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INTRODUCTION.

Nous avons déjà plusieurs bons ouvrages sur l'art d'exploiter les mines, nous sommes riches en mémoires détachés et en traités spéciaux ; mais je crois qu'il nous manquait encore un livre élémentaire portatif, complet et peu coûteux, qui fût à la portée de l'homme du monde qui veut s'occuper de mines et du maître ouvrier qui cherche à s'instruire. Tel est le but de l'ouvrage que je présente aux nouveaux exploitans et aux jeunes mineurs français qui voudront rivaliser avec les Saxons, et qui sentiront de plus en plus que la science et la pratique sont deux sœurs qui gagnent beaucoup à vivre en commun, qui s'entr'aident journellement, qui ont chacune leur mérite et qui ne peuvent se séparer sans s'éloigner aussitôt du but de perfection vers lequel on se plaît à les voir marcher ensemble.

Tant d'hommes distingués se sont occupés de l'art des mines, qu'il devenait assez difficile de composer un nouvel ouvrage sur ce même sujet sans rentrer à chaque instant dans un champ déjà cultivé; mais bien déterminé d'avance à faire honneur à chacun de son propre ouvrage, et à ne me réserver que le faible mérite d'avoir disposé et coordonné ces différens documens avec ordre et méthode, en y ajoutant ce qu'une longue

pratique m'a personnellement appris, j'ai encore entrevu le moyen d'être utile à mes concitoyens, et je n'ai plus balancé à mettre la main à l'œuvre.

Ces Élémens pratiques d'exploitation font suite à la Minéra¬ logie appliquée aux arts, que j'ai publiée il y a quelques années, et qui renferme la description et l'histoire de toutes les substances minérales qui sont employées dans les arts et les manufactures: mon but était alors de faire connaître les minéraux utiles et leurs nombreuses applications, comme il l'est aujourd'hui de décrire tous les moyens dont on fait usage pour les arracher et les extraire du sein de la terre, qui les recèle presque tous.

Jars, Delius et Monnet parmi les anciens auteurs, MM. d'Aubuisson et Héron de Villefosse chez les modernes, ne se sont point bornés dans leurs excellens ouvrages à décrire les différentes parties de l'art du mineur; ils ont traité de la préparation et même de la fonte des minerais: deux parties tout-à-fait étrangères à l'exploitation proprement dite, et dont je n'ai pas dû m'occuper, puisque le plan que je me suis tracé commence avec l'exploration de la surface, comprend tout ce qui s'exécute dans l'intérieur de la terre, mais se termine rigoureusement au moment où les substances qui font le sujet de l'exploitation sont sorties du sein de la terre et arrivées jusqu'au jour.

Je me suis très peu étendu sur la construction des pompes et des machines en général, parce que nous possédons une foule d'ouvrages de mécanique dans lesquels on trouve tout ce que l'on peut désirer sur l'établissement et l'application de tous les moteurs connus, et que j'ai dû me borner à conseiller d'adopter telle ou telle machine plutôt que telle ou telle autre, mais sans la décrire en détail.

Les sciences et les arts sont arrivés à ce point éminent qui exige cette même division de travail qui contribue si puissamment à la perfection des travaux manuels. Les sciences natų

relles surtout, qui ne sont point étrangères à notre sujet, se sont, depuis trente ans, subdivisées presque à l'infini, et c'est à cette même époque qu'il faut rapporter l'origine des progrès immenses qu'elles ont faits chez toutes les nations civilisées ; chacun a senti qu'après avoir acquis des connaissances générales sur telle ou telle science, il devait en adopter une partie seulement, s'y adonner tout entier, y sacrifier tous ses momens, tous ses moyens, toutes ses pensées, et renoncer à la prétention de tout parfaitement connaître. C'est à cette division tacite, à ce partage intellectuel, dont chacun a choisi sa part, que nous devons, n'en doutons pas, les travaux d'Haüy sur les caractères physiques des minéraux, ceux de Werner sur leur aspect et leur physionomie externe, ceux de Berzelius sur leur constitution chimique; tandis que d'autres minéralogistes se sont spécialement occupés du gissement et de la manière d'être des substances minérales, et d'autres encore, de la recherche de leurs nombreuses applications.

L'art des mines a dû subir le sort de toutes les connaissances humaines, il peut et doit se présenter seul et entièrement dégagé de tout ce qui ne lui appartient pas essentiellement ; je dis plus, c'est que je suis très persuadé que l'époque n'est pas éloignée où l'on sentira la nécessité d'un traité particulier de l'exploitation de la houille, et que l'art gagnera infiniment encore à cette nouvelle subdivision.

Je me suis au reste fort peu détourné de la route adoptée par mes devanciers pour la classification des différentes parties de l'art; car, après avoir décrit la plupart des circonstances qui peuvent servir d'indices pour la présence des minerais et des combustibles, leurs dispositions diverses dans l'intérieur de la terre, les meilleurs moyens d'explorer la surface et de pratiquer les travaux de recherches qui doivent confirmer ou détruire les notions acquises par l'inspection superficielle des terrains, je me suis attaché, tout comme eux, à décrire les différens modes d'attaquer les roches, les outils que l'usage a

fait adopter, et les moyens divers employés pour exploiter tel ou tel gîte, et pour porter ou élever au jour les produits du travail du mineur.

La conservation des hommes et des travaux exigeait bien un chapitre séparé; car l'art de soutenir la roche ébranlée qui tend à tout combler, les moyens de faire écouler les eaux, de s'opposer aux inondations subites et aux progrès des incendies souterrains, et d'assainir l'air infecté de gaz délétères, sont des sujets si importans pour le mineur, que l'on doit employer tout ce qui dépend de soi pour les mettre en évidence et attirer sur eux l'attention extrême qu'ils commandent.

La géométrie souterraine, qui n'est autre chose que l'application de la géométrie et de la trigonométrie à l'art de lever les plans de mine et de les dessiner sur le papier, forme un chapitre séparé, qui se termine par des tables de sinus calculés que nous devons à M. de la Chabaussière.

L'administration, enfin, pour ce qui tient aux fonctions, à la conduite, aux devoirs et au bien-être des ouvriers, pour ce qui est relatif à la comptabilité du directeur, s'il en est chargé; à la constitution des sociétés et à la législation des mines, forme notre sixième et dernier chapitre, qui est terminé par la loi du 21 Avril 1810, qui régit cette partie de notre industrie en France.

Quant à l'appendice, il se compose d'une suite de notes détachées, qui ne pouvaient trouver place dans le courant du texte, et qui sont toutes relatives à des objets de détail, tels que le prix de la journée du mineur, du mètre cube de roche abattue, la valeur des bois et autres matériaux, le prix et la force des différentes machines, les dimensions des principaux ouvrages de mine exécutés en France, en Allemagne, en Angleterre ou ailleurs, et autres notions analogues, qui peuvent être de quelque intérêt pour les gens de l'art, et surtout pour les jeunes praticiens, que j'ai toujours eus en vue en composant cet ouvrage.

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