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Une nouvelle taxe sur la valeur en capital des propriétés bâties et non bâties a été instituée en vertu d'une loi du 10 juillet 1902 dont nous croyons devoir reproduire le texte, car elle constitue une innovation grave en matière d'impôts directs.

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Art. 1er. La ville de Paris est autorisée à établir, à partir du 1er janvier 1902, par application de l'article 5 de la loi du 29 décembre 1897, une taxe sur la valeur en capital des propriétés bâties et non bâties situées sur son territoire.

Celle taxe ne pourra dépasser dix centièmes pour cent (0.10 %) de la valeur en capital, telle qu'elle résulte de l'évaluation effectuée en exécution des délibérations du conseil municipal des 21 octobre 1898 et 25 juin 1899, y compris, pour les usines, la valeur de l'outillage passible de la contribution foncière.

Elle sera imposée au nom des propriétaires ou usufruitiers.

Elle sera due, tant pour les propriétés non bâties passibles de l'impst foncier que pour les propriétés bâties assujetties à la contribution foncière et pour celles qui en sont temporairement affranchies, par application des articles 9 de la loi du 8 août 1890 et 9 de la loi du 30 novembre 1894.

Seront, toutefois, exemptées de la taxe les propriétés appartenant à la ville de Paris, au département de la Seine ou à l'Assistance publique. Il ne sera accordé aucun dégrèvement pour cause de vacance de maison ou de chômage d'usine.

Les propriétaires seront admis à réclamer contre l'évaluation de la valeur en capital attribuée à leurs immeubles, pendant six mois à partir de la publication du premier rôle dans lequel ces immeubles auront été imposés et pendant trois mois à partir de la publication des rôles des deux années suivantes, conformément à l'article 18 de la loi du 16 juillet 1901.

Passé ce délai, aucune réclamation ne sera recevable, sauf dans le cas de démolition totale ou partielle des maisons et usines, et dans le cas où les immeubles deviendraient non imposables à la contribution foncière.

Les constructions nouvelles, les reconstructions, les additions de constructions et, d'une manière générale, toutes les propriétés qui deviendront imposables seront cotisées par comparaison avec les autres propriétés de même nature déjà imposées.

Les évaluations de la valeur en capital des propriétés bâties et non bâties seront revisées en même temps que les évaluations du revenu net servant de base à la contribution foncière des propriétés bâties; elles pourront être contestées dans les mêmes conditions et dans les mêmes délais que les évaluations primitives.

Sont applicables à la taxe autorisée par la présente loi les dispositions des articles 7 de la loi du 31 décembre 1900 et 2 de la loi du 21 mars 1901.

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Art. 2. Le taux maximum des taxes que la ville de Paris est autorisée à établir sur la valeur locative des locaux d'habitation en vertu de la loi du 31 décembre 1900 et sur la valeur locative des locaux commerciaux et industriels en vertu de la loi du 21 mars 1901, est réduit, à partir du 1er janvier 1902, à cinquante centièmes pour cent (0.50 %) de la valeur locative.

Sont abrogées, à compter de la même date, les dispositions de la loi du 31 décembre 1900 qui ont autorisé la même ville à percevoir une taxe sur la valeur vénale des propriétés non bâties.

XX.

LOI DU 31 JUILLET 1902, PORTANT MODIFICATION DU DÉCRET-LOI DISCIPLINAIRE ET PÉNAL POUR LA MARINE MARCHANDE. (1)

Notice et notes par M. Henri FROMAGEOT, docteur en droit, avocat
à la cour d'appel de Paris.

La loi du 15 avril 1898 (2), qui a modifié dans un grand nombre de ses dispositions le décret-loi disciplinaire et pénal pour la marine marchande du 24 mars 1852, avait déjà atténué ou supprimé un certain nombre de peines. Le législateur avait cru devoir maintenir (art. 52, 53, 55) la peine de la boucle simple ou double appliquée soit aux fautes de discipline soit aux délits maritimes; il s'était borné à remplacer la pénalité unique de boucle aux pieds, antérieurement prescrite, par l'alternative laissée aux juges de la boucle simple ou de la boucle double, ce choix permettant de graduer la pénalité; en outre il avait fixé à cette peine une durée maxima (3).

