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ON n'a pas cru devoir fuivre l'ordre des anciennes éditions pour l'impreffion de la Princesse d'Élide. Cette pièce étoit confondue parmi tous les détails des Fêtes qui furent données à Versailles en 1664, depuis le 7 Mai, jufques & compris le 13 du même mois. Sans priver le public de ces détails qui peuvent être amusans & curieux, on s'eft contenté de mettre le tout dans un meilleur ordre. On a aussi changé le titre général de Plaisirs de l'Ifle enchantée, avec d'autant plus de raifon, que ce titre ne convient qu'aux trois premières journées, qui feules font comprises dans ce fujet; les quatre autres n'y ont aucun rapport, & on y a fubftitué celui de Fêtes de Versailles en 1664.

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AVERTISSEMENT

DE L'ÉDITEUR

SUR LA PRINCESSE D'ÉLIDE.

CETTE Comédie-Ballet en cinq actes, avec un Prologue & des Intermèdes, fut jouée pour la première fois à Versailles, le 8 Mai, & fur le Théâtre du Palais Royal, le 9 Octobre 1664

La fuperbe Fête que Louis XIV, dans fon nouveau Palais de Versailles, donna à la Reine, fa mère, & à Marie Thérèfe, fon époufe, fous le titre des Plaifirs de l'Ifle Enchantée, offrit pendant 7 jours tout ce que la magnificence & le bon goût du Prince, le génie & les talens de tous ceux qui le fervoient, pouvoient enfanter de plus merveilleux & de plus varié.

L'Italien Vigarani, un des plus ingénieux décorateurs & des plus furprenans machiniftes qu'on ait vu; le célèbre Lulli, qui annonça dans cette Fête les charmes de fa mélodie; le Président de Périgny, chargé des vers confacrés aux Éloges des Reines; Benferade, fi connu par fon double talent de lier la louange du perfonnage dramatique avec celle de l'acteur; Molière enfin, le célèbre Molière, qui fic les honneurs de la feconde journée par la Princee

d'Élide, & ceux de la fixième par un effai des trois premiers actes du Tartuffe; tout cela rendit cette Fête une des plus étonnantes que l'Europe ait ja

mais vues.

Louis XIV n'avoit donné à Molière que trèsde tems pour peu le fpectacle qu'il lui demandoit, & tous les fujets n'étant pas propres à des Fêtes auffi auguftes, notre auteur chercha des fecours ailleurs que dans fes propres idées.

de

Ce fut d'Agostino Moreto, auteur Espagnol trèseftimé, qu'il emprunta la Fable de la Princeffe d'Élide, & ce fut une galanterie fine de la part Molière, de préfenter à deux Reines, Espagnoles de naiffance, l'imitation d'un des meilleurs ouvrages du théâtre de leur nation.

Nous avons déjà dit que Molière étoit incapable d'une imitation fervile, & ce fut en homme de génie qu'il évita les fautes & qu'il augmenta les beautés de fon original. Cependant, il faut en convenir, le genre férieux & galant ne fut jamais bien propre au génie de Molière.

La pièce Efpagnole qui a pour titre El Defden con El Defden, dédain pour dédain, eft en trois actes, & Molière porta la fienne à cinq, pour en multiplier les divertiffemens.

Il fut fi preffé, qu'il ne put mettre en vers que le premier acte, & la moitié de la première fcène du fecond; le refte fut dialogué rapidement en profe,

& il y a quelques fcènes dans les derniers actes où l'on s'apperçoit que Molière écrivit avec une précipitation qui ne permet de traiter les chofes, ni avec l'étendue, ni avec la délicateffe qu'elles deman-t deroient.

M. Louis Riccoboni, dans fes Obfervations fur Molière, au chapitre de l'Imitation, s'étend beaucoup fur la façon ingénieufe dont Molière enchérit fur fon original. Nous croyons devoir y renvoyer le lecteur, pour n'être pas trop long fur un ouvrage qui ne nuifit point à la réputation de Molière, mais qui ne l'augmenta point.

Nous obferverons feulement, à l'égard du Prologue & des Intermèdes, que le génie le plus marqué ne difpenfe perfonne de tomber dans l'infipidité de ce genre, & que Molière, égal, à cet égard, à nos rimeurs lyriques, écrivit dans fon Prologue, que Dans l'âge où l'on eft aimable, Rien n'eft fi beau que d'aimer.

Et dans le cinquième Intermède, que

Quelque fort qu'on s'en défende,

Il y faut venir un jour,

Qu'il n'eft rien qui ne fe rende

Aux doux charmes de l'amour.

Ce font ces petites maximes plates dont un opéra ne peut fe garantir, qui donnèrent de l'humeur à Defpréaux contre un genre qui, d'ailleurs, offrit

par la fuite de grandes beautés fous la plume de Quinault. L'exemple de Molière auroit dû, auprès de cet auftère cenfeur, fervir d'excuse pour l'auteur d'Alcefte & d'Armide.

Quelqu'un a mis en vers les quatre actes en profe de la Princesse d'Élide, mais les ouvrages les plus foibles des grands hommes gagnent bien rarement à paller par d'autres mains.

Au mois de Juillet 1718, on joua au Théâtre Italien une pièce intitulée les Amours à la chaffe, qui étoit une mauvaise imitation de la Princesse d'Elide, à ce que difent les Lettres Historiques fur les Spectacles de Paris, 1719. Cette pièce étoit précédée du Défiant, & l'une & l'autre étoient de M. Coypel.

Cette comédie de Molière, ainsi que fa Psyché, furent traduites au commencement de ce fiècle par Riccoboni, qui les fit jouer en Italie avant de venir en France.

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