Images de page
PDF
ePub

portions restant entre ses mains. A plus forte raison en serait-il de même si la matière, au lieu d'être donnée en bloc et rendue par parties séparées au fur et à mesure de la confection, avait été donnée et rendue par lots séparés; les derniers objets confiés et restant entre les mains de l'ouvrier ne répondraient pas par privilége des sommes dues pour payement de la main d'œuvre des objets confiés et rendus antérieurement.

Parmi les créanciers privilégiés sur les immeubles, d'après l'article 2103, paragraphe 4 du Code Napoléon, sont les architectes, entrepreneurs, maçons et autres ouvriers employés pour édifier, reconstruire ou réparer des bâtiments, canaux, ou autres ouvrages quelconques, pourvu néanmoins que, par un expert nommé d'office par le tribunal de première instance dans le ressort duquel les bâtiments sont situés, il ait été dressé préalablement un procès-verbal, à l'effet de constater l'état des lieux relativement aux ouvrages que le propriétaire déclare avoir dessein de faire, et que les ouvrages aient été, dans les six mois au plus de leur perfection, reçus par un expert également nommé d'office. Le montant du privilége ne peut excéder les valeurs constatées par le second procès-verbal et il se réduit à la plus value existante à l'époque de l'aliénation de l'immeuble et résultant des travaux qui y ont été faits. Ceux qui ont prêté les deniers pour payer ou rembourser les ouvriers jouissent de ce même privilége, pourvu qu'il soit authentiquement constaté par l'acte d'emprunt, que la somme était destinée à cet emploi, et par la quittance

des ouvriers, que ce paiement a été fait des deniers empruntés.

Ce privilége est soumis à la formalité de l'inscription (C. N., art. 2110).

Les maçons, charpentiers et autres ouvriers qui ont été employés à la construction d'un bâtiment ou d'autres ouvrages faits à l'entreprise, ont une action directe contre celui pour lequel les ouvrages ont été faits, jusqu'à concurrence de ce dont il se trouve débiteur envers l'entrepreneur au moment où leur action est intentée (C. N., art. 1798).

Par suite de l'action directe conférée par la loi, même au cas de faillite de l'entrepreneur, les ouvriers doivent être payés par préférence à tous autres créanciers du failli sur les sommes que reste devoir le propriétaire (Doctrine et Jurisprudence conformes et unanimes).

Quant à la preuve des paiements faits par le propriétaire, elle peut résulter de pièces n'ayant pas date certaine et de tous actes, pourvu que leur sincérité ne puisse être soupçonnée ?

La cession faite par l'entrepreneur du prix que lui doit le propriétaire avant l'exercice de l'action des ouvriers met obstacle à l'exercice de cette action directe. La somme, dans ce cas, n'étant plus due à l'entrepreneur, ne peut être réclamée par les ouvriers ses créanciers. L'opinion contraire a été adoptée quelquefois par des tribunaux et des auteurs; mais, repoussée par cour de Cassation (18 janvier 1854), et par la plupart des jurisconsultes, elle ne semble pas devoir prévaloir. La saisie-arrêt faite entre les mains du propriétaire,

la

pour lequel les ouvrages ont été faits, sur les sommes par lui dues à l'entrepreneur, met également obstacle à l'action directe que les ouvriers viendraient exercer postérieurement (Bordeaux, 31 mars 1854).

Le décret du 26 pluviôse an II confère aux ouvriers des entrepreneurs de travaux de l'Etat un droit de préférence sur les sommes dues à ces entrepreneurs, que la jurisprudence se refuse d'étendre lorsqu'il s'agit de travaux communaux.

Prescription.

La disposition de l'article 2271 du Code Napoléon, qui soumet à la prescription de six mois l'action des ouvriers pour le paiement de leurs journées, fournitures et salaires, est trop générale, pour ne pas l'appliquer non-seulement aux ouvriers à temps, mais encore aux ouvriers à pièce. La cour de Cassation, par arrêt du 27 janvier 1851, l'a admise à l'encontre d'un ouvrier plombier qui, à la suite de travaux et fournitures faits à une propriété de M. de Rotschild, demandait une somme de 20,000 francs. La prescription de six mois ne cesse d'être opposable que lorsque l'ouvrier, s'engageant à faire des travaux dont quelques-uns sont étrangers à sa profession, devient entrepreneur. Cependant la cour de Cassation a refusé de l'appliquer le 12 avril 1853 à un charpentier qui avait fait une charpente et un escalier, parce qu'il n'avait pas été employé comme simple ouvrier à la journée, moyennant salaire quotidien des gens de travail.

Avances.

Pour ce qui concerne les avances, leur constatation, leur remboursement, voyez ce que nous avons dit sous la même rubrique dans la section première.

Compétence.

Les contestations relatives aux engagements respectifs des maîtres et de leurs ouvriers sont de la compétence des juges de paix, lorsque d'ailleurs il n'y a pas sur les lieux de conseil de prud'hommes. Il n'y a pas lieu dans ce cas de rechercher si cette contestation présente un caractère civil ou commercial; c'est du moins la règle généralement adoptée; quelques dissidents seulement soutiennent que, dans ce dernier cas, le tribunal de commerce est compétent.

SECTION III.

OBLIGATIONS DES PATRONS, DROIT DES TIERS.

Aux termes des articles 11 et 12 du décret du 22 germinal an xi, nul individu employant des ouvriers ne peut recevoir un apprenti ou un ouvrier sans un congé ou certificat d'acquit de ses engagements délivré par celui de chez qui il sort, à peine de dommages-intérêts envers le maître.

Cette disposition, qui a été sans cesse appliquée, est

encore en vigueur (cass. 9 juillet 1829;

22 fév. 1840; 18 juin 1846, etc.) Il y a plus, cette prescription est aujourd'hui accompagnée d'une sanction spéciale; ce qui avait également lieu avant la loi de germinal. L'action civile en dommages-intérêts n'en continue pas moins à subsister.

La règle est recevable :

Qu'il s'agisse de l'emploi d'un ouvrier à journée ou d'un ouvrier à façon (Nancy, 18 juin 1849).

Que l'ouvrier sorte immédiatement de la fabrique du patron qui réclame, ou qu'il ait été employé dans l'intervalle dans d'autres ateliers (cass., 2 août 1848).

Que les ouvriers soient domiciliés ou non dans la commune où ils travaillent (cass., 9 juillet 1829).

Elle n'est applicable qu'aux manufacturiers, fabricants et autres personnes se livrant à des entreprises industrielles, mais nullement à de simples cultivateurs, par exemple, qui recevraient un ouvrier sortant d'une manufacture sans exiger la justification d'un livret portant un congé d'acquit (cass., 30 juin 1836).

SECTION IV.

BUREAUX DE PLACEMENT.

Nous ne croyons pas devoir terminer ce chapitre relatif aux relations civiles entre les maîtres et les ouvriers sans parler des bureaux spécialement destinés à lier ces relations.

« PrécédentContinuer »