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Bruxelles,

prince Auguste de Saxe-Cobourg Cohary; puis le corps diplomatique Les ministres et les membres des Chambres présents à Les magistrats, les autorités civiles, les états-majors de la garde civique et de l'armée, - Un bataillon d'infanterie de ligne, Un escadron de cavalerie, Les voitures de deuil.

Vingt-quatre sous-officiers pris par moitié dans la garde civique et dans l'armée marchaient aux côtés du char funèbre; ils prirent le cercueil à son arrivée au portail de l'église de Laeken.

Au moment de l'arrivée du cortège à l'église, les honneurs militaires lui furent rendus par le détachement de la garde civique et de l'infanterie de ligne qui occupaient les abords de l'église.

La grande nef de l'église était exclusivement réservée aux personnes composant le cortége.

La garde civique et la troupe de ligne formaient la haie.

Les dépouilles mortelles restèrent exposées pendant deux jours en chapelle ardente.

Les drapeaux et étendards étaient voilés et les tambours couverts de drap noir. Les musiques ne jouèrent que pendant la marche du convoi.

MM. les officiers portaient un crêpe au bras, à l'épée ou au sabre. MM. les fonctionnaires civils en costume portaient également un crêpe au bras et à l'épée.

Un service funèbre fut célébré le 17 octobre, à 11 heures, à Laeken. Après le service, la famille royale quitta l'église et l'inhumation eut lieu dans le caveau qui avait été préparé à cet effet.

Les présidents des chambres, les ministres, les officiers de la maison du Roi, les présidents et procureurs généraux des cours, des amis de la famille d'Orléans accompagnèrent le cercueil dans la chapelle.

On procéda en leur présence au scellement du cercueil dans un sépulcre de plomb et on l'introduisit dans le caveau. M. le secrétaire général du ministère de la justice rédigea le procès-verbal de l'inhumation.

Après ces opérations, on ferma le caveau par un mur, et les assistants se retirèrent.

Le sentiment religieux qui s'était manifesté avec une énergie pleine de foi pour obtenir la guérison de la Reine, ne s'affaiblit pas lorsque le pays connut la perte immense qu'il avait faite. Des services funèbres furent célébrés, sur l'invitation des évêques, dans toutes les églises du royaume pour le repos de l'âme de l'auguste princesse.

Le deuil officiel fut de six mois; la Cour le prit pour un an. Non

seulement ce deuil fut porté par les fonctionnaires, mais la société presque entière voulut, en le revêtant, s'associer à la douleur du Roi et donner, en même temps un nouveau témoignage d'affection à la Reine que la Belgique avait perdue.

Le service funèbre célébré à Laeken, le 17 octobre, était, à prement parler, un service de famille.

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Le service national n'eut lieu que le 24 octobre, à 11 heures, dans l'église SS. Michel et Gudule.

Son Éminence le Cardinal-Archevêque, chanta la sainte messe. Monseigneur l'Archevêque de Tyr, les Évêques de Bruges, de Gand, de Liége, de Namur et de Tournay, asssistaient au service. Leurs Grandeurs occupaient six prie-Dieu et six fauteuils, placés sur trois rangs, dans l'espace qui séparait l'autel du monument funèbre.

Une garde d'honneur entourait le catafalque qui avait été dressé au milieu de la croix de l'église ; elle était composée des généraux, des colonels et lieutenants-colonels qui avaient fait le service du corps à Laeken et des sous-officiers qui avaient porté le cercueil.

Les généraux faisaient face au choeur; les officiers supérieurs étaient placés deux à deux sur les côtés, les sous-officiers formaient la haie au pied du cénotaphe.

La garde d'honneur était sous les armes.

Pendant le service, le canon tirait de cinq en cinq minutes. Après l'évangile, le R. P. Deschamps, de l'Ordre du Saint-Rédempteur, placé derrière une tribune portée au pied de l'autel, prononça l'oraison funèbre; il s'est exprimé en ces termes :

Dominus dedit, Dominus abstulit.

Dieu nous l'a donnée, Dieu nous l'a ôtée. (LIB. JOB. I.)

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» C'est donc en vain que nos yeux la chercheront encore, cette douce Majesté que nous avons vue si souvent ici, humblement confondue dans l'assemblée de tous. Sa place y est vide! Oh! si jamais la parole humaine s'est sentie impuissante, c'est pour exprimer la plainte de nos cœurs.

» Comment traduire cette douleur intime, profonde et résignée de deux familles royales, cette affliction de tout un peuple qui éclate en sanglots et s'épanche en prières; ce deuil universel et cet amour filial que la multitude, accourue de tous les points du pays, apporte à celle qui était sa reine, sa mère et sa providence ici-bas? Toute voix est insuffisante en présence de ce spectacle, toute oraison funèbre est bien faible à côté de celle-là, prononcée par une nation entière, dans ce silence sublime que la douleur fait partout!

» Mais Dieu qui nous l'avait donnée et qui vient de nous la reprendre, ne

demande-t-il de nous que la douleur? Ne veut-il pas aussi la reconnaissance et nous faire peut-être mieux sentir, en nous l'enlevant, la grandeur du don qu'il nous avait fait? N'attend-il pas de nous un souvenir fidèle?

