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de police, et où le tribunal chargé de les réprimer n'aurait d'autre alternative que de les punir par l'application successive de la peine encourue ou du maximum de cette même peine; qu'en ne désignant ainsi que deux catégories des faits déclarés punissables, et en gardant le silence sur la troisième, cet article a suffisamment montré qu'il n'a pas compris cette dernière dans ses dispositions; qu'en prohibant le cumul des peines applicables aux délits et aux crimes, et en établissant une règle spéciale pour la punition des divers crimes ou délits dont un accusé serait convaincu, le législateur a été déterminé tant par la nature des peines et les limites du droit de punir, que par l'intérêt même de l'humanité et de l'amendement des coupables; que ces motifs ne sauraient avoir lieu quand il s'agit des peines qui ne sont applicables, le plus souvent, qu'à de simples infractions ou omissions, négligences ou désobéissances de la part de celui qui les a commises, à des lois ou à des règlements de police; qu'il importe peu que la première partie de l'art. 365, C. d'inst. crim., attribue aux cours d'assises une compétence générale sur tous les faits qui sont constatés devant elles, que l'étendue de cette compétence est la conséquence naturelle de la juridiction qu'elles exercent; mais qu'on n'en peut conclure qu'elle emporte nécessairement avec elle l'obligation d'appliquer, sans aucune distinction, à tous les faits sur lesquels ces cours peuvent être appelées à prononcer, la défense du cumul des peines; que la loi a pu, en effet, par des raisons d'intérêt public, prescrire à une juridiction supérieure de statuer sur les faits qui ne sont pas habituellement portés devant elle, et laisser cependant aux principes généraux sur la nature et l'étendue des peines toute leur application; qu'il n'en pourrait être autrement qu'au moyen d'une dérogation expresse à ces principes, et que celle qui a été introduite dans la deuxième partie de l'art. 365, C. d'inst. crim., ne porte pas sur les cas où il s'agit de contraventions de police [1]. »

Cet arrêt, rendu par les chambres réunies, établit pour la première fois une doctrine que la chambre criminelle avait jusque-là refusé de consacrer. Les faits, au reste, ont exercé une influence évidente sur cette décision; il s'agissait de contraventions multipliées commises journellement par les préposés d'une entreprise de vidanges, et la peine qui suivait ces contra

[1] Cass., 7 juin 1842. (V., dans ce sens, Brux., cass.,

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ventions, confondues dans une seule, était impuissante à les réprimer; au lieu de demander soit au législateur, soit à l'administration, des mesures efficaces pour faire cesser ce déplorable état de choses, la cour de cassation a cru les trouver dans une interprétation restrictive, qui dénie à toutes les contraventions en général le bénéfice de l'art. 365.

Il ne s'agit point ici de porter notre examen sur le principe posé par cet article, et de rechercher son influence spéciale sur la répression des contraventions; il ne s'agit point de refaire la loi, mais de l'appliquer. Or, la règle qui prohibe la cumulation des peines, lorsque l'agent est poursuivi à raison de plusieurs faits punissables, est formellement établie par les articles 365 et 379, C. d'inst. crim.; toute la question est de savoir si elle est générale pour toutes les infractions et toutes les juridictions, ou si elle est spéciale à certains faits et à la seule cour d'assises.

Le dernier arrêt de la cour de cassation l'a restreinte à deux classes d'infractions, les crimes et les délits, et il appuie, en premier lieu, cette restriction sur le texte du 2° § de l'art. 565. Ce paragraphe porte qu'en cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte sera seule prononcée. On induit de là qu'il n'en est pas ainsi à l'égard des contraventions, puisqu'elles ne sont pas désignées dans cet article. Cette induction est-elle fondée?

