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» à pied; plus leurs maisons font vaftes & magnifiques, plus celles des pau»vres font petites & miférables; plus » leur table eft couverte de mets, plus il y a de gens qui font réduits uni» quement à leur riz. Ce que les hom» mes en fociété peuvent faire de » mieux, à force d'industrie & de tra» vail, d'économie & de fageffe, dans un Royaume bien peuplé, c'est » d'avoir tous le néceffaire, & de pro»curer le commode à quelques-uns ».

La piété filiale eft un des plus grands refforts du Gouvernement Chinois. Ce n'eft pas, comme ailleurs, une fimple règle de bienféance, un devoir purement naturel; c'eft un point de religion, fcrupuleufement obfervé. L'objet de la piété filiale est de ne laiffer voir au Souverain, dans fes fujets, que ses véritables enfans; & aux fujets, dans leur Souverain que le père commun de la Nation. Les anciens l'appelloient même le père & la mère de l'Empire. Nous voudrions pouvoir tranfcrire le Code de la piété filiale; nous difons Code, parce que ce livre claffique a acquis

force de loi. On n'y a rien oublié, je ne dis pas des marques d'amour & de refpect, mais des égards, des déférences, des plus petites attentions que les enfans doivent à leurs pères, & dont l'inobfervance pafferoit pour un crime. L'Empereur lui-même y est auffi foumis que le dernier de fes fujets. C'eft une espèce de culte qu'il rend à l'Impératrice-Mère, fi elle a furvécu à fon époux. Aucune mère, dans le monde entier, ne jouit d'un hommage auffi marqué, auffi éclatant, auffi public. C'eft fur-tout le premier jour de chaque année, qu'il fe renouvelle de la manière la plus impofante. Nous n'avons point de Fête qui égale cette augufte cérémonie.

On ne ceffe de nous dire qu'il eft ridicule d'établir des loix fomptuaires dans un grand Etat, & cependant la Chine a fes loix fomptuaires. Ce Code économique détermine dans le plus grand détail, la forme des habits pour toutes les faisons, le prix de ces habits pour tous les états, pour tous les âges, L'habit ou le coftume autorilé dans telle ou telle claffe, eft tellement in

diqué par le Code fomptuaire, qu'on diftingue à fon premier afpect, de quelle claffe eft celui qui le porte. eft tellement économifé, qu'il met un frein au luxe du riche, & ne gêne point le pauvre.

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L'agriculture eft fingulièrement ho norée à la Chine; on fait que l'Empereur, à l'ouverture du printems donne à tous fes fujets, l'exemple de fon refpect pour la charrue, en traçant lui-même quelques fillons; ce font quarante laboureurs d'élite, qui arrangent l'attelage, & préparent les grains que l'Empereur doit femer, & on leur diftribue par fon ordre, quatre pièces de coton à chacun pour fe faire des habits. On fait le même préfent à une quarantaine d'autres plus âgés, qui ont feulement été fpectateurs de cette cérémonie.

Quel que foit le pouvoir des Gouverneurs de Province, ils en doivent ufer avec beaucoup de circonfpection; car ils font furveillés fans ceffe par des Vifiteurs que le Souverain envoie dans les Provinces ; & ce qui eft vraiment admirable, l'Empereur

prend quelquefois le parti de remplacer lui-même ces Vifiteurs. Kan-hi, un des plus célèbres Monarques de la Chine, & qui vivoit au commencement de ce fiècle, donna, dans une pareille circonftance, un exemple mémorable de févérité & de juftice. Un jour qu'il s'étoit un peu éloigné de fa fuite, il apperçut un vieillard qui pleuroit amèrement. Qu'avez-vous, lui demanda l'Empereur? Seigneur, lui répondit le vieillard, fans le connoître, je n'avois qu'un fils; il faifoit toute mon efpérance, & pouvoit devenir l'appui de ma famille. Un Mandarin Tartare me l'a enlevé je me vois par là privé de tout fecours, & n'en efpère aucun ; car jamais un homme foible & pauvre comme mois, n'obtiendra juftice du Gouverneur, contre un homme puiffant. On vous la rendra, lui répondit l'Empereur, toujours fans fe faire connoître; montez en croupe derrière moi, & conduifez-moi à la maifon du raviffeur. Le bon homme accepta, & après deux heures de route, ils arrivèrent chez le Mandarin, qui ne s'attendoit pas à cette vifite. La fuite de

l'Empereur arriva prefqu'en même tems que lui; la maison du Mandarin fut bientôt remplie & entourée, Lé Mandarin ne put nier la violence dont on l'accufoit, & l'Empereur le con damna à perdre la tête; ce qui fut exécuté. Alors fe retournant vers le vieil→ lard, il lui dit du ton le plus grave & le plus impofant je vous donne la charge du coupable qui vient de mourir; ayez foin de la remplir avec plus de modération que lui, & profitez de fa faute & de fa punition, de peur qu'à votre tour, vous ne ferviez d'exemple aux autres,

Lifez entièrement les chapitres fur l'Adminiftration Militaire, fur l'Admi niftration de la Famille Impériale, fur le Code des Empereurs, fur le Gouver nement actuel; je vous en donnerois une trop foible idée en en détachant quelques morceaux. Les matières me preffent, & je paffe au fecond livre de cette feconde partie, qui traite de la Religion des Chinois.

La doctrine fur l'exiftence & les attributs d'un fouverain Etre, fur le culte & les hommages qui lui font dus, a subsisté à la Chine, fans altéz·

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