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gnement, nous vous ordonnons et vous exhortons, autant qu'il nous est possible, qu'après avoir fait à Dieu les prières pour le salut de notre seigneur et père, vous ayez nonobstant cette mutation à continuer la fonction de vos charges et administrer la justice à nos sujets, ainsy que le devoir de vos charges vous y oblige selon l'intégrité de vos consciences, jusqu'à ce que vous nous ayez fait et presté le serment accoustumé. Cependant nous vous asseurons que vous nous trouverez tel envers vous, et en général et en particulier, qu'un bon roy doit être envers ses fidèles sujets et serviteurs. Donné à Saint-Germain-en-Laye, le quatorzième may 1643. Signé Louis, et plus bas, DE GUÉNÉGAUD.

LIT DE JUSTICE.

N° 2.- · ARRÊT du parlement de Paris, le roi séant en son lit de justice, qui déclare la reine sa mère régente du royaume, et lui confie la garde et l'éducation du roi (1).

Paris, 18 mai 1643. (Néron. II. 679. Dupuy. Major. des rois. p. 520.)

A ses pieds (du roi) le duc de Chevreuse, grand chambellan. Plus bas assis sur le degré par lequel on descend dans le parquet,

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du serment. Le chancelier, averti de cette circonstance, déclara au parlement que les termes étoient conformes à ceux qui se trouvoient dans la lettre écrite en 1547, lors de la mort de François Ier, et que, depuis cette époque, il ne se trouvoit pas d'exemple de semblables lettrės, ajoutant « que M. le premier président « Lizet demanda au roi la confirmation des charges et de tous les officiers du parlement, et que nous ne devons pas trouver étranges les termes auxquels celles qui auroient esté envoyées le matin se trouvoient écrites. » Le parlement lui répliqua Que depuis ce temps, qui étoit presque de cent années, lá face des affaires publiques avoit bien changé; que les roys avoient autorisé la disposition des offices, mesme de judicature, et que l'établissement du droit annuel estoit une espèce d'hérédité publique qui renduit la condition des officiers asseurée, « non pas pour se dispenser du respect, de l'obéissance et de la soumission qu'i's doivent au roy, et contre laquelle ils ne voudroient ni ne sauroient prescrire, mais pour les dispenser de ces anciennes formalitez lesquelles s'observoient lorsque les offices estoient de simples commissions. (Reg. du parlem. Biblioth. Cass.)

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(1) Sous Louis XIII (année 1615), le parlement de Paris se composoit de deux cents inagistrats; huit présidents à mortier, chefs de la compagnie, siégeoient dans la grand'chambre composée de trente conseillers, qui y parvenoient par rang d'ancienneté. Cinq chambres des Enquêtes et deux des Requêtes avoient des attributions diverses, quant aux matières judiciaires : dans les affaires publiques, le parlement procédoit toutes les chambres assemblées.. Richelieu

......

le prévôt de Paris. Devant le roy au dedans du parquet, étoient à genoux et nuës têtes, les huissiers de la chambre, portant une masse d'argent doré. En la chaire qui est aux pieds du roy, où le greffier en chef est lorsque l'on tient l'audience, couverte de tapis du siége royal, étoit monsieur Seguier, chancelier, vêtu d'une robe de velours violet, doublée de satin cramoisy, ayant le cordon bleu, comme garde des sceaux de l'Ordre du SaintEsprit. Sur le banc où sont les gens du roy durant l'audience, messieurs les présidens, Molé premier, Potier, de Mesme, de Bailleul, de Nesmond, de Bellièvre, de Longueil. Sur une autre forme les secrétaires-d'état, Phelypeaux, de Guénégaud et Le Tcllier. Sur les sièges du premier barreau d'auprès de la lanterne de la cheminée, maîtres Omer Talon avocat du roy, Meliand procureur général, Briquet avocat du roy.

Aux hauts siéges à main droite proche le roy, une place entre deux, la reine. Ensuite, le duc d'Orléans oncle du roy. Le prince de Condé, premier prince du sang. Le prince de Conty, fils dudit seigneur prince de Condé. Le duc de Vendosme. Le duc d'Usez. Le duc de Ventadour. Le duc de Sully. Le duc de Lesdiguières. Le duc de la Rochefoucauld. Le duc de la Force. Les maréchaux de France. Le maréchal de Vitry. Le maréehat d'Estrée. Le maréchal de Bassompierre. Le maréchal de Chastillon. Le maréchal de Guiche. L'archevêque de Paris sur le bano des conseillers de la grand'chambre. L'évêque de Senlis. Sur un autre banc, la princesse de Condé : la duchesse de Longueville : la damoiselle de Vendosme, avec voile de grand deuil: Bouthillier sur-intendant des finances : conseillers-d'état et maîtres des requêtes en robe de satin, sur un banc dans le parquet.

