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Après les défenses communes à toutes autres personnes de vendre, débiter ou donner à manger de la viande pendant le carême, il est enjoint au boucher de l'Hôtel-Dieu de tenir sa boucherie garnie de bonne viande de toutes sortes pour le secours des malades, de la vendre à un prix raisonnable à ceux qui auront permission d'en manger, et de tenir registre de la quantité et du prix de la chair qu'il vendra aux malades, ensemble de leurs noms et demeures, sous peine d'amende arbitraire.

En 1619, les défenses furent étendues au bourg de Charenton. Enfin, depuis l'année 1667, le Parlement adopta l'usage de rendre un arrêt, quelques jours avant le carême, pour régler la police et la discipline qui devaient s'observer dans les boucheries (1) de l'Hôtel-Dieu, et renvoya aux juges de police pour l'exécution. En même temps, le roi expédiait à un officier de robe-courte, un ordre qui lui donnait entrée avec ses archers dans tous les lieux de la ville et des faubourgs de Paris. En conséquence, cet officier faisait tous les jours ses visites, saisissait la viande qu'il trouvait exposée en vente, et, selon la qualité des personnes, il emprisonnait les contrevenans.

Dans cet arrêt que le Parlement rendait chaque année, il était enjoint aux rôtisseurs et bouchers de

(1) Ces boucheries étaient au nombre de cinq: une à l'Hôtel-Dieu même, une à l'Abbaye, une à la vieille porte Saint-Honoré, une au Marais du Temple et une à la rue de Beauvais.

Paris et des faubourgs, et à toutes autres personnes de quelque qualité qu'elles fussent, de porter à l'Hôtel-Dieu, dès le jour des cendres, les viandes, volailles ou gibiers, vives ou mortes, qu'elles pouvaient avoir de reste, dont on leur payait la valeur, si elles étaient trouvées propres à l'usage des malades, sans être gâtées ni corrompues; et au cas contraire, elles étaient jetées en la rivière.

Avant que l'usage se fût introduit de permettre les œufs pendant le carême, les mêmes défenses s'étendaient aussi à la vente de cet objet. Outre les dispenses particulières qui viennent d'être expliquées, il y en a quelquefois une générale que l'Eglise accorde à tout un diocèse ou à toute une province; c'est lorsqu'il y a une si grande disette d'alimens qu'il serait impossible au peuple de faire maigre le carême sans une notable incommodité. Cette nécessité est quelquefois arrivée dans le diocèse de Paris. Alors le Parlement, sur la remontrance des officiers de police, invitait l'archevêque de Paris à permettre l'usage de la viande ou celui des œufs, selon que la disette était plus ou moins pressante: cette dispense étant accordée, le Parlement rendait un arrêt qui en ordonnait l'exécution.

La police des processions a toujours été semblable à celle qui s'observe aujourd'hui; il est donc inutile de s'en occuper ici.

Le jubilé de l'an 1696 étant arrivé dans le temps du carnaval, les bals, masques et spectacles publics furent sévèrement défendus.

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Les pélerinages, comme les processions, tirent leur origine des visites fréquentes qui étaient rendues par les premiers fidèles aux lieux qui ont été honorés de quelques-uns des mystères de notre religion, ou aux tombeaux des martyrs : ainsi, cette action en ellemême et dans son principe, est très-pieuse et trèslouable; aussi les lois l'ont-elles toujours approuvée, et mis les pélerins au nombre des personnes les plus

favorisées.

Pepin, par une ordonnance de l'an 755, les exempta de tous péages, de tous passages de ponts ou de rivières, tant pour eux que pour leur bagage. Il fit défense à tous propriétaires ou fermiers de ces droits d'en rien exiger, d'arrêter les pélerins ou de leur faire aucune peine à cette occasion, sous peine de 60 sous d'amende, moitié au fisc et l'autre moitié au pélerin.

