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CHAPITRE LIV.

TRAITÉ DE PAIX DE LUNDEN, EN SCANIE, CONCLU LE 6 OCTOBRE 1679, ENTRE LE DANEMARCK ET LA SUÈDE.

L'am

Liaisons entre la France et la Suède. bition de Louis XIV impliqua les puissances du Nord dans une guerre qui éclata en 1675, et dura jusqu'en 1678.

Les liaisons de ce prince avec la Suède, celles qui subsistaient entre le Danemarck et les Étatsgénéraux, la jalousie que le grand électeur ressentait de voir l'embouchure de l'Oder entre les mains d'une puissance étrangère, et les dissensions qui subsistaient toujours entre les rois de Danemarck et les ducs de Holstein-Gottorp, concoururent à allumer le feu de cette guerre.

Les liaisons entre la France et la Suède datent de la guerre de trente ans, pendant laquelle ces deux États réunirent leurs efforts contre la prépondérance de la maison d'Autriche. Leur alliance renouvelée peu de temps avant la paix de Westphalie, par le traité qui fut conclu à Munster, le 25 avril 1647, avait expiré en 1630. Les guerres dans lesquelles Charles-Gustave entraîna la Suède, empêchèrent le renouvellement de cette alliance; mais nous avons vu quelle peine la France s'était donnée pour mettre fin à cet état de choses, et pour replacer la Suède dans une position où l'alliance entre les cours de Versailles et de Stockholm pût devenir utile et désirable à la première. A peine M. de Terlon, à Copenhague, et M. de Lombres, à Oliva, eurent-ils réussi à rétablir la paix dans le Nord, que fut conclue l'alliance de Fontainebleau.

Alliance de Fontainebleau, de 1661.-MM. de Lyonne et de Berni, et le comte Claude de Tott, envoyé du roi de Suède près la cour de France, la signèrent le 24 septembre 1661. Elle avait un double but, l'un commercial, qui nous est étranger, l'autre politique; c'est le maintien de la paix de Westphalie, celui de la liberté de la navigation et du commerce, dans l'Océan et la mer Baltique, et la sûreté des deux empires. Art. 10 et suiv.

Les deux puissances se promirent assistance réciproque dans les guerres qu'elles auraient à soutenir à cause de cette alliance ou à cause de la précédente guerre. Art. 14.

L'alliance devait durer dix ans. Art. 21 2. Par des articles secrets, la France promettait à la Suède un subside de 480,000 rixdales, pour 12,000 hommes que la cour de Stockholm s'obligeait à envoyer en Pologne pour soutenir l'élection au trône du duc d'Enghien ; et si le roi de Suède, dans le cours de cette guerre, était attaqué en Allemagne, ou dans ses États, le roi promettait à la Suède de lui payer, en six ans et en six payements, la somme de 1,600,000 rixdales.

Par un nouveau traité du 18 janvier 1662, il fut stipulé que le roi de Suède non-seulement ferait agir ses troupes contre les puissances étrangères, qui s'opposaient à l'élection du duc d'Enghien, mais même contre les Polonais confédérés 3.

I DU MONT, Corps dipl., tom. VI, part. I, p. 394. 2 Ibid., tom. VI, part. II, p. 381.

3 Nous ne pensons pas que ces articles secrets aient été connus avant M. DE FLASSAN, qui en donne le sommaire

dans son Histoire de la diplomatie française, vol. III, p. 261. Après quoi il continue ainsi, p. 262 : « L'élection du roi Casimir ayant eu lieu en Pologne avant que les Suédois se fussent armés, les deux traités précédents se

Alliance de Stockholm, de 1663. Le chevalier de Terlon conclut avec la Suède le 24 dé

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cembre 1662 4 janvier 1663, un autre traité par lequel l'alliance de Fontainebleau fut renouvelée, et la France s'engagea à payer à la Suède 400,000 rixdales de subsides, en quatre années, et cela indépendamment d'autres 100,000 qu'elle avait payés en 1662. MagnusGabriel de la Gardie, les sénateurs Magnus Hoff et Claude Tott, Mathias Biernklau et Édouard Ehrensteen, signèrent ce traité pour la Suède 1. Peu de jours auparavant, le 30 décembre 1662, il avait été signé aussi à Stockholm un traité de commerce, par lequel la France obtint le droit de former un dépôt de marchandises à Gothenbourg et Landscrona, et la Suède à Bordeaux et à la Rochelle 2.

