Images de page
PDF
ePub

UN SECOND MEMBRE présente des considérations générales dans lesquelles il passe en revue les différents ministères. La faiblesse de la voix de l'orateur ne permet pas de l'entendre.

UN TROISIÈME MEMBRE dit que, à une époque aussi avancée de la session et avec une majorité aussi assurée que celle qu'il reconnait au ministère, il renonce à toute discussion politique; mais le budget présente une occasion importante pour examiner comment le Gouvernement administre les intérêts matériels de la France. L'orateur en a examiné toutes les parties avec un soin scrupuleux; il a des critiques pour tous les départements ministériels; mais il exprime le regret que, au moment où il va les apporter devant la Chambre, un seul de MM. les Ministres se trouve présent.

Il commencera par le Ministère des finances. Ce département est chargé des plus grands intérêts du pays, puisqu'il a dans ses attributions les voies et moyens sans lesquels l'administration deviendrait impossible. Il adresse à ce Ministère trois reproches le premier, c'est de suivre de mauvais errements dans la distribution des emplois richement rétribués dont il dispose. Il est bon que la hiérarchie soit suivie autant que possible, et, lorsqu'il faut admettre des exceptions, elles doivent s'appliquer à des positions considérables, à de grands services rendus au pays; mais elles ne doivent jamais servir de récompense aux services politiques; elles ne doivent pas être abandonnées au népotisme ni au favoritisme. En second lieu, le Ministère des finances est empreint d'un caractère de fiscalité absolue, il se préoccupe des intérêts du trésor jusqu'au point de pressurer les contribuables. Enfin, il montre une extrême faiblesse dans la défense des deniers de l'Etat au milieu de cette espèce de vertige qui, s'emparant de l'administration et aussi, l'orateur le dit à regret, de la Chambre, le pousse å entreprendre de si immenses travaux publics, particulièrement en ce qui concerne les chemins de fer.

L'oráteur blâme ensuite l'habitude prise depuis quelques années par les Ministres des travaux publics de parcourir la France dans l'intervalle des sessions; ces déplacements ont, selon lui, ce double désavantage : 1o de le placer vis-à

vis des intérêts locaux où il peut être conduit à s'engager mal à propos; 2° de lui faire abandonner la direction des affaires générales.

L'orateur rend justice aux bonnes intentions du Ministre du commerce; mais il remarque quelque chose d'insuffisant dans ses actes. Il lui paraît timide et embarrassé comme le serait une personne qui se trouverait déplacée dans la compagnie à laquelle elle est jointe. Il le blâme surtout de ne pas faire davantage pour les classes ouvrières, l'exemple des heureux résultats qu'on a tirés de l'institution des prud'hommes était pourtant une cause d'encouragement.

Quant à M. le Ministre de l'instruction publique, l'orateur est persuadé qu'il a d'excellentes intentions; mais il est fâcheux que, jusqu'ici, ses grands projets se soient réduits à de petites choses.

Quant au département de la guerre, l'orateur regrette le parti qu'a pris M. le maréchal Soult de se retirer. La position qu'il a acceptée est insuffisante pour lui. Cette retraite a signalé de nouveau la difficulté qu'on éprouve toutes les fois qu'il s'agit de trouver un Ministre de la guerre. On a été obligé de le prendre en dehors des deux Chambres, et comme l'usage veut qu'il en fasse partie, on a dû, le même jour, le faire Pair et Ministre de la Guerre. Sa position est difficile, si, comme on le croit communément, il existe quelque désaccord entre le département de la guerre et le Gouverneur général de l'Algérie. Le Ministre actuel aurat-il autant de moyens de résister qu'en avait son prédécesseur ?

L'orateur passe ensuite à un fait grave sur lequel il est convaincu que la Chambre désirera avoir des explications catégoriques. Il veut parler de la nomination d'un colonel d'artillerie au grade de maréchal-de-camp le jour même où son âge devait l'appeler à la retraite. Cette nomination serait due à l'intercession de plusieurs membres de la Chambre des Députés, et, aux dernières élections, un fait du même genre aurait eu lieu dans la carrière de cet officier. Un certain nombre d'électeurs ayant fait connaître au préfet que leur concours était assuré au Gouvernement, mais qu'ils désiraient qu'on accordât de l'avancement à cet officier, le préfet en informa M. le Ministre de l'intérieur.

Celui ci transmit la dépêche au Ministre de la guerre, et de là elle fut envoyée au conseil des Ministres, qui était as semblé L'officier, qui était lieutenant-colonel, fut nommé colonel séance tenante, et les électeurs furent instruits le jour même par le télégraphe qu'on avait donné satisfaction à leur demande. L'orateur se borne à rappeler les circonstances, sans en tirer aucune conclusion.

Passant ensuite au Ministère de la justice et des cultes, l'orateur doute qu'on ait montré, vis-à-vis du clergé, toute la fermeté nécessaire, et il rappelle, à l'occasion du conseil d'Etat, la violation par le Ministre lui-même de la loi qu'il avait présentée peu de temps auparavant aux Chambres, On sait que, dans le débat qui s'est élevé lors de la discussion de l'adresse, le Ministre a été réduit à s'excuser sur son intention.

.. Quant aux affaires étrangères, l'orateur accuse M. le Ministre d'avoir fait des choix fâcheux sous l'influence de la politique, surtout dans cette Chambre, et de ne laisser aucune trace de son action dans son Ministère.