Il faut remarquer d'abord que le mot délit est un terme générique qui comprend en général tous les faits punissables. Dans l'art. 363 il est employé par opposition au mot crime, pour indiquer les infractions qui ont un caractère de criminalité moins grave; il comprend donc et les délits proprement dits et les contraventions. La preuve que telle est la signification de ce mot se trouve dans le premier paragraphe du même article. Cette disposition porte que, si le fait est défendu, la cour d'assises prononcera la peine établie par la loi, même dans le cas où ce fait ne se trouverait plus de sa compétence. Or, le fait cesse d'être de la compétence de la cour d'assises, soit lorsqu'il devient, d'après les débats, un délit, soit une simple contravention; dans ces deux cas, la cour est donc compétente pour prononcer les peines. L'art. 363 confond donc dans sa première disposition les délits et les contraventions; comment admettre ensuite qu'il les ait séparés dans sa seconde?

Et puis il est difficile de supposer que le pouvoir de la cour d'assises se restreigne et s'affaiblisse, pour ainsi dire, quand les faits qu'elle

2 fév. 1833, 15 juill. et 21 oct. 1836; Bull., 1853, p. 46; apprécie sont plus minimes et plus dénués d'in1836, p. 322, et 1838, p. 122.) térêt. Ainsi cette cour, qui peut ne prononcer

CHAUVEAU. T. IV. ÉD. FRANC. T. VIII.

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qu'une seule peine quand elle est saisie d'un crime et d'un délit, devrait nécessairement en prononcer deux quand elle statuerait à la fois sur un crime et sur une contravention; le crime absorberait le délit, et n'absorberait pas la contravention! Cette anomalie deviendra plus sensible par un exemple. Supposons qu'un individu prévenu de vol qualifié soit en même temps inculpé d'avoir établi des jeux de hasard dans un lieu public. La cour d'assises, dans le système de la cour de cassation, prononcera deux peines, l'une pour le crime, l'autre pour la contravention; mais si la contravention acquiert par la récidive un caractère plus grave, si elle devient passible, aux termes du 2° § de l'art. 478, d'une peine correctionnelle, cette peine s'absorbera dans la première, de sorte qu'à mesure que l'infraction prend un caractère plus grave, la répression s'adoucira.

Si, au lieu de considérer l'art. 365 comme l'application d'une règle générale qui domine notre législation pénale, on ne voulait y voir qu'un principe renfermé dans les termes de l'espèce où il a été posé, il faudrait arriver à d'autres conséquences non moins étranges: l'art. 365 ne s'applique qu'aux cours d'assises, et n'autorise que les cours d'assises à faire application de ses dispositions. Les articles du Code qui ont réglé la juridiction correctionnelle ne les ont point reproduites. Faut-il conclure de là que cette juridiction ne doit point en faire l'application? Sans aucun doute il le faut, dans le système de la cour de cassation; car, si l'art. 365 doit être restreint dans un cas, sous prétexte que ses termes ne permettent aucune extension, la même raison devra circonscrire son application à la seule hypothèse spécialement prévue par son texte; ainsi la cour d'assises est seule autorisée à n'infliger qu'une seule peine à l'auteur de plusieurs délits; le tribunal correctionnel, placé dans les mêmes circonstances, n'aura pas le même pouvoir, l'art. 365 ne pourra lui être appliqué; de sorte que la gravité des peines dépendra de la nature de la juridiction qui en fera l'application: telle est l'une des conséquences du dernier arrêt de la cour de cassation.

Et cette interprétation s'appuie-t-elle du moins sur la nature et sur le système répressif des infractions de police? La cour de cassation déclare: «que le législateur a été déterminé, en rédigeant l'art. 365, tant par la nature des peines et les limites du droit de punir, que par l'intérêt même de l'humanité et de l'amendement des coupables, et que ces motifs ne sauraient avoir lieu quand il s'agit de simples contraventions. >> Ce ne sont point là les vrais motifs de l'art. 365;