L'alliance de Stockholm, dont le principal objet était le maintien de la paix de Westphalie, ne fut pas si intime qu'elle eût pu empêcher la France de contracter avec le Danemarck des engagements semblables. La bonne intelligence entre Louis XIV et Frédéric III avait un peu souffert par les événements qui avaient précédé la paix de Copenhague de 1660; néanmoins il n'y eut pas de rupture, et l'ambassadeur de France avait paru au congrès comme médiateur entre la Suède et le Danemarck. La paix étant parfaitement rétablie dans le Nord, Frédéric III envoya en France un ambassadeur extraordinaire; ce fut Annibal de Sehested. Il conclut, le 16 février 1663, avec MM. de Brienne, le Tellier, Lyonne et Colbert, un traité de com

merce dont l'art. 27 établit le principe que les marchandises neutres trouvées sous pavillon ennemi seront confisquées, tandis que Les marchandises ennemies trouvées sous pavillon neutre seront libres 3.

Le 3 août de la même année, ces ministres conclurent un traité d'alliance entre les deux États. Le roi de Danemarck s'engagea à coopérer avec le roi de France au maintien de la paix de Westphalie. On devait mettre des forces égales en campagne, mais la France fournissait au roi de Danemarck un subside pendant la durée de la guerre 4.

Par des articles secrets du même jour, il fut convenu que les deux rois ne mettraient point en campagne moins de 2,000 chevaux et de 6,000 hommes de pied; que le roi de France payerait 300,000 rixdales de subsides au roi de Danemarck; si celui-ci était attaqué par la Suède, le roi de France ne serait point tenu de lui donner des troupes ni de faire diversion dans les États du roi de Suède, mais seulement de lui payer 400,000 rixdales 5.

Louis XIV désirait que la Suède accédât aux articles patents du traité du 3 août 1663, et envoya, en 1664, M. de Terlon à Stockholm, pour négocier cette accession; mais les régents de Suède ne voulaient pas que le Danemarck prît part à la garantie de la paix de Westphalie, dont ce traité semblait le charger. Au commencement de 1666, Louis XIV envoya le marquis de Pomponne à Stockholm; sa mission avait un double objet, d'engager les Suédois à soutenir,

trouvèrent annulés; et le roi envoya en Suède le chevalier de Terlon pour engager Charles XI à s'en désister. La cour de France, voulant pourtant lui accorder quelque satisfaction, autorisa le chevalier de Terlon à conclure avec lui, le 24 décembre 1662, un traité, etc. » Il y a dans ce passage des choses que nous ne comprenons pas. Il était question, il est vrai, en 1660 et dans les années suivantes, du projet de porter le duc d'Enghien au trône de Pologne, mais seulement après la mort de Jean-Casimir, qui régnait depuis 1648. Lorsque ce prince abdiqua en 1668, le grand Condé fut un des compétiteurs au trône, mais il n'y eut en 1661 aucune élection; d'où il s'ensuit que, dans le traité du 16 janvier, il ne put avoir été question que d'une élection éventuelle. Par conséquent les Suédois ne pouvaient se trouver dans le cas de n'avoir pas achevé à temps leurs préparatifs pour empêcher une élection désagréable à la France. La manière dont M. de FLASSAN parle des regre's de Charles XI d'être obligé de

renoncer aux fonds que le traité de Fontainebleau lui avait fait espérer, nous paraît aussi un peu extraordinaire. Charles XI (qui, par une faute d'impression, est nommé dans ce passage Charles IX) était alors un enfant de six ans. Nous avons quelque peine à croire qu'immédiatement après la paix d'Oliva, les régents de la Suède aient donné les mains à des articles qui les menaçaient d'une nouvelle guerre ; mais nous ne pouvons prétendre que nos doutes balancent le témoignage positif de M. de FLASSAN, qui parle de ces articles comme quelqu'un qui les aurait lus. Nous aurions désiré toutefois qu'il les eût insérés textuellement dans son ouvrage.

1 DU MONT, Corps dipl., tom. VI, part. II, p. 448. 2 Ibid., p. 446.

3 Ibid., p. 436; SCHMAUSS, Corpus juris gentium academici, p. 765.

4 DU MONT, Corps dipl., tom. VI, part. II, p. 470. FLASSAN, . c., p. 296.

par un corps de troupes, l'élection du prince de Condé ou de son fils, comme successeur éventuel du roi de Pologne, et de les porter à rester neutres dans la guerre qui venait d'éclater entre la Grande-Bretagne et les États-généraux, et surtout de ne pas attaquer le Danemarck, l'allié des États-généraux. MM. de Pomponne et de Terlon réunirent en vain leurs efforts pour décider les régents à se mêler des affaires de la Pologne ; mais ils obtinrent la promesse formelle que la Suède n'attaquerait pas le Danemarck aussi longtemps qu'elle aurait la guerre avec les Russes. On donna cette forme à l'engagement de la Suède, parce que la guerre de Russie servait à celle-ci de prétexte pour se soustraire à ses obligations envers la GrandeBretagne.

