Images de page
PDF
ePub

Telle est la prison où le tyran, dont vous savez le caractère, est dévoré de passions et de terreurs. Malgré l'avidité de ses désirs curieux, il ne peut rompre ses chaînes; la ville est fermée pour lui seul; il ne verra jamais ce que veut voir tout homme libre; et sans cesse caché dans son palais comme une femme, il envie à ses sujets jusqu'à leur plaisir de voyager.

couronne.

Un autre supplice toujours renaissant est réservé à ce malheureux, trop faible pour maîtriser son âme tyrannique, et que son mauvais génie force d'être souverain: esclave de lui-même, il a pris l'engagement de commander aux autres. N'est-ce pas le sort déplorable d'un homme malade et languissant, qui, au lieu de vivre solitaire et tranquille, serait contraint de passer toute sa vie comme un athlète dans l'arène des combats? Le tyran n'est pas moins à plaindre, et déjà malheureux par son caractère, il l'est encore plus par sa Véritablement esclave, quoi qu'en dise le vulgaire, mais le plus infortuné, le plus vil des esclaves; flatteur de tous les méchans; incapable de satisfaire jamais ses voeux, et toujours mécontent, toujours pauvre, si l'on pense à tous les besoins de son cœur; condamné à vieillir, comme un Etat despotique, dans les inquiétudes, les angoisses et les larmes; il fait asseoir sur le trône à ses côtés l'envie, l'injustice, la trahison; il n'a pas un ami, pas une vertu, et son âme n'accueille et ne nourrit que les crimes.

Καὶ ἐξ ἁπάντων τούτων μάλιστα μὲν αὐτῷ δυστυχεῖ εἶναι, ἔπειτα δὲ καὶ τοὺς πλησίον αὐτῷ τοιούτους ἀπεργάζεσθαι.

DE REPUBLICA, IX.

LITTERE DATÆ

AD SYRACUSANOS.

Εἶ πράττειν. Ἃ δ ̓ ἂν διανοηθέντες μάλιστα, εὖ πράττοιτε ὄντως, πειράσομαι ταῦθ ̓ ὑμῖν κατὰ δύναμιν διεξελθεῖν. Ἐλπίζω δὲ οὐχ ὑμῖν μόνοις ξυμβουλεύσειν τὰ ξυμ φέροντα πᾶσι τοῖς ἐν Συρακούσαις, ὑμῶν δὲ καὶ τοῖς ἐχθροῖς καὶ πολεμίοις, πλὴν εἴ τις αὐτῶν ἀνοσιουργός γέγονε· ταῦτα γὰρ ἀνίατα, καὶ οὐκ ἄν ποτέ τις αὐτὰ ἐκνίψειε. Νοήσατε δὴ ἃ λέγω νῦν.

Ἔσθ ̓ ὑμῖν κατὰ Σικελίαν πᾶσαν, λελυμένης τῆς τυ ραννίδος, πᾶσα μάχη περὶ αὐτῶν τούτων· τῶν μὲν βουλομένων ἀναλαβεῖν πάλιν τὴν ἀρχήν· τῶν δὲ τῇ τῆς τυραννί δος ἀποφυγῇ τέλος ἐπιθεῖναι. Ξυμβουλὴ δὴ περὶ τῶν τοιού των ὀρθὴ δοκεῖ ἑκάστοτε τοῖς πολλοῖς εἶναι, ταῦτα ξυμβουλεύειν δεῖν, ἢ τοὺς μὲν πολεμίους ὡς πλεῖστα κακὰ ἐξερ γάσεται, τοὺς δὲ φίλους ὡς πλεῖστα ἀγαθά· τὸ δὲ οὐδαμῶς ῥᾴδιον, πολλὰ κακὰ δρῶντα τοὺς ἄλλους, μὴ οὐ καὶ πάσ χειν αὐτὸν πολλὰ ἕτερα. Δεῖ δὲ, οὐ μακρὰν ἐλθόντας ποι, τὰ τοιαῦτα ἐναργῶς ἰδεῖν· ἀλλ ̓ ὅσα νῦν γέγονε τῇδε αὐτοῦ περὶ Σικελίαν, τῶν μὲν ἐπιχειρούντων δρᾷν, τῶν δὲ ἀμύνασθαι τοὺς ὁρῶντας, ἀκἂν ἄλλοις μυθολογοῦντες ἱκανοὶ γίγνοισθ ̓ ἂν ἑκάστοτε διδάσκαλοι, τούτων μὲν δὴ σχεδὸν οὐκ ἀπορία.

C'est ainsi que le tyran est le plus malheureux des hommes, qui sont tous malheureux autour de

· lui.

RÉPUBLIQUE, LIV. IX.

CONSEILS DE PLATON
AUX SYRACUSAINS.

SOYEZ heureux. Mais comment pourrez-vous répondre au souhait le plus cher de mon cœur? je vais essayer de vous l'apprendre. Puissent mes conseils être utiles et à tous les Syracusains et même à leurs ennemis! Le sacrilége seul n'a plus de droit au bonheur : il a perdu l'espérance, et ses crimes sont inexpiables. Vous, écoutez-moi.

