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«< et non autorisé dans le monde (1), ne pourra être «< reçu dans les ports britanniques (2); 2° S. E. n'est <«< pas tenue de discuter avec une puissance non « reconnue, sur ce qu'elle a cru convenable de faire. «< Elle s'avance (3) néanmoins jusqu'à dire que l'île de Mourtoux est une dépendance du gouverne«ment ionien, et que le roi d'Angleterre est son seul « protecteur. S. Exc. considère en outre le canal tout « entier de Corfou, depuis Mourtoux jusqu'à Casopo, <«< comme étant de fait le port de. Corfou. Le gouver«nement ionien ne peut que déplorer (d'après les principes de la même neutralité qu'il a toujours <<< mainteņus) la folle présomption de celle des deux parties belligérantes, qui a occasioné le présent « état des choses. >>

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<< Son Excellence désire que la personne qui se trouve « dans ce port veuille à l'instant faire voile. >>

Cette lettre était signée, d'ordre du lord haut commissaire Th. Maitland, par Frédéric Hankey, personnage dont on a vu précédemment figurer le nom dans la vente de Parga au visir Ali pacha.

La communication de cette pièce officielle au gou

(1) La croix, adoptée pour signe de régénération par les Grecs, compte dix-huit cents ans de gloire, et les Portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle. On voit bien que Sur Grace ne descend pas des familles qui prétendent rattacher leur origine aux croisades.

(2) C'est-à-dire dans les ports de l'Heptarchie ionienne. (3) Il n'y a aucun établissement sur l'île de Mourtoux (Syvota). Si elle fait partie de l'heptarchie, pourquoi y souf

vernement des Hellènes, était de nature à faire craindre que l'entreprise méditée contre l'Épire n'éprouvât des obstacles insurmontables de la part des Anglais. Le ton menaçant d'une lettre sémi-officielle, qui taxait de folle présomption l'héroïsme d'une nation poussée par des circonstances impérieuses à défendre son existence physique, car il fallait tendre la gorge au couteau, même en se soumettant, expliquait trop en faveur de qui le lord haut commissaire formait des vœux, pour compter sur l'inertie de ses dédains. Cependant, en relisant sa note hautaine, comme la navigation interdite au labarum grec, ne s'étendait qu'au mouillage de Corfou qu'on déterminait depuis Syvota jusqu'à Casopo, on reprit courage. Le port Glychys ou Phanari étant sept lieues au dessous des nouvelles colonnes d'Hercule, sur lesquelles on avait tracé le nec plus ultra de la croix, on s'imagina qu'on pouvait librement agir en deça de cette limite. L'espérance reparut dans le conseil des Hellènes, devenus, par ce qui se passait, plus intéressés que jamais à couvrir le but véritable de leur expédition du prétexte de pénétrer dans l'Étolie, pour s'opposer à l'invasion que Khourchid pacha méditait contre la Grèce occidentale.

Le président Mavrocordatos, son nom sera grand dans l'histoire de la Grèce, dirigé par la seule ambition de servir sa patrie, n'eut pas plus tôt entrevu

frir les Turcs; les y laisser s'établir militairement? On raisonne mal quand on est en colère.

la possibilité de poursuivre l'exécution du plan proposé par les Souliotes, qu'il s'empressa de nommer le général Normann son chef d'état-major. Loin de redouter son mérite, il s'en remit à lui pour toutes les mesures nécessaires au succès de l'entreprise, et comme on avait envoyé depuis longtemps des commissaires de recrutement dans les îles et sur tous les points, où l'on pouvait trouver des hommes qui eussent servi en Europe, on parvint à former deux corps d'élite régulièrement disciplinés.

Le premier, composé de deux cent cinquante six officiers français, italiens, allemands, polonais, prussiens, danois et suisses, car les enfants de Guillaume Tell, partout braves et loyaux, ne pouvaient pas manquer d'avoir des représentants armés dans la lutte de la croix contre l'étendard de Mahomet; cette compagnie, composée d'étrangers, prit le nom de Philhellène. L'honneur de combattre contre les barbares, avait fait accourir de l'occident ces nouveaux croisés, parmi lesquels on citait le capitaine Laskis, de Varsovie; le lieutenant Pourpaker, helvétien; le lieutenant Dejourdi, de Bade; Guys de Saint-Hélène, français; Voutier, élève de première classe de la marine royale; Mignac capitaine de hussards, français; Chauvassaigne, garde du corps de Monsieur; Han, danois, lieutenant de bombardiers; le capitaine Haney, de Paris; Dandré, français; et Hamsel, médecin suisse. Le commandement de ce bataillon d'élite fut confié au colonel Dania, génois d'origine, ancien chef d'escadron de chasseurs.

Un second corps, ou régiment, fort de six cents hommes, tous Grecs, ayant servi en France ou en Russie, divisé en deux bataillons, fut mis sous les ordres d'un colonel piémontais, nommé Tarella. Ainsi l'armée d'expédition eut une espèce de garde de vétérans d'honneur, composée de huit cent cinquante six hommes, dont Alexandre Mavrocordatos fut nommé stratarque par le sénat législatif de Corinthe. Il donna ensuite ses dernières instructions relativement à Nauplie de Romanie, forteresse que la célèbre Bobolina de Spetzia bloquait par mer depuis plus de quatorze mois, avec une persévérance qu'on aurait cru audessus de ses forces et de son sexe, si l'infatigable constance de cette femme aussi extraordinaire par sa valeur que par la piété conjugale qui la caractérise, n'était attestée par des témoins irrécusables.

On était informé depuis quelques jours seulement que le serasker Khourchid pacha n'avait pas plus tôt appris la consommation de l'échange de son harem, qui fut débarqué le 2 mai à Prévésa, qu'il avait démasqué ses vues secrètes. Ce n'était ni vers la Thessalie, ni du côté de l'Acarnanie qu'il avait dirigé son attaque, mais contre la Selleïde. Le moment était arrivé de saisir l'ennemi au corps, de prendre les Turcs en flagrant délit, de les terrasser, de précipiter leurs hordes dans les ondes de l'Achéron, de leur porter un coup décisif, et peut-être de les anéantir. On partit précédé du labarum, en prenant la route qui passe par Sicyone et Ægium pour se rendre à Patras. Arrivés près de cette dernière ville, Mavrocordatos eut

nn entretien avec Colocotroni, qui faisait le blocus du château, et on s'embarqua aussitôt au mouillage de Saint-André, à la vue des Turcs étonnés de la belle ordonnance des chrétiens.

Le vent était propice: on aurait cinglé vers l'Épire; mais comme on craignait que Th. Maitland n'eût décrété que le port de Corfou s'étendait depuis la pointe d'Otrante jusqu'aux terres de la Morée, Mavrocordatos, jetant un regard douloureux sur la belle mer de la Grèce, fermée à la valeur de ses enfants, ordonna de porter le cap vers Missolonghi, où il prit terre le cinq juin à midi.

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