car ils s'appliqueraient aussi bien à l'état de récidive qu'à la perpétration de plusieurs délits avant toute condamnation. La seule raison de cet article est que l'agent qui commet successivement plusieurs infractions avant toute poursuite, a paru moins coupable que celui qui a reçu, dans un ou plusieurs jugements, des avertissements de la justice, dont il a dû profiter. Or, cette raison ne s'applique-t-elle pas avec autant de force aux contraventions qu'aux crimes et aux délits? Celui qui a commis successivement plusieurs contraventions ne doit-il pas être présumé avoir agi par ignorance, jusqu'à ce qu'il ait reçu l'avertissement d'un premier jugement? Plus les faits sont minimes, plus il est possible de tirer de leur multiplicité même une sorte d'excuse, car cette multiplicité atteste l'inattention ou l'ignorance de l'agent, et l'on doit supposer qu'un seul jugement, qu'une seule peine suffira pour la faire cesser. Ne serait-il pas étrange d'additionner minutieusement toutes les contraventions pour établir le total de la peine? Et cette peine ne se trouverait-elle pas hors de proportion avec la gravité de ces infractions? Supposons, par exemple, qu'il soit constaté qu'un propriétaire a oublié vingt fois le balayage de la rue, qu'un charretier a été trouvé vingt fois hors de la portée de ses chevaux; le juge prononcera donc, dans le premier cas, cent francs d'amende, dans le second, deux cents francs d'amende, et trois mois d'emprisonnement. L'intérêt de la justice est que la poursuite suive immédiatement la contravention; mais si elle marche lentement et qu'elle laisse les infractions s'accumuler, elles se confondent dans une seule infraction qui ne doit plus entraîner que la peine la plus forte. Il ne peut exister aucun motif pour dénier aux infractions les plus légères le bénéfice d'une règle qui s'applique aux infractions les plus graves.

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nettoyer ou réparer les fours, cheminées ou usines où l'on fait usage de feu. »>

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Cette contravention consiste uniquement dans le défaut soit de réparation, soit de nettoyage des fours, cheminées ou usines, lors même que cette négligence n'a produit aucun dommage. S'il en étai résulté un incendie de propriétés mobilières a immobilières d'autrui, la gravité de ce rés at modifie le caractère de la négligence; ie est alors classée parmi les délits; elle rre dans les termes de l'art. 458. Mais lors d'elle n'a occasionné aucun incendie, ou I que l'incendie qu'elle a causé n'a occasionné aucun préjudice aux propriétés d'autrui, l'article 471 reste seul applicable. Ainsi l'incendie produit par le défaut de nettoyage d'une cheminée n'est qu'une simple contravention, tant qu'il n'en est point résulté la destruction des propriétés d'autrui [1].

La seule difficulté que présente cette contravention consiste dans l'appréciation de la négligence. Quand y a-t-il nécessité de réparer, d'entretenir ou de nettoyer? Il est évident que cette question ne peut se décider que d'après les usages locaux, les résultats du défaut d'entretien et l'appréciation des faits.

§ II.

« 2o Ceux qui auront violé la défense de tirer, en certains lieux, des pièces d'artifice. >>

Cette disposition suppose une prohibition préalable de tirer des pièces d'artifice en certains lieux. L'autorité municipale est nécessairement investie, d'après les attributions qu'elle a reçues des lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791, et que nous développerons plus loin, de désigner ces lieux par des arrêtés, ce n'est qu'après que cette désignation a été faite que la contravention peut exister [2].

Les résultats de cette contravention peuvent en changer le caractère dans deux cas : 1° lorsqu'elle a causé l'incendie des propriétés mobilières ou immobilières d'autrui; le fait rentre alors dans les termes de l'art. 458. A la vérité cet article veut que les pièces aient été tirées avec négligence ou imprudence, mais la seule vio

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« 3° Les aubergistes et autres qui, obligés à l'éclairage, l'auront négligé; ceux qui auront négligé de nettoyer les rues et passages dans les communes où ce soin est laissé à la charge des habitants. >>

Ce paragraphe comprend deux dispositions distinctes, le défaut d'éclairage et le défaut de balayage.

