Images de page
PDF
ePub

rent d'autres risques que celui de payer une modique rançon, ainsi que sa majesté en avoit eu connoissance par queiques procédures de rançons faites par des corsaires de Dunkerque.

AU TEMPS des semailles le roi ayant été informé que plusieurs laboureurs, peu instruits de la cherté des bleds, qui ne provient que de l'artifice des marchands et autres qui en font commerce, et qui les ont recélés pour en augmenter le prix, appréhendant d'en manquer, et qu'il ne leur en restât pas suffisamment, après qu'ils auroient ensemencé leurs terres, pour la subsistance de toute leur famille pendant le cours de l'année, se proposoient de ne point semer leurs terres ; permet à tous particuliers, faute par les laboureurs et autres d'ensemencer leurs terres, de les semer et d'en recueillir les fruits, sans être obligés d'en payer aucune rente, ni tenus d'acquitter aucunes censives, etc.

[ocr errors]

Enfin, malgré toutes les précautions prises, malgré des confiscations et des amendes prononcées contre des fermiers qui avoient été convaincus d'avoir fait les plus fausses déclarations sur leurs récoltes, la cherté des

grains faisant craindre les effets de la misere publique pour l'hiver, les exemptions de droit sur les grains de toute espece ont été renouvellées et étendues. Les cours de justice ont rendu des réglemens pour forcer les pauvres à se classer chacun dans leurs paroisses, dans leurs villages, bourgs ou hameaux; ont ordonné qu'il seroit dressé des rôles de tous ceux qui seroient à la charge de la charité publique ; le roi a fait faire des distributions de pain jusqu'à cent mille livres par jour dans la ville de Paris. Ayant reconnu que cette libéralité devenoit un nouvel objet de trafic et de spéculations qui .nuisoient à sa destination véritable, on en a fait le partage aux curés en les chargeant de cette distributiou. Les mêmes inconvéniens s'étant perpétués sous ce nouveau régime, les curés de Paris ont obtenu que cette charité seroit convertie en une aumône pécuniaire de 120,coo livres par semaine.

Nous allons terminer un détail dans lequel nous ne serions pas entrés, sans le desir de donner pour toujours, et l'on pourroit dire à jamais, une base positive sur la conduite du gouvernement d'une part, et d'au trẻ part sur l'esprit public en matiere de subsistance.

En effet, ce que nous venons de dire pour 1693, nous nous bornerons à en donner les indications dans des circonstances semblables, dont la suite de nos recherches nous a fourni des preuves. Ne sera-t-on pas frappé, par exemple, des rapprochemens que l'on peut faire de ce qui vient de se passer sous nos yeux avec ce qui se passoit alors? L'hiver de 1693 fut cruel par la cherté des grains; la récolte suivante fut très abondante, et néanmoins la cherté continua long-temps après. Il falloit contraindre les cultivateurs à battre leurs gerbes; c'étoit une sorte de concert entre tous les propriétaires pour maintenir par leur retard un surhaussement de prix qui leur étoit avantageux; et il ne faut pas croire que cette spéculation eût été particuliere aux propriétaires de terres. Une déclaration du 22 juin fait connoître que des gens plus coupables avoient acheté des récoltes sur pied, et elle fut rendue pour déclarer nuls tous ces marchés.

Les achats de récoltes sur pied ne se sont pas renouvellés; mais cette circonstance est essentielle à remarquer, par rapport aux inductions que nous en pourrons tirer par

la suite.

Année 1694 jusqu'à 1709.

AVANT de passer à une autre époque aussi malheureuse que celle que nous venons d'examiner, il ne sera pas totalement inutile de faire connoître les actes de législation qui ont paru dans l'intervalle. S'ils ne doivent plus servir de guides, ils fixeront au moins nos idées ; ils nous apprendront que le goût des accaparemens étoit vraiment général; car les arrêts du conseil et ceux dụ parlement ne cessent d'en désigner les auteurs et de les poursuivre. Nous avons même trouvé des jugemens rendus contre plusieurs, et c'est pour prévenir ces dangers que l'on a publié dans le temps des réglemens sur les formalités publiques auxquelles seroient soumis tous ceux qui voudroient entreprendre le commerce des grains; sur la police des marchés ; et que l'on a même renouvellé de plus anciennes ordonnances rendues sur cette mațiere; afin sans doute de dénoncer plus particuliérement aux habitans de ce royaume une race d'hommes qui s'y perpétuoit depuis tant de temps, et qui se déroboit avec tant d'adresse aux regards de l'administration. On a renouvellé et pu

blié par extrait, en 1699, l'ordonnance de 1577, touchant le commerce des grains. Dèslors on défendoit à ceux qui prennent et qui tiennent terres à ferme, de, par eux, ou personnes interposées, tenir et garder bleds en grenier plus de deux ans, sinon pour la provision de leur maison; et néanmoins, en cas de nécessité, permet aux officiers de la police des lieux de faire ouvrir les greniers en tout temps, quand besoin sera. C'est par suite de l'attrait que le commerce des grains paroissoit avoir alors, que l'ordonnance de 1698, portant peine de mort contre ceux qui feroient sortir des grains du royaume, a été rendue. Voici un des motifs du préambule : « Plusieurs particuliers font » tous les jours, en différens endroits, de très-grands amas de bleds et autres grains, » dans la vue de les transporter en pays étranger, où ils se vendent plus cher que » dans ce royaume ; ce qui fait que, quoiqu'il y ait suffisamment de grains et de

ככ

ככ

ככ

כל

légumes de toute espece pour la subsis»tance de nos sujets, les prix en sont néan>> moins excessivement augmentés, et aug>> mentent tous les jours ».

La vigilance des cours ne se rallentissoit pas pour poursuivre ceux qui n'avoient pas

« PrécédentContinuer »