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plus irritante que conciliante. En conséquence ils ont adopté l'article 123 qui se lit comme suit :

"Les sommations respectueuses aux père et mère ne sont plus "obligatoires."

Cet article n'est pas indiqué comme étant de droit nouveau pour le motif que le droit en question était depuis longtemps tombé en désuétude.

§ VII.- Autres empêchements au mariage dont il est question dans notre code.

Sans parler, pour le moment, de quelques empêchements prohibitifs, comme le défaut de publications ou le fait d'une opposition au mariage, qui existent dans le droit français comme dans le nôtre et que j'expliquerai plus loin, je dois signaler certains empêchements qui entraînent la nullité du mariage dans notre droit. Le code civil nomme un de ces empêchements, l'impuissance, les autres qu'il ne désigne pas sont ceux qui relèvent des lois de chaque église particulière.

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I. L'impuissance. L'article 117 se lit comme suit: "L'impuissance naturelle ou accidentelle, existant lors du mariage, le "rend nul, mais dans le cas où elle est apparente et manifeste.

"Cette nullité ne peut être invoquée que par la partie même " avec qui l'impuissant a contracté; elle n'y est plus recevable si "elle a laissé passer trois ans sans se plaindre."

Cette cause de nullité n'est pas reconnue par le code Napoléon, on a trouvé que la preuve en était difficile et scandaleuse. On ne l'admet, dans la doctrine, que lorsque l'un des conjoints a ignoré l'impuissance de l'autre, et son ignorance constitue alors une erreur sur la personne. A ce titre, la plupart des auteurs l'admettent comme motif de demander la nullité du mariage.

L'article 117 n'est que la reproduction de notre ancien droit, avec cette restriction que l'impuissance doit être apparente et manifeste et doit avoir existé lors du mariage. La procréation des enfants étant la fin principale du mariage, ceux qui y sont manifestement impropres ne peuvent contracter mariage.

Mais il faut que cette impuissance soit apparente et manifeste. Il faut donc qu'elle puisse se constater par la simple inspection de la personne. Il ne s'agit donc pas de la debilité de l'organe générateur, mais de son absence.

Deuxième condition, peu importe que l'impuissance soit naturelle ou accidentelle, elle doit avoir existé lors du mariage.

Une impuissance qui surviendrait subséquemment au mariage ne pourrait l'invalider pour l'avenir.

La nullité qui résulte de l'impuissance n'est que relative puisque le conjoint qui en souffre peut seul l'invoquer. Encore doit-il formuler sa plainte dans les trois ans ; il n'y est plus recevable dit notre article s'il a laissé passer trois ans sans s'en plaindre. On devra compter ces trois ans du jour de la célébration du mariage, à moins que des circonstances, telles que la séparation immédiatement après le mariage, ne doivent faire fixer le point de départ de cette prescription à une date subséquente. Nous trouvons trois arrêts sur cette question. Dans une cause de Lussier & Archambault (11 L. C. J., p. 53), la cour d'appel a jugé que, dans une action en nullité de mariage entre deux catholiques, fondée sur un empêchement d'impuissance, le tribunal civil ne peut pas prononcer la nullité du mariage avant qu'un décret de l'autorité ecclésiastique ait préalablement déclaré nul le sacrement. On y a également jugé que le terme de trois ans fixé par la loi pour intenter l'action en nullité de mariage pour cause d'impuissance n'est pas absolu.

Dans une autre cause, celle de Dorion & Laurent (17 L. C. J., p. 324), la même cour a jugé que si la preuve de l'impuissance est incomplète, l'épouse poursuivie doit se soumettre à l'examen de médecins experts et qu'à son refus de le faire, les causes invoquées dans l'action seront considérées pro confessis et le mariage cassé.

Enfin, dans la cause de Langevin v. Barette (4 R. L., p. 160), la cour supérieure a décidé qu'un mariage peut être déclaré nul dix-sept ans après sa célébration à cause d'impuissance existant lors du mariage, si les parties se sont séparées après sa célébration et ont depuis vécu séparément, et aussi lorsque la partie défenderesse a résidé, depuis cette séparation, en pays étranger. L'autorité ecclésiastique doit d'abord prononcer la nullité du mariage.

