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& cette fécurité foutient le courage qu'ils déployent contre les abus. Če n'est pas tout; ces mêmes Cenfeurs forment en particulier, un Tribunal qui a infpection fur tout l'Empire. Ils ont le droit de faire à l'Empereur toutes les remontrances qu'exige ou l'intérêt du Prince, ou celui du public. Leur infpection s'étend fur tous les hommes publics de robe ou d'épée; fur tous les ordres de citoyens; ils font , pour ainfi dire, piacés entre le Prince & les Mandarins entre ceux-ci & le peuple & les familles entre les familles & les particuliers; & ils joignent communément à l'importance de leurs fonctions, une probité incorruptible, un courage que rien ne peut abattre. Le Monarque peut, à toute rigueur, leur ôter la vie ; mais plufieurs ont fouffert la mort plutôt que de trahir la vérité, que de tolérer un abus. Il ne fuffit point alors d'en frapper un, il faut les frapper tous: le dernier qu'on épargneroit n'en fuivroit pas moins la trace de tous les autres. Les Annales d'aucune autre Nation n'offrent d'exemple d'un pareil

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Tribunal; & il feroit nécessaire chez toutes fans exception. Il ne faut pas zoutefois préfumer que les privilèges d'un Cenfeur lui donnent le droit de manquer au Souverain, ni d'inftruire. le public des obfervations qu'il ofe lui faire il feroit puni de mort, s'il en faifoit part feulement à un de fes collègues; il feroit puni de mort, s'il Iui échappoit dans fes représentations, un feul terme qui s'éloignât de la modération & du refpect.

Le Tribunal de l'Hiftoire n'eft pas: moins fingulier. Il eft compofé des plus beaux génies de l'Empire, de des hommes de lettres les plus profonds. Ils ont fubi, avant que d'y être admis, un un examen rigoureux.. C'est à eux qu'eft confiée l'éducation de l'Héritier du Trône, & la rédaction de l'Histoire générale de l'Empire. Cette dernière fonction les fait redouter de l'Empereur lui-même. Ils ont prouvé qu'il pouvoit plutôt les opprimer que les féduire. Ce n'eft pas tout; l'oppreffion ou les tentatives de féduction feroient, malgré lui, confignées dans l'Hiftoire.

Les lois civiles des Chinois ne font prefqu'autre chofe que des préceptes de morale; la piété filiale en eft la bafe, comme elle eft celle du Gouvernement. Tout Mandarin Gouverneur, foit de Province, foit de Ville, eft obligé de les enfeigner deux fois par mois au peuple, qui fe raffemble autour de lui. Voici quelquesunes de ces maximes.

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Que la profeffion des laboureurs » & de ceux qui cultivent les vers à foie, jouiffe de l'eftime publique; » on ne manquera jamais de grains pour fe nourrit, ni de vêtemens » pour le couvrir.

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Qu'on entretienne avec foin', les écoles publiques; & fur-tout, » qu'on y forme les Etudians aux » bonnes mœurs.

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Qu'on extirpe, avec foin »fectes dès leur naiffance; il feroit >> trop tard après.

»Qu'on inculque fouvent au peuple, » les loix pénales établies par l'au» torité fouveraine. Les efprits grof» fiers & indociles, ne peuvent étre » contenus que par la crainte ».

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Les loix qui concernent les mariages, font très-étendues. Un Chinois ne peut avoir qu'une femme légitime; mais il lui eft permis d'avoir plufieurs concubines, qui font reçues dans la maifon fans difficulté. N'y at-il pas au moins de l'inconféquence permettre un tel abus dans un pays affamé, pour ainfi dire, de fon exceffive population, & dans lequel on eft réduit à tolérer la barbarie des pères qui expofent ou font périr les enfans dont ils font furchargés? Au refte, ces femmes de la feconde claffe, dépendent totalement de la femme légitime; elles font, ou doivent être toujours à fes ordres, & leurs enfans font réputés les fiens. Le divorce eft permis à la Chine, comme il le fut chez tous les peuples anciens, mais avec moins de facilité & dans certains cas feulement, tels que l'adultère, l'antipathie, la défobéiffance abfolue, la ftérilité, & des maladies habituelles qui fe communiquent.

La procédure criminelle des Chinois eft peut-être la plus parfaite de

toutes celles qui exiftent. Sa lenteur devient la fauve-garde de ceux qu'on accuse injustement. Les criminels n'y gagnent rien, puifque le tems découvre la vérité, qui ne peut pas leur être favorable. Tout accufé eft foumis à l'examen de cinq à fix Tribunaux ; chacun d'eux reçoit la procédure, & l'information n'eft pas uniquement dirigée contre l'accufé, elle l'eft auffi contre les accusasateurs & contre les témoins,

La moindre de toutes les punitions, c'eft la baftonnade. Le plus ou moins de gravité de la faute, détermine le nombre de coups de bâton; le moin dre nombre eft toujours de vingt; cette punition n'a rien d'infamant. Souvent même l'Empereur la fait donher à quelques-uns de fes courtisans ; ce qui n'empêche pas qu'il ne le reçoive enfuite, & ne le traite auffi bien qu'auparavant. Cela s'appelle une correction paternelle. Ce bâton eft de bambou, un peu applati, large du bas, poli du haut, pour être manié plus aifément. Tout Mandarin peut en

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