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comment elle y a été reçue. Il dit encore qu'il y avait peu d'églises et peu de chrétiens dans les Gaules, avant Dèce; mais puisqu'il y avait déjà des temples élevés à la gloire de Jésus-Christ dans nos provinces, il fallait que ces chrétiens fussent assez nombreux.

La réfutation de la troisième autorité, qui est celle d'une lettre écrite en 567 à sainte Radegonde, par sept évêques de France qui venaient de célébrer un concile à Tours, est peu importante.

La quatrième est celle de Grégoire de Tours. Cet auteur dit que l'on ordonna sept évêques, qui furent envoyés en Gaule pour y prêcher, mais il ne nous apprend point qui est celui qui les ordonna et qui les envoya. Il donne pour témoin de cette ordination et de cette mission, l'historien de la Passion de saint Saturnin, qui n'en parle point, et qui fait seulement mention de l'épiscopat de saint Saturnin, qu'il fixe à l'an 250. On peut donc renverser ce que dit saint Grégoire de Tours de la mission des sept évêques, par cet argument: un auteur trop éloigné du temps dont il parle, qui cite faussement un témoin plus ancien, y ajoute plusieurs fables, et ne s'accorde pas avec lui-même, n'est pas un témoignage auquel on puisse avoir égard. On doit d'ailleurs considérer que si l'on excepte les actes de saint Saturnin, que saint Grégoire cite à faux et sans raison, il n'a eu aucun monument sur lequel il ait fondé ce qu'il dit de la mission des sept évêques venus dans les Gaules sous Dèce car s'il avait eu quelque écrit sur ce sujet, ç'aurait été particulièrement pour son église de Tours

et saint Gatien, le premier de ses prédécesseurs. Or, il est certain qu'il n'a rien trouvé dans les archives de Tours touchant saint Gatien, car il reconnaît positivement qu'il n'a appris que par le bruit commun famá ferente) que ce saint avait été envoyé à Tours par les évêques de Rome, tandis qu'il est certain que saint Gatien n'a pu avoir été envoyé que par un seul évêque.

Un long article de notre auteur répond ensuite à ce que M. de Tillemont allègue pour soutenir son opinion. Ce n'est en général qu'une répétition plus étendue de ce qu'on a lu plus haut. Nous arrivons enfin à la cinquième partie, qui contient les principales preuves de l'antiquité des églises des Gaules.

Il est certain, dit d'abord l'auteur, que la foi fit de grands progrès avant la ruine de Jérusalem. Notre Seigneur avait annoncé que cela aurait lieu, tandis qu'Eusèbe, saint Hilaire, saint Chrysostôme, Théophilacte, Eutime, quelques autres Pères, et plusieurs grands interprètes de ces derniers temps, Maldonat, Grotius et d'autres, croient qu'en effet, avant cet évè nement, qui arriva l'an 70, la foi et l'Evangile de Jésus-Christ avaient été annoncés aux Juifs, à tous les peuples de l'empire romain, et aux Barbares qui étaient connus. L'auteur cite le passage de Grotius qui s'y rapporte.

Entrant ensuite dans de plus grands détails, il prouve que la foi était répandue dans tout l'empire romain avant Dèce. Il cite Lactance et Eusèbe. Il soutient que saint Leu a prêché dans les Gaules, sur

le témoignage de saint Epiphane, qui écrit que saint Luc, après la mort de saint Paul, reçut la commission de prêcher l'Evangile; qu'il le prêcha premièrement dans la Dalmatie, dans les Gaules, dans l'Italie et dans la Macédoine, mais principalement dans les Gaules, selon la traduction du Père Petau, ou selon Comarius, mais il commença par les Gaules. Suit une réfutation des argumens par lesquels M. de Tillemont a cherché à infirmer le témoignage de ce saint.

