Images de page
PDF
ePub

raine allemande avec Metz sont cédées à l'Allemagne; cinq milliards de contribution seront payés par la France; au fur et à mesure du paiement de cette somme, le pays sera évacué en trois ans. Paris sera occupé en partie jusqu'à la ratification de la paix par l'Assemblée nationale de Bordeaux.

Les détails de la paix se traiteront à Bruxelles. Si la ratification a lieu, nous voilà à la fin de cette guerre aussi glorieuse que sanglante, qui nous a été octroyée avec une frivolité sans exemple.

Jamais la Prusse n'oubliera que c'est à vous qu'elle doit que la guerre n'a pas pris des dimensions extrêmes. Que Dieu vous en bénisse. Pour la vie votre ami reconnaissant.

N° 1124.

Signé: GUILLAUME.

L'EMPEREUR ALEXANDRE II A L'EMPEREUR GUILLAUME.

(Télégramme.)

Saint-Pétersbourg, le 15 (27) février 1874.

Vous remercie pour détails des préliminaires de paix et partage votre joie. Dieu donne qu'une paix solide en soit la conséquence. Suis heureux d'avoir pu vous prouver mes sympathies en ami dévoué. Puisse l'amitié qui nous lie assurer le bonheur et la gloire de nos deux pays.

[ocr errors]

Signé: ALEXANDRE.

N° 1125.

M. BANCROFT A M. HAMILTON FISH.

Berlin, le 27 février 1874.

Sir, le télégraphe vous aura apporté la nouvelle des préliminaires de paix entre la France et l'Allemagne, signés samedi soir, sur la base de cession de l'Alsace, moins Belfort, et de la Lorraine allemande, y compris Metz, avec une indemnité de guerre de cinq milliards.

La forteresse de Belfort commande le passage sud des Vosges dans le centre de la France. Pour une puissance allemande désireuse d'une

guerre avec la France, la possession de Belfort serait d'une grande importance, puisqu'elle assure l'accès des parties les plus riches de la Bourgogne. Comme position défensive, elle n'est pas d'une grande importance pour l'Allemagne. Fidèle, en conséquence, au principe de ne pas demander de cessions territoriales autres que celles nécessaires à la défensive, l'Allemagne a très-sagement restitué Belfort à la France. Cette ville est essentiellement française et l'a toujours été depuis des siècles. La forteresse de Metz est retenue par l'Allemagne parce que les autorités militaires allemandes la considèrent comme étant essentielle comme ligne de défense, mais sa position était de telle importance pour la France, pour sa propre protection, que sa cession aurait pu être difficilement réclamée, si l'Allemagne, il y a quatre ans, n'avait pas été forcée par la France de renoncer à la forteresse de Luxembourg.

L'indemnité pécuniaire demandée pèsera lourdement sur la France, car l'argent doit être trouvé et payé en trois ans, et la guerre a causé dans le crédit de la France un ébranlement dont elle ne se relèvera pas de sitôt. Le conseil de l'empire d'Allemagne, qui ressemble assez à notre Sénat, est assemblé en ce moment à Berlin, et forme la réunion des hommes d'État les plus distingués de l'empire. L'époque de la première Diète de l'Allemagne renouvelée est fixée au 16 mars. L'Empereur est attendu ici plus tôt. On dit qu'il ressent très-vivement la perte de tant de braves officiers et soldats dans la guerre, qu'il rentrera dans sa capitale avec le moins d'éclat possible, et, qu'en place de réjouissance pour la victoire, un de ses premiers actes sera de proposer un deuil public pour le pays tout entier. Lorsque ceci sera fait et que la plus grande partie de l'armée sera rappelée, il pourra y avoir une entrée triomphale dans Berlin, à laquelle l'Empereur prendra part.

L'Empereur a probablement annoncé déjà au Président des ÉtatsUnis son élévation à la dignité impériale. Dans ce cas, j'espère bientôt recevoir la réponse du Président à cette communication.

Recevez, etc.

Signé: G. BANCROFT.

No 1126.

EXPOSÉ DES MOTIFS DU PROJET DE LOI RELATIF AUX PRELIMINAIRES DE PAIX, PRÉSENTÉ A L'ASSEMBLÉE NATIONALE, LE 28 FÉVRIER 1874, PAR M. THIERS, CHEF DU POUVOIR EXÉCUTIF.

Messieurs, vous m'avez imposé une mission douloureuse. Tous les efforts dont j'étais capable, tous ceux dont était capable mon hono rable collègue, M. Jules Favre, nous les avons faits pour nous montrer dignes de vous, dignes du pays. D'ailleurs, la Commission que vous avez envoyée avec nous à Paris, et qui a vu tout ce qui s'est passé, qui a été témoin de tous nos efforts, de toutes nos douleurs, aura plus tard à s'en expliquer devant vous.

Pour le présent, je me bornerai à vous lire le projet de loi suivant, que nous vous proposons.

Je vous demanderai la permission de charger ensuite un de nos collègues de lire le texte du Traité. Dans l'impatience où j'étais de me rendre au milieu de vous, je n'ai pas pris un instant de repos. Voici le texte du projet de loi:

Le Chef du Pouvoir exécutif de la République française propose l'Assemblée nationale le projet de loi dont la teneur suit:

à

L'Assemblée nationale, subissant les conséquences de faits dont elle n'est pas l'auteur, ratifie les préliminaires de paix dont le texte est ci-annexé, et qui ont été signés à Versailles, le 26 février 1871, par le Chef du Pouvoir exécutif et le ministre des affaires étrangères de la République française, d'une part;

Et, d'autre part, par le chancelier de l'empire germanique, M. le comte Otto de Bismarck-Schoenhausen, le ministre d'État et des affaires étrangères de S. M. le Roi de Bavière, le ministre des affaires étrangères de S. M. le Roi de Wurtemberg et le ministre d'État représentant S. A. R. le Grand-Duc de Bade; et autorise le Chef du Pouvoir exécutif et le ministre des affaires étrangères à échanger les ratifications.

