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MM. Canuet, Orfila, il faudrait en conclure queles préparations plombiques produisent un effet local de nature inflammätoire; mais, d'un autre côté, M. Orfilá a rapporté uné obser vation chez l'homme, dans laquelle il n'existait pas d'inflam~ mation dans le tube intestinal; et les animaux intoxiqués pár MM. Flandin et Danger, Rognetta n'en ont pas offert non plus. Les auteurs, selon nous, n'ont pas assez distingué, dans la plupart des expériences, des expertises légales, l'état purement congestionnel des muqueuses, de l'état inflammatoire, et l'on sait qu'elles s'imbibent très-facilement de sang, préntient par conséquent une couleur plus ou moins foncée, lorsquè, par une cause quelconque, ce liquide devient plus fluide, effet que produisent la plupart des poisons inorganiques; c'est qu'on présente aussi les animaux empoisonnés lentement par l'injection d'un sel plombique dans les veines (page 636).

EMPOISONNEMENT PAR LES PRÉPARATIONS DE BISMUTH.

Le nitrate de bismuth est en gros cristaux prismatiques, incolore, translucide, inodore, d'une saveur àcide, styptique, un peu hygrométrique; il devient opaque à sa surface. Il rougit le papier bleu de tournesol humide. 1o chauffé entre deux charbons ardents, il fond, fuse, dégage des vapeurs vitreuses, se transforme en une poudre blanc-jaunâtre (oxyde de bismuth anhydre), et se réduit en globules métalliques, d'un gris blanc argentin, avec reflet irisé. Ces globules sont cassants, ne sẽ laissent pas diviser par la pointe d'un canif, se dissolvent complétement dans l'acide azotique ou l'eau régale, à une légère chaleur; le soluté, s'il n'est pas trop acide, précipite en blanc par l'eau distillée, en noir par l'acide sulfhydrique, offre, enfin, les réactions des sels de bismuth. Ces caractères distinguent suffisamment ce métal de l'antimoine, etc.

Le nitrate de bismuth se dissout dans l'eau distillée et ordinaire, et se transforme immédiatement en nitrate acide, qui reste dissous, et en sous-nitrate de bismuth, (blanc de fard, magistère de bismuth), qui se dépose en petites paillettes

blanches. Ce dernier produit, tel qu'on le trouve dans les pharmacies, est ordinairement en poudre blanc-jaunâtre, qui peut-être n'est que de l'oxyde. Du reste, tous les deux sont réductibles sur les charbons comme le nitrate. Insolubles dans l'eau, ils se dissolvent dans l'acide azotique.

Les solutés de sels de bismuth précipitent: 1o par l'acide sulfhydrique, les sulfhydrates, en noir (sulfure de bismuth); 2opar la potasse, en paillettes blanches (hydrate de protoxyde), insoluble, dans un excès de réactif; 5o par le chromate de polasse, en jaune canari (chromate de bismuth); 4o par l'iodure de potassium, en jaune-rougeâtre d'abord, puis en brunchocolat (iodure de, bismuth), soluble dans un excès de réactif; le soluté est d'un jaune doré brillant ; 5o par la teinture de noix de galle, en jaune sale (tannate de bismuth); 6" par le cyanure jaune de potassium et de fer, en blanc légèrement jaunàtre. 7o enfin, l'acide sulfurique ne précipite pas les sels de bismuth; une lame de zinc bien décapée en dépose le métal.

Les sels de bismuth offrent des réactions à peu près analogues aux sels de plomb; ils s'en distinguent cependant par la potasse, l'iodure de potassium, l'acide sulfurique, qui donnent des réactions différentes, Ajoutons ensuite que la plupart de ces précipités sont réductibles par le flux noir, et que le bismuth est facile à distinguer du plomb. Si la dissolution était trop étendue pour donner les réactions caractéristiques, on la précipiterait par un courant d'hydrogène sulfuré, on transformerait le sulfure en nitrate par l'acide azotique, ou en chlorure par l'acide hydrochlorique, et on constaterait ensuite les réactions.

Préparations de bismuth et matières organiques. Le sous-nitrate ainsi que l'oxyde sont sans action sur ces matières, mais peuvent être dissous, en bien petite quantité, il est vrai, par les liqueurs acides. Le nitrate, avons-nous dit, est décomposé par l'eau; il l'est aussi et trausformé en composé insoluble par la plupart des matières organiques, et surtout par le lait, l'albumine, les décoctés des substances astringentes, avec les

quels il donne des précipités blancs ou blanc-jaunâtre. Il trouble la bile en jaune clair; forme, avec le vin, un dépôt violacé et le décolore en grande partie; il ne trouble point les solutés gélatineux.

