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L'occupation de cette place n'ayant jamais eu, et, d'après les sentiments de sincère dévouement que la cour d'Autriche porte au Saint-Siége, ne pouvant jamais avoir d'autre caractère que celui d'une prudente défensive, les instructions données à tous les commandants des troupes autrichiennes. leur ont toujours prescrit de borner l'application des règlements militaires, imposés à toute garnison quelconque, aux environs immédiats des parties occupées par les troupes impériales. Le passage suivant, extrait de la note de S. Ém. le cardinal secrétaire d'État, du 9 août 1847, en fournit la preuve: (Suit un passage en italien de cette dépêche.)

Il est dans les intérêts du gouvernement romain, autant que dans ceux de la cour impériale et de la population de la ville de Ferrare elle-même, que le service de cette place se fasse avec ordre et régularité. Le danger que les fauteurs de désordre ont fait courir à M. le capitaine Jankowich, et auquel il n'a été soustrait que parce qu'il lui a été possible de recevoir l'appui d'une patrouille, prouve combien le service de patrouilles, qui est prescrit par les règlements militaires, est nécessaire pour le maintien de l'ordre.

L'empereur, ne pouvant regarder la protestation faite par S. Ém. le cardinal-légat, à Ferrare, comme fondée sur un droit; trouvant, au contraire, dans les dernières manifestations qui ont eu lieu à Ferrare des motifs de plus pour la garnison de ne manquer à aucune des règles de prudence qu'il est de son devoir d'observer, dans son intérêt comme dans celui des habitants, charge le soussigné de faire connaître à S. Ém. M. le cardinal secrétaire d'État que M. le maréchal comte de Radetzki, coinmandant général des troupes de S. M. I. et R. dans le royaume lombardo-vénitien, a l'ordre de maintenir la garnison de Ferrare dans les droits qui lui compètent, et dont l'exercice est, au surplus, devenu militairement indispensable à sa sûreté.

Si la cour impériale, qui ne voudrait avoir à entretenir avec la cour de Rome que les relations les plus intimes, si nécessaires à la prospérité des deux États, déplore le fond de cette question, le cabinet de Vienne ne peut, de son côté, que regretter la forme insolite donnée à la protestation faite par S. Ém. le cardinal-légat. Ce n'est pas par-devant notaire que peuvent se traiter dignement

et utilement les affaires entre les gouvernements; le cabinet de Vienne doit donc se prémunir contre l'introduction d'une pareille forme.

Relativement à la communication faite au corps diplomatique résidant auprès du Saint-Siége, le soussigné est chargé de faire connaître à S. Ém. le cardinal secrétaire d'État qu'elle place le cabinet de Vienne dans la nécessité de communiquer aux cabinets qui y ont droit l'acte de protestation qui lui a été adressé et la réponse qu'il y a faite.

Le soussigné saisit cette occasion, etc.

Lutzow.

Lettres diplomatiques.

Les lettres diplomatiques ont le même objet que les notes dont nous venons de nous occuper; elles n'en diffèrent que par la forme, plus libre et toute épistolaire. Le rédacteur y parle à la première personne; la date et le lieu d'où elles sont écrites se placent en tête de l'office, que termine, selon le rang du destinataire, la formule de courtoisie d'usage, suivie de la signature.

LETTRES DIPLOMATIQUES.

Lettre du ministre des affaires étrangères d'Espagne au chancelier de Suède, touchant la prise de deux frégates espagnoles. (1800.)

Monsieur,

Le roi mon maître a vu avec la plus vive indignation, par un rapport que le consul de S. M. Suédoise à Barcelone a remis au capitaine-général de la Catalogne, contenant la déclaration du capitaine Rudbardt de la galiote suédoise la Hoffnung, que, le 4 septembre dernier, dans l'après-midi, deux vaisseaux et une

frégate anglaise ont forcé ledit capitaine, après avoir examiné ses papiers et les avoir trouvés en règle, de prendre à son bord des officiers anglais et un nombre considérable de marins, et de se laisser remorquer à l'entrée de la nuit par plusieurs chaloupes anglaises jusque sur la rade de Barcelone et sous le canon de ses batteries; après quoi les Anglais, ayant réduit le capitaine et son équipage au silence, en lui tenant le pistolet sur la poitrine, se sont emparés du gouvernail, et ont fait, à neuf heures du soir, montés sur ledit bâtiment et sur les chaloupes qui l'environnaient, une attaque contre deux frégates sous pavillon espagnol qui s'y trouvaient à l'ancre, lesquelles n'ayant pu soupçonner que ce bâtiment ami et neutre recélait des ennemis à son bord, et servait ainsi à l'attaque la plus traîtreuse, ont été brusquement forcés de se rendre.

On se réfère, pour les autres particularités et les violences exercées par les Anglais sur le bâtiment suédois, à la déclaration du capitaine qui est ci-jointe.

Le roi mon maître a dû considérer cet événement comme intéressant les droits et blessant les intérêts de toutes les puissances de l'Europe, sans en excepter l'Angleterre, et surtout comme l'insulte la plus grave faite au pavillon de S. M. Suédoise.

