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dence; leur projet n'allait à rien moins qu'à enlever la reine et l'infante.

Dans la nuit du 7 octobre, Diego Léon et Concha se présentent au détachement de la garde faisant le service, lui rappellent les serments de fidélité prêtés à Marie-Christine, et l'engagent à faire justice du général usurpateur. Des cris d'enthousiasme leur répondent; les soldats proclament la régence de la reine Christine; ils sont rejoints par un bataillon du régiment de la princesse, et tous ensemble pénètrent dans le palais et se précipitent vers l'appartement de la reine. Mais aux portes et dans les vestibules, les hallebardiers se présentent, bientôt renforcés par quelques bataillons de la garnison. Une lutte désespérée s'engage à quelques pas des chambres des princesses; les coups de feu retentissent dans les corridors, dans les escaliers; les dalles sont couvertes de morts et de blessés. La reine et sa sœur éplorées entendent, pendant plus d'une heure, les bruits d'une effroyable mêlée. Enfin les conjurés sont repoussés, le palais est évacué; Diégo Léon et Concha s'empressent de fuir de Madrid suivis de quelques cavaliers, et la capitale, à son réveil, apprend avec étonnement qu'elle vient d'échapper à une révolution.

Ce premier succès raffermit les fidélités ébranlées, et le régent, agissant avec vigueur, enveloppa de ses troupes toutes les provinces insurgées. Van-Halen s'avançait sur Saragosse; Alcala désarmait la milice de Tolosa; Seoane se rendait à Valence, et Espartero, lui-même, marchait vers le nord. Bientôt O'Donnell, vivement pressé, évacuait la citadelle de Pampelune, et venait, avec Ubisondo, chercher un refuge en France. Toutes les troupes révoltées de l'Alava et du Guipuscoa rentraient dans le devoir, et les populations

étaient entraînées par l'exemple; Diégo Léon, arrêté dans sa fuite, était militairement exécuté; l'insurrection avortée semblait donner de nouvelles forces à Espartero. Il profita des premiers moments de triomphe pour porter un coup décisif au fédéralisme provincial. Par un bando, daté de Vittoria, le 23 octobre, il déclara aux provinces basques qu'elles seraient, à l'avenir, assimilées au reste de la Péninsule. C'était annoncer la suppression des fueros et le triomphe de la centralisation. Espartero accomplissait l'entreprise qui avait fait tomber Marie-Christine, et lui-même n'avait gagné le pouvoir qu'en soutenant le principe contraire.

Quoi qu'il en soit, le triomphe d'Espartero était aussi un échec pour la politique française en Espagne. Le cabinet des Tuileries s'était associé, au moins, par ses sympathies, à la dernière tentative de Marie-Christine et de ses généraux. Personne ne l'ignorait dans la Péninsule; beaucoup de gens, à Madrid, lui attribuaient même une complicité plus directe, et ceux-là félicitaient l'Espagne d'avoir remporté une double victoire.

CHAPITRE IX.

Réforme électorale.

Le roi s'y oppose avec opiniâtreté.

Ses théo

ries sur le gouvernement représentatif. Conseil de cabinet sur la

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les chemins de fer. · Crédits supplémentaires. - Vote du budget.

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· Clôture de la session. Poursuites

contre la presse. Procès Bourdeau. des journaux.

Mort de M. Humann.

Condamnations multipliées

M. Lacave-Laplagne le remplace. Occupation des îles Marquises et des îles de la Société par l'amiral Dupetit-Thouars.

A peine le ministère était-il sorti des épreuves de l'adresse, que la lutte des partis recommença sur une question qui doit se représenter sans cesse, comme un avertissement donné au pouvoir, sans que jamais le pouvoir veuille comprendre qu'elle renferme une révolution. La réforme électorale gagnait chaque année des partisans dans le pays, quoique, chaque année, les privilégiés du parlement se retranchassent avec opiniâtreté dans le cercle étroit du monopole.

Le plus grand obstacle à la réforme était le roi lui-même. Ennemi de toute innovation, non-seulement parce qu'elle

lui semblait un affaiblissement de son autorité, mais aussi parce qu'elle lui apportait l'inconnu, il repoussait obstinément toute discussion à ce sujet. Il se persuadait d'ailleurs que les réclamations n'avaient rien de sérieux, que l'agitation n'était que factice, entretenue seulement par quelques hommes de parti, sans que les masses eussent aucun souci des droits qu'on invoquait pour elles. En général, la politique représentative n'était pour lui qu'une grande comédie; et le système constitutionnel une mystification. « C'est la << maladie de l'époque, disait-il; elle passera, mais il faut << savoir la traiter. Les rois du continent s'en préservent avec « terreur; moi, j'emploie la méthode homéopathique, et cela << me réussit. » Avec aussi peu de respect pour des formes politiques dont il avait la garde, il devait nécessairement accueillir avec dédain ou légèreté tout ce qui tendait à les développer. Trop oublieux, d'ailleurs, de l'origine de sa royauté, il ne voulait se rappeler que l'origine de sa famille, et chaque fois qu'il s'agissait des prérogatives de la couronne, il terminait la discussion en disant : « Ne suis-je pas le petit-fils de Louis XIV. » La révolution de 1789 n'était à ses yeux qu'un fait passager dont il fallait amoindrir les conséquences, celle de 1830, une transaction de famille qui n'ôtait rien au principe dynastique. Or, ce principe n'admettait pas de concessions: celles qui avaient été faites, il les considérait comme provisoires; sa logique, par conséquent, n'en pouvait accueillir d'autres.

Mais ses ministres qui voyaient de plus près les agitations réformistes, commençaient à s'en préoccuper; et sans même en comprendre toute l'importance, ils ne pouvaient s'empêcher d'en tenir compte, ne fût-ce que pour les comprimer. D'un autre côté, il se faisait à petit bruit des modifications

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