garder son trône, il faut qu'il demande leur tête ; et dans ses amis comme dans ses ennemis, la vertu mérite la mort. Que son œil pénétrant discerne donc le courage, le génie, la sagesse, l'opulence. L'heureux monarque! il est, par sa destinée, l'ennemi naturel de tout ce qui fait la gloire des peuples, et il est forcé d'en purger l'Etat. C'est le contraire des médecins, qui purgent le corps de ce qui l'altère, et y laissent tous les principes de santé. Mais le despote règne à ce prix : quel étrange bonheur! à quelle alternative il se condamne! Régner sur de vils mortels qui l'abhorrent, ou craindre à chaque instant les vengeurs de la patrie. Plus ses fureurs le rendront odieux, plus il aura besoin de nombreux et fidèles satellites. Mais quels hommes lui seraient fidèles? d'où tirera-t-il ses défenseurs? Il en accourra de toutes parts, s'il leur offre l'appât de l'or; et je vois déjà un essaim de frêlons étrangers faire la garde autour de lui. S'il préfère ses propres sujets, il peut affranchir les esclaves dont il aura tué les maîtres, et se confier à leurs armes; il n'en trouvera pas qui le défendent mieux. Répétons encore, l'heureux monarque! Il proscrit la vertu, pour commettre sa personne à de tels amis, à des esclaves! Ces confidens, ces nouveaux citoyens l'admirent et forment sa cour; s'il reste de vrais citoyens, ce n'est que pour le haïr et l'éviter. En vérité la tragédie est une belle invention, et ὁ Εὐριπίδης διαφέρων ἐν αὐτῇ· ὅτι καὶ τοῦτο πυκνῆς διανοίας ἐχόμενον ἐφθέγξατο, ὡς ἄρα Σοφοί τύραννοι (εἰσὶ) τῇ σοφῶν ξυνουσίᾳ, καὶ ἔλεγε δῆλον ὅτι τούτους εἶναι τοὺς σοφοὺς οἷς ξύν εστι. Καὶ ὡς ἰσόθεόν γε τὴν τυραννίδα ἐγκωμιάζει, καὶ ἕτερα πολλὰ, καὶ οὗτος, καὶ οἱ ἄλλοι ποιηταί. Τοιγάρτοι, ἅτε σοφοὶ ὄντες οἱ τῆς τραγωδίας ποιηταί, ξυγγιγνώσκουσιν ἡμῖν τε καὶ ἐκείνοις, ὅσοι ἡμῶν ἐγγὺς πολιτεύονται, ὅτι αὐτοὺς εἰς τὴν πολιτείαν οὐ παραδεξό μεθα, ἅτε τυραννίδος ὑμνητάς. Εἰς δέ γε, οἶμαι, τὰς ἄλλας περιϊόντες πόλεις, ξυλλέγοντες τοὺς ὄχλους, και λὰς φωνὰς καὶ μεγάλας καὶ πιθανὰς μισθωσάμενοι, εἰς τυραννίδας τε καὶ δημοκρατίας ἕλκουσι τὰς πολιτείας. Οὐκοῦν καὶ προσέτι τούτων μισθούς λαμβάνουσι καὶ τιμῶνται, μάλιστα μὲν, ὥσπερ τὸ εἰκὸς, ὑπὸ τυράννων, δεύτερον δὲ ὑπὸ δημοκρατίας· ὅσῳ δ ̓ ἂν ἀνωτέρω ἴωσι πρὸς τὸ ἄναντες τῶν πολιτειῶν, μᾶλλον ἀπαγορεύει αὐτ τῶν ἡ τιμὴ, ὥσπερ ὑπὸ ἄσθματος ἀδυνατοῦσα πορεύεσθαι. ̓Αλλὰ δὴ ἐνταῦθα μὲν ἐξέβημεν· λέγωμεν δὲ πάλιν, ἐκεῖνο τὸ τοῦ τυράννου στρατόπεδον τὸ καλόν τε καὶ πολὺ καὶ ποικίλον καὶ οὐδέποτε ταυτὸν, πόθεν θρέψεται. Δῆλον ὅτι, ἐάν τε ἱερὰ χρήματα ᾗ ἐν τῇ πόλει, ταῦτα ἀναλώσει, ὅποι ποτὲ ἂν ἀεὶ ἐξαρκῇ τὰ τῶν ἀποδομένων, ἐλάττους εἰσφορὰς ἀναγκάζων τὸν δῆμον εἰσφέρειν. Τί δ ̓, ὅταν δὴ ταῦτα ἐπιλίπῃ; Δῆλον ὅτι ἐκ τῶν πατρῴων θρέψεται, αὐτός τε, καὶ οἱ ξυμπόται τε καὶ ἑταῖροι καὶ ἑταῖραι. Μαν θάνω ὅτι ὁ δῆμος, ὁ γεννήσας τὸν τύραννον, θρέψει αυ τόν τε καὶ ἑταίρους· πολλὴ αὐτῷ ἀνάγκη. Πῶς λέγεις ; Euripide un auteur bién moral. Quelle sentence profonde il a renfermée dans ce vers sur un tyran : Il apprend la sagesse en écoutant les sages. Des sages composent sans doute la cour d'un usurpateur! Au reste, Euripide et les poëtes du théâtre divinisent en quelque sorte la tyrannie et d'autres fléaux de l'humanité. La muse qui les inspire nous pardonnera donc si, dans notre République, et dans celles qui adopteront nos maximes, on ne reçoit pas les chantres des tyrans. Qu'ils aillent