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DEUXIÈME PARTIE.

L'INITIATION DIVINE.

CHAPITRE PREMIER.

L'INITIATION DIVINE.

I.

Si l'enfant qui vient de naître ne peut s'élever à l'intelligence, qu'avec le secours d'une puissance initiatrice qui pénètre dans les profondeurs du moi, quelle fut l'initiation du premier homme?

Et d'abord qui fut l'initiateur? A cette question la réponse est facile; car, qui fut le père et qui fut la mère du premier homme? Dieu. — Dieu lui-même a donc été le premier initiateur. « Souviens-toi, homme, « des jours antiques! le Seigneur ton Dieu t'a porté

« dans ses bras comme un jeune enfant; comme un

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aigle qui porte ses petits, qui étend ses ailes sur eux,

qui vole sur eux et les provoque à voler. Il te porta « à ses mamelles et te mit sur ses genoux, il joignit « à la nourriture les caresses et les tendresses, comme «< une mère caresse son enfant qui suce son lait. »

Lorsque la muse sacrée de la tradition raconte les soins que Dieu prit autrefois de l'humanité naissante, on dirait que pour tracer ses tableaux elle fait poser la tendresse d'une mère avec son enfant. Et ce caractère de l'Écriture suffirait seul pour attester une initiation divine analogue à l'initiation maternelle, si nous ne savions pas d'ailleurs que sans la première, il est aussi impossible de comprendre les idées universelles qu'il l'a été d'expliquer les notions élémentaires sans la seconde. Qu'est-ce à dire ?... Que la même scène intérieure qui se passe tous les jours entre une mère et son enfant, dut se passer autrefois entre Dieu et le premier homme..... Mais comment pourrions-nous décrire cette scène ? Nous ne l'essaierons pas; il vaut mieux laisser l'esprit de chacun en concevoir comme il pourra toute la sublimité. La tradition a dit : « Le Seigneur notre Dieu forma l'homme « du limon de la terre, et souffla sur sa face l'esprit de vie, et l'homme fut fait dans une âme vivante. » Ces paroles en disent assez de même que la pensée d'une mère devient celle de son enfant, il fallut que la pensée de Dieu devint celle du premier homme.

La géologie elle-même nous enseigne qu'entre tous

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les êtres l'homme est venu le dernier sur cette terre. Avant d'entrer en conseil pour cette création suprême, avant de dire : Faisons l'homme à notre image, Dieu s'était longtemps exercé à des créations d'un ordre inférieur. Lorsque l'homme parut, les espèces vivantes qui ne sont pas lui, quelques-unes timides et les autres féroces, étaient en possession du globe. On serait donc épouvanté, en songeant à cette apparition subite de l'homme, si l'on ne songeait en même temps à la providence divine: et il faudrait rapporter aux premiers jours d'Adam ce profond effroi de l'humanité, cet effroi gigantesque dont la mémoire est empreinte dans les antiques traditions. Mais, au contraire, la tradition nous enseigne que les premiers jours d'Adam furent les plus beaux jours de sa vie; elle nous raconte la sagesse divine occupée sans cesse de lui; et la raison est bien forcée d'accepter cette croyance; la raison est, ici, forcée de rendre témoignage à la tradition; car, quel eût été, sans la main de Dieu, le sort de l'humanité naissante? Celui d'un enfant au berceau perdu dans le désert.

II.

De même que la pensée d'une mère devient celle de son enfant, il fallut que la pensée divine devint celle du premier homme; de même que par l'ini

tiation maternelle, l'enfant se connait et connait sa mère; dès le premier acte de l'initiation divine, à ce moment suprême où le moi divin se posa tout à coup dans la conscience humaine, Adam dut se connaître et connaître Dieu. Je suis, il est; telles furent les premières notions d'Adam, et cette notion il est relative à Dieu, dut se présenter à l'homme dans toute sa plénitude et dans toute sa puissance; car elle dut entrer dans la pensée humaine telle qu'elle était dans la pensée divine, c'est-à-dire comme la notion d'un ètre qui s'est défini par ces paroles: Je suis celui qui suis. Il y a plus encore: de même que dans l'initiation maternelle, l'enfant apprend à aimer soi et à aimer sa mère, Adam dut aimer soi et aimer Dieu au sein d'un ineffable bonheur. La sagesse suprême a dit d'elle-même : « Mes délices étaient d'ha<«< biter avec les enfants des hommes; » ce qui est le témoignage traditionnel de l'amour qui unit Dieu à l'humanité naissante. L'amour est Dieu lui-même sous un de ses aspects; et dans cet amour plein de puissance et de bonheur, Adam puisa cette étonnante richesse d'amour qui nourrit le cœur de l'homme religieux.

Il y a donc une parfaite analogie entre les éléments de l'initiation maternelle et ceux de l'initiation primitive; avec cette différence que la notion d'un être extérieur et intelligent fut primitivement l'idée de Dieu même, et que le sentiment d'amour qui accompagna cette idée, fut l'amour de Dieu. Si l'initiation

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