Analyse. 1o Examiner attentivement si, dans les dépôts des liquides organiques, dans les matières molles ou solides, à la surface du tube intestinal, ne se trouve point une poudre blanche, cristalline, ou une poudre blanc-jaunâtre (sous-nitrate, oxyde de bismuth), qu'il serait facile d'isoler par le lavage. 2o traiter les matières suspectes par l'eau distillée, faiblement acidulée par l'acide azotique; filtrer, essayer une portion de liqueur par les réactifs, et si les résultats sont négatifs, précipiter le restant par l'acide sulfhydrique; laver le sulfure; le transformer en nitrate par l'acide azotique; évaporer au bainmarie; reprendre le résidu par l'eau, et ensuite essayer de nouveau les réactifs caractéristiques, ou réduire une portion du résidu, dans la cavité d'un charbon. 3° quant aux matières solides du tube intestinal, M. Devergie conseille de les dissoudre dans l'acide hydrochlorique un peu étendu, de les désorganiser par un courant de chlore, de filtrer et d'essayer les réactifs; et si les résultats sont négatifs, d'incinérer ces matières dans un creuset avec de la potasse; de traiter les cendres par l'eau régale pour dissoudre le bismuth, etc. Les procédés de l'incinération simple, de carbonisation par l'acide sulfurique, d'incinération par l'acide azotique et le chlorate de potasse, tels que nous les avons indiqués aux préparations cuivreuses et plombiques sont parfaitement applicables, et donuent de fort bons résultats. Le bismuth n'étant pas volatil, il faut incinérer le produit dans un creuset de porcelaine. On obtient ce métal en globules dans les cendres dont on l'isole par le lavage, ou en traitant les cendres par l'acide azotique pour le transformer en nitrate. Le lait, les liquides visqueux, chargés, enfin, de beaucoup de matières organiques seraient soumis aux mêmes procédés analytiques. Quant au vin, on précipiterait le bismuth par l'hydrogène sulfuré, et le sulfure serait ensuite converti en chlorure par l'acide chlorhydrique.

Dans toutes ces expériences il convient, lorsqu'on a obtenu lé bismuth à l'état de nitrate, de chlorure, d'opérer les réactions sur des morceaux de verre, à Faide d'une baguetté de verre, parce que si on étendait la liqueur d'eau, on perdrait le bismuth qui se précipite à l'état de sous-sc!.

Ayant retiré, par les lavages, une poudre blanche cristalline où une poudre blanc-jaunâtre du tube intestinal, des matières suspectes enfin, peut-on savoir si c'est l'oxyde, le sous-nitrate qui ont été administrés, ou bien le nitrate acide? Dans le premier cas, la poudre obtenue serait blanc-jaunâtre, et, dans les liquides et surtout dans les matières solides, on ne trouverait pás cu que peu dé bismuth en combinaison, en supposant que les lavages aient été bien exécutés; dans le second cas au contraire, le sous-nitrate serait en poudre blanche cristalline, et si, dans les parties liquides, on ne décelait point de poison, on en trouverait toujours en combinaison dans les matières solides des vomissements, le tube intestinal, etc.

Nitrate de bismuth absorbé. M. Orfila empoisonne des chiens avec 8 à 10 gram. de nitrate de bismuth dissous dans 200 gram. d'eau, lie l'œsophage et la verge, les pend vingt-quatre heures après, et retire du bismuth du foie, de la rate, des urines par le procédé que nous avons indiqué aux préparations plombiques, page 649, c'est-à-dire, en faisant bouillir ces organes dans de l'eau acidulée par l'acide azotique, évaporant le décocté à siccité, et carbonisant le résidu par l'acide azotique ét lé chlorate de potasse. Le charbon bouilli dans l'eau aiguisée par l'acide azotiqué a donné une liqueur qui a précipité du blanc de fard par l'eau distillée, et du sulfure de bismuth par l'acide sulfhydrique, et le sulfure a été transformé en nitrate par l'acide azotique affaibli, etc. Il a aussi obtenu des résultats analogues en agissant de même sur le tube intestinal des cliiens, ainsi que sur leurs urines soumises au mêine procédé analytique que dans l'empoisonnement par le plomb. Par la carbonisation directe, on arrive aux mêmes résultats.

Effets toxiques. Pauvres d'observations chez l'homme, nous n'avons guère que les expériences sur les animaux pour nous

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éclairer, encore sont-elles peu nombreuses, trop pèu variées et trop peu comparatives. Le sous nitrate a été porté à la dose de 20 centigr. à 3 gram. comme médicament, saus accidents; cependant Odier, Pott, disent, qu'à haute dosé, il peut occasiðnner des hausées, des vomissements, des coliques, de la diarrhée, des vertiges; arcidents qui se dissipent assez promptement. Le Dr J. Kerner rapporte le cas suivant, dont rous donnons seulement un extrait. Un homme affecté de pyrosis prend, dans un verre d'ean, un mélange de 8 gram. (2 gros) dė sous-nitrate de bismuth et de crème de tartre aussitôt après, ardeur à la gorge, vomissements, déjections des matières liquides, qui, plus tard, devinrent Britiâtres; pouls petit, intermittent; face pale; froid de tout le corps; contractions spasmodiques et douloureuses des muscles, surtout des extrémités inférieures; diglütition difficile; douleurs brûlantés du pharyrx; sécheresse de la muqueuse buccale et pituitaire; soif inextinguible; appétence des boissons acides. Les vomisse ments, les autres symptômes s'aggravent de plus en plus; la face et les mains se tumélient, le ventre se météorise, la respiration devient pénible, et le malade suchombe le neuvième jour. La sécrétion urinaire a été suspendue pendant sept jours. Autopsie. Tube intestinal rempli de gaz; muqueuses buccale, pharyngée et gastro-intestinale comme gangrénées, surtout celle du rectum, où elle se détachait facilement; papilles intestinales très-rouges et saillantes; taches noirâtres sur la muquense tracheale; cxtrémité inférieure de la moelle enflammée, ainsi que la face interne du cœur. Rien d'anormal dans l'encephate, les reius, les pounions.

N'ayant rien de bien circonstancié sur le degré de purété du médicament qui a été administré, sur l'état antérieur du malade, sur l'influence que peut avoir exercée la crème de tartre soit sur l'organisme, soit en rendant peut-être le nitrate de bismuth soluble, nous n'osons hasarder aucune explication, aucun commentaire. Nous ferons remarquer toutefois que la gravité des symptômes, des altérations pathologiques, qui ont offert la plus grande analogie avec ceux de l'empoisonnement par le

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