Peu de temps après, par un décret du 31 janvier 1900 (4) le gouverne. ment vint abolir comme peine disciplinaire à bord des navires de la flotte la peine de la barre de justice, boucle double et la peine de la barre de justice, boucle simple, plus généralement connues toutes deux sous le nom de peine des fers. Il était évident que cette disposition, édictée par décret pour les navires de la flotte, était inapplicable aux navires du commerce; un jugement du tribunal maritime commercial

(1) J. Off. du 11 septembre 1902. TRAVAUX PRÉPARATOIRES.

:

Chambre exposé des motifs, doc. 1902 p. 90; rapport, ibid. p. 261; urgence, adoption sans discussion, 18 mars 1902; Sénat, urgence, adoption sans discussion, 3 juillet 1902.

(2) V. Ann lég. franç. t. XVIII, p. 234.

(3) V. Rapport de M. Félix Faure du 4 mars 1890, annexé à l'exposé des motifs (Chambre) de la loi du 15 avril 1898.

(4) V. Ann. lég. franç., t. XX, p. 33.

du Havre du 3 avril 1901, qui avait prononcé ladite peine de la boucle, ayant été de ce chef l'objet d'un pourvoi en cassation, la chambre criminelle ne put que rejeter le pourvoi (1) en faisant remarquer que le décret-loi disciplinaire ou pénal pour la marine marchande n'avait pas été modifié à cet égard.

Se conformant à la mesure prise pour la marine de guerre, la loi nouvelle a pour objet de supprimer en principe la peine des fers et de ne plus l'admettre qu'à titre tout à fait exceptionnel et lorsqu'elle constitue le seul moyen efficace pour assurer la sécurité de l'équipage ou du navire; le législateur en a, en outre, alténué la rigueur, en prévoyant expressément dans un paragraphe additionnel que les hommes punis de cette peine devront être autorisés à monter sur le pont deux fois par jour pendant une heure.

Cette réforme a été votée par les deux chambres sans discussion. Elle n'a pas été cependant sans soulever certaines critiques dans les milieux maritimes. On a fait observer que la situation n'était pas la même sur les navires de guerre que sur les navires de commerce, que sur les uns il était possible de remplacer la peine des fers par d'autres punitions (2), alors que sur les autres les fers étaient un moyen de répression indispensable non seulement envers l'équipage, mais aussi envers certains passagers, tels que les émigrants ou les passagers de pont; que notamment, en présence des ravages faits par l'alcoolisme dans les escales, c'était le seul moyen efficace et même humain d'empêcher l'homme ivre revenant à bord de nuire à autrui et à lui-même; on a ajouté qu'il était à craindre que la mesure de mansuétude prise par le législateur ait pour effet d'obliger en pratique les supérieurs à recourir, comme dans certaines marines étrangères, à des voies de fait brutales destinées à abrutir le délinquant et à le mettre hors d'état de nuire ou de se suicider (3).

D'autres a loucissements ont également été apportés par la loi nouvelle au régime disciplinaire et pénal de la marine marchande. Le fait pour un marin, se trouvant dans un port ou sur rade, de se servir momentanément d'un des canots du bord sans aucune intention mal

(1) Cass., Ch. crim. 7 juin 1901 (Gazette des tribunaux, 12 juin 1902) aff. Guénolo. La ligue pour la défense des droits de l'homme et du citoyen s'étant émue de cet arrêt, s'adressa au ministre de la marine; celui-ci, par lettre du 17 juillet 1901 (rapportée au Journal des Débats du 1er août 1901), répondit << qu'il était permis de penser que la suppression dans la marine de guerre de la peine de la boucle simple et de la boucle double conduirait la marine marchande à n'en plus faire usage », et, quoiqu'il en fût, annonçait le prochain dépôt d'un projet de loi; il ajoutait que, dès maiutenant, il adressait une circulaire aux autorités maritimes les invitant à prendre les mesures nécessaires pour que la peine en question ne fût plus appliquée.

(2) V. le décret du 24 mai 1900, Ann. lég. franç. t. XX, p. 33, concernant les peines disciplinaires applicables aux maîtres, quartier-maîtres et marins embarqués.

(3) V. Le Yacht, Journal de la marine, no 1er février 1902, p. 57.

veillante a paru ne constituer qu'une simple désobéissance et devoir rentrer à ce titre dans la catégorie des fautes de discipline et non plus des délits. Enfin, il a paru plus en rapport avec nos mœurs actuelles a'abaisser le maximum des peines de prison et de cachot applicables aux fautes de discipline.

