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les fantaisies, les caprices, l'idée de conserver sa beauté, l'embarras de la grossesse, celui d'une famille trop nombreuse, troublent la propagation de mille manières.

CHAPITRE II.

Des mariages.

L'obligation naturelle qu'a le père de nourrir ses enfants a fait établir le mariage, qui déclare celui qui doit remplir cette obligation. Les peuples1 dont parle Pomponius Mela ne le fixoient que par la ressemblance.

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Chez les peuples bien policés le père est celui que les lois, par la cérémonie du mariage, ont déclaré devoir être tel 3, parce qu'elles trouvent en lui la personne qu'elles cherchent.

Cette obligation, chez les animaux, est telle, que la mère peut ordinairement y suffire. Elle a beaucoup plus d'étendue chez les hommes : leurs enfants ont de la raison; mais elle ne leur vient que par degrés: il ne suffit pas de les nourrir, il faut encore les conduire : déja ils pourroient vivre,

et ils ne peuvent pas se gouverner.

Les Garamantes.

2 Liv. 1, chap. 111.

3 Pater est quem nuptiæ demonstrant.

Les conjonctions illicites contribuent peu à la propagation de l'espèce. Le père, qui a l'obligation naturelle de nourrir et d'élever les enfants, n'y est point fixé; et la mère, à qui l'obligation reste, trouve mille obstacles par la honte, les remords, la gêne de son sexe, la rigueur des lois : la plupart du temps elle manque de moyens.

Les femmes qui se sont soumises à une prostitution publique ne peuvent avoir la commodité d'élever leurs enfants. Les peines de cette éducation sont même incompatibles avec leur condition; et elles sont si corrompues qu'elles ne sauroient avoir la confiance de la loi.

Il suit de tout ceci que la continence publique est naturellement jointe à la propagation de l'espèce.

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CHAPITRE III.

De la condition des enfants.

C'est la raison qui dicte que, quand il y a un mariage, les enfants suivent la condition du père; et que, quand il n'y en a point, ils ne peuvent concerner que la mère 1.

1 C'est pour cela que, chez les nations qui ont des esclaves, 1 fant suit presque toujours la condition de la mère.

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CHAPITRE IV.

Des familles.

Il est presque reçu partout que la femme passe dans la famille du mari. Le contraire est, sans aucun inconvénient, établi à Formose 1, où le mari va former celle de la femme.

Cette loi, qui fixe la famille dans une suite de personnes du même sexe, contribue beaucoup, indépendamment des premiers motifs, à la propagation de l'espèce humaine. La famille est une sorte de propriété : un homme qui a des enfants du sexe qui ne la perpétue pas n'est jamais content qu'il n'en ait de celui qui la perpétue.

Les noms qui donnent aux hommes l'idée d'une chose qui semble ne devoir pas périr, sont très propres à inspirer à chaque famille le désir d'étendre sa durée. Il y a des peuples chez lesquels les noms distinguent les familles : il y en a où ils ne distinguent que les personnes; ce qui n'est pas si bien.

'Le P. Duhalde, tome 1, page 165.

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CHAPITRE V.

Des divers ordres de femmes légitimes.

Quelquefois les lois et la religion ont établi plusieurs sortes de conjonctions civiles; et cela est ainsi chez les mahométans, où il y a divers ordres de femmes, dont les enfants se reconnoissent par la naissance dans la maison, ou par des contrats civils, ou même par l'esclavage de la mère, et la reconnoissance subséquente du père.

Il seroit contre la raison que la loi flétrît dans les enfants ce qu'elle a approuvé dans le père: tous ces enfants y doivent donc succéder, à moins que quelque raison particulière ne s'y oppose, comme au Japon, où il n'y a que les enfants de la femme donnée par l'empereur qui succèdent. La politique y exige que les biens que l'empereur donne ne soient pas trop partagés, parce qu'ils sont soumis à un service, comme étoient autrefois nos fiefs.

Il y a des pays où une femme légitime jouit dans la maison, à peu près des honneurs qu'a dans nos climats une femme unique: là, les enfants des concubines sont censés appartenir à la première femme cela est ainsi établi à la Chine. Le respect filial', la cérémonie d'un deuil rigoureux, ne sont Le P. Duhalde, tome 11, page 124.

point dus à la mère naturelle, mais à cette mère que donne la loi.

A l'aide d'une telle fiction, il n'y a plus d'enfants bâtards; et dans les pays où cette fiction n'a pas lieu, on voit bien que la loi qui légitime les enfants des concubines est une loi forcée, car ce seroit le gros de la nation qui seroit flétri par la loi. Il n'est pas question non plus, dans ces pays, d'enfants adultérins. Les séparations des femmes, la clôture, les eunuques, les verroux, rendent la chose si difficile, que la loi la juge impossible. D'ailleurs le même glaive extermineroit la mère et l'enfant.

CHAPITRE VI.

Des bâtards dans les divers gouvernements.

On ne connoît donc guère les bâtards dans les pays où la polygamie est permise; on les connoît dans ceux où la loi d'une seule femme est établie. Il a fallu, dans ces pays, flétrir le concubinage; il a donc fallu flétrir les enfants qui en étoient nés.

Dans les républiques, où il est nécessaire que

'On distingue les femmes en grandes et petites, c'est-à-dire en légitimes ou non; mais il n'y a point une pareille distinction entre les enfants. C'est la grande doctrine de l'empire, est-il dit dans un ouvrage chinois sur la morale, traduit par le même père, page 140.

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