II. Autres empêchements qui résultent des lois des différentes églises. Le code civil a indiqué les principaux empêchements au mariage. Ce sont ceux qui ont pour cause le défaut de consentement, l'impuissance, l'existence d'un mariage précédent, le défaut de consentement des père et mère ou du tuteur de l'un des conjoints, la parenté, l'affinité, etc. Mais il y a d'autres empêchements qui dépendent des lois qui obligent les membres des diverses églises. Sur ce sujet, les codificateurs ne pouvaient rien définir, mais il ont reconnu l'existence et la force obligatoire de ces lois par l'article 127 qui se lit comme suit :

"Les autres empêchements, admis d'après les différentes croyances religieuses, comme résultant de la parenté ou de l'affinité et d'autres causes, restent soumis aux règles suivies "jusqu'ici dans les différentes églises et sociétés religieuses.

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"Il en est de même quant au droit de dispenser de ces empêchements, lequel appartiendra tel que ci-devant, à ceux qui en "ont joui par le passé."

Il faudrait écrire presque un volume pour expliquer, non le sens de cet article qui est clair, mais les empêchements de mariage auxquels il fait allusion. Il s'agit des lois de chaque Église et de chaque société religieuse. Pour l'Église catholique, c'est le droit canon; pour l'Église d'Angleterre et l'Église d'Écosse, ce sont certaines dispositions du droit canon antérieures au concile de Trente et certains statuts; pour les juifs, c'est la loi de Moïse et le Talmud; pour d'autres sociétés religieuses, ce sont leurs coutumes. Il y aurait là un développement à faire qui dépasserait de beaucoup les bornes d'un ouvrage élémentaire.

Toutefois, m'aidant des ouvrages de spécialistes sur la matière, je vais tenter d'énumérer succinctement les empêchements reconnues par les principales sociétés religieuses.

I. Le mariage des catholiques. Parlant des catholiques, le juge Loranger fait l'énumération suivante des empêchements dirimants d'après le droit canon: "Les empêchements dirimants," dit-il, 'sont au nombre de quinze (a) qui proviennent 1° de l'erreur, "2° de la condition, 3° du vœu solennel, 4° de la parenté, 5o "du crime, 6o de la disparité du culte, 7o de la violence, 8° de "l'Ordre, 9° du lien d'un mariage existant, 10° de l'honnêteté "publique, 11° de l'âge, 12° de l'affinité, 13° de l'impuissance, "14° de la clandestinité et 15° du rapt de violence tant que la personne ravie n'est pas rendue à la liberté " (n° 160).

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Il énumère ensuite quatre empêchements prohibitifs 1° les fiançailles (b), 2° la défense de l'Eglise, 3° le temps où le mariage est célébré et 4° le vœu simple (c).

(a) Je soulignerai ceux qui ne sont pas mentionnés par le code. (b) Je souligne l'empêchement des fiançailles comme n'étant pas mentionné par le code, mais je dois faire observer que le juge Loranger dit, n° 164, que l'article 62 a défendu de surseoir à la célébration du mariage pour cause d'opposition fondée sur une simple promesse de mariage, laissant intact l'empêchement des fiançailles. dans le cas où elles seraient valablement établies et n'auraient pas été légitimement dissoutes.

(c) On a réuni et expliqué les empêchements dirimants dans les vers suivants :

Error, conditio, votum, cognatio, crimen,

Cultús disparitas, vis, ordo, ligamen, honestas,

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Parlons maintenant des empêchements sur lesquels le code ne s'explique pas ou s'explique d'une manière insuffisante.

La condition. C'est un empêchement qui venait du droit romain et qui défendait le mariage d'une personne libre avec un esclave (a). Tout le monde étant libre dans la société moderne, il ne peut être question de cet empêchement.

Le vou solennel (b). — Il est certain que le vœu solennel forme un empêchement dirimant au mariage (c). Donc, la personne qui l'a prononcé ne peut se marier. Il y a plus, il annule un mariage déjà ratifié, ratum, mais non consommé, consummatum, mais il est sans effet sur la validité d'un mariage ratifié et consommé (Loranger, no 174) (d).

Etas, affinis, si forte coire nequibis,

Si parochi et duplicis desit præsentia testis,
Rapta si sit mulier, nec parti reddita tuta,

Hæc facienda vetant counubia, facta retractant.

J'emprunte cette citation au juge Loranger, no 159. Je trouve, cependant, une différonte version de ces vers dans la Théologie Morale du cardinal Gousset, t. II, no 785, et dans le Cours de droit canon de Mgr André, v° Empêchements de mariage. Dans cette version les troisième, quatrième et cinquième vers sont remplacés par les deux vers suivants :

Amens, affinis, si clandestinus et impos,
Si mulier sit rapta, loco nec reddita tuto.

