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ce système, les 500 millions dépensés par l'Etat, l'eussent été productivement, et lui auraient donné un revenu de 35 millions.

L'orateur représente ensuite que la conversion des rentes, si on l'eût abordée franchement, aurait produit une économie annuelle de 25 millions. Il croit également qu'on aurait pu réduire de 15 millions le budget de la guerre. Il s'attache, en outre, à prouver qu'au moyen d'un impôt sur les voitures de luxe, et qu'en mettant à profit l'accroissement annuel de 40 millions sur les receites, on se serait aisément ménagé les moyens de réduire l'impôt du sel de 25 millions, de dégreyer les douanes, les péages, les patentes, de réduire le décime de guerre, d'atténuer, en un mot, les charges qui pèsent sur les classes les plus souffrantes.

Dans l'opinion de l'orateur, ce système, dans lequel on s'obstine à marcher, produirait des conséquences desastreuses, le jour où le maintien de la paix serait compromis, et où éclaterait une crise financière. A ce sujet, il exhorte la Chambre à ne point perdre de vue les enseignements de l'histoire, à se rappeler ce qui est arrivé en France pendant toutes les régences, et il demande si c'est là l'avenir que la sagesse du règne prépare à la régence nouvelle.

M. LE MINISTRE DES FINANCES demande la parole, et s'exprime en ces termés:

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"L'orateur qui descend de cette tribune a fait, au commencement de son discours, une comparaison entre les dépenses qui ont eu lieu sous le Gouvernement de la Reslauration et celles qui ont eu lieu pendant les quinze années du Gouvernement actuel.

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«Il a trouvé que les dépenses avaient été beaucoup plus considérables, if a indiqué un chiffre de 3 millia ds et quelques cent millions. Je ne conteste pas ce chiffre, je n'en ai pas fait le releve; je crois cela possible.

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« Je sais, je n'ai jamais ignoré que les dépenses ont pris un developpement considérable depuis quelques années. J'ai cru, quant à moi, que le Gouvernement avait si peu à

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redouter des conséquences qu'on avait à tirer de ce fait, que, peu après ma rentrée aux affaires, j'ai fait préparer, j'ai publié, et j'ai remis aux Chambres un document dans lequel se trouvait la comparaison entre le dernier budget de la Restauration et le budget qui était alors présenté aux Chambres, dans lequel ressortaient les excédants de dépenses que présentait ce budget, et dans lequel tous les différends étaient expliqués.

« Je pensais, et je pense encore que le Gouvernement auquel j'appartiens avait à tirer avantage de cette compa-raison, et c'est parce que j'avais cette conviction que j'ai moi-même, sans provocation aucune, appelé l'attention du pays sur les deux systèmes financiers.

Il ne s'agit pas uniquement, Messieurs, de comparer les chiffres des dépenses, il faut comparer aussi les causes de dépenses et les résultats obtenus.

Parmi les causes, il y en a une considérable que la Restauration a léguée au Gouvernement de Juillet, qu'il a dù accepter, et qui a été souvent ici l'objet de discussions vives dans lesquelles des systèmes differents ont été présentés, mais dans lesquelles des votes de la grade majorité de laChambre ont toujours été pour le système qui necessitait les dépenses les plus considérables: je yeux parler de l'Algérie.

« J'en veux parler seulement pour la citer; je n'ai pas l'intention d'entrer dans des détails sur cette cause de dépenses; il y aura bientôt une discussion dans laquelle ces détails trouveront mieux leur place. Je me bornerai à faire observer que cette dépense entre pour plus d'un milliard dans le chiffre dont on a parlé tout-à-l'heure.

<< Les autres causes de dépense, ce sont les dépenses militaires de guerre et de mer de toute nature, et puis les grands travaux publics.

Quand on se reporte aux évènements de 1840, on comprend comment les dépenses militaires de toute nature ont eu, sur les budgets qui ont suivi cette année-là, une influence lelle, que le chiffre de ces budgets se trouve plus élevé que celui des budgets qui ont précédé...

« Une cause qui devrait amener ce résultat, c'est que les chemins de fer n'entraient pour rien dans les dépenses

antérieures à 1840 ; c'est là un fait nouveau qui a dû avoir sa place dans le budget de l'Etat, et une grande place.

« Mais, cette place, il ne l'a eue que depuis 1840. On conçoit dès lors qu'il en soit résulté pour les budgets qui ont suivi des excédants sur les budgets antérieurs.

« Maintenant, Messieurs, ces travaux, faut il en faire un reproche au Gouvernement? Faut-il, au contraire, se féliciter avec lui qu'ils aient été entrepris et qu'ils soient continués ?

« Quant à moi, il est d'abord une de ces natures de travaux devant laquelle j'ai pensé que ni le Gouvernement ni le pays ne pouvaient hésiter: c'était celle qui tenait à sa défense et à sa force militaire.

« Ces travaux-là, qu'on disait hier ne pas être des travaux productifs, sont les plus productifs de tous; car ceux qui assurent la sécurité et l'indépendance du pays, ceux qui permettent de jouir de tous les développements de la prospérité publique, sont ceux qui doivent passer en prémière ligne, et ce serait un bien mauvais calcul que celui qui refuserait ou qui ajournerait les travaux de ce genre, parce qu'ils n'offriraient pas une compensation aussi immédiate que ceux dont je vais parler tout-à-l'heure.

