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d'aimer Dieu, & incapable de le haïr en luimême : Sentez bien la nobleffe de votre cœur, qui ne trouvant rien parmi les creatures d'affez bon pour le fatisfaire pleinement, ne peut trouver fon repos qu'en Dieu feul. Rapellez hardiment les amusemens les plus chers & les plus violens qui ont autrefois occupé ce cœur: & jugez de fens froid, s'ils n'étoient pas fi mêlez d'inquietude, de chagrin, d'ennui & d'amertume, que votre pauvre cœur n'y trouvoit que de la mifere.

Helas! notre cœur fe porte avec beau coup d'empreffement aux biens créez; perfuadé qu'il eft d'y trouver de quoi fatisfaire fes defirs: mais auffi tôt qu'il les a goûtez: il en voit l'impoffibilité. C'est que Dieu ne veut pas qu'il trouve fon repos en aucun lieu, non plus que la colombe fortie de l'Arche de Noé; afin qu'il retourne à fon Dieu, de qui il s'eft éloigné. Ah que l'excellence de notre coeur eft grande ! & pourquoi donc le retiendrions-nous contre fon gré, dans l'efclavage des créatures ?

mon ame, devez-vous dire, vous pouvez parfaitement connoître & aimer Dieu; pourquoi donc vous amufer à ce qui eft infi niment au-deffous? Vous pouvez pretendre à l'Eternité, pourquoi donc vous fixer à des momens paffagers? ce fut l'un des regrets de l'Enfant prodigue, qu'aiant pû vivre delicieusement à la table de fon Pere, il fe voioit reduit à manger les reftes des bêtes. Qmon ame tu és capable de poffeder Dieu;

Malheur à toi, fi tu te contentes de moins que ce que Dieu eft.

Elevez donc & excitez votre ame qui eft éternelle, à la contemplation & à la recherche de l'éternité, puis qu'elle en eft digne.

CHAPITRE XI.

Seconde Confideration, fur l'excellence des

Ca

Vertus.

Onfiderez que les vertus attachées à la devotion, peuvent feu es rendre votre cœur content en ce monde : admirez-en la beauté, & les comparez aux vices contraires. Quelle fuavité dans la patience, dans la douceur, dans l'humilité; en comparaifon de la vangeance, de la colere & du chagrin, de l'ambition & de l'arrogance ? dans la liberalité, dans la charité, dans la fobrieté; en comparaifon de l'avarice, de l'envie, & des defordres de l'intemperance? Les vertus ont cela d'admirable, que la pratique en laiffe à l'ame une confolation infiniment douce: au lieu que les vices la jettent dans un abbattement & une defolation tout-à-fait deplorables. Pourquoi done ne tâcherions-nous pas de nous procurer toute cette joie ?

Qui n'a qu'un vice, n'eft pas content; & qui en a plufieurs, eft mécontent: Mais qui a peu de vertus, en reçoit deja de la joie ; & fon contentement croît à proportion qu'il

devient plus vertueux. O vie Devote, que tu és belle, douce, & agreable! Tu adoucis les afflictions; & tu donnes de la fuavité aux confolations: fans toi, le bien eft le mal, & les plaifirs ne caufent que de l'inquiétude, du trouble, & de l'abbattement. Ah! qui te connoîtroit affez pourroit bien dire avec la Samaritaine: Seigneur donnezmoi cette eau: Domine da mihi hanc aquam ; afpiration fort ordinaire à la Bienheureufe Mere Therefe, & à fainte Catherine de Genes, quoi que pour differens fujets.

CHAPITRE XII.

Troifiéme Confideration, fur l'exemple des Saints.

Onfiderez l'exemple des Saints de tout

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n'ont-ils pas fait pour aimer Dieu avec un entier devouement? regardez les Martyrs inébranlables en leurs refolutions: quels tourmens n'ont ils pas foufferts, plûtôt que d'en rien relâcher ? voiez ces Perfonnes fi belles & fi floriffantes, l'ornement du fexe devot, plus blanches que les lis par leur pureté, & plus vermeilles que la rose par leur charité : les unes à douze ans, à treize, à quinze; les autres à vingt & à vingt-cinq, ont enduré plufieurs Martyrs, plutôt que de changer de refolution, non feulement fur la foi, mais même fur la devotion; foit

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à l'égard de la virginité, ou du fervice des pauvres affligez; foit à l'égard de la confolation de ceux qu'on conduifoit au fupplice, ou de la fepulture des morts. O Dieu quelle conftance a fait paroître ce fexe fragile en ces occafions!

Regardez tant de faints Confeffeurs : avec quelle force d'efprit ont-ils meprifé le monde! Combien leur fermeté a-t-elle été invincible! rien n'a jamais pu l'ébranler : ils ont pris leur parti fans referve, & l'ont foutenu fans exception. Mon Dieu ! Que n'a pas dit faint Auguftin de fa fainte mere! avec qu'elle conftance fuivit elle fon deffein de fervir Dieu fidellement, dans le maria& dans la viduité ? & combien de traverfes d'obstacles, & d'accidens fainte Paule la chere fille de faint Jerome n'eut-elle pas à foûtenir & à combattre, comme nous l'ap prenons de lui? Mais que ne devons nous pas faire, fur de fi excellens modèles ? les Saints étoient ce que nous fommes ; ils faifoient tout pour le même Dieu que nous adorons; & ils travailloient pour aquerir les mêmes vertus: pourquoi donc n'en ferons-nous pas autant dans notre condition, & felon notre vocation; pour foûtenir la fainte proteftation, que nous avons faite d'être à Dieu ?

CHAPITRE XIII.

Quatrième Confideration, fur l'amour de JefusChrift pour nous.

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&

Onfiderez l'amour avec lequel JefusChrift Notre-Seigneur a tant fouffert en ce monde, & particulierement au Jardin des Oliviers, & fur le Calvaire : Cet amour nous regardoit; & obtenoit de Dieu le Pere par tant de peines & de travaux, les bonnes refolutions & proteftations que votre cœur a faites; & de plus les graces neceffaires pour les nourrir pour les fortifier pour les accomplir. O faintes refolutions que vous étes precieufes; puis que vous étes les fruits de la paffion de mon Sauveur !O combien mon ame vous doit-elle cherir puis que vous avez couté fi cher à mon Je fus! Helas 6 Sauveur de mon ame vous mourûtes, pour me meriter la grace de les faire; faites moi la grace, que je meure plûtôt que de les perdre.

Penfez y bien, Philothée : Il est certain que le cœur de notre cher Jefus attaché à la Croix, confideroit le vôtre, qu'il l'aimoit, & que par cet amour il lui obtenoit tous les biens que vous avez eus & que vous aurez jamais Oui, Philothée nous pouvons dire comme Jeremie: O Seigneur avant que je fulle, vous me regardiez, & m'appelliez par mon nom. N'en doutons pas le Divin

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