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Affûrément.

CLEANTE.

HARPAGON.

Il y a une petite difficulté. C'eft que j'ai peur qu'il n'y ait pas, avec elle, tout le bien qu'on pourroit prétendre.

Ah! Mon pere,

CLEANTE.

le bien n'eft pas confidérable, lorfqu'il eft

question d'épouser une honnête personne.

HARPAGON.

Pardonnez-moi, pardonnez-moi. Mais ce qu'il y a à dire, fi l'on n'y trouve pas tout le bien qu'on fouhaite, on peut tâcher de regagner cela fur autre chose.

c'eft que,

Cela s'entend.

CLEANTE.

HARPAGON.

Enfin, je fuis bien aise de vous voir dans mes fentimens ; car fon maintien honnête & fa douceur m'ont gagné l'ame, & je fuis réfolu de l'époufer, pourvû que j'y trouve quelque bien.

Hé?

CLEANTE.

HARPAGON.

Comment?

CLEANTE.

Vous êtes réfolu, dites-vous.

HARPAGON.

D'époufer Mariane.

Qui? Vous ? Vous?

CLEANTE.

HARPAGON.

Oui, moi, moi, moi. Que veut dire cela?

CLEANTE.

Il m'a pris tout à coup un éblouissement, & je me retire d'ici.

HARPAGON.

Cela ne fera rien. Allez vîte boire dans la cuisine un grand verre d'eau claire.

V

SCENE VI.

HARPAGON, ELISE.

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HARPAGON.

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Oilà de mes damoifeaux flouets, qui n'ont non plus de vigueur que des poules. C'est-là, ma fille, ce que j'ai réfolu pour moi. Quant à ton frere, je lui deftine une certaine veuve dont, ce matin, on m'eft venu parler; &, pour toi, je te donne au feigneur Anfelme.

Au feigneur Anfelme?

ELISE.

HARPAGON.

Oui, un homme mur, prudent & fage, qui n'a pas plus de cinquante ans, & dont on vante les grands biens.

ELISE faifant la révérence.

Je ne veux point me marier, mon pere, s'il vous plaît.

HARPAGON contrefaifant Elife.

Et moi, ma petite fille ma mie, je veux que vous vous ma

riiez, s'il vous plaît.

ELISE faifant encore la révérence.

Je vous demande pardon, mon pere.

HARPAGON contrefaifant Elife.

Je vous demande pardon, ma fille.

ELISE.

Je fuis très-humble fervante au feigneur Anfelme; mais, [faifant encore la révérence.]

avec votre permiffion, je ne l'épouserai point.

HARPAGON.

Je suis votre très-humble valet; mais, [contrefaifant Elife.] avec votre permission, vous l'épouserez dès ce soir.

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ELISE faifant encore la révérence.

Cela ne fera pas, mon pere.

HARPAGON contrefaifant encore Elife.

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Si, vous dis-je.

HARPAGON.

ELISE.

C'est une chofe où vous ne me réduirez point.

HARPAGON.

C'est une chofe où je te réduirai.

ELISE.

Je me tuerai plûtôt, que d'époufer un tel mari.

HARPAGON.

Tu ne te tueras point, & tu l'épouferas. Mais voyez quelle audace! A-t-on jamais vû une fille parler de la forte à fon pere?

ELISE.

Mais a-t-on jamais vu un pere marier fa fille de la forte?

HARPAGON.

C'est un parti où il n'y a rien à redire; & je gage que tout le monde approuvera mon choix.

ELISE.

Et moi, je gage-qu'il ne sçauroit être approuvé d'aucune perfonne raisonnable.

HARPAGON appercevant Valére de loin.

Voilà Valére. Veux-tu qu'entre nous deux nous le faffions juge de cette affaire?

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Ci, Valére. Nous t'avons élû pour nous dire qui a rai—

IC

ma

fon, de ma fille, ou de moi.

VALERE.

C'est vous, monfieur, fans contredit.

HARPAGON.

Sçais-tu bien de quoi nous parlons ?

VALERE.

Non. Mais vous ne fçauriez avoir tort, & vous êtes toute raifon.

HARPAGON.

Je veux ce soir lui donner pour époux un homme auffi riche que fage; & la coquine me dit au néz, qu'elle fe moque de le prendre. Que dis-tu de cela?

Ce que j'en dis?

VALERE.

HARPAGON.

Oui.

VALERE.

Hé, hé.

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