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Dans le cas où le chiffre de 50.000 tonneaux pour les navires à vapeur ne serait pas atteint, la différence sera reportée d'année en année.

Art. 25. Des règlements d'administration publique détermineront les mesures nécessaires à l'application de la présente loi (1).

XV.

LOI DU 10 AVRIL 1902, COMPLÉTANT L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 27 DÉCEMBRE 1890 (CONTRAT DE LOUAGE) (2).

Notice par M. HUBERT-VALLEROUX, avocat à la cour d'appel de Paris,
docteur en droit.

Cette loi, très courte et votée sans débat dans l'une et l'autre Chambre, est due à l'initiative d'un député, M. Raiberti. Voici comment il en expliquait l'utilité: « L'article 2 de la loi du 27 décembre 1890 a imposé aux compagnies et administrations de chemin de fer l'obligation de soumettre à l'homologation ministérielle, dans le délai d'un an, les statuts et règlements de leurs caisses de retraites et de secours.

<< Les compagnies ont bien déféré, dans le déli imparti par la loi, à l'obligation qui leur était ainsi imposée. Mais aucune sanction n'assure l'efficacité du pouvoir de contrôle ainsi attribué au ministre. Tout au plus celui-ci peut-il, par des négociations, s'efforcer d'amener les compagnies à apporter à leurs règlements de caisses de retraites les modifications qu'il juge nécessaires. En cas de désaccord final, la seule solution qu'il puisse adopter est le refus d'homologation, c'est-à-dire le maintien

(1) Nous donnons à la note 1, en tête du présent travail, l'indication des différents règlements et circulaires promulgués pour assurer l'exécution de la loi. Le décret du 9 septembre 1902 (J. Off. 10 septembre 1902) pris en exécution de l'article 25 ci-dessus, remplace le décret antérieur du 25 juillet 1893; comprenant 94 acticles, il est divisé comme il suit Titre I, Détermination de l'àge, de la jauge et du chargement des navires; Titre II, Prise de rang des navires; Titre III, Essais de vitesse; Titre IV, Évaluations des distances de port à port; Titre V, Obligations relatives au service postal; Titre VI, Constatations du droit aux primes de construction et de navigation et à la compensation d'armement, liquidation et paiement; Titre VII, Prélèvement sur les primes à la construction et à la navigation et sur les compensations d'armement; Titre VIII, Péages locaux; Titre IX, Dispositions diverses et transitoires.

(2) J. Off. du 12 avril 1902 : TRAVAUX PRÉPARATOIRES.

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· Chambre propos. Raiberti, doc. 1902, p. 306; rapport, p. 317; déclar. d'urgence et adoption, 20 mars 1902. Sénat rapport, doc. 1902, p. 400; déclaration d'urgence et adoption, 29 mars 1902.

du statu quo. Il y a là une lacune qu'il est nécessaire de combler, si l'on tient à assurer l'enlière exécution des intentions du législateur de 1890.

« La meilleure mesure à prendre en cas de différend entre le ministre et la compagnie, paraît être de laisser au conseil d'Etat le soin de statuer »>.

C'est la solution qui fut adoptée par le Parlement. On remarquera que ce complément nécessaire de la loi de 1890 est venu seulement au bout de onze ans et demi.

Article unique. Le paragraphe suivant est ajouté à l'article 2 de la loi du 27 décembre 1890:

<< Dans le cas où l'homologation, prévue par l'article 2 de la loi du 27 décembre 1890 sur le contrat de louage et les rapports entre les agents de chemins de fer et les compagnies, n'est accordée que sous réserve de certaines modifications ou additions non acceptées par la compagnie, il sera statué par un décret rendu sur avis conforme du conseil d'Etat. »>

XVI.

DÉCRET DU 31 MAI 1902, RELATIF AU PLAN D'ÉTUDES SECONDAIRES (1).

Notice par M. Henry TAUDIÈRE, professeur à la faculté libre de droit de Paris.

<< Les vieilles formules sont démodées, les vieux moules se brisent. Il faut à la société moderne autre chose que le plan d'études emprunté par Napoléon aux Jésuites ». Ainsi parlait un partisan de la réforme, on pourrait dire de la révolution, accomplie dans l'organisation des études secondaires par le décret du 31 mai 1902 et les arrêtés ministériels ou circulaires qui l'accompagnent.

« L'enseignement classique d'autrefois est fait pour une élite, une aristocratie, il forme « l'honnête homme », le lettré délicat, et non pas l'homme moderne; faute d'être suffisamment utilitaire, il ne satisfait plus aux besoins sociaux actuels. C'est une des causes de l'infériorité économique dans laquelle se trouve aujourd'hui la France, car il constitue une préparation à l'enseignement supérieur et aux carrières libérales, non à la vie pratique, aux fonctions productives, qui représen

(1) J. Off. du 2 juin 1902.