La première ne spécifie ni les personnes qui sont obligées à l'éclairage, ni l'étendue de cette obligation. C'est encore à l'autorité municipale, en vertu des lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791, à faire cette spécification. Les infractions à ces règlements sont passibles de l'application de l'art. 471 [4].

La contravention résultant du défaut de balayage n'a point également été suffisamment définie par la loi.

Le soin de nettoyer les rues et passages est imposé aux habitants, dans toutes les villes où l'autorité municipale ne les a pas déchargés de cette obligation.

Ce service n'est pas, à bien dire, une charge de la propriété; les propriétaires des maisons et terrains qui longent la voie publique, ou les personnes qui les remplacent et les représentent, ne sont pas nécessairement tenus de faire nettoyer la partie de la voie publique qui se trouve au devant de ces maisons et terrains; d'où la conséquence que l'obligation de nettoyer n'existe que dans les villes où l'autorité locale a pris des arrêtés relatifs à cette partie importante de la salubrité publique, lorsqu'il y a un arrêté municipal. Si le locataire n'a pas accepté à cet

rêtés de l'autorité communale sur la propreté des rues, sont obligatoires quant aux mesures qu'ils prescrivent.

Ils ne le sont point quant aux peines qu'ils établissent, si elles excèdent les peines fixées par la loi en matière de petite voirie.

Les tribunaux doivent, dans ce cas, appliquer la peine légale, savoir l'amende prononcée par l'art. 471, no 5, C. pén. (Brux,, cass., 10 janv. 1834; Bull. de cass., 1854, 153)

égard une obligation personnelle, ou si la mai- | des matériaux ou des choses quelconques, qui son est inhabitée, la charge retombe sur le propriétaire [1].

Dans la plupart des communes, l'enlèvement des immondices se fait par les soins de l'autorité, et le balayage des rues reste seul à la charge des habitants. Il appartient aux maires, en vertu des lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791, de prendre des arrêtés pour régler cette obligation, et la jurisprudence n'a jamais méconnu la légalité de ces arrêtés.

Ainsi la cour de cassation a successivement déclaré que les règlements de police qui fixent l'heure à laquelle les rues doivent être balayées [2], les jours de la semaine où cette obligation doit avoir lieu [3], qui obligent les habitants à arracher l'herbe qui croît devant leurs maisons [4], qui prescrivent le mode et les lieux de dépôt des immondices [5], sont obligatoires pour les tribunaux de police.

Lorsque le nettoiement des rues et l'enlèvement des boues ont été confiés à une entreprise, la question s'est élevée de savoir si l'entrepreneur est passible des peines de police, à raison des contraventions qui sont constatées dans son service. La cour de cassation a successivement adopté, sur ce point, des solutions qui se contrarient mutuellement [6]; mais leur examen tient plus particulièrement à l'essence du pouvoir municipal en matière de police, et nous le placerons en conséquence sous le § 15 de l'article 471.

& IV.

« 4° Ceux qui auront embarrassé la voie publique en y déposant ou y laissant sans nécessité

[1] Cass., 6 avril et 10 août 1833 et 13 fév. 1834. [2] Cass., 28 août 1818. (Dalloz, Jurisp. génér., t. 3, p. 154.)

[5] Cass., 4 août 1827. [4] Cass., 17 déc. 1824. [5] Cass., 6 oct. 1832.

[6] Cass., 12 nov. 1813, 24 août 1821 et 17 sept. 1841. [7] Le tribunal de simple police, chargé de réprimer les contraventions à l'art. 471, no 4, C. pén., doit aussi condamner les contrevenants à l'enlèvement des objets qui empêchent ou diminuent la liberté ou la sûreté du passage de la voie publique. (Brux., cass., 20 déc. 1838; Bull., 1839, 69.)

[8] Le fait d'avoir formé sur une grande route un dépôt de bris de pavés qui gênent la circulation n'est pas passible des peines portées par la loi du 6 mars 1818. C'est l'art. 471, no 4, qui lui est applicable. (Brux., cass., 29 août 1834; Bull. de cass., 1855, 131.)