» Quand du haut de la chaire, nous contemplions ici, parmi les simples fidèles, la Reine volontairement descendue du trône, la louange s'arrêtait sur nos lèvres et nous nous taisions, vaincus par la puissance de l'humilité chrétienne. Mais maintenant que pour la trouver, nos yeux s'élèvent vers cet autre trône d'où l'on ne descend plus, nous laisserons échapper et se répandre une parole longtemps contenue, et nous dirons quel était ce don que Dieu nous avait fait dans celle qui fut pour la Belgique et pour l'Europe un gage de paix; » Pour le roi, pour les siens, pour ceux qui souffrent, un ange de consolation;

>> Pour tous, un puissant exemple.

» Dieu voulait sans doute que l'éloge fût plein et qu'il comprit la vie et la mort de LOUISE-MARIE-THÉRÈse-Charlotte-ISABELLE D'ORLEANS, première reine des Belges.

» Elle naquit à Palerme, le 3 avril 1812.

» Sa mère, la princesse Amélie des Deux-Siciles, sœur de l'impératrice d'Allemagne, des reines de Sardaigne et de Naples, avait épousé un fils de France, exilé de sa patrie par la force révolutionnaire; mais quand on est du sang royal, tout est grand, l'exil autant que la gloire, et les époux étaient dignes l'un de l'autre.

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L'épouse, celle qui devait être la mère de notre Reine, n'était pas seulement la sœur des Empereurs et des Rois, elle était encore petite-fille de MarieThérèse, si chère au cœur des Belges.

» Est-ce là un aimable jeu du hasard?

» Il n'y a pas de hasard, mes frères, sinon pour notre ignorance, et si quelque chose se joue dans la conduite des choses humaines, c'est la sagesse de Dieu. Ludens coram eo in orbe terrarum.

» Il faut entendre comment une des plus grandes voix du christianisme prend en pitié ceux qui, « mesurant le conseil du Très-Haut à leurs pensées, » ne le font Auteur que d'un certain ordre général d'où le reste se développe » comme il peut! comme s'il avait à notre manière des vues générales et con» fuses, et comme si la souveraine intelligence pouvait ne pas comprendre » dans ses desseins les choses particulières, qui seules subsistent en vérité. » N'en doutons pas, chrétiens, Dieu a ordonné dans les nations les familles » particulières dont elles sont composées, mais principalement celles qui doi>> vent gouverner les nations et en particulier dans ces familles, les personnes » par lesquelles elles doivent ou s'élever ou se soutenir ou s'abattre (1). »

>> C'est ainsi que Louise-Marie d'Orléans était destinée à servir d'appui à l'élévation du peuple belge, et à conquérir l'amour qu'il portait à Marie-Thérèse. » Aussi avec quels soins Dieu ne nous la préparait-il pas? Pouvait-il mieux lui donner une éducation de reine ou de mère du peuple qu'en la faisant grandir sous les yeux de Marie-Amélie, cette femme forte qui la mit au monde dans l'exil, et qui du fond d'un nouvel exil, est revenue la voir mourir !

(1) Bossuet.

Recueillant à la fin de la noble vie de sa fille le fruit de ces habitudes de simplicité, de force et de piété profonde qu'elle lui avait inspirées.

» Mais, si Dieu formait de loin une reine au peuple belge, de plus loin encore formait-il un peuple pour une dynastie que lui désirait Charles-Quint, qu'avait espérée Isabelle, et qui, par une autre Isabelle, devait être le don de l'avenir. Les lois qui président à la constitution des sociétés ressemblent à celles de la nature. Quand un arbre jette de profondes racines, c'est qu'il promet une forte croissance, et s'il pénètre bien avant dans l'obscurité, c'est pour être revêtu de splendeur. La Providence traite ainsi les nations. Elle les fait prendre racine dans l'obscurité de leur origine, les forme peu à peu dans l'humble progression de leur histoire, dessine dans leur caractère l'unité qui les distingue, leur donne dans leur foi une sève puissante, et, quand l'heure de leur élévation est venue, elle en indique elle-même les instruments et les soutiens. Je dis qu'elle indique elle-même ces soutiens, car nul n'a le pouvoir, ni la multitude, ni ses assemblées, de créer les faits antérieurs d'où ils résultent, ni la valeur qui leur appartient. Ce que l'homme peut, c'est de les reconnaître, de les acclamer et d'y correspondre. La Providence voulant donc couronner le long travail de la nationalité belge, et montrer ce qu'il y avait de sève dans le caractère et la fidélité de ce peuple, le glorifia tout à coup au milieu de trois grandes nations, qu'elle intéressa toutes les trois à sa jeune gloire par le choix du chef de sa nouvelle dynastie et le mariage du premier roi des Belges avec Louise-Marie-Thérèse de France.