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tent 48 % de la population totale. Suivant le mot de Descartes, « on ne peut sans danger rester étranger aux choses de son temps. » — Du reste ses programmes et ses plans d'études sont trop rigides, aucune communication n'est possible entre eux; il devient indispensable de faire tomber les barrières artificielles qui séparent les degrés et les modes de l'enseignement secondaire, de telle sorte qu'un élève engagé tout jeune dans une direction puisse en changer sans perdre le fruit du travail déjà fait. Puis la durée des études est exagérée. Nombre d'élèves restent en route et ce sont pour eux autant d'années perdues. D'autres vont jusqu'au bout, qui n'obtiennent pas le titre de bachelier et constituent des déclassés, des non-valeurs. Les plus heureux s'aperçoivent souvent que le baccalauréat ne leur ouvre presqu'aucune porte; l'enseignement reçu leur est peu profitable pour gagner leur vie, car ils n'ont pas été préparés au genre d'existence qui les attendait, » Tel est le réquisitoire dressé contre l'enseignement secondaire qu'on donnait jusqu'ici en France. Et ces critiques ne datent pas d'hier. Pour leur donner satisfaction, après la création par M. Guizot, en 1833, de l'enseignement primaire supérieur, M. de Salvandy créa, en 1847, l'enseignement spécial, qui fut réorganisé, en 1865, par M, Duray et, en 1881, par M. Jules Ferry, puis transformé, en 1891, par M. Bourgeois en enseignement secondaire moderne. Mais, quoi qu'en pensât chacun de ces réformateurs, la solution qu'il avait imaginée n'a pas été définitive. Le malaise de l'enseignement secondaire a subsisté et même a pris un caractère de plus en plus aigu. Sous quelque forme qu'il fût donné, cet enseignement semblait toujours s'adapter mal aux conditions sociales nouvelles, en même temps que les difficultés d'une réforme vraiment utile s'accroissaient de jour en jour.

Deux fails nouveaux s'imposent en effet à l'attention des gouvernants. Le premier, c'est l'augmentation constante de la partie de la population française qui veut pour ses fils l'enseignement secondaire : on compte 200.000 familles en ce cas en 1900 au lieu de 20.000 en 1850. S'inspirant de sentiments respectables par certains côtés, mais cédant aussi à une pensée d'ambitieuse vanité et d'envie, la démocratie entend ne pas laisser à une élite le bénéfice des grades universitaires; ce baccalauréat, si peu utile dans l'existence, elle le réclame pour les siens comme pour les riches, au nom de l'égalité, L'État est même, dans une large mesure, (responsable de cet état d'esprit par la prodigalité avec laquelle il a distribué les bourses dans les lycées et collèges,

Mais, par ailleurs, ces familles, qui veulent ainsi l'instruction secondaire pour leurs enfants, s'en sont fait une conception à part elles demandent qu'elle soit utilitaire autant au moins que libérale et qu'elle Soit donnée dans le moins de temps et avec le moins de frais possible. Au besoin elles invoquent l'exemple des pays étrangers et se réclament des écoles reales supérieures d'Allemagne. Par surcroit, elles protestent contre tout surmenage, toute fatigue supplémentaire imposée à leurs descendants, et désirent une diminution non seulement des

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années de scolarité mais aussi du temps employé au travail pendant ces années-là.

En somme, un enseignement qui, dans l'ordre spéculatif, par la haute culture des esprits, maintienne l'excellence du génie national, mais qui en même temps prépare à la vie pratique et assure l'avenir économique du pays; un enseignement souplement approprié aux besoins de chacun et ayant, sous ses formes multiples, la même valeur extérieure, une même sanction, donnant les mêmes droits à tous ceux qui l'auront reçu; un enseignement démocratique également ouvert à tous, acquis à peu de frais et sans fatigues, en un laps de temps restreint; voilà l'idéal rêvé dont le gouvernement devait assurer la réalisation. Le problème était ardu et complexe et il n'est pas certain, en dépit de la confiance manifestée par ses auteurs, que la réforme de 1902 l'ait résolu d'une façon définitive. Dans tous les cas, l'élaboration en a été laborieuse et circonspecte; jamais on n'a procédé avec tant de précautions, en prenant tant de consultations.