[9] Cass., 2 juin 1825. (Sirey, 1826, 1, 121.) [10] Cass., 2 juill. 1824.

empêchent ou diminuent la liberté ou la sûreté du passage [7]; ceux qui, en contravention aux lois et aux règlements, auront négligé d'éclairer les matériaux ou les excavations par eux faites dans les rues et places. >>

Cette disposition prévoit deux côontraventions différentes l'embarras, sans nécessité, de la voie publique, et le défaut d'éclairage des matériaux déposés ou des excavations faites sur cette voie.

La première est clairement définie par la loi, et n'a besoin de l'appui d'aucun règlement pour être punie. Elle existe par la réunion de trois conditions: il faut : 1° que des matériaux ou des choses quelconques, de nature à empêcher ou à diminuer la liberté ou la sûreté du passage, aient été déposés; 2° que ce dépôt ait été fait sur la voie publique; 3° qu'il ait été fait sans nécessité.

Ces mots de matériaux ou de choses quelconques s'appliquent nécessairement à tous les objets qui peuvent diminuer ou empêcher la liberté ou la sûreté du passage [8]. La jurisprudence les a étendus: 1° au dépôt de tonneaux sur le trottoir d'une rue [9]; 2° au carrossier qui laisse des voitures en réparation sur la rue [10]; 3° au maréchal ferrant qui ferre ou saigne des chevaux devant sa boutique [11]; 4° au stationnement des voitures [12]; 5° au stationnement des chevaux et des bestiaux [13]. Nous ne multiplierons pas ces exemples; nous ferons seulement remarquer qu'il ne suffit pas que les choses qui gênent le passage se trouvent momentanément sur la voie publique, il est nécessaire, pour qu'il y ait contravention, qu'elles y aient été déposées [14]. La voie publique doit servir à l'usage de

[11] Cass., 50 frim. an 13. [12] Cass., 23 mars 1832. [15] Cass., 9 fév. 1832.

[14] Le fait d'avoir planté des bornes qui anticipent sur la voie publique ne rentre pas sous les dispositions de l'article 471, no 4, et n'est pas ainsi de la compétence des tribunaux de simple police. (Brux., cass., 27 mars 1855; Bull., 1855, p. 227.)

L'art. 471, no 4, n'est pas applicable au fait d'avoir fermé un chemin par une barrière. (Brux., cass., 15 juill. 1840 et 19 juill. 1841 ; Bull., 1841, p. 359, et 1840, p. 417.)

Les dispositions de l'art. 471, no 4, qui punissent ceux qui embarrassent la voie publique, ne s'appliquent pas au cas d'empiètement par des coustructions. Cet article ne prévoit que les simples embarras occasionnés par le dépôt ou le délaissement temporaire et momentané sur la voie publique d'objets qui empêchent ou diminuent la liberté du passage. (Brux., cass., 15 juil!. 1840; Bull., 1840, p. 417.)

tous; c'est le dépôt qui constitue l'empiètement, l'usurpation au profit d'un seul et au détriment des autres; en général, on doit considérer qu'il y a dépôt dans le sens de la loi lorsque la chose est destinée, par la volonté du propriétaire, à demeurer et à séjourner un certain temps sur la voie publique.

Le deuxième élément de la contravention est que le dépôt ait été fait sur cette voie. Que fautil entendre par voie publique? Cette expression comprend évidemment toutes les rues et passages situés dans l'intérieur et dans les faubourgs des villes et des bourgs. En effet, il s'agit d'une contravention de voirie urbaine qui ne peut être commise que dans les lieux soumis à une police. Les art. 2, 3 et 4 de la loi du 28 septembre6 octobre 1791 mettent d'ailleurs au nombre des délits ruraux'la détérioration ou l'usurpation des chemins publics dans les campagnes, et on doit placer dans la même catégorie, par les mêmes raisons, les embarras qui empêchent ou diminuent la liberté du passage sur ces chemins [1]. D'un autre côté, les dépôts de matériaux faits sur les grandes routes constituent, aux termes des art. 1, 2, 3 et 4 de la loi du 29 floréal an 10, une contravention de grande voirie de la compétence des conseils de préfecture [2].