Aux hauts sièges à main gauche. L'évêque de Beauvais, comte et pair de France. Sur les siéges des barreaux, les présidens et conseillers des enquêtes et requêtes du palais.

A côté dans le parquet au bureau où se fait la lecture des édits et déclarations du roy: au devant un bureau semé de fleurs-de

créa quinze nouveaux offices de conseillers; la conipagnie refusa de reconnoître les titulaires. Le roi vint en personne les installer sur leurs siéges; mais les présidents, qui distribuoient les procès à juger, ne donnèrent aucuns rapports à faire aux conseillers intrus, et ne consentirent pas à délibérer avec eux. ( M. de St-Aulaire, Hist. de la Fronde.) Ces conseillers contribuèrent en 1649 aux frais de la guerre du parlement pour une somme considérable, et le parlement les reconnut. K. Arrêt du parlem. 9 janvier 1649.

lys, le greffier en chef revêtu de son épitoge et manteau fourré, avec moy principal commis.

Ce jour la cour, toutes les chambres assemblées en robes et chaperons d'écariate, messieurs les présidens revêtus de leurs manteaux, et tenans leur mortier, attendoient la venue du roy selon son ordre, les capitaines des gardes saisis des huis du parlement sur les huit heures du matin, ayant eu avis de l'arrivée de monsieur le duc d'Orléans, a député pour aller au-devant de luy messieurs les présidens de Bellièvre et de Longueil, et maîtres Nicolas Chevalier, Guy de Thelis et Jean Scaron conseillers en icelle, et l'ont été recevoir à moitié de la grand'salle du palais, et sont rentrez avec le sieur duc d'Orléans: et peu après. sur les huit heures et demie, ladite cour ayant sçu que monsieur le chancelier approchoit, a député maîtres Pierre Bruxelles et Nicolas Thuder, aussi conseillers en icelle, pour l'aller recevoir au parquet des huissiers, lesquels rentrez avec lui, l'ont conduit jusques, au lieu où il a pris sa place au-dessus du premier président; ledit sieur Chancelier suivi de plusieurs conseillersd'état et maîtres des requêtes. Et sur les neuf heures et demie étant venu un exempt vers ladite cour, l'avertir de l'arrivée du roy et de la reine sa mère à la sainte Chapelle, a député pour aller les salüer et recevoir, messieurs les présidens Potier, de Mesme, de Bailleul et de Nesmond, maîtres Jules Savarre, Samuël de la Nauve, Nicolas Chevalier, Guy de Thelis, Jean Scaet Michel Champrond, conseillers en icelle, qui l'ont conduit marchans devant lui: sçavoir les sieurs présidens Potier et de Mesme, et les autres présidens et conseillers ensuite dudit. seigneur roy, qui étoit vêtu d'une robe violette, et portée par les ducs de Chevreuse, grand chambellan, et comte de Charost capitaine de ses gardes, en son lit de justice, et ladite dame reine ensuite proche dudit seigneur roy, à main droite, où étant ledit seigneur roy et ladite dame reine sa mère placée.

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Ledit seigneur roy a dit qu'il étoit venu pour témoigner au parlement sa bonne volonté, que monsieur le chancelier dira le

reste.

Ladite dame reine a dit :

« Messieurs, la mort du défunt roy mon seigneur, quoiqu'elle ne m'ait surprise à cause de la longueur de sa maladie, m'a néanmoins tellement surchargée de douleur, que jusques à présent je me suis trouvée incapable de consolation et de conseil; et quoique les affaires du royaume désirent un soin continuel pour

satisfaire au dedans et pourvoir au dehors, mon affliction a été si grande, qu'elle m'a ôté toutes sortes de pensées de ce que j'avois à faire, jusques à ce qu'au dernier jour vos députez ayant salué le roy, monsieur mon fils, et fait les profestations de leur fidélité et obéissance, ils le supplièrent de venir tenir son lit de justice, prendre la place de ses ancêtres, laquelle il considère comme une marque de la royauté. Ce que j'ai voulu faire aujourd'hui pour témoigner à cette compagnie, qu'en toutes sortes d'occasions je seray bien aise de me servir de vos conseils, qué je vous prie de donner au roy monsieur mon fils, et à moy, tels que vous jugerez en vos consciences pour le bien de l'Etat. »

A l'instant le duc d'Orléans oncle du roy prenant la parole', et l'adressant à la reine, lui a témoigné la satisfaction que tout le royaume devoit avoir de son procédé; que dès samedy dernier en la présence des députez du parlement il s'étoit expliqué, et avoit dit que l'honneur tout entier étoit dû, non-seulement à sá condition de mère de roy, mais aussi à son mérite et à sa vertu ; et que la régence lui ayant été déférée par la volonté du défunt roy, et par le consentement de tous les grands du royaume, et depuis vérifiée en cette cour en la présence de lui qui parle, il ne désiroit autre part dans les affaires que celle qu'il lui plairoit lui donner, et ne prétendoit aucun avantage de toutes les clauses particulières contenuës en cette déclaration (1).