Une grande commission avait été nommée, en 1899, par la Chambre des députés pour étudier quelques propositions relatives à l'enseignement secondaire. Elargissant son cadre sous l'inspiration de M. Ribot, son président, elle entreprit une vaste enquête sur la situation des études secondaires en France et le résultat de ses travaux, avec les conclusions par elle tirées, fut, quant aux plans d'études et aux programmes, résumé dans le rapport spécial de M. Couyba.

Elle proposait, à ce point de vue, une division tripartite de l'enseignement secondaire, la diversité des aptitudes et des besoins sociaux exigeant la diversité des types d'instruction. Il y aurait l'enseignement classique (avec latin obligatoire et grec facultatif); l'enseignement moderne (avec langues vivantes); l'enseignement pratique complémentaire ou annexe; dans tous, l'étude du français serait la base essentielle. De l'un à l'autre, les plus grandes facilités de communication seraient accordées. Comme les deux enseignements théoriques auraient une durée égale de six années, divisée en deux cycles égaux comme temps, et que l'enseignement moyen utilitaire durerait trois ans, la multifurcation s'opèrerait à la fin du premier cycle au gré des vocations ou des besoins; par là l'harmonie et la solidarité règneraient dans les collèges et il n'y aurait plus d'erreurs irréparables dans le choix fait originairement d'une espèce d'enseignement. Entre les deux cycles des enseignements classique et moderne se placerait un examen public et éliminatoire destiné à relever le niveau des études et à écarter les déclasssés; le baccalauréat serait, à la fin du second cycle, remplacé par un diplôme d'études secondaires supérieures. Suivaient certaines propositions relatives au programme de chaque enseignement dont les proviseurs, après avis des conseils des professeurs, devaient régler tout le détail. La commission formulait toutefois les desiderata suivants : il y aurait dans les programmes des matières obligatoires et des matières à option, telles, pour l'enseigne

ment classique, le grec dans le premier cycle, et, dans le second, les mathématiques, la physique, les littératures étrangères; le système des cours gradués d'une heure de durée au plus serait substitué à celui des classes; des cours communs pourraient être organisés pour les élèves des deux enseignements.

Avant d'élaborer son projet, la commission avait recueilli sur ces divers points les avis les plus divers, le rapport en fait foi. Elle essaya de plaire à tout le monde, ce qui est parfois le moyen de ne contenter personne. Dans tous les cas, le ministre ne se pressa pas de donner suite à ces propositions, car ce fut le 17 décembre 1900 seulement qu'il les soumit au conseil supérieur de l'instruction publique. Il insistait auprès du conseil sur la nécessité, tout en défendant et même en fortifiant les humanités, d'organiser un enseignement pratique solidement établi, puis de s'occuper beaucoup de l'éducation, car « la qualité du savoir importe beaucoup plus que la quantité. »

Au projet primitif, le conseil supérieur apporta des amendements et des corrections dont, en définitive, il ne fut pas tenu grand compte. Partant de la division déjà existante de l'enseignement secondaire en classique et moderne, il acceptait l'idée des deux cycles dans chaque ordre. Les études classiques devaient durer sept années et il n'y avait de changements et de diversité dans l'enseignement qu'à compter de la seconde. Les élèves optaient alors entre : 1o l'étude du grec; 2o des cours scientifiques préparant aux mathématiques élémentaires; 3° l'étude des langues vivantes. Il n'y avait pas d'examen à la fin du premier cycle. Dans l'enseignement moderne, le premier cycle, comportant des études d'un caractère général et pratique dont le programme pouvait varier suivant les régions, durait quatre ans et se terminait par un examen public avec diplôme d'études secondaires modernes du premier degré; le second, d'une durée de deux ans, terminé par un autre examen avec diplome d'études secondaires modernes du degré supérieur, était consacré à un enseignement d'ordre principalement scientifique.

Des négociations commencèrent alors entre la commission d'enquête et le ministre. L'accord se fit sur tous les points essentiels dans le courant de l'année 1901 et M. Ribot en prenait acte, au mois d'octobre, dans une lettre adressée au ministre. Mais la discussion ne fut pas inscrite de suite à l'ordre du jour de la Chambre. Cependant, le ministre avait amené la commission à céder sur les points demeurés encore indécis et il constata l'accord définitivement obtenu dans une lettre adressée en janvier 1902 à son président, en y joignant une série de propositions constituant le plan de réforme. M. Ribot rédigea aussitôt un rapport complémentaire dans lequel il présentait à la Chambre les propositions ministérielles et concluait à un projet de résolution ainsi conçu : « La Chambre des députés approuve les propositions du ministre de l'instruction publique concernant la réforme de l'enseignement secondaire ».

Au cours de la discussion du budget, déjà en retard, c'est-à-dire en un singulier moment pour traiter d'un tel sujet, la Chambre fut appelée à

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