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Jefus qui nous enfanta fur fa Croix, nous portoit tous en fon cœur, comme une mere porte fon enfant dans fes entrailles: fa divine bonté nous y prepara tous les moiens generaux & particuliers de notre falut, tous les attraits, & toutes les graces dont elle fe fert maintenant, pour conduire nos ames à la perfection: femblable à une bonne mère, qui prepare à l'enfant qu'elle porte, tout ce qui doit lui être neceffaire pour le conferver après fa naiffance.

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Ah mon Dieu! que nous devrions graver ceci profondement en notre memoire! eftil poffible que j'aie été aimé, & fi doucement aimé de mon Sauveur; qu'il ait penfé à moi en particulier, & pour toutes les petites occafions dans lefquelles il m'a depuis attiré à lui? & combien donc devons-nous aimer, cherir, & emploier tout cela utilement? ceci eft bien doux: le cœur fi tendre de Jefus penfoit à Philothée, l'airnoit, & lui procuroit mille moiens de falut; comme s'il n'y eût pas eu d'autre ame au monde à qui il eût penfé: de même que le Soleil éclairant un feul endroit de la terre, ne l'éclaire pas moins, que s'il ne repandoit fa lumiere par tout ailleurs. Il m'a aimé, dit faint Paul, il s'eft donné pour moi : comme s'il difoit, pour moi feul, & tout autant que s'il n'eût rien fait pour le refte des hommes. C'eft, Philothée, ce qui doit être gravé en votre ame, pour bien cherir & nourrir votre refolution, qui a été fi precieuse au coeur du Sauveur.

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CHAPITRE XIV.

Cinquiéme Confideration, fur l'amour éternel de Dieu pour nous.

Onfiderez l'amour éternel que Dieu a eu pour vous: avant l'Incarnation & la mort de Jefns-Christ, fa divine Majefté vous aimoit infiniment, & vous predeftinoit à fon amour. Mais quand commença-t-il à vous aimer ? il commença quand il commença d'être Dieu: & quand commença-t-il d'être Dieu ? jamais: car il a toûjours été fans commencement & fans fin; & fon amour qui n'a jamais eu de commencement pour vous, vous a preparé de toute éternité les graces & les faveurs qu'il vous a faites. Il le dit pour nous tous par le Prophete Jeremie. Je t'ai aimé d'une charité perpetuelle, & je t'ai attiré mifericordieufement à moi il parle à vous auffi-bien qu'à tout autre ; vous devez donc à fon amour les bonnes refolutions que vous avez faites.

O Dieu! quelles refolutions donc, que celles-ci, que Dieu a eu prefentes à fa divine fageffe & à fa bonté, dès fon éternité! combien nous doivent-elles être cheres & precieufes que ne devrions-nous pas fouffrir, plûtôt que d'en rien perdre, quand même tout le monde devroit perir? car tout le monde ensemble ne vaut pas une ame;&

une ame ne vaut rien fans ces faintes refo

lutions.

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CHAPITRE X V.

Affections generales fur les Confiderations prece dentes, pour conclure tout cet exercice. Cheres refolutions, je vous regarde comme le bel arbre de Vie que mon Dieu a planté au milieu de mon cœur; & que mon Sauveur veut arrofer de fon Sang, pour lui faire porter de bons fruits: plutot mille morts, que de permettre qu'il foit deraciné de mon cœur. Non, ni la vanité, ni les delices de la vie, ni les richeffes, ni les afflictions, ne me feront pas changer de deffein.

Helas Seigneur! Je dois cet avantage à votre paternelle bonté, qui a choifi mon cœur toute méchante terre qu'il étoit, pour porter des fruits dignes de vous: combien y a-t-il d'ames qui n'ont pas eu ce bonheur & puis je jamais m'humilier affez fous la main de votre mifericorde?

O delicieufes & faintes refolutions! fi je vous conferve, vous me conferverez, fi vous vivez en mon ame, mon amevivra en vous: Subfiftez donc à jamais dans mon cœur, aimables refolutions, qui étes éternelles en la mifericorde de mon Dieu : foiez & vivez éternellement en moi, & que ja mais je ne vous abandonne,

Après ces affections, il faut particularifer ici les moiens de bien foutenir vos cheres refolutions: ce font principalement, le frequent ufage de l'Oraifon & des Sacremens, les bonnes œuvres, le foin de vous corriger des fautes que vous avez reconnuës, la fuitè des mauvaises occafions, & la fidelité à fuivre les avis qu'on vous donnera.

Enfin protestez vivement & mille fois, que vous perfevererez en vos refolutions; & comme fi vous teniez votre cœur entre vos mains, prefentez le à Dieu pour le lui confacrer & facrifier entierement; lui difant que vous le laiffez entre les fiennes, que vous ne voulez jamais le reprendre, & que vous fuivrez en tout & par tout fa fainte volonté. Priez Dieu qu'il vous renouvelle entierement, qu'il beniffe & qu'il foutienne par la force de fon efprit cette renovation : & invoquez fur cela la fainte Vierge, votre Ange, les Saints, faint Louis, & les

autres.

Allez dans cette difpofition d'un cœur ému par la grace, aux pieds de votre Pere fpirituel accufez-vous des fautes principales que vous aurez remarquées dans votre Confeffion generale; & aiant prononcé de vant lui & figné la même proteftation que vous fîtes alors recevez en l'abfolution avec les mêmes fentimens. Enfin allez unir votre cœur ainsi renouvellé à fon principe & à fon Sauveur, dans la participation du faint Sacrement de l'Euchariftie.

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CHAPITRE XVI.

Les Sentimens qu'il faut conferver après cet

exercice.

LE jour que vous aurez fait cette reno

vation, & les jours fuivans, vous de

vez prononcer fouvent de cœur & de bouthe ces ferventes paroles de faint Paul, de St. Augustin, & de fainte Catherine de Gennes non, je ne fuis plus à moi ; foit que je vive, foit que je meure, je fuis à mon Sauveur; je n'ai plus rien de moi, ni rien à moi c'eft Jefus qui vit en moi, & tout ca que je puis appeller mon bien, c'eft d'être à lui. O monde, vous étes toûjours vousmême & moi j'ai toujours été auffi moimême; mais dorefnavant je ne ferai plus moi-même. Non, nous ne ferons plus nousmêmes; car nous aurons le cœur changé: & le monde qui nous a trompez, fera trompé en nous; car ne s'appercevant de notre changement que peu à peu, il nous croira toûjours femblables à Efau, & il nous trouvera enfin femblables à Jacob.

Il faut que notre cœur conferve bien l'impreffion de cet exercice, & que nous paffions doucement de la meditation aux affaires & aux converfations; de peur que l'onction de nos bonnes refolutions ne fe perde tout d'un coup parce qu'il faut que notre ame en foit bien penetrée en toutes fes parties; mais Co

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