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SECTION X X X.

De la fin de l'ambassade.

TOUTE fonction de l'ambassadeur cesse aussitôt que celui qu'il représente meurt, ou n'est plus en état d'agir; ou bien, lorsque le prince auprès duquel il réside meurt ou cesse de pouvoir agir. L'ambassade prend fin également lorsque celui qui en étoit chargé est révoqué, ou bien lorsque le temps de son service est expiré. Il ne lui est cependant pas permis de quitter la cour où il réside qu'il n'en ait reçu un ordre exprès de son maître, ou une permission. Mais dans le cas où le prince représenté est insulté dans la cour où son ministre réside, celui-ci peut, et doit même en sortir, afin que l'on ne doute point de son ressentiment.

Les hostilités font aussi cesser l'ambassade; mais le droit des

gens n'est

pour cela point violé en la personne du ministre aussi-tôt que la guerre est ouverte ; et ce n'est qu'en Turquie seulement où l'on traite en ennemi l'ambassadeur du souverain avec qui l'on cesse d'être en paix; par-tout ail1790. Tome XII,

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leurs on lui donne le temps de se retirer en sûreté.

Lorsque l'ambassadeur part d'une cour satisfaité de la conduite qu'il a tenue, il est d'usage, après qu'il a pris son audience de congé, qu'on lui donne des marques de l'estime qu'on fait de lui, et de la considération que l'on a pour son maître. C'est un article fort essentiel que celui des présens, mais on pense bien différemment à ce sujet; la république de Venise regarde comme un affront que l'on n'en fasse point à ses ambassadeurs, et les Provinces-Unies défendent à leurs ministres d'en recevoir, et les regardent comme une injure. Mais si la république de Venise regarde les présens comme une partie essentielle de l'ambassade elle défend très-rigoureusement à ses ambassadeurs de recevoir des bénéfices ou des pensions d'un souverain étranger; elle voit en cela, dans le ministre qui accepteroit, ine désertion punissable et une espece d'en'gagement de trahir les intérêts de la répu -blique.

LIVRE I I.

SECTION PRE MIER E.

De la fonction de l'ambassadeur en gé

néral.

Le talent le plus nécessaire au ministre public est celui d'être un peu comédien soit afin de bien représenter le souverain qu'il sert, soit afin de se concilier l'affection du prince auprès duquel il réside, et de pénétrer le secret des affaires qu'il lui importe de connoître. Disons tout suivant les circonstances l'ambassadeur , , pour bien jouer son rôle, doit renoncer aux loix de l'amitié, aux devoirs de la conduite, aux charmes de la société; en un mot, il doit paroître l'opposé de ce qu'il est et parler autrement qu'il ne pense. Avec tout cela, l'ambassadeur, pour mieux en imposer, doit jouir d'une haute estime et dans la cour de son maître et dans celle où il réside. Quant à ces personnes de qualité que les princes envoient en ambassade uniquement pour les éloigner, ce ne sont que des exilés honorables fort peu capables de servir.

Fa

La fonction principale de l'ambassadeur ordinaire consiste à entretenir la bonne correspondance entre les deux princes, rendre les lettres de son souverain à celui auprès duquel il est envoyé, solliciter une réponse satisfaisante, observer tout ce qui se passe, protéger les sujets de son maître et veiller à ses intérêts; en sorte que, pour bien définir le ministre public, on peut dire que c'est d'un côté un messager de paix, et de l'autre un espión honorable. Ce qu'il a de plus important à faire est de bien étudier le caractere et le génie des ministres qui composent le conseil du souverain auprès duquel il réside, de démêler leurs passions, leurs foiblesses, leurs défauts, et de savoir en profiter avec adresse. Il doit, sur-tout, éviter d'en venir à des violences ouvertes; et si les circonstances sont telles qu'il soit nécessité de recourir à quelque moyen de rigueur, il peut bien comploter en secret et ourdir quelque trame, mais prendre tous les soins possibles pour qu'on ne la découvre point, car dès-lors le droit des gens cesseroit de le protéger, et il nuiroit aux intérêts du prince qui l'emploie.

SECTION I I.

Avec qui Pambassadeur doit négocier.

Le ministre public ne pent pas traiter toujours avec le prince immédiatement; il traitera donc avec ceux qui agissent sous l'autorité du souverain à la cour duquel il est. Dans certains gouvernemens les grandes affaires se négocient au cabinet, dans quelques autres elles se traitent au conseil; mais avant que de les mettre en délibération soit au conseil, soit au cabinet,l'ambassadeur doit avoir sondé les esprits comme les dispositions, et se concilier les suf frages autant qu'il a dépendu de lui.

SECTION I I I.

Comment le ministre doit négocier.

Ce sont les circonstances, les occasions, les caracteres qui doivent faire connoître à l'ambassadeur si c'est de vive voix ou par écrit qu'il lui convient mieux de négocier. A Venise, où les ambassadeurs n'ont aucun commerce avec ceux qui ont part

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