l'extrême timidité sont des défauts qui se découvrent aisément en ceux en qui ils se trouvent, le prince n'y peut être trompé, s'il ne le veut bien être. Henri IV et son conseil confierent l'épineuse négociation pour la treve des Pays-Bas au président Jeannin, âgé pour lors de plus de 72 ans, et qui remplit avec le plus grand avantage cette pénible tâche. En semblables circonstances, le sénat de Venise a également chargé des plus importantes négociations des vieillards nonagénaires, comme elle envoie pour des affaires moins difficultueuses de jeunes gens en qualité d'ambassadeurs dans les cours étrangeres, afin qu'ils se forment de bonne heure dans le grand art de négocier. Souvent l'expérience ou du moins la prudence et l'habileté suppléent à l'âge, et l'on sait Jules Mazarin avoit vingt ans à peine

que

qu'il traitoit d'importantes affaires, et que six ou sept ans après, quoique bien jeune encore, il étoit en état de donner des leçons pour les négociations aux ministres les plus consommés.

SECTION I X.

Si les gens d'église sont propres pour ambassades.

les

T

Il est bon de distinguer ici entre les gens d'église; il en est qui sont réellement patriotes et sujets du souverain de l'état dans lequel ils vivent, et tels sont les prélats évêques, abbés, etc. Il en est d'autres qui, vivant sous des régimes particuliers, et vouant une obéissance aveugle, aux ordres d'un général immédiatement soumis au pape, forment un état dans l'état, n'ont que leurs intérêts et ceux de leur société en yue. Il faut bien se garder de confier une ambassade à ceux-ci; ils sont trop dangereux, et ne songent perpétuellement qu'à sacrifier' les intérêts du prince et de la patrie,aux intérêts du corps dont ils sont membres, et aux ordres du monarque étranger auquel ils ont peine d'obéir. A Venise on ne fait

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point cette distinction, et les gens d'église, quels qu'ils soient, n'ont aucune part aux affaires d'état. En France, en Espagne, et dans la plupart des autres cours de l'Europe, les ministres les plus célebres, et les négociateurs les plus habiles, ont été des gens d'église, les moines exceptés. Le souverain doit avoir égard à l'habileté seule, et point du tout à la condition ecclésiastique ou laïque du négociateur qu'il emploic.

més par

SECTION X.

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It est des légats de deux sortes; les uns sont gouverneurs de province ou de ville, d'Avignon, de Ferrare, d'Urbin, de Bo logne, etc.; les autres sont ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires. nomle pape. Ils jouissent non seulement des honneurs des ambassadeurs, mais encore de très-grandes prérogatives dans la plupart des états de la chrétienneté, où ils exercent une jurisdiction fort étendue: mais en France ce pouvoir est fort restreint par les libertés de l'église gallicane; en sorte qu'ils n'y ont rien au-delà de ce qui est ac

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