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risant leurs erreurs, et le pape Honorius anathématisé nommément; le tout du consentement des légats du pape Agathon, qui présidaient au concile; et Agathon et ses successeurs renouvelèrent plusieurs fois cette condamnation d'Honorius.

Saint Cyprien, dès le troisième siècle, soutint avec tous les évêques d'Afrique et plusieurs de l'Asie mineure, que les hérétiques devaient être rebaptisés, contre la décision expresse de saint Etienne, qui passa jusqu'à l'excommunication, au moins comminatoire; et saint Augustin, pour excuser saint Cyprien d'avoir soutenu cette erreur, ne dit autre chose, sinon que la question était difficile, et n'avait point encore été décidée par un concile universel. Donc ni saint Cyprien ni saint Augustin ne croyaient pas que l'on fût obligé de se soumettre sitôt que le pape avait pro

noncé.

Ceux qui veulent que le pape soit infaillible ne nient pas toutefois qu'il puisse devenir hérétique, comme ils n'osent pas dire qu'il soit impeccable, quoiqu'il n'ait pas tenu au pape Grégoire VII de le faire croire. Mais l'expérience n'a que trop fait voir qu'il n'y a aucune misère humaine à laquelle il ne soit sujet. Ils disent donc que le pape peut errer dans la foi, comme un tel homme, ou même comme docteur particulier, mais non pas comme pape, et prononçant ex cathedrd. La difficulté est d'établir cette distinction; car les lettres du pape Honorius qui furent condamnées, étaient adressées aux patriarches d'Alexandrie, d'Antioche et de Cons

tantinople, qui l'avaient consulté sur une question de loi, et le pape saint Etienne avait aussi décidé l'affaire du baptême, de toute son autorité.

Enfin, de quelque manière que ce soit qu'un pape fût hérétique, on convient qu'il devait être déposé, et par conséquent jugé. On ne voit point d'autre tribunal au-dessus de lui que le concile universel; aussi est-ce le premier cas auquel le concile de Constance a défini que le pape est soumis au concile. Le second est celui du schisme. Le troisième est la réformation de l'Eglise dans le chef et dans les membres. Pour bien entendre ce décret du concile, il faut en expliquer l'occasion et les suites.

Après que les papes eurent résidé soixante-dix ans à Avignon, le pape Grégoire XI retourna à Rome, et mourut en 1378. Urbain VI, Italien de naissance, fut élu à sa place; mais les cardinaux français, dont la faction était très-puissante, se plaignirent que l'élection n'avait point été libre, et s'étant retirés de Rome, élurent un Français qu'ils nommè rent Clément VII, et qui vint s'établir à Avignon. Le schisme dura environ quarante ans; Urbain VI mourut en 1389, et Boniface IX lui succéda à Rome. Clément VII mourut en 1394, et Pierre de Lune, autrement Benoît XIII, lui succéda à Avignon. A Rome, il y eut encore Innocent VII en 1404, et Ange Corrario, ou Grégoire XII, en 1406. Toute la chrétienté était partagée entre ces deux obédiences; le fait qui avait donné occasion au schisme était tellement embrouillé par les disputes,

qu'il n'était plus possible de reconnaître quel était le pape légitime; et aucun des deux ne voulait renoncer à ses prétentions. Ainsi, les personnages les plus savans et les plus pieux ne trouvèrent point d'autre voie pour finir le schisme, qu'un concile-général, qui déposa les deux prétendus papes, et en fit élire un autre. Ce fut l'Université de Paris qui travailla le plus à cette grande œuvre. On commença par la soustraction d'obédience aux deux papes; puis les cardinaux des deux partis, au moins la plupart, s'assemblèrent à Pise en 1409, avec grand nombre d'évêques et de docteurs (1). Le concile fit le procès aux deux prétendus papes, Grégoire et Benoît, et élut pour pape légitime Alexandre V, qui mourut

