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étonnemment, que Marie étoit bénie au-deffus JUILLET 2, de toutes les femmes, puifque Dieu l'avoit choifie pour répandre fur le monde fa bénédiction, & pour écarter les maux dont Eve avoit accablé le genre humain. En appellant auffi béni le fruit de fes entrailles, elle donna à ce titre un fens infiniment plus fublime. Le divin Enfant étoit en effet le principe de toutes les graces; & ce n'étoit que par lui que Marie elle-même en avoit reçu de fi grandes.

⚫ Elizabeth tournant enfuite les yeux fur ellemême, s'écria: Eh! d'où me vient ce bonheur que la Mere de mon Seigneur daigne venir me vifiter ? Elle favoit bien qu'elle avoit conçu par miracle; mais Marie avoit conçu en reftant Vierge, & par l'opération du Saint-Efprit: celui qu'elle avoit conçu étoit plus grand que les Prophetes; mais Marie devenoit Mere du Fils éternel de Dieu > vrai Dieu lui-même. Jean-Baptifte fe fervit depuis d'une femblable exclamation pour exprimer les fentiments de fa profonde humilité, quand JefusChrift fe préfenta pour être baptifé par fes mains, Telles font les difpofitions où nous devons être lorfque Dieu nous vifite par fa grace, fur-tout dans les Sacrements. Elizabeth appelle Marie Mere de fon Seigneur, c'eft à dire, Mere de Dieu; & elle lui prédit ce qui doit arriver, tant à elle qu'à fon Fils, qui avoit été l'objet des Prophéties.

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Marie s'entendant louer, defcendit dans l'abyme de fon néant; puis rapportant à Dieu tous les dons de la grace qui étoient en elle elle fit éclater fon amour, fa reconnoiffance, fon humilité par l'admirable cantique que l'Eglife récite tous les jours à Vêpres. On y trouve une élévation de fentiments & une fublimité de ftyle

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qui ne font point dans les Ecrits des anciensProphetes. La Sainte Vierge y loue Dieu de fes JUILLET 26 miféricordes infinies, & lui en donne toute la gloire. Dans le tranfport de fa joie, elle adore fon Sauveur, qui a bien voulu jetter les yeux fur fa baffeffe. Quoique toutes les nations doivent l'appeller bienheureuse, elle déclare que l'abjection feule eft fon partage, & que le mystere qui l'occupe eft uniquement l'effet de la puiffance & & de la bonté de Dieu. Elle ajoute que celui qui a détrôné les tyrans, qui a nourri dans le défert les Juifs affamés, & qui a opéré tant de prodiges en faveur de fon peuple, eft venu le vifiter en perfonne, afin de vivre parmi les hommes, de mourir pour eux & d'accomplir toutes les prédictions des Prophetes. Marie, après avoir paffé environ trois mois avec fa coufine, reprit la route de Nazareth.

Lorfqu'unis à l'Eglife nous louons Dieu de fes miféricordes & des prodiges qu'il a opérés dans le myftere de l'Incarnation, appliquons-nous à imiter les vertus dont la Sainte Vierge nous a donné l'exemple. Apprenons d'elle fur-tout à fanctifier les vifites & les conversations, qui font la fource de tant de péchés pour un fi grand nombre de Chrétiens. Evitons, comme elle, tout difcours profane, vain & inutile. Quand il s'agit de délaffer notre efprit, tâchons, autant qu'il eft poffible, que nos entretiens fervent à nous rendre plus vertueux, ou du moins à augmenter en nous les connoiffances utiles. Banniffons ces puérilités qui dégradent l'ame & la rétréciffent. Nous réprimerions la démangeaifon de parler, fi nous penfions qu'elle a la vanité pour principe, & que cette vanité nous rend fouvent criminels & tou

jours ridicules. En effet rien n'eft plus infuppor JUILLET 2. table dans la fociété que ces parleurs continuels

qui ne peuvent retenir leur langue, qui divulguent fouvent ce qu'ils auroient intérêt de cacher, & qui mettent au jour leurs pensées, avant de leur avoir laiffé le temps de s'arranger dans leur efprit. Que nous nous épargnerions de peines d'indifcrétions & de fautes de toute efpece, fi nous étions plus réservés dans nos paroles ! Travaillons donc à devenir plus maîtres de nousmêmes & à détruire par la pratique du filence une paffion auffi dangereufe.

LE MÊME JOUR.

S. PROCESSE ET S. MARTINIEN,
MARTYRS.

PROCESSE & Martinien étoient du nombre de
ceux auxquels les prédications & les miracles de
faint Pierre & de faint Paul firent embraffer le
Chriftianifme à Rome. La Foi pénétra jufques
dans le Palais de Néron, & plufieurs perfonnes
attachées à fon fervice crurent en Jefus-Chrift.
Saint Paul en parle dans fon Epître aux Philip-
piens (1).

Ce fut en 64, que Néron arma la cruauté des bourreaux contre les Fideles, dont le nombre augmentoit de jour en jour (a). Le voyage qu'il

(1) Phil. IV. 20.