Art. 1o. L'article 52 du décret-loi disciplinaire et pénal du 24 mars 1852 est modifié de la manière suivante en ce qui concerne les hommes de l'équipage:

« Pour les hommes de l'équipage;

« 1o La consigne à bord pendant huit jours au plus ;

« 2o Le retranchement de la ration de boisson fermentée, au plus pendant trois jours et à deux repas par jour ;

«< 3o La retenue d'un à dix jours de solde, si l'équipage est engagé au mois, et de deux à vingt francs (2 à 20 fr.), s'il est engagé à la part;

« 4o La prison pendant quatre (1) jours au plus.

5o Le cachot pendant deux (2) jours au plus.

« La peine du cachot peut être accompagnée du retranchement de la ration de boisson fermentée et, s'il s'agit d'un homme dangereux ou en prévention de crime, peut être prolongée aussi longtemps que la nécessité l'exige.

« Il pourra de plus être fait usage, à titre exceptionnel, dans les cas de force majeure constatés par une mention sur le livre de punitions et pour assurer la sécurité de l'équipage et du navire, de la boucle simple ou de la boucle double. »

Le même article est complété par l'adjonction d'un paragraphe ainsi conçu:

« Tout homme puni de la peine de la boucle simple ou double ou de celle du cachot, ainsi que tout officier ou passager puni des arrêts dans la chambre, doit être conduit sur le pont deux fois par jour, pendant une heure chaque fois.

Art. 2.

>>

L'article 33 du décret-loi du 24 mars 1852 est modifié ainsi qu'il suit :

Les peines que peut infliger le capitaine, maître ou patron, aux termes de l'article 7 du présent décret-loi, sont:

« 1° La consigne pendant huit jours;

<< 2o Le retranchement de la boisson fermentée pendant trois jours. >>

(1) Au lieu de huit jours. (2) Au lieu de cinq jours.

Art. 3.

L'article 55 du décret-loi du 24 mars 1852 est modifié

ainsi qu'il suit:

«Les peines applicables aux délits sont:

«<1° L'amende de seize à trois cents francs (16 à 300 fr.); «<2' La perte ou la suspension de la faculté de commander; « 3° L'emprisonnement pendant six jours au moins et deux ans au plus. >>

Art. 4. Le paragraphe 11 de l'article 58 du décret-loi du 24 mars 1852 est modifié ainsi qu'il suit:

(

« 11° L'emploi non autorisé, dans un port ou rade, sans perte, dégradation ou abandon, d'une embarcation du navire. »

Art. 5.

Le paragraphe 6 de l'article 60 du décret-loi du 24 mars 1852 est modifié ainsi qu'il suit:

«6° L'emploi, sans autorisation, d'une embarcation de navire. dans des conditions autres que celles prévues à l'article 58. »

XXI.

LOI DU 12 AOUT 1902, PORTANT MODIFICATION AUX LOIS DES 25 VENTOSE AN XI ET 21 JUIN 1843, RELATIVES AU NOTARIAT (1).

Notice par M. DEFRÉNOIS, avocat à la cour d'appel de Paris.

La loi du 25 ventôse an XI est considérée avec juste raison comme la charte du notariat. Jusqu'à nos jours, malgré les événements politiques si nombreux et si variés qui se sont produits depuis sa promulgation, nos législateurs n'avaient osé y porter aucune atteinte. Mais, en ces derniers temps, des déconfitures malheureusement trop nombreuses se sont produites dans le notariat. Déjà en 1890, les décrets sur le notariat avaient imposé une comptabilité aux notaires et avaient prescrit une surveillance plus étroite. Cette réforme n'empêcha pas des catastrophes nouvelles. Aussi le gouvernement considéra que d'importantes modifications de la loi de ventôse s'imposaient. «< Relever le niveau du notariat», tel est, porte l'exposé des motifs, le but de la nouvelle loi ; et pour y arriver, on a employé deux moyens : l'un consiste à supprimer

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(1) J. Off. du 14 août 1902. TRAVAUX PRÉPARATOIRES. Sénat exposé des motifs, doc. 1897, p. 336; rapport doc. 1898, p. 618; 1 délibération, 21 janvier et 7 février 1899; 2° délibération, 14 mars 1899. Chambre : exposé, doc. 1899, p. 995; rapport, doc. 1902, p. 340; adoption (urgence), 26 mars 1902. Sénat exposé, doc. 1902, p. 457, rapport, p. 458; adoption (urgence), 10 juillet 1902.

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