Il désirerait que les explications données par M. le Ministre de la marine eussent été plus complètes. Il reconnaft qu'il a hérité, de ses prédécesseurs, des grands embarras et des désordres administratifs de son département; mais il regrette que ce ne soit pas à lui que la découverte en 'soit due.

Le Ministre de l'intérieur mérite surtout le reproche de trop mêler la politique à l'administration. It fait de la politique avec les places, avec les beaux-arts et même avec la charité publique. L'orateur sait bien que M. le Ministre n'en convient pas; mais les dénégations qu'il a souvent apportées à la Chambre n'ont pas toujours suffi, et, dans tous les cas, il reste une impression morale fâcheuse. Il serait à désirer qu'il cherchât des agents moins préoccupés de politique et qui s'occupassent davantage de l'administration et de l'exécution des lois. D'ailleurs, comme tous ses collègues l'ont imité dans cette tendance, le reproche peut leur être adressé à tous, et l'orateur en conclut que le Ministère ne vaut pas plus en politique qu'en administration.

UN MEMBRE a la parole pour un fait personnel; il dit :

• Messieurs,

« Ceux d'entre vous qui auront lu ce matin, dans un journal, un article où j'ai moi-même été assez étonné de lire mon nom, ne le seront pas de me voir à la tribune après un épisode du discours du préopinant.

«Il a fait ici, suivant des personnes dans lesquelles il croit devoir placer une grande confiance, l'histoire de deux nominations d'un des officiers supérieurs de l'armée les plus dignes et les plus méritants.

a

« Une première histoire est celle de la nomination de cet officier au grade de colonel, et d'une dépêche telegraphique qui s'y rapporte.

« Ce fait là seul, sans celui du journal et sans l'immixtion de mon nom à cette affaire, aurait dû m'amener à la tribu- ' ne, car il y un autre fait personnel plus important encore pour moi que celui qui me touche directement: c'est un fait qui touche un de nos collègues que nous avons perdu. Ce fait, il est rattaché, ou on prétend le rattacher par sa date à l'élection de M. de Maisonneuve, que nous avons perdu, et qui était un de mes collègues de la députation du Bas-Rhin.

a Si notre collègue qui l'a porté à la tribune, tout en ayant confiance dans la véracité de ceux qui le lui ont rapporté, avait voulu en avoir un peu dans les représentants au département du Bas-Rhin, et croire qu'ils pouvaient être informés de ce qui s'était passé; s'il s'était adressé à moi, il se serait épargné la peine d'apporter à la tribune des inexactitudes.

« Le colonel dont il s'agit est au service depuis fort longtemps. A l'autre Chambre, M. le Ministre de la guerre a indiqué quelle était la nature de ses services. Qu'il me soit permis d'en rappeler quelques uns, car je professe pour lui, quoique je nie tout-à-fait ce qu'on m'altribue dans sa nomination, une grande estime et un grand respect, surtout pour ses services et pour sa carrière militaire, qui est une des plus brillantes que je connaisse.

« C'est a raison de ses services que, depuis le grade de lieutenant, le comité d'artillerie, dans les présentations qu'il avait le droit de faire, lui avait toujours invariablement

donné le n° 1, et c'est à la faveur de ce no 1 dans les présentations, qu'il a été nommé capitaine, chef-d'escadron, lieutenant-colonel et colonel.

. Quant à la dépêche télégraphique, en voici l'histoire vraie :

Lorsque l'élection de M. de Maisonneuve a eu lieu, je n'ai eu absolument aucune connaissance du fait, et il eût été impossible qu'il passât inaperçu pour moi, attendu que j'étais très intimement lié avec M. de Maisonneuve, que j'étais de ceux qui désiraient son élection, que je m'en suis occupé pour la part d'influence que je puis avoir dans le pays, et qu'il ne s'y est rien fait que je ne sache parfaitement.

« Je savais que le colonel Drieu venait d'être nommé à l'époque à peu près où les élections allaient avoir lieu.

« Il s'est trouvé une autorité départementale qui a cru qu'elle pourrait être agréable à quelques personnes en obtenant que la nomination fût connue avant l'expédition des avis officiels, et j'ai été moi-même étonné que, au moment où l'élection venait d'avoir lieu, une dépêche télégraphique annonçât cette nomination. Mais je puis certifier à notre collègue,comme à toute la Chambre, que c'est là le seul fait qui soit parvenu à ma connaissance et qui ait existé. Il n'a pas été fait de démarches pour que ce colonel, alors lieutenant-colonel, fùt nommé colonel en vue des élections à faire. Ce fait, M. de Maisonneuve n'y aurait pas donné les mains, et il aurait fait à son élection plus de mal que de bien. Ce fait n'a pas existé.

« J'en viens à la seconde nomination.

« Quant à la seconde nomination, la Chambre comprendra que je ne dois pas prendre, en l'absence de M. le Ministre de la guerre, la défense d'un fait qui lui appartient; que je ne dois faire que repousser le rôle qu'on veut me faire jouer dans cette affaire.

«Quant au fait en lui-même, quant à la nomination d'un colonel au grade de maréchal-de-camp, je n'ai pas besoin de dire que, soumise à tous les examens de légalité, il n'y a pas de reproche à lui faire, et que, dans mon sens, dans ina pensée, il y a encore bien moins que des reproches, il n'y a

« PrécédentContinuer »