(a) Néron montra tant de clémence les cinq premieres années de fon regne, qu'étant une fois obligé de figner l'Arrêt de mort d'un Criminel, il dit qu'il fouhaiterait ne point favoir

écrire. Séneque, fon Précepteur, & Burrhus, Préfet du Prétoire, dont il fuivoit les confeils, ne laifferent pas de découvrir à travers cette modération, qu'il avoit du penchant à la cruauté. Ce fut pour cela que Séneque

fit dans la Grece en 67, laiffa un peu respirer l'Eglife de Rome. Il parcourut les principales villes JUILLET 2.

écrivit, & lui adreffa fon Traité reux plaifir d'être maître de fa

perfonne & de fes actions. Il

aucun fentiment de honte, dans
les plus infâmes débauches. Son
cœur étoit fi corrompu, qu'au
rapport de Suétone, il étoit
perfuadé que tous les hommes

de la Clémence, que nous avons
encore, Malheureufement ceux fe plongea publiquement & fans
qui avoient fa confiance, ne
travaillerent qu'à donner un
autre objet à fes paffions. Sé-
neque & Burrhus conniverent
à un commerce impur, où il
s'engagea dès fa jeuneffe; celui reffembloient, avec cette
qui prouve combien étoit dé- feule différence qu'ils cachoient
fectueuse la vertu même des plus leurs crimes, & qu'ils étoient
fages d'entre les Philofophes encore hypocrites. Il y a un
Païens. Si les Instituteurs de degré d'extravagance qui est in-
Néron s'imaginerent qu'il falloit féparable du vice; mais cette
céder quelque chofe pour fau- extravagance, perfonne ne la
ver le reste, & paffer certaines porta jamais fi loin que Néron.
paffions, pour arrêter l'effet de Tous fes projets annonçoient un
celles qui devoient avoir plus infenfé du premier ordre ; &
d'influence fur l'État, ils virent rien ne flattoit plus fon orgueil,
par l'événement qu'ils s'étoient qu'une entreprise qui paroiffoit
abufés par une fauffe prudence. impoffible. Il méprifoit les re-
Il leur eût été bien plus glo- gles que dictent la décence &
rieux de mourir, que d'applau- la juftice. Sa principale ambi-
dir au moindre mal moral; mais tion étoit de chanter, de dé-
le Paganisme n'a jamais été ca- clamer & de jouer des inftru-
pable de fournir des martyrs à ments fur le théâtre, ou de
la vertu. D'ailleurs, quand on conduire un char dans le Cirque.
connoît la nature des paffions, Malheur à quiconque refufoit
on fait qu'il eft très-dangereux de lui applaudir, ou ne lui
de les fatter; qu'on ne peut laiffoit pas remporter le prix;
bientôt plus les retenir dans les il étoit égorgé, ou réservé à
bornes qu'on vouloit leur pref- un genre de mort encore plus
crire, & que la tyrannie de barbare. La cruauté étoit le
leur pouvoir devient infurmon-vice qui l'a principalement rendu
table. Cette vérité n'eft que
trop bien prouvée par l'exemple
de Néron.

En effet, ce Prince s'étant prévalu de l'indulgence qu'on avoit pour lui, s'abandonna en peu de temps à toute la fougue de fes défirs, fur-tout lorfqu'il commença à goûter le dange

l'objet de l'exécration du genre
humain. Par le confeil de l'in-
fâme Poppée, il fit affaffiner sa
mere Agrippine en 58. Depuis
ce temps-là, il n'eut point de
plus grand plaifir, que de trem❤
per fes mains dans le fang de.
tout ce qu'il y avoit d'hommes
illuftres par leur naiffance, leur

de cette province, fuivi d'une armée de Panto JUILLET 2. mimes & de Chanteufes, qui portoient des inftruments de Mufique, des masques & des habits de théâtre. Il fe fit déclarer vainqueur dans tous les Jeux publics, & on lui adjugea dix-huit cents couronnes différentes. Après avoir maffacré la nobleffe du pays, confifqué les biens des perfonnes riches & pillé les temples, il revint à Rome pour y faire couler de nouveaux flots de fang. Saint Pierre & faint Paul fcellerent alors leur foi par un glorieux martyre. Proceffe & Martinien, leurs difciples, ne tarderent pas à les fuivre. Ils avoient, fuivant l'Auteur de leurs Actes, la garde de la prifon Mamertine, où les deux Apôtres les inftruifirent & les baptiferent pendant qu'ils y furent détenus.

Saint Grégoire le Grand prêcha fa trentedeuxieme Homélie fur leur fête dans une Eglife où repofoient leurs corps. Les malades, dit ce Pere, reçoivent la fanté à leur tombeau; les énergumenes y font délivrés, & les parjures y font tourmentés par les Démons. L'ancienne Eglife, dont nous venons de parler, étant tombée en ruines, le Pape Pafchal I transféra les Reliques des deux Martyrs dans celle de faint Pierre fur le Mont-Vatican. On lit leur nom dans les Martyrologes de la plus haute antiquité.

Voyez Saint Grégoire le Grand, Hom. 32. Tillemont, Hift. Eccl. T. 1. p. 179. & Hift. des Emper. Sollier, T. 1. Julii, p. 300.

courage & leur vertu, & prin- | rit auffi, après avoir fouffert cipalement dans celui de fes toutes fortes de mauvais traite proches. Octavie fa femme pé-ments pendant plufieurs années

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