En effet, il est évident que les puissances belligérantes, en admettant les bâtiments neutres sur leurs rades et dans leurs ports, ont voulu restreindre le fléau de la guerre et ménager les relations commerciales de peuple à peuple.

En conséquence, tout ce qui tend à rendre cette navigation dangereuse préjudicie également aux droits et aux intérêts de toutes les nations.

Mais, dans le cas actuel, les droits et l'honneur du pavillon suédois ont été violés d'une manière si outrageante, qu'on en trouverait peu d'exemples dans l'histoire maritime de l'Europe.

L'attentat, s'il restait impuni, tendrait à brouiller deux nations amies, à anéantir leurs relations commerciales, et à faire considérer le pavillon qui le souffrirait comme un auxiliaire secret de la puissance ennemie, et forcerait ainsi l'Espagne à prendre les mesures que l'intérêt de ses vaisseaux et la sécurité de ses ports lui commanderaient.

Cependant le roi mon maître aime encore à croire que le capitaine suédois n'est coupable d'aucune connivence avec les Anglais, et qu'il n'a fait que céder au nombre et à la violence.

Dans cette supposition; le roi m'a ordonné de porter à la connaissance de S. M. Suédoise cette insulte grave commise contre son pavillon; et, ne doutant pas du ressentiment qu'elle éprouvera d'un procédé aussi révoltant de la part de quelques officiers de la marine britannique, il s'attend à ce que la cour de Stockholm fera auprès du ministère anglais les instances les plus sérieuses pour que les officiers qui se sont rendus coupables de ce méfait soient punis sévèrement, et que les deux frégates espagnoles, surprises et enlevées de la rade de Barcelone par une perfidie aussi contraire au droit des gens et aux règles de la guerre, soient immédiatement restituées avec leurs cargaisons, comme étant illégalement capturées à l'aide d'un vaisseau neutre, qui servait d'instrument aux assaillans.

S. M. C. se croit d'autant plus fondée à regarder le succès de cette réclamation comme assuré, que le gouvernement anglais lui-même ne saurait se dissimuler que ses ennemis, en suivant un pareil exemple, pourraient se servir également des bâtiments neutres pour infester ses rades et causer dans ses ports les plus grands dommages.

Mais si, contre toute attente, les démarches de S. M. Suédoise auprès de la cour de Londres, pour obtenir la réparation de l'injure faite à son pavillon ainsi que la restitution des deux frégates espagnoles, n'avaient pas le succès désiré avant la fin de cette année, S. M. se verrait obligée, quoiqu'avec regret, de prendre envers le pavillon suédois des mesures de précaution qui mettraient ses rades et ses ports à l'abri d'un abus aussi inique que celui que les Anglais viennent de commettre.

J'ai l'honneur d'être, avec une haute considération, etc.
Le chevalier d'Urquijo.

Saint-Ildephonse, le 17 septembre 1800.

Réponse du chancelier de Suède à la lettre précédente, remise au ministre d'Espagne à Stockholm. (1800.)

S. M. Suédoise a appris avec le plus vif déplaisir la violence que quelques officiers de la marine anglaise ont faite à un vaisseau marchand de la Poméranie Suédoise, pour le faire servir à une entreprise hostile contre deux frégates ancrées sur la rade de Barcelone. Parfaitement d'accord avec S. M. C. dans la manière d'envisager ce nouvel abus de la force, et le danger commun que de pareils exemples pourraient entraîner, tant pour les neutres que pour les belligérants eux-mêmes, S. M. en fera porter des plaintes à Londres, dues en même temps à ses liaisons amicales avec la cour d'Espagne et à la neutralité du pavillon.

Dans ces réclamations, qui auront pour premier objet les droits du pavillon et ceux des sujets de la Suède, S. M. C. trouvera juste, sans doute, que le roi se regarde comme partie principale. En suivant ses intérêts comme S. M. les entend elle n'oubliera certainement pas ceux de l'Espagne. La justice veut qu'on restitue ce qui a été pris illégalement S. M. y insistera toutefois sans garantir le succès de cette démarche. Elle fera en temps et lieu des communications confidentielles à la cour d'Espagne sur les dispositions dans lesquelles elle aura trouvé le gouvernement anglais à cet égard; mais une juste confiance de la part de S. M. C. lui laissera sans doute dans cette négociation le libre choix des formes et des moyens, la dispensant de toute époque fixe, comme de toute espèce de compte à rendre; l'Espagne, qui, comme le reste de l'Europe, connaît le long procès que la Suède fait plaider à Londres sur des restitutions qu'elle poursuit pour son propre compte, n'a pas lieu de se promettre une plus prompte justice dans une cause où il s'agit de restitutions à faire à des ennemis.

En général, S. M. Suédoise ne se considère nullement comme responsable d'un fait dont les causes lui sont absolument étrangères. D'après les rapports qui ont été faits à la cour d'Espagne, et d'après les circonstances qu'elle admet elle-même comme

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