parcourir d'autres Etats, et qu'au milieu du peuple assemblé, ils arment de la persuasion les plus belles voix de leurs acteurs mercenaires, pour mettre à la place de tous les gouvernemens les tyrans, les démogogues. Chez eux, surtout chez les premiers, ils seront comblés d'argent et de gloire; mais plus ils voudront s'engager dans la route escarpée qui mène aux vraies républiques, plus leur gloire ira s'affaiblissant, déshonorée par d'inutiles efforts. Et cette garde du tyran, ce brillant essaim, ces nombreux satellites sans cesse renouvelés, comment fera-t-il pour les nourrir? Doutez-vous qu'il ne saisisse d'abord les biens religieux? Tant que les produits de la vente ne seront pas épuisés, de moindres impôts chargeront le peuple. Mais ensuite, quelle ressource? Il vivra sur les biens paternels, lui, ses convives, ses favoris, ses maîtresses. Et j'entends par biens paternels ceux du peuple, qui est en effet son père. Le peuple indigné s'écriera peut-être : « N'est ἐάν τε ἀγανακτῇ τε καὶ λέγῃ ὁ δῆμος, ὅτι οὔτε δίκαιον τρέφεσθαι ὑπὸ πατρὸς υἱὸν ἡβῶντα, ἀλλὰ τοὐναντίον ὑπὸ υἱέως πατέρα, οὔτε τούτου αὐτὸν ἕνεκα ἐγέννησέ τε καὶ κα τέστησεν, ἵνα, ἐπειδὴ μέγας γένοιτο, τότε αὐτὸς δουλεύων τοῖς αὑτοῦ δούλοις, τρέφοι ἐκεῖνόν τε καὶ τοὺς δούλους μετὰ ξυγκλύδων ἄλλων, ἀλλ ̓ ἵνα ἀπὸ τῶν πλουσίων τε καὶ καλῶν κἀγαθῶν λεγομένων ἐν τῇ πόλει ἐλευθερωθείη, ἐκείνου προστάντος· καὶ νῦν κελεύει ἀπιέναι ἐκ τῆς πόλεως αὐτόν τε καὶ τοὺς ἑταίρους, ὥσπερ πατὴρ υἱὸν ἐξ οἰκίας μετὰ ὀχληρῶν ξυμποτῶν ἐξελαύνων; Γνώσεταί γε, νὴ Δία, τότ ̓ ἤδη ὁ δῆμος, οἷος οἷον θρέμμα γεννῶν ἠσπάζετό τε καὶ ηυξε, καὶ ὅτι ἀσθενέστερος ὢν ἰσχυροτέρους ἐξελαύνει. Πῶς λέγεις ; τολμήσει τον πατέρα βίαζεσθαι, κἂν μὴ πείθηται, τύπτειν ὁ τύραννος; Ναι, ἀφελόμενός γε τὰ ὅπλα. Πατραλοίαν λέγεις τύραννον καὶ χαλεπόν γηροτρόφον, καὶ, ὡς ἔοικε, τοῦτο δὴ ὁμολογουμένη ἂν ἤδη τυ ραννὶς εἴη· καὶ τὸ λεγόμενον, ὁ δῆμος, φεύγων ἂν καπ νὸν δουλείας ἐλευθέρων, εἰς πῦρ δοῦλον δεσποτείας ἂν ἐμπεπτωκὼς εἴη, ἀντὶ τῆς πολλῆς ἐκείνης καὶ ἀκαίρου ἐλευθερίας τὴν χαλεπωτάτην τε καὶ πικροτάτην δούλων δουλείαν μεταμπισχόμενος. DE REPUBLICA, VIII. TYRANNUS. Αν οὖν καὶ τὸ πάλαι τύραννος ὁ ἔρως λέγεται; οὔκουν καὶ μεθυσθεὶς ἀνὴρ τυραννικόν τι φρόνημα ἴσ il pas plus juste qu'un fils comme lui nourrisse son père, et l'ai-je tiré du néant, l'ai-je élevé si haut, pour me voir, dès qu'il serait grand, l'esclave de mes esclaves, pour le nourrir lui, ses valets et son cortége? Je voulais, malgré les riches et ceux qu'on nomme ici les bons citoyens, être libre par så puissance : maintenant, qu'il sorte avec ses amis; c'est un père qui chasse un fils de chez lui avec ses compagnons de plaisirs. » Mais le peuple verra quel monstre il avait formé, nourri, réchauffé dans son sein; il verra sa propre faiblesse, et toute la force de son ennemi. Le tyran ne craindra pas de l'outrager, de le frapper même, s'il est indocile: le peuple est désarmé. Le tyran est donc un fils ingrat, un parricide; voilà l'image de la tyrannie triomphante. Le peuple, en voulant éviter, comme on dit, la fumée de la dépendance entre gens libres, tombe dans le brasier d'un honteux despotisme; et à son excessive et folle liberté succède le plus dur et le plus amer esclavage, qui le soumet à des esclaves. RÉPUBLIQUE, LIV. VIII. PORTRAIT DU TYRAN. L'AMOUR est un tyran, comme on l'a dit; l'homme dans l'ivresse veut aussi dominer; la démence, la |