Depuis la chute de la tyrannie, la Sicile entière est divisée : les uns voudraient reprendre le pouvoir absolu; les autres, en être délivrés pour toujours. En ces temps de discorde, chaque parti n'approuve que ce qui doit faire le plus de mal au parti contraire et le plus de bien à sa faction, comme si l'on pouvait ici faire beaucoup de mal aux autres sans en souffrir beaucoup soi-même. Vous n'avez pas besoin d'exemples étrangers; votre Sicile, déchirée par ceux qui veulent nuire et par ceux qui veulent se défendre, donne à tous les peuples une éclatante leçon ses malheurs ont dû l'instruire.

Τῶν δὲ ὅσα γένοιτ ̓ ἂν ἡ πᾶσι ξυμφέροντα ἐχ θροῖς τε καὶ φίλοις, ἢ ὅτι σμικρότατα κακὰ ἀμφοῖν, ταῦτα οὔτε ῥᾴδιον ὁρᾷν, οὔτε ἰδόντα ἐπιτελεῖν. Εὐχῇ δὲ προσέοικεν ἡ τοιαύτη ξυμβουλή τε καὶ ἐπιχείρη σις τοῦ λόγου· ἔστω δὴ παντάπασι μὲν εὐχή τις ἀπὸ γὰρ θεῶν χρὴ πάντα ἀρχόμενον ἀεὶ λέγειν τε καὶ νοεῖν. Ἐπιτελὴς δ ̓ εἴη, σημαίνουσα ἡμῖν τοιόνδε τινὰ λόγον.

Νῦν ὑμῖν καὶ τοῖς πολεμίοις σχεδὸν, ἐξ οὗπερ γέγονεν ὁ πόλεμος, ξυγγένεια ἄρχει μία διὰ τέλους, ἥν ποτε κατ έστησαν οἱ πατέρες ὑμῶν εἰς ἀπορίαν ἐλθόντες τὴν ἅπασαν, τόθ ̓ ὅτε κίνδυνος ἐγένετο ἔσχατος Σικελίᾳ τῇ τῶν Ἑλλήνων, ὑπὸ Καρχηδονίων ἀνάστατον ὅλην ἐκβαρβα ρωθεῖσαν γενέσθαι. Τότε γὰρ εἵλοντο Διονύσιον μὲν, ὡς νέον καὶ πολεμικὸν, ἐπὶ τὰς τοῦ πολέμου πρεπούσας αὐτῷ πράξεις· ξύμβουλον δὲ, καὶ πρεσβύτερον, Ἱππαρίνον· ἐπὶ σωτηρίᾳ τῆς Σικελίας αὐτοκράτορας, ὥς φασι, τυράν νους ἐπονομάζοντες. Καὶ, εἴτε δὴ θείαν τὶς ἡγεῖσθαι βού λεται τύχην καὶ θεὸν, εἴτε τὴν τῶν ἀρχόντων ἀρετὴν, εἴτε καὶ τὸ ξυναμφότερον, μετὰ τῶν τότε πολιτῶν τῆς σωτηρίας αἰτίαν ξυμβῆναι γενομένην, ἔστω ταύτῃ ὅπη τὶς ὑπολαμβάνει· σωτηρία δ ̓ οὖν οὕτω ξυνέβη τοῖς τότε γενομένοις· τοιούτων οὖν αὐτῶν γεγονότων, δίκαιόν που τοῖς σώσασι πάντας χάριν ἔχειν. Εἰ δέ τι τὸν μετέπειτα χρόνον ἡ τυραννὶς οὐκ ὀρθῶς τῇ τῆς πόλεως δωρεᾷ κατακέχρηται, τούτων δίκας τὰς μὲν ἔχει, τὰ δὲ τινέτω. Τίνες οὖν δὴ δίκαι ἀναγκαίως ὀρθαὶ γίγνοιντ' ἂν ἐκ τῶν ὑπαρ χόντων αὐτοῖς ; Εἰ μὲν ῥᾳδίως ὑμεῖς ἀποφυγεῖν οἷοί τ'

Mais faire du bien ou le moins de mal possible à tous les partis, est un art plus difficile à trouver; et si on le trouve, il n'est pas aisé d'en suivre les règles. Aussi, lorsque j'ose entreprendre pour yous cette recherche salutaire, c'est comme un vœu que j'adresse aux dieux immortels : oui, c'est un vœu que je fais, et toutes nos paroles, tous nos sentimens doivent commencer par les dieux. Qu'ils daignent m'inspirer, et que mon vœu soit rempli !

Les Syracusains, et leurs factions mêmes, depuis qu'elles existent, ont obéi sans interruption à une famille royale, que vos pères établirent dans un moment de terreur, quand la Sicile grecque, ravagée par les Carthaginois, fut menacée de devenir barbare. Ils choisirent Denys, jeune guer- • rier, pour conduire les opérations militaires, et Hipparinus, sage vieillard, pour le conseiller le danger de la Sicile leur fit accorder à tous deux ce pouvoir absolu, que vous nommez tyrannie. Soit qu'une fortune divine ou un dieu même voulût sauver vos ancêtres, soit que le mérite des chefs, joint à la valeur des troupes, leur donnât la victoire, soit toutes ces causes ensemble, la Sicile fut délivrée; et il est juste peut-être de ne pas oublier les libérateurs de la patrie. Si, dans la suite, la tyrannie n'a pas fait un bon usage du présent qu'elle avait reçu de vous, elle en a été punie; qu'elle le soit encore. Mais où trouver une juste punition pour de telles fautes? Si vous pouviez facilement vous soustraire sans de grands périls et de grands PENSÉES DE PLATON.

21

« PrécédentContinuer »