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Alliance de Stockholm, de 1672. La France cessa de payer des subsides à la Suède à l'expiration du traité du 4 janvier 1663. Ce fut la raison qui engagea cette puissance à abandonner les intérêts de son ancienne alliée pour se lier, en 1668, avec les puissances maritimes et l'Espagne 2. Louis XIV, ayant conclu la paix d'Aixla-Chapelle, résolut de porter la guerre en Hollande. Il jugea important, dans cette occurrence, de mettre la Suède dans ses intérêts, et envoya M. de Pomponne à Stockholm, où il arriva le 8 août 1671. Il réussit, par divers moyens, à vaincre la défaveur dans laquelle le système français était en Suède, et à ébaucher un nouveau traité d'alliance qui était sur le point d'être signé lorsque ce ministre fut rappelé pour remplacer M. de Lyonne en qualité de secrétaire d'État pour le département des affaires étrangères. M. de Courtin, son successeur, mit la dernière main au traité et le signa à Stockholm, le 14 avril 1672, avec le comte Claude de Tott, Sten Bielke, Nicolas Brahé et Jean Gyllenstierna. Nous en avons donné ailleurs le sommaire 3. Ce traité obligea la Suède à agir avec 16,000 hommes, en Pomeranie, contre ceux qui assisteraient les Hollandais dans la guerre que Louis XIV se proposait de leur faire, c'est-à-dire contre le

Danemarck et l'électeur de Brandebourg. La France porta ses subsides à 600,000 rixdales par an 4.

Ce traité fut renouvelé par un traité conclu à Versailles le 25 avril 1675 5. M. de Pomponne et le comte Pierre Sparre le signèrent.

Liaisons entre le Danemarck et les États-généraux. Nous avons eu occasion de parler des services que les États-généraux, les fidèles alliés du Danemarck, depuis 1621, avaient rendus à ce royaume dans ses guerres contre la Suède. Les liaisons entre les deux États avaient été resserrées encore depuis la paix de Copenhague, par deux traités qui furent conclus à La Haye, l'un le février 1666, entre le Danemarck et les États-généraux seuls; l'autre, le 15 octobre de la même année, entre ces deux alliés, l'électeur de Brandebourg et les ducs de BrunswickLunebourg. Nous avons parlé ailleurs de ces traités; mais c'est ici le lieu d'en faire connaître plus particulièrement les dispositions.

Traité de La Haye, du 11 février 1666.- Le traité du 11 février est dirigé contre la GrandeBretagne, avec laquelle les Hollandais étaient alors en guerre, et dont le Danemarck avait quelques sujets de plainte. Le roi promet, par l'art. 1, de défendre, pendant la durée de cette guerre, aux vaisseaux anglais, l'entrée du Cattegat et des détroits de la Baltique. Pour donner force à cette défense, il tiendra dans les environs du Sund 14 vaisseaux de guerre. Art. 3.

Le roi emploiera à l'équipement de ces vaisseaux les 288,000 rixdales que, d'après les traités antérieurs, il devait payer annuellement à la république, à titre d'équivalent pour le secours de 6,000 hommes auquel il est obligé; et, en outre, les États-généraux lui payeront un subside de 600,000 rixdales par an. Art. 4.

Par l'art. 5, les États-généraux se réservent de pouvoir donner en déduction de ce subside huit vaisseaux de guerre de 42 canons.

Si, en haine de ce traité, une des parties était attaquée, l'autre l'assistera de toutes ses forces. Art. 9.

Cette circonstance confirme les doutes que nous avons manifestés, ci-dessus (note 3, page 141-142), à l'égard de la disposition où les régents de Suède doivent avoir été, en 1661, de se mêler des affaires intérieures de la Pologne.

Voyez vol. I, pages 139 et 140.