» Le 9 août 1832, l'union bénie dans la chapelle de Compiègne révéla aux nations étonnées deux faits du premier ordre : l'alliance de la France et de l'Angleterre formée à cette occasion même, et qui fut alors la sauvegarde de la paix du monde ; la reconnaissance de la neutralité belge, qui fixa d'une manière rationnelle et durable les limites si longtemps incertaines et disputées des nations voisines. A ce double point de vue, la reine Louise-Marie fut donc un don de paix pour la Belgique et pour l'Europe. Et Dieu voulut que l'ange tutélaire de notre patrie fût la fille du grand roi, promoteur de la paix générale, parce que nulle n'était plus digne de la main du prince conciliateur dont le trône a la gloire d'être le lien de tous les autres!

à son

» Cette grande œuvre de l'indépendance de la Belgique avait paru, origine, hardie, téméraire aux Puissances qui ne l'acceptaient qu'avec doute et défiance. Mais le Roi et la Reine crurent en nous. Ils virent dans le cœur de Ja nation autre chose que ce qui fait les révolutions; ils y virent ce qui les termine, l'esprit de tradition et de foi, l'amour de la religion et de l'ordre. Ils confièrent à la Belgique leur dynastie, comme la Belgique leur confia la garde de sa nationalité, et ils nous consacrèrent un dévouement qu'aujourd'hui nous leur rendons.

» La Reine, associée à nos destinées, eut la joie de les voir grandir avec la renommée de sagesse de son royal époux. Dix-huit années de gouvernement intelligent et modérateur et de persévérente nationalisation, avaient assez soutenu les institutions et secondé les mœurs publiques, pour permettre à la Belgique d'être éprouvée!

» La première épreuve fut terrible, la seconde est accablante!

» La première date de trois ans, à peine, quand un cri d'effroi se répandit

partout au bruit de la chute du trône dont l'absence reste encore le principe d'un ébranlement général, d'une agitation qui n'a pas cessé.

» La seconde est devant nous, et nous ne l'apercevons qu'au travers de nos larmes.

» Une noble tige se détache la première de l'arbre dynastique! elle est tombée doucement dans les bras du Roi, et cependant la secousse que ce grand cœur en éprouve est si forte, sa douleur et la nôtre si profondes, son expression si simple, si amère, si incomparable, que l'excès de notre affliction nous console, et que la communauté de notre peine devient une nouvelle preuve de l'union qui fait notre force, de l'indissoluble lien qui attache le peuple à son Roi.

» Qu'elle reste grande donc notre trop légitime douleur, mais qu'elle soit sans trouble et jamais semblable à celle qui n'espère plus! Qu'elle nourrisse, au contraire, par le souvenir de la Reine, de la fille de saint Louis, une double espérance au fond des cœurs, celle de la vie présente et celle de la vie future.

» De la vie présente aussi, car si les Puissances sont ébranlées, si le nœud qui nous y attachait semble s'être relâché à son tour par cette mort imprévue, si Dieu enfin, semble nous frapper après nous avoir bénis, il faut penser que c'est moins pour nous perdre que pour nous avertir.

» L'ordre troublé autour de nous peut se rétablir, la Reine revivra en vérité dans ses enfants que Dieu tient en réserve pour la conservation de son œuvre. — Et si elle n'est plus là pour être médiatrice de douceur entre les puissances du monde, elle est toujours vivante pour être médiatrice de grâce entre le ciel qui frappe et la terre qui a besoin de Dieu.

» Médiatrice de grâces! oh! que ce nom lui convient bien! N'a-t-elle pas eu, comme celle qui surtout et par-dessus tout a mérité ce nom, une vie de prières, d'amour, de courage et de douleurs? Elle qui était si digne et si grande devant les hommes, que la majesté lui semblait naturelle, tant elle était simple, était si recueillie devant les autels, que son attitude inspirait l'adoration pour Dieu et le respect pour elle!

» Les heureux témoins de sa vie intérieure savent que les préoccupations si nombreuses d'une Cour ne lui ont jamais fait négliger cet avertissement de l'Esprit-Saint: Avant d'aller à Dieu, prépare ton âme. Ils savent avec quelle constance elle l'a accompli jusqu'à la fin, et n'oublions jamais cette parole de sa dernière heure Suis-je assez préparée ?

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» Ange d'amour et de consolation autant que de prières, elle aimait fort tout ce que Dieu lui avait donné à aimer :

» Son père, aux côtés duquel elle brûlait d'être et se plaçait en effet quand la révolution, conspirant dans l'ombre, préparait au Roi une mort humainement inévitable;

» Sa mère, la plus dévouée et la plus éprouvée des mères, qui trouvait dans un royal enfant un cœur capable de répondre à un dévouement sans mesure et à des infortunes sans égales, un cœur d'une tendresse si invincible, que triomphant des distances, il s'épanchait tous les jours dans celui qui chaque jour aussi lui rendait épanchement pour épanchement.

» Ses frères, ses sœurs, toute cette grande et noble famille, modèle entre toutes pour la vie d'intimité, la vie d'intérieur que rien ne remplace (nous voudrions le dire assez haut pour être entendu de ceux qui l'oublient);

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