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LXIII. Death disarmed by Christian Philosopny. LE Chancelier More ayant refusé de reconnoître Henri VIII. roi d'Angleterre, pour chef suprême de l'église, fut dépouillé de sa dignité, et jeté dans une prison. On lui enleva ses livres, son unique consolation au milieu de toutes les horreurs qui l'environnoient; mais on ne put jamais lui enlever la tranquillité d'âme qui le soutenoit dans ses disgrâces.

Ses amis firent tout ce qu'ils purent pour le gagner, en lui représentant qu'il ne devoit point être d'une autre opinion que le grand conseil d'Angleterre : "J'ai pour moi toute l'église," répondit-il, "qui est le grand conseil des Chrétiens."

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Sa femme le conjurant d'obéir au roi, et de conserver sa vie pour la consolation de ses enfans: "Combien d'années,” lui dit-il, pensez-vous que je puisse vivre ?""Plus de vingt ans," répondit-elle.-"Ah! ma femme," répliqua More, "voulez-vous donc que je change l'éternité avec vingt ans ?"

Ayant été condamné à périr du dernier supplice, on vint lui dire que le roi avoit modéré l'arrêt de mort rendu contre lui, à la peine d'être seulement décapité. "Je prie Dieu," répondit-il, "de préserver tous mes amis d'une semblable clémence !"

Etant au pied de l'échafaud, il appela un homme, auquel il dit "Mon cher ami, je vous prie de m'aider à monter, "afin que vous puissiez vous vanter de m'avoir rendu le dernier service.'

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Ayant mis la tête sur le billot, et s'appercevant que sa barbe, qui étoit fort longue, étoit étendue de telle sorte que le bourreau l'auroit coupée en l'exécutant, il le pria de l'accommoder de façon qu'elle fut conservée. 'Et d'où vient," lui dit le bourreau, "que vous vous mettez en peine de votre barbe, vous à qui l'on va couper la tête ?" Cela m'est fort peu important," lui répliqua More, "mais c'est pour toi que je parle; veux-tu être accusé de ne pas savoir ton métier, puisqu'on t'a ordonné de me couper la tête, et non pas la barbe ?” Il reçut la mort avec la tranquillité d'un chrétien et le sang-froid d'un philosophe.

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True Wisdom claims no Homage.

LXIV. Si vous voulez vous faire aimer, et si vous désirez que l'on vous rende justice, laissez oublier aux autres que vous êtes homme de mérite et de réputation: ils ne seront jamais plus portés à vous estimer, et à vous vanter, que lorsque vous leur abandonnerez entièrement le soin.

Platon voulant voir les jeux olympiques, se rendit à Olympie, où il logea avec des personnes qui ne le connaissaient pas. Il leur plut par ses manières et par son entretien, sans se découvrir à eux. Après la célébration des jeux, ils vinrent le visiter à Athènes, où il les reçut avec ces façons aimables qui distinguent les vrais sages.

Alors ses hôtes lui dirent: "Faites-nous voir, s'il vous plaît, ce disciple de Socrate, qui porte le même nom que vous (car il leur avait dit qu'il se nommait Platon), et dont la renommée fait partout tant de bruit; menez-nous à son école, et présentez-nous à lui, afin que nous retirions quelque fruit de sa conversation.

C'est moi-même, leur répondit Platon, avec un sourire modeste." Ces étrangers emportèrent de lui une bien plus grand idée, que si, dès le premier moment, il s'était annoncé pour ce qu'il était, avec emphase et prétention.

LXV. Gratitude a Spring of true Courage.

LE cardinal Wolsey, ministre et favori de Henri VIII, roi d'Angleterre, ayant été disgracié par son maître, se vit tout d'un coup abandonné de tout le monde. FitzWilliams, un de ses protégés, fut le seul qui parut s'honorer d'avoir été l'objet de ses bienfaits. Il offrit même sa maison de campagne au cardinal, et le conjura d'y venir au moins passer un jour.

Le cardinal ayant accepté cette invitation, fut reçu par Fitz-Williams avec les marques de la plus vive reconnaissance et du plus profond respect. Le roi fit venir ce dernier, et lui demanda avec colère, comment il avait pu avoir l'audace d'en agir ainsi avec un homme accusé et déclaré coupable de haute trahison.

"Sire, répondit Fitz-Williams, je suis pénétré pour votre majesté de la soumission la plus respectueuse; je ne suis ni mauvais citoyen, ni sujet infidèle. Ce n'est ni

le ministre disgracié, ni le criminel d'état que j'ai reçu chez moi ; c'est mon bienfaiteur, c'est mon protecteur, celui qui m'a donné du pain, et de qui je tiens la fortune et la tranquillité dont je jouis. Ah! sire, si je l'avais abandonné dans son malheur, j'eusse été le plus ingrat des hommes."

Henri VIII, surpris et plein d'admiration, fit chevalier sur-le-champ l'homme qui venait de lui parler avec tant de courage et de sensibilité, et le nomma son conseiller privé.

LXVI. Conjugal Love the Strongest Passion of Woman. Le duc de Wirtemberg s'était opposé de toutes ses forces à l'élection de Conrad III, proclamé empereur en 1133. Quand le nouveau monarque eut pris possession de la couronne, le duc de Wirtemberg, refusant de le reconnaître, se renferma dans la petite ville de Weinsperg, la plus forte place de ses états.