3 Vol. I, p. 342.

4 DU MONT, Corps dipl., tom. VI, part. II, p. 166. Ibid., tom. VII, part. I, p. 291.

6 Vol. I, page 130.

Le traité est suivi de plusieurs conventions particulières. Les États-généraux formaient différentes prétentions contre le Danemarck; ils réclamaient, entre autres, 5 millions de florins pour frais de leur flotte dans la dernière guerre entre le Danemarck et la Suède. Le roi, de son côté, formait d'autres réclamations pour non exécution des traités antérieurs. Une convention particulière, jointe au traité du 11 février 1666, annule toutes ces prétentions réciproques excepté deux, relatives à une obligation de 400,000 rixdales passée par le roi aux états de Hollande et de Westfrise, et à une créance de 120,000 rixdales de la ville d'Amsterdam. Le roi ayant demandé que les États- généraux se chargeassent de la première, et que la seconde fût compensée par quelques réclamations qu'il formait, on convint de s'en remettre pour ces deux objets à l'arbitrage du roi de

France.

Une seconde convention particulière décide un point ligitieux relatif au traité du 12 février 1647, à l'égard du péage de la charge de bois en Norwége.

La troisième convention règle les différends qui s'étaient élevés entre les deux compagnies des Indes. Le Danemarck renonce à la restitution des forts de Cabo-Corso, Tacquoray et Annemabao, en Guinée, dont les Hollandais avaient trouvé moyen de se mettre en possession; la compagnie danoise conservera Frédériksbourg et Christiansbourg jusqu'à l'expiration de l'octroi que le roi lui avait accordé et qui finit avec l'année 1679.

Une quatrième convention particulière explique l'art. 5 du traité principal.

La cinquième arrange un différend qui avait pour objet les prétentions des marchands et bateliers dont les marchandises avaient été déchargées à Copenhague, par ordre du gouvernement danois, en 1658 et 1659.

Enfin, le traité du 11 février 1666 est suivi de dix articles secrets relatifs à la jonction des flottes des deux États contre la Grande-Bretagne '.

1. Tous ces traités et articles sont signés par Paul de Klingenberg, et le résident du roi à La Haye, Pierre Carisius. Les deux Jean de Witt

et six autres députés les signèrent pour la république.

Quadruple alliance de La Haye, du 28 octobre 1666. La quadruple alliance qui fut signée le 28 octobre, est dirigée contre la Suède, quoique cette puissance, qui faisait alors assiéger Bremen pour forcer cette ville à reconnaître sa supériorité, n'y soit pas nommée. Les alliés promettent, par l'art. 3, d'aider à défendre et protéger les royaumes, principautés, comtés, pays, peuples, villes et forts situés en Europe et appartenant aux parties contractantes, contre tous ceux qui les attaqueront.

L'alliance durera six ans. Les secours à fournir par les parties contractantes sont déterminés ainsi qu'il suit par le roi de Danemarck et les États-généraux, chacun 1,800 hommes de cavalerie et 3,600 d'infanterie; par l'électeur de Brandebourg, 1,200 de cavalerie et 2,400 d'infanterie; par les ducs de Brunswick, 600 cavaliers et 1,200 fantassins. Art. 4.

L'art. 9 oblige les alliés à s'assister réciproquement avec toutes leurs forces, si le secours stipulé dans l'art. 4 n'est pas suffisant 2.

Liaisons de l'électeur de Brandebourg avec la France. Traité de Kenigsberg, de 1656. - Fre.. déric-Guillaume, électeur de Brandebourg, que nous verrons bientôt conduire son armée au

delà du Rhin pour protéger les États-généraux contre la France, était, depuis 1656, l'allié de cette puissance. M. de Lombres avait signé ce traité à Koenigsberg, le 24 février de cette année; le baron de Schwerin et le sieur de Hoverbeck Pavaient conclu pour le roi. On avait promis de s'assister réciproquement, savoir, si l'électeur était attaqué dans ses possessions en Empire, et le roi dans les provinces qui lui avaient été cédées par la paix de Westphalie. Dans le premier cas, le roi devait envoyer à l'électeur 5,000 hommes de pied et 1,200 chevaux; dans l'autre, l'électeur devait assister le roi de 2,400 hommes de pied et 600 chevaux 3. L'élec. teur était alors l'allié du roi de Suède; mais bientôt il contracta des liaisons intimes avec la maison d'Autriche, par l'assistance de laquelle il espérait expulser les Suédois de la Poméranie, ou au moins se rendre maître de l'embouchure de

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l'Oder. La France, qui était l'amie plutôt que l'alliée de la Suède, dissimula le déplaisir que lui causait cette union; mais après la paix d'Oliva, elle envoya à Berlin M. de Lessain, chargé de détacher l'électeur de l'Autriche, et de préparer les voies à l'élection du prince de Condé comme roi de Pologne. Frédéric-Guillaume ne jugea pas conforme à ses intérêts que le trône de Pologne fût occupé par un prince ayant de si puissants protecteurs; d'ailleurs ce n'était pas en se liant étroitement à l'allié de la Suède, que l'électeur pouvait espérer parvenir à son but, qui était d'éloigner cette puissance de ses possessions sur l'Oder.