« J'arrive maintenant aux travaux publics.

« Ici, je dois dire que ce n'est pas seulement le Gouvernement actuel qui a pensé que ces travaux devaient recevoir une grande impulsion. En comparant la situation de la France à celle des pays qui l'entourent, il était impossible de méconnaître, quelque douloureuse que fût cette conviction, que la France était en arrière vis-à-vis de beaucoup de ces pays. Il y avait nécessité de combler cet intervalle qui était pour elle une cause d'infériorité sous tous les rapports.

« La Restauration le reconnut comme le Gouvernement actuel, et c'est là le principe des opérations qu'elle fit en 1821 et 1822. Je crois qu'elle se trompa dans le mode qu'elle employa: de tous les moyens auxquels on pouvait avoir recours, je crois qu'elle choisit le plus mauvais.

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« Mais il ne faut pas lui en faire un reproche, parce que ses intentions étaient bonnes; c'était une erreur du temps et du défaut d'expérience.

. On pouvait, pour des travaux de ce genre, ou les faire exécuter par l'Etat, ou les faire exécuter par des compagnies avec le secours de l'Etat, ou en confier l'exécution à. des compagnies toutes seules, dans les cas où ils dussent être assez productifs pour que le secours de l'Etat ne fût pas nécessaire; mais la combinaison la plus mauvaise était celle qui consistait à faire exécuter par l'Etat luiniême avec des sommes empruntées à des compagnies qui imposaient des conditions qui devaient gêner plus tard sa liberté. Il eût valu infiniment mieux avoir recours au crédit général, faire un emprunt dans les formes ordinaires, que de se lier ainsi envers des compagnies. Mais enfin, je le répète, si le mode laissait à désirer, il n'y avait pas moins là l'intention d'améliorer les travaux publics et les voies de communication en France.

« C'est en 1833 que furent présentées aux Chambres des dispositions ayant pour objet, soit à l'aide des ressources que promettait l'annulation d'une partie des rentes de l'amortissement, soit à l'aide de crédits que fournirait l'aliénation d'une autre partie de ces rentes, de donner les moyens d'exécuter une certaine quantité de grands travaux, et surtout d'achever les travaux précédemment entrepris.

« Vint ensuite la loi des travaux publics de 1837, loi dont il a été question assez largement dans le discours de l'orateur qui a ouvert la discussion.

Je ne reviendrai pas sur l'application de cette loi; je me bornerai à faire à la Chambre une simple obser vation.

« L'orateur dont je parle a fait remarquer que M. Humann avait reproché à cette loi l'inconvénient d'affecter des ressources incertaines à des engagements certains: il a accordé à la mémoire de M. Humann des éloges dont je suis loin de vouloir affaiblir l'importance; il a opposé les doctrines que M. Humann avait professées dans cette circonstance a ce qui se pratique maintenant, les imputations sur la dette flottante d'abord, sauf ensuite à combler les imputations provisoires avec les réserves de l'amortissement; il a opposé, dis-je, les doctrines de M. Humann à ce systėme; mais il a omis dans sa discussion une seule circon

stance, c'est que l'origine de ce système appartient à M. Humann. Et, en effet, c'est dans la loi du 6 février 1832, présentée par le Cabinet, forsque M. Homann en faisait partie, que se trouve une disposition qui était certainement son œuvre, car il est évident que tout un système financier de cette importance n'aurait pas été présenté sans son assentiment. Dans cette lof, dis-je, sé trouve, pour la première fois, la disposition qui porte précisément que les dépenses pour les grands travaux des chemins de fer seront imputées sur la dette Boltante, et seront couvertes avec les réserves de l'amortissement après que les deficits du budget auraient été comblés.

« J'avais besoin de mettre ce système, dont je mé déclaré d'ailleurs complètement le partisan, sous l'autorité du hom de l'homme pour qui le jour de la justice est arrivé.

Si ce système, dans lequel je reconnais qu'il y a des anticipations, si ce système s'appliquait à des dépenses qui ne fussent pas utiles, je vais plus loin, qui ne fussent pas nécessaires et urgentes, je reconnais qu'il y aurait danger, imprudence à le suivre ; mais lorsqu'il s'agit de dépenses qui ont ce caractère, je dis qu'on n'a pas le choix, qu'il faut les faire à tout prix, et qu'alors il faut comparer ce système à celui dans lequel on les exécuterait par suite d'emprunts successifs, car il n'y aurait que ces deux modes de les exécuter.

«On parlait tout à-l'heure de tous les avantages du maintien de la paix ; on parlait tout-à-l'heure du jour où cette paix ne pourrait plus être conservée. On avait raison: il faut toujours avoir en présence le moment où les circonstances seront changées Mais en portant ses vues sur ce moment, quelle est la conduite qu'un gouvernement doit tenir s'il désire; lorsque ce moment arrivera, que le pays soit préparé?

Les chemins de fer notamment, qui sont la principale cause de cette anticipation de dépenses dont il est question, les chemins de fer ne sont-ils pas l'élément le plus indispensable de la défense du pays, le jour où il pourrait être at taqué? Songez un instant à l'état d'infériorité dans lequel se trouverait la France, le jour où le premier coup de canon serait tiré, où toutes les puissances qui l'entourent auraient

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