(1) Cette déclaration (du 20 avril précédent) portoit création d'un conseil de régence, composé de la reine, du duc d'Orléans, du prince de Condé, du cardinal Mazarin, du chancelier Séguier, du surintendant des finances Bouthillier, et de Chavigny. Toutes les affaires de la paix, de la guerre et des finances devoient y être décidées à la pluralité des voix ; il nommoit aux charges de la couronne, aux principaux emplois militaires et civils, aux gouvernements des provinces et des places fortes, enfin à toutes les dignités importantes. . . . . Aucune précaution ne fut oubliée pour donner à la déclaration toute l'autorité possible. Le roi vouloit qu'elle fût irrévocable, aussi ferme que la loi satique; il la signa en présence des princes, des pairs, des ministres, des officiers de la couronne et des députés du parlement. Il écrivit au bas : Ce que dessus est ma très expressc volonté, que je veux être exécutée. Il obligea la reine et le due d'Orléans à la signer aussi, et la remit ensuite au premier président Molé, en lui disant : « J'ai disposé des affaires de mon royaume; c'est la seule satisfaction que • je puisse avoir en mourant.» Le lendemain le duc d'Orléans porta, par l'ordre du roi, cette déclaration au parlement pour y être enregistrée....... La reine protesta devant deux notaires « contre la signature qu'elle avoit donnée par obéissance pour le roi. » (M. de St-Aulaire. Hist. de la Fronde. )

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Louis XIII, mal obéi pendant sa vie, se flatta de l'être mieux après sa mort; mais la première démarche d'Anne d'Autriche fut de faire annuler les volontés

Le prince de Condé premier prince du sang a approuvé la générosité du duc d'Orléans oncle du roy, qui a témoigné être non-seulement utile, mais nécessaire pour le bien et gouvernement de l'Etat, dans lequel les affaires ne succèdent jamais lorsque l'autorité est partagée: déclarant qu'il est de même sentiment, ainsi qu'il l'avoit fait entendre aux députez du parlement lorsqu'ils salüèrent le roy au dernier jour dans le Louvre.

Après quoi ledit sieur chancelier se leva de sa place, et ayant monté vers ledit seigneur roy, et mis le genoüil en terre pour recevoir le commandement de parler, retourna en sa place, et adressant sa voix à la compagnie, il dit :

• Messieurs, si la plus graude marque de la colere de Dieu contre un peuple, est de lui donner un mauvais prince; cellelà sans doute n'est pas guere moindre de lui en ôter un extrêmement bon. Quand je songe à la perte que la France vient de faire, et cet accident funeste qui lui a ravi son prince, cette pensée remplit avec raison mon esprit d'étonnement et mon cœur d'une douleur sans mesure. Ce prince qui faisoit trembler il y a huit jours toute l'Europe sous sa puissance, qui soutenoit la grandeur de cette monarchie avec tant de gloire, n'est plus: ce pieux et invincible monarque, qui a été tant aimé de Dieu, qui l'a rendu la merveille des rois, l'instrument de ses graces pour la France, a été enlevé par

de son mari par un arrêt du parlement de Paris. Ce corps, long-temps opposé à la cour, et qui avoit à peine conservé sous Louis XIII la liberté de faire des remontrances, eassa le testament de son roi avec la même facilité qu'il auroit jugé la cause d'un citoyen. Anne d'Autriche s'adressa à cette compagnie pour avoir la régence illimitée, parce que Marie de Médicis s'étoit servie du même tribunal après la mort de Henri IV; et Marie de Médicis avoit donné cet exemple, parce que toute autre voie eût été longue et incertaine; que le parlement, entouré de ses gardes, ne pouvoit résister à ses volontés, et qu'un arrêt rendu au parlement et par les pairs sembloit assurer un droit incontestable. L'usage qui donne la régence aux mères des rois parut donc alors aux Français une loi presque aussi fondamentale que celle qui prive les femmes de la couronne. Le parlement de Paris, ayant décidé deux fois cette question, c'est-à-dire, ayant seul déclaré par des arrêts ce droit des mères, parut en effet avoir donné la régence. Il se regarda, non sans quelque vraisemblance, comme le tuteur des rois, et chaque conseiller crut être une partie de la souveraineté. ( Voltaire, Siècle de Louis XIV.) Le parlement annula, sans le dire, la partie de la déclaration du testament du roi qui avoit établi des limites à l'autorité de la régente. La renonciation de tous ceux qui y étoient nommé sà l'autorité dont elle des investissoit avoit rendu la tâche du parlement facile. La difficulté avoit été d'obtenir cette renonciation de Gaston et du prince de Condé.

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