Traité de Paris, de 1664. Il lui importait cependant de se ménager l'amitié de Louis XIV, dont l'intervention pouvait lui être utile pour obtenir enfin la remise de la ville d'Elbing. En conséquence il saisit la première occasion qui se présenta pour renouveler les négociations avec la cour de France. Turenne ayant dit au résident de Brandebourg, à Paris, que le roi était disposé à cultiver l'amitié de l'électeur, celui-ci qui craignait qu'à l'occasion de la guerre de Turquie, la France et la Suède n'envahissent l'Allemagne, envoya à Paris, au commencement de 1663, Christophe Gaspard, baron de Blumenthal, auquel on donna la qualité de député extraordinaire, parce qu'on n'avait pas encore pu s'accorder avec la cour de France sur le cérémonial avec lequel devait être reçu un plénipotentiaire électoral. Quoique cet agent fût bien reçu, il s'éleva cependant diverses difficultés qui retardèrent la conclusion d'une alliance, Les unes se rapportaient au fond, d'autres à la forme; et ces dernières ne furent pas les plus aisées à lever. L'électeur voulait maintenir expressément son alliance avec l'empereur, et cette demande était d'autant plus fondée, que Louis XIV se trouvait alors en paix avec la cour de Vienne. On exigeait que l'électeur s'engageât à soutenir à la diète et ailleurs les bonnes intentions du roi pour le maintien de la paix en Allemagne; qu'il entråt dans l'alliance du Rhin, et qu'il consentit à ce que le duc de Neubourg fût compris dans la paix d'Oliva. L'alliance du Rhin ayant pour objet ostensible le maintien de

la paix de Westphalie, avait été conclue, pour trois ans, à Mayence, le 15 août 1658, entre la France, les trois électeurs ecclésiastiques, le duc de Neubourg, le roi de Suède, comme duc de Bremen, la maison de Brunswick et le landgrave de Hesse, et renouvelée pour d'autres trois années le 13 août 1661, et une seconde fois le 25 janvier 1663. En 1661, les ducs de Würtemberg et de Deux-Ponts y avaient aussi accédé 2. L'électeur, auquel cette confédération déplaisait, parce qu'elle paraissait garantir au duc de Neubourg ses prétentions sur la succession de Clèves, ne refusa pas absolument d'y entrer, pourvu qu'on fit un changement dans la rédaction de quelques articles. La France ne voulut pas garantir à l'électeur l'article séparé de la paix d'Oliva, relatif à la possession de la ville d'Elbing3. Voilà pour le fond; quant à la forme, l'électeur voulait que le traité fût rédigé en latin, et non en français, et qu'on lui donnât le titre de serenitas electoralis, à la place de celui de celsitudo. Les ministres de Louis XIV ne voulurent, par contre, pas donner le titre d'évangéliques aux protestants. L'article de la langue fut arrangé par transaction; on convint de faire deux instruments du traité, l'un en français, l'autre en latin; le premier pour l'électeur, le second pour le roi. Après que toutes les difficultés eurent été aplanies, il s'en éleva une nouvelle lors de la signature. M. de Lyonne, en signant l'instrument français, affecta d'étendre tellement son nom et ses qualités, que le député de l'électeur ne put signer dans la même ligne. On allégua, de la part de la France, l'exemple d'un ministre de Trèves, qui avait placé son nom dans la seconde ligne, et le ministre de Frédéric-Guillaume fut obligé de céder sur ce point. Enfin le traité fut signé le 6 mars 1664.

Son contenu est conforme à celui de Koenigsberg de 1556, excepté les changements suivants. On ajouta à l'art. 3 cette clause : « Le roi et l'électeur déclarent, de bonne foi, qu'ils n'ont aucun traité avec quelque puissance ou prince, qui s'oppose à l'exécution entière et sincère des deux articles précédents. S'il existait une pareille alliance, ils y renoncent expressément, maintenant comme alors, et alors comme main

Voyez ci-dessus, page 80, où nous avons parlé de l'alliance de Berlin, du 9 février 1658.

2 Voy. DU MONT, Corps dipl., tom. VI, part. II, p. 239, 3 Voyez ci-dessus, page 115,

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