Les raisons sur lesquelles l'auteur s'appuie pour soutenir que saint Crescent a été envoyé dans les Gaules par saint Paul, sont fort ingénieuses. Dans la deuxième épître de saint Paul à Timothée, cet apôtre dit : « Car« demas m'a abandonné, s'étant laissé emporter à l'a<«<mour du siècle, et il s'en est allé à Thessalonique, << Crescent en Galatie (eis Tadaria), Tite en Dalma<< tie, etc. » L'auteur observe d'abord que quelques auteurs ont lu dans saint Paul is radλav. Il dit ensuite que l'opinion était généralement répandue, dans la primitive Eglise, que Crescent était venu dans les Gaules; puis il remarque que le nom de Galatie s'appliquant d'ailleurs également en grec à la province que nous appelons ainsi, et à la Gaule, il s'agit seulement de savoir de laquelle des deux l'apôtre voulait parler; or, il écrivait à Timothée, pour lors en Asie : il est donc plus probable qu'il lui rendait compte de ce qui se passait en Europe. Aussi la Galatie est-elle placée, dans ce passage, entre Thessalonique et la Dalmatie, situées l'une et l'autre en Europe: pour

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quoi s'imaginer que saint Paul ait voulu parler de la Galatie asiatique? Quant à l'argument que M. de Tillemont déduit de ce qu'il ne reste aucun souvenir en France de la prédication de saint Crescent, il s'applique de même à la Galatie, qui n'en conserve pas davantage.

Le témoignage de Bardesane sert à l'auteur pour établir que la religion chrétienne était florissante dans les Gaules sous Marc-Aurèle. On a vu plus haut l'argument qu'il tire de saint Irénée pour l'antiquité des églises de Germanie. Ce saint ayant aussi parlé, dans le même passage, de celles des Gaules, l'auteur revient au moyen qu'il a déjà employé pour démontrer l'étendue de la religion chrétienne dans ces provinces à l'époque de saint Irénée.

L'existence seule des hérétiques marcoriens, dans les provinces du Rhône, fournit à l'auteur une preuve de plus à l'appui de son sentiment; car, dit-il, les hérétiques ne s'établissaient que sur les ruines de l'Eglise donc l'Eglise était répandue dans les provinces où il y avait des marconiens.

Un long article est consacré à prouver que saint Irénée n'a pas été seul évêque dans les Gaules; le principal argument est tiré d'Eusèbe, qui dit qu'un concile a été assemblé dans les Gaules, auquel saint Irénée à présidé : or, pour qu'il y eût un concile, il devait y avoir des évêques.

L'extinction de la foi dans les Gaules est un paradoxe contraire à tous les monumens du troisième siècle, et à Tertullien, observe ensuite l'auteur de la

Dissertation. Si cette extinction était arrivée, serait-il possible que personne n'en eût jamais eu aucune connaissance, ni Origène, ni Eusèbe, ni Sulpice Sévère, ni aucun auteur ecclésiastique ou profane? car il ne s'en trouve ni trace ni vestige. Sulpice Sévère, aụteur gaulois, fait mention de la persécution que l'empereur Sévère excita contre les chrétiens, et il ne dit point que cette persécution se soit étendue jusqu'aux Gaules. Ce que Tertullien dit de l'étendue de la religion dans les Gaules, ne permet pas non plus de croire qu'elle ait pu y être éteinte par la persécution de Sévère. Si l'exercice de la religion avait cessé en quelque endroit, ce devait être à Lyon, lorsque saint Irénée souffrit la mort : or, elle n'y avait point cessé; et lorsqu'on envoya sept évêques dans les Gaules pour y rallumer le flambeau de la foi, on aurait plutôt songé à rétablir l'Eglise de Lyon qu'à en fonder de nouvelles. On ne voit pourtant pas qu'aucun évêque ait été destiné pour Lyon; au contraire, on y trouve Faustin qui gouvernait cette Eglise l'an 253. Il existe d'ailleurs des preuves que la religion subsista au milieu des persécutions de Sévère; car on assure que saint Andéol, sous-diacre, fut martyrisé à Viviers cinq ou six ans après saint Irénée. Saint Féréol, prêtre, et saint Férution, diacre, disciples de saint Iré née, endurèrent le martyre à Besançon, l'an 211. Enfin, on prétend que la même année saint Félix, saint Fortunat et saint Achillée souffrirent pour Jésus-Christ à Valence.

Nous ne suivrons point l'auteur dans l'article où il

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