Il y fut assiégé, et soutint toutes les attaques avec une bravoure héroïque. Enfin il fallut céder à la force. L'empereur voulait tout tuer et tout détruire. Cependant il fit grâce aux femmes, leur permettant même d'emporter ce qu'elles avaient de plus cher, et de sortir de la ville.

L'épouse du duc profita de cette circonstance pour sauver son mari: elle le prit sur ses épaules; toutes les femmes en firent autant de leurs époux, et elles se mirent à défiler devant Conrad, chargées de ce précieux fardeau, et ayant la duchesse à leur tête. Conrad ne put tenir contre un spectacle si touchant, et il pardonna au duc et à tous les habitans, en faveur de leurs épouses.

LXVII. Respect for Old Age a Duty.

PENDANT les fêtes qu'on nommait Panathénées, et qui se célébraient à Athénes, un vieillard était venu chercher une place dans l'endroit où se tenaient les Athéniens; les jeunes gens se moquèrent de lui, et le renvoyèrent avec dédain.

Il se présenta ensuite du côté des Lacédémoniens: dès qu'il fut à leur portée, ils se levèrent tous, par respect pour son âge. Les Athéniens applaudirent cette action

avec enthousiasme: "Hélas! s'écria un Lacédémonien, ce peuple connaît ce qui est honnête, sans avoir le courage de le pratiquer!" Pour le vieillard, attendri, il s'écria: "Les Athéniens connaissent les règles de la bienséance; les Lacédémoniens les pratiquent."

Effectivement, la vieillesse, dévouée ailleurs au mépris, élevait un Spartiate au faîte de l'honneur. Les autres citoyens, et surtout les jeunes gens, avaient pour lui les égards qu'ils devaient, un jour, exiger pour euxmêmes. La loi les obligeait de lui céder le pas à chaque rencontre, de se lever quand il paraissait, de se taire quand il parlait.

On l'écoutait avec déférence dans les assemblées de la nation et dans les salles du Gymnase. Ainsi les citoyens de Lacédémone, qui avaient servi leur patrie, loin de lui devenir étrangers à la fin de leur carrière, étaient respectés, les uns comme les dépositaires de l'expérience, les autres comme ces monumens dont on se fait une religion de conserver les débris.

LXVIII. A Christian Precept taught by a Savage Ex

ample.

UN Indien, qui n'avoit pas eu de succès dans sa chasse, erroit dans le voisinage d'une plantation située sur les établissemens du derrière de la Virginie. Il s'approcha de cette plantation, et, voyant le propriétaire assis à sa porte, il lui dit qu'il avoit grand' faim, et lui demanda un morceau de pain: sur le refus qu'il reçut en réponse, il demanda un verre de bière: même refus. "Mais je meurs de soif,” reprit le sauvage ; "donnez-moi au moins un peu d'eau." Retire-toi, chien d'Indien," dit le plan

teur, "tu n'auras rien ici !"

Il arriva, quelques jours après, que ce planteur inhumain, chassant dans un bois avec quelques amis, s'écarta d'eux, en suivant une pièce de gibier qu'il ne put joindre, et perdit ses compagnons. Après avoir erré toute la journée, accablé de fatigue, et mourant de faim et de soif, il aperçut une cabane de sauvages: il y courut, et demanda en grâce qu'on le conduisît à la plantation Européenne la plus prochaine.

"Il est trop tard," lui dit le sauvage, maître de la ca

bane, "pour pouvoir espérer d'y arriver avant la nuit ; restez ici, vous y serez le bien-venu, et demain il fera jour." Il lui présenta ensuite un morceau de venaison, et d'autres rafraîchissemens dont il avoit besoin.

Ensuite, ayant étendu plusieurs peaux pour lui faire un lit, il le fit coucher, en lui disant de reposer tranquillement, lui promettant de le réveiller le lendemain de bonne heure, et de le conduire sur le chemin qui le meneroit chez lui.

La nuit se passa: le sauvage tint parole à son hôte, et l'accompagna jusqu'à ce qu'il reconnût les lieux et sa route. Au moment où il alloit s'en séparer, et lui dire adieu, il voit le sauvage s'arrêter, l'envisager, et lui demander, "Me reconnois-tu ?" Le planteur frémit en le reconnoissant en ce moment pour le même Indien qu'il avoit renvoyé autrefois avec tant de dureté.

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Il avoua, en tremblant, qu'il reconnoissoit ses traits, et il commençoit à excuser sa conduite brutale, lorsque le sauvage l'interrompit, et lui dit froidement : Quand tu verras un pauvre Indien mourant de soif, et demandant un verre d'eau, donne-le lui, et ne lui dis plus va-t-en, chien d'Indien !" Aprés cet avis, il lui souhaita un bon voyage, et le quitta. Il est inutile de demander lequel de l'Indien ou du planteur méritoit le nom de sauvage.

LXIX. The true Friend is no Flatterer.

LES différends de Henri IV avec Sully eussent pu donner matière à plus d'un duel entre gens pointilleux, et qui auraient tout soumis au droit du glaive. Ce ministre ne reçut point la confidence qu'on lui faisait, sans faire une vive remontrance à Henri sur ce qu'il croyait contraire à la gloire de son maître.

Ce prince, dont les passions étaient vives, reçut d'abord fort mal les représentations de son confident. Il le quitta même assez brusquement, en disant tout haut: "Voilà un homme que je ne saurais plus souffrir, il ne fait jamais que me contredire, et trouver mauvais tout ce que je veux: mais, pardieu! je m'en ferai bien obéir ; je ne le reverrai de quinze jours.

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