Cette version ajoute un empêchement dirimant, la démence, amens. Il paraît retrancher celui de l'age, mais on le comprend sous ce même terme amens. (Gousset, t. II, n° 786).

On a aussi decrit les empêchements prohibitifs de la même manière :
Ecclesiæ vetitum, tempus, sponsalia, votum,
Impediunt fieri, permittant facta teneri,

Sponsalia sunt juris privati, cetera juris publici.

(a) Mgr André, loc. cit.

(b) Pour la définition du væru solennel et du vœu simple, voir Loranger, t. Ier, nos 169-197.

(c) Gousset, t. II, n° 807 Cet auteur enseigne que suivant l'opinion la plus probable le pape peut dispenser de cet empêchement,

(d) Je me sers ici des termes techniques du droit canon. Suivant ce droit le mariage peut être légitime, legitimum, ratifié, ratum, et consommé, consummatum. Par mariage légitime, on entend" celui qui est contracté suivant le droit des gens, entre per"sonnes non baptisées, et par le consentement légitime des parties, "de sorte qu'il n'est pas ratifié par l'Eglise et est privé de la dignité de sacrement" (Loranger, no 127). Le mariage ratifié est celui qui est contracté suivant les lois de l'Eglise et consacré par le sacrement, mais qui n'a pas été consommé, et le mariage consommé est celui qui a été suivi du commerce charnel.

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La parenté et l'affinite. Il est question de cet empêchement dans le code civil, mais le législateur ne parle que de la ligne directe, et de la ligne collatérale en ce qui concerne les mariages entre frère et sœur, légitimes et naturels, et alliés au même degré, aussi légitimes ou naturels, et les mariages entre oncle et nièce, tante et neveu. Le droit canon va plus loin et défend les mariages dans la ligne collatérale jusqu'à et compris le quatrième degré de consanguinité (a). Cet empêchement étant dirimant, annule le mariage contracté entre parents ou affins légitimes jusqu'à ce degré prohibé. L'affinité illégitime ne constitue un empêchement que jusqu'au deuxième degré et cela même lorsque cette affinité résulte d'un mariage nul, suivi du commerce charnel, mais contracté de bonne foi. En ligne collatérale, on peut dispenser de cet empêchement, mais pas entre frère et sœur (Gousset, nos 815-816).

Il y a en outre la parenté spirituelle qui existe entre le parrain ou la marraine et le baptisé, entre le baptisant et le baptisé, entre le baptisant et les père et mère du baptisé, entre le parrain et la marraine d'un côté et les père et mère du baptisé (Gousset, n° 811). La confirmation crée également une parenté spirituelle entre celui qui confirme, celui qui est confirmé, ses père et mère et celui qui le tient.

Le crime. Cet empêchement, qui est susceptible de dispense, tire son origine de l'adultère seul ou de l'homicide seul, ou de l'homicide et de l'adultère réunis. Pour que l'adultère seul produise un empêchement, il faut qu'il soit formel, c'est-à-dire que celui qui le commet avec une personne mariée, sache que cette personne est mariée; il faut aussi qu'il soit consommé. Si le ma

(a) Il faut observer que le droit canon, à la différence du code civil (art. 618), ne compte, en ligne collatérale, les degrés de parenté que d'un seul côté. Ces degrés sont égaux quand un égal nombre de générations sépare les parents de l'ancêtre commun, inégaux, quand ce nombre est inégal ; alors on part du descendant le plus éloigné et on remonte en comptant un degré par génération, jusqu'à l'ancêtre commun. Ainsi le frère et la soeur sont au premier degré de consanguinité, l'oncle et la nièce au deuxième degré, des cousins germains sont également au deuxième degré, des cousins issus de germains, au troisième degré et les enfants de ces cousins, au quatrième degré. (Gousset, t. II, no 808-809). Le droit civil, au contraire, compte les degrés de parenté dans chaque ligne en remontant jusqu'à l'ancêtre commun (qu'on ne compte pas) dans une ligne, et en descendant de cet ancêtre dans l'autre ligne. Ainsi, suivant le droit civil, le frère et la sœur sont au deuxième degré, l'oncle et la nièce, au troisième degré, les cousins germains, au quatrième degré, les cousins issus de germains, au sixième degré, et les enfants de ces cousins au huitième degré.

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