La question s'est élevée, par suite de cette dernière loi, de savoir si le n° 4 de l'art. 471 est applicable quand le dépôt a été fait sur une rue formant le prolongement d'une grande route. La cour de cassation a décidé : « qu'une circonstance de cette nature ne suffit pas pour déterminer d'une manière exclusive la compétence que la loi du 29 floréal an 10 attribue à l'autorité administrative, relativement aux contraventions en matière de grande voirie; que tout ce qui résulte de ce que le même terrain sert à la fois de rue et de grande route, c'est que les contraventions aux règlements de police qui s'y réfèrent peuvent être poursuivies concurremment par l'autorité administrative et par le tribunal de simple police; que par cela seul qu'une maison ou autre édifice se trouve situé dans l'intérieur d'une ville, d'un bourg ou d'un village, lors même que la rue sert de grande route et quelle que soit sa largeur, les propriétaires ou locataires sont sujets aux lois et règlements de police, ainsi qu'à la juridiction des tribunaux chargés par les lois générales de prononcer sur les contraventions à ces règlements et à ces lois [3]. »

[1] Cass., 1er déc. 1827.

[2] En Belgique cette compétence a cessé.

[5] Cass., 18 juin 1811.

[4] Cette juridiction exceptionnelle n'existe plus en Bel

Il ne faut pas appliquer cette jurisprudence sans distinction et d'une manière absolue. S'il est incontestable que, même dans les rues qui servent de prolongement aux routes royales, l'infraction aux règlements de police, de salubrité publique, etc., peut être poursuivie devant les tribunaux de simple police, d'un autre côté il faut admettre que certaines détériorations de ces rues ne doivent donner lieu qu'à une poursuite devant le conseil de préfecture [4]. Nous n'entendons ici approuver l'arrêt de la cour de cassation qu'autant qu'il a décidé que le n° 4 de l'art. 471 n'était pas abrogé par la loi de floréal.

Si le prévenu soutenait que la partie de la voie publique qu'il a embarrassée est sa propriété particulière, il y aurait lieu de surseoir au jugement de la contravention, jusqu'à ce que cette question préjudicielle eût été jugée; mais l'allégation d'une possession, même immémoriale, ne suffirait pas pour justifier ce sursis, car une possession immémoriale, lorsqu'elle est illégale, ne saurait affranchir des obligations que la loi impose [5], à moins que le prévenujne prouvât le changement de destination, le déclassement légal du chemin qui serait alors devenu une propriété privée, soit de l'État, soit d'un département, soit d'une commune.

Le troisième élément de la contravention est que les matériaux ou choses quelconques aient été déposés ou laissés sur la voie publique sans nécessité. C'est au tribunal de police qu'il appartient d'apprécier dans quels cas il y a nécessité de ce dépôt; cette appréciation est laissée à sa discrétion; il est tenu seulement de constater cette circonstance dans son jugement. En général, il y a nécessité quand le propriétaire des matériaux n'a pas été à même de prendre les dispositions nécessaires pour l'enlèvement des matériaux ou des choses déposées.

La contravention ne peut exister que par la réunion de ces trois éléments. L'autorité municipale, toutefois, tient des lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791 le droit de prendre des arrêtés sur cette matière; mais ces arrêtés ne peuvent avoir d'autre objet que de rappeler ou de faire exécuter les dispositions de la loi. En effet, ainsi que nous l'avons déjà fait observer, lorsque la loi a disposé sur des objets confiés à la vigilance de l'autorité municipale, les maires ne peuvent par des arrêtés en restreindre ou en étendre les dispositions; cette règle a été

gique. (V. Brux., cass., 29 mars 1833; Bull., t. 1er, p. 68; Const. belg., art. 94.)

[5] Cass., 4 oct. 1823. (Sirey, 1824, 1, 150.)

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