Charlemagne, en 802, fit aussi de très-expresses défenses à tous ses sujets, pauvres ou riches, de refuser l'hospitalité aux pélerins, c'est-à-dire le logement, le feu et l'eau.

Mais comme les meilleures choses peuvent dégénérer en abus, on s'est toujours précautionné contre un trop grand penchant du peuple à s'éloigner de la patrie pour entreprendre des pélerinages. Par un nouvel édit de 803, Charlemagne ordonna aux magistrats des provinces d'avoir une grande attention aux pélerins qui passaient par leur juridiction, et de les obliger tous de déclarer leurs noms, leurs qualités et les lieux d'où ils venaient, pour connaître si ce n'étaient point des fugitifs ou des vagabonds.

Aux époques plus récentes de notre monarchie, nul ne pouvait aller en pélerinage hors du royaume sans être muni de passeports en règle, qui n'étaient délivrés que sur une attestation de l'évêque diocésain. Tel est l'esprit de plusieurs ordonnances rendues sous le règne de Louis XIV.

On donnera plus tard quelques détails sur différentes espèces de confrairies qui existaient autrefois en France. Il suffira de faire observer ici qu'elles étaient dans le cas des communautés séculières ou régulières, qui ne pouvaient s'établir sans la permission du prince.

Il ne nous reste plus qu'à faire connaître, en peu de mots, les peines temporelles par lesquelles nos rois se sont efforcés de mettre un frein à l'impiété des jureurs et des blasphémateurs.

Louis-le-Débonnaire, par un édit de 826, ordonna que quiconque proférerait des blasphêmes contre Dieu serait emprisonné de l'ordre de l'évêque ou du principal magistrat du lieu; qu'il tiendrait prison jusqu'à ce qu'il eût expié ce crime par une pénitence publique, qui lui serait imposée par l'évêque, et qu'il fût réconcilié à l'Eglise selon les saints canons.

On ne trouve plus ensuite de lois contre le blasphême jusqu'au règne de saint Louis. Ce monarque voulut que tous les blasphémateurs fussent marqués d'un fer chaud au front, et qu'en cas de récidive ils eussent la langue et la lèvre aussi percées d'un fer chaud. Clément IV loua fort saint Louis de son zèle, par un bref du 12 juillet 1264; mais il n'approuva pas

sa sévérité : il lui conseilla d'imposer seulement aux blasphémateurs des peines temporelles, sans mutilation ou flétrissure de membres. Ces remontrances du souverain pontife firent en effet changer les peines trop sévères en peines pécuniaires, et en celles de l'échelle et du fouet.

On ne tarda pourtant pas à en revenir aux mesures de sévérité. Philippe de Valois, par des lettres patentes du 22 février 1347, adressées au prévôt de Paris, ordonne «< que celui ou celle qui proférerait le vi<< lain serment ou qui dirait des paroles injurieuses con<<< tre Dieu et le saint Siége, serait mis pour la première « fois au pilori, depuis prime jusqu'à none, avec per« mission aux assistans de lui jeter aux yeux des ordures qui néanmoins ne pussent pas le blesser; qu'ensuite il jeûnerait un mois au pain et à l'eau; que pour la <«<seconde fois il serait remis au pilori un jour de « marché, où la lèvre de dessus lui serait fendue d'un << fer chaud; la troisième, celle de dessous; la qua<«< trième, que les deux lèvres lui seraient coupées; et « en cas d'une cinquième récidive, la langue entière «<lui serait coupée, afin que dorénavant il ne pût dire << du mal de Dieu ni d'aucun autre. Ordonne que ce«<lui qui entendrait proférer ces blasphêmes, sans ve<«<nir sur le champ le déclarer en justice, serait con« damné en l'amende de 6 livres; et en cas qu'il ne << se trouvât pas en état de payer cette somme, qu'il << tiendrait prison, en jeûnant au pain et à l'eau, jus«qu'à ce qu'il eût satisfait par cette pénitence à la faute par lui commise, au lieu de l'amende qu'il

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