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Tout ce morceau eft plein de vérité, & rien de plus beau que l'idée qui le termine.

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Vous ne lirez pas avec moins d'intérêt les autres Difcours fur la fainteté, fur la facilité du falut, fur l'obligation d'aimer Dieu &c. Vous trouverez dans tous des plans bien conçus, des idées faines des idées faines, fouvent agréables, un ton affectueux qui touche & pénètre le cœur; en un mot, les plus beaux fentimens exprimés dans un ftyle pur & toujours gracieux.

Je fuis, &c.

LETTRE X.

Morale tirée des Confeffions de Saint Auguftin, par M. l'Abbé Grou; a Paris, chez Mérigot jeune, Libraire, Quai des Auguftins, au coin de la rue Pavée. 2 vol. in-12 d'environ 400 pages chacun,

CE n'eft pas feulement un ouvrage très-pieux, très-édifiant que je vous annonce ici, Monfieur; c'eft encore un livre très-bien écrit. A une morale pure & toute célefte, l'Auteur joint le ftyle le plus doux & le plus agréable. Il entre parfaitement dans les fentimens du grand & fublime docteur qu'il a pris pour fon guide, & les développe avec autant d'action que d'éloquence.

Chaque paffage de Saint-Augustin eft une fource abondante où M. l'Abbé Grou puise d'excellentes leçons pour

les différens états de la vie, & les diverses affections de l'ame & du cœur. Je ne vous citerai pour exemple que le douzième article, où l'auteur développe cette plainte que Saint-Auguftin fait de lui-même : Je me plaifois à moi-même, & je defirois de plaire aux yeux des hommes. On ne peut pas mieux peindre les funeftes effets de l'amourpropre, & les ravages qu'il caufe dans notre ame, que le fait ici M. l'Abbé Grou, après avoir montré qu'il a perdu les anges rebelles, le premier homme, qu'il infecte même quelquefois jufqu'au cœur des faints, il fait voir qu'il n'eft point d'âge, d'état & & de condition que cette funefte complaifance n'empoisonne.

« Obfervez les enfans. A peine fe »fentent-ils qu'ils s'aiment déjà de > cet amour pervers, qu'ils rappor >>tent tout à eux, qu'ils croyent que » tout leur est dû, & qu'ils s'irritent » contre tout ce qui s'oppofe à leurs defirs. A mefure qu'ils croiffent & qu'ils deviennent capables de ré» flexion, leur amour propre s'étend » à plus d'objets; il devient en même, GT

» temps plus diffimulé, parce que la » raifon en découvre l'injuftice; il e déguise & fe cache aux yeux des autres, pour mieux parvenir à ses » fins; il mendie finement les louan»ges; il les prodigue, afin qu'on les » lui rende : en un mot, il eft intéreilé, » menteur, baffement complaifant;

&, dans tout ce qu'il paroît faire. » pour autrui, il n'envisage que lui» même. N'eft-ce pas là ce que nous » fommes tous pleins de mépris, » d'envie, de jaloufie pour les autres, de préfomption, d'amour, d'admi→ration pour nous

» D'où eft venu l'irreligion qui défole aujourd'hui le royaume D'où eft fortie cette malheureufe fecte de Philofophes? D'où font nés tant d'écrits où règnent le libertinage & l'impiété? De l'envie de fe diftinguer, de fe faire une réputation, » de donner le ton à fon fiècle, de paffer pour avoir plus de force d'ef » prit, plus de génie que le commun » des hommes, de paroître indépen» dant de toute autorité divine & humaine. Et cela qu'eft ce autre chofe

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» qu'un amour-propre exalté, qui » s'affranchit de toute règle, de tout » lien, & qui fe porte aux derniers » excès de la déraifón?

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» L'attrait pour le plaifir n'eft pas » l'unique caufe de la corruption des » deux fexes; la vanité, le defir de plaire y entrent pour beaucoup : c'eft même ordinairement par-là que » la paffion commence. On eft con» tent de foi; on aime à fe parer, » se montrer, à attirer les regards, à » être recherchée parce que c'eft là le triomphe de l'amour-propre. Un » orgueil fecret, une certaine com

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plaifance en foi même, un delir » violent d'être préférée aux autres, » le dépit, la jaloufie qu'on a de fes: » rivales, ont pour le moins autant » de part aux foibleffès du fex e, que » le penchant de la nature & la force » du tempérament.

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Que dirai-je de la dévotion, & de » tous les défauts, de tous les travers, » de tous les ridicules que l'amour-pro» preya introduits? Les dévots font-ils: » ceux qui ont le moins de complaifance >> en eux-mêmes; qui defirent le moins

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