Teneur des préliminaires de paix, dont la lecture a été faite à l'Assemblée nationale et dont l'instrument authentique reste déposé aux archives du ministre des affaires étrangères.

Je demande à la Chambre de déclarer l'urgence. Des circonstances de la plus haute gravité exigent que nous perdions le moins de temps possible pour l'échange des ratifications. Ce sera le signal du retour de nos prisonniers et de l'évacuation d'une grande partie du territoire, y compris Paris.

N° 1127.

M. WASHBURNE A M. HAMILTON FISH.

Paris, le 28 février 1874.

Sir, le traité de paix entre la France et le nouvel Empire d'Allemagne, qui aura à être ratifié ensuite par l'Assemblée nationale à Bordeaux, a été signé à Versailles dimanche dans l'après-midi. Le texte n'en a pas encore été publié, mais ses principales conditions sont bien connues. La nouvelle de la signature de ce traité a été reçue à Paris samedi soir et a causé, comme vous devez bien le supposer, une profonde impression. La condition par laquelle trente mille hommes de l'armée allemande occuperont une partie de Paris jusqu'après la ratification du traité a produit une vive émotion, mais j'espère que la ville traversera cette pénible épreuve sans scènes de violences.

On supposait généralement que la plus grande partie de l'armée d'investissement ferait une entrée triomphale dans Paris, à travers ses rues principales, mais sans en occuper aucune partie. Le changement apporté à ce programme, de ne faire entrer qu'un petit nombre de troupes qui resterait dans Paris jusqu'après la ratification à Bordeaux, semble indiquer que cette occupation partielle de la capitale n'a pour objet que d'exercer une pression sur l'Assemblée nationale pour hâter ses résolutions. Le Gouvernement a fait un appel pressant à la patience et à la modération des habitants, et il a été secondé à cet égard par la grande unanimité de la presse. Par l'extrait ci-joint, que j'ai coupé dans un des journaux, vous verrez que la publication de tous les journaux de Paris doit être suspendue durant l'occupation prussienne.

Notre légation est située dans la partie de la ville qui doit être occupée par les troupes allemandes; c'est celle où le plus grand nombre des résidents américains ont leur domicile. Il y a eu pas mal de crainte parmi nos concitoyens d'avoir peut-être à loger les soldats allemands; mais j'ai écrit hier au comte de Bismarck à ce sujet, et j'ai appelé son attention sur la correspondance qui a été échangée entre M. Bancroft et M. de Thiele, pour ce qui concernait la protection des propriétés américaines dans l'éventualité de l'occupation de Paris par les troupes allemandes, afin que des ordres fussent donnés par les autorités militaires pour assurer la protection de toutes les propriétés américaines dans Paris.

Je dirai qu'il ne me paraît pas y avoir le moindre doute sur la ratification du traité par l'Assemblée de Bordeaux. Vous aurez certainement recu par télégraphe le texte de ce traité avant que cette dépêche vous parvienne, vous serez à même de l'apprécier et de décider dans votre propre jugement si la paix qui vient d'être conclue sera durable. Il est impossible de dire quelle sera l'influence du temps sur le peuple français; mais je crois pouvoir assurer que, pour le présent, il existe par toute la France un sentiment de haine contre les Prussiens tel, qu'il n'y en a aucun exemple dans l'histoire des peuples. L'article du Siècle que je vous envoie vous donnera une assez bonne idée du sentiment qui domine à ce sujet en France.

Les principaux négociateurs, du côté de la France, sont MM. Thiers et Jules Favre. Une tâche plus cruelle n'a jamais été probablement imposée à des hommes patriotes, et ce n'a été qu'aux dernières heures de l'armistice que le traité a été signé. Je tiens d'une source digne de foi que le nœud de la question a été la cession de la forteresse de Belfort, qui a été demandée opiniâtrement par les négociateurs allemands et aussi opiniâtrement refusée par les négociateurs français; enfin M. Thiers déclara de la façon la plus absolue que, bien que les Allemands fussent disposés à ne pas entrer dans Paris si Belfort leur était cédé, il ne consentirait jamais à signer une paix qui céderait Belfort. Je crois que la conservation de cette forteresse contribuera à faire paraître moins dure à la population parisienne l'entrée des Allemands dans la capitale. Plusieurs résidents américains sont déjà de retour ici, et aussitôt que la paix aura été définitivement conclue et que les trains de chemins de fer auront repris leur marche régulière pour les voyageurs et leurs bagages, je m'attends à les voir tous revenir.

Il y a eu de vives craintes sur l'état sanitaire futur de Paris, mais je crois qu'il n'y a aucun motif raisonnable d'avoir de pareilles craintes. La mortalité va diminuant chaque jour. Les approvisionnements sont maintenant en abondance et à meilleur marché qu'avant le siége. Ce qui fait faute ici pour le moment, ce sont les moyens de locomotion, le plus grand nombre des chevaux ayant été tués pour être mangés durant le siége; mais, aussitôt que la paix sera conclue, les choses reprendront leur état normal. Paris est redevenu déjà tout à fait parisien, et pendant les quelques derniers beaux jours les rues ont été couvertes de cette même population animée produisant ce plaisant aspect qui est particulier à cette ville historique. Mais si vous sortez de l'enceinte, la destruction et la dévastation de la guerre peuvent à peine se décrire. Le changement le plus complet et le plus terrible se montre à Saint-Cloud; ce charmant village, avec son

« PrécédentContinuer »