(1) Le concile de Pise, que nous regardons avec raison comme général, n'a pas laissé d'avoir ses contradicteurs ; car sans parler de Benoist et de Grégoire, qui étaient intéressés à ne le point recevoir, parce qu'il les avait déposés, saint Antonin ne l'a pas cru légitime. Le cardinal de Turrecremata a dit que du moins il n'était pas assuré qu'il le fût, parce qu'il avait été célébré sans l'autorité du pape. Le chartreux Boniface Ferrier, frère de saint Vincent Ferrier, le traite de conciliabule, d'assemblée profane, hérétique, maudite, séditieuse, chimérique, scandaleuse et diabolique..... Théodoric Urie, moine allemand, n'en parle pas mieux dans son Histoire du concile de Constance, dédiée à l'empereur Sigismond; mais toutes leurs raisons ont été solidement réfutées dans un traité de Gerson, de Auferribilitate papa ab Ecclesià, c'està-dire qu'on peut retrancher un pape de l'Eglise en certains cas, que cet auteur expose fort au long. (Edit.)

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«< conque,

l'année suivante. Jean XXIII lui succéda. Cependant Grégoire et Benoît se disaient toujours papes dans leurs obédiences, quoique très-raccourcies. Pour achever d'éteindre le schisme, Jean XXIII assembla, en 1414, le concile de Constance, qui, dans la session quatrième, fit cette déclaration : « Le concile univer«sel, représentant toute l'Eglise militante, tient son << pouvoir immédiatement de Jésus-Christ, et toute «personne, de quelqu'état et dignité qu'elle soit, « même le pape, est tenue de lui obéir en ce qui con<«cerne la foi, l'extirpation du schisme et la réfor«<mation générale de l'Eglise de Dieu, dans le chef << et dans les membres.» Et dans la session cinquième, le concile réitère le même décret, et ajoute : « Quide quelque condition, état et dignité, même papale (sic), méprisera opiniâtrement d'obéir aux mandemens et ordonnances de ce saint concile général sur les choses susdites, c'est-à-dire la foi, <«<le schisme et la réformation, soit soumis à péni<«<tence et puni convenablement. » Ainsi, le concile de Constance a établi la maxime, de tous temps enseignée en France, que tout pape est soumis au jugement de tout concile universel, en ce qui regarde la foi, l'extinction d'un schisme et la réformation générale. Ce concile réduisit en pratique la maxime. Jean XXIII, reconnu pour pape légitime par le concile et par la plus grande partie de l'Eglise, fut accusé et convaincu de plusieurs crimes, jugé et déposé. Il acquiesça à sa condamnation. En sa place fut élu Martin V, en 1417, dans le même concile de Constance.

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1. 10 LIV.

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Cependant Grégoire XII avait cédé ses prétentions, et s'était soumis au concile (1). Benoît XIII, persévérant dans sa contumace, était abandonné de tout le monde. Ainsi, on peut compter dès-lors le schisme fini, quoique Benoît ait vécu jusqu'en 1424, et que deux cardinaux qu'il avait faits lui eussent substitué un nommé Gilles Munios (Muñoz), qu'ils nommèrent Clément VIII, dont l'obédience était réduite au château de Paniscole en Aragon, et qui se soumit enfin à Martin, en 1429, onze ans après la fin du concile de Constance.

Ce concile ordonna que l'on tiendrait un autre concile général cinq ans après, puis sept ans, puis de dix ans en dix ans. Martin V en avait convoqué un, quand il mourut en 1431. Eugène IV, son succesfut obligé de le tenir, et ce fut le concile de Bâle (2). D'abord, on y renouvela les décrets de ce

seur,

(1) Il n'est rien que les partisans de la cour de Rome n'aient mis en usage pour empêcher qu'on regarde le concile de Constance comme œcuménique, parce qu'on y a décidé solennellement que le pape, évêque de Rome, était soumis au concile général, dans ce qui regarde la foi et la réformation de l'Église. (Edit.)

(2) Les ultramontains contestent encore l'œcuménicité du concile de Bâle, parce qu'il n'a pas été approuvé par les papes, évêques de Rome. Cette réponse suppose précisément ce qui est en question; car on demande si l'évêque de Rome a une autorité supérieure aux conciles généraux? si ces tribunaux tirent leur autorité de lui? On décide que non, la tirent de Jésus-Christ même, et que l'évêque de Rome

qu'ils

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