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le détail des exploits de le Fort au fiège & à la prife d'Afoph, où il fit tout ce qu'on pouvoit attendre d'un Général auffi prudent qu'intrépide. Après cette conquête, qui rendit le Tzar maître du Palus Maotides, ce Prince » voulut donner à fes fujets » le fpectacle pompeux d'un triomphe » dans le goût des Romains; il fit > entrer fon armée dans Mofcou fous » des arcs de triomphe; l'Amiral le

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Fort, le Maréchal Kermeretoff, les » Généraux Gordon & Scheim, les » autres Officiers - Généraux & tous » ceux qui s'étoient diftingués au fiège, avoient la tête ornée d'une » couronne & précédoient le Souve» rain qui fe trouvoit fans diftinction » à fon rang de Colonel, & qui fem» bloit n'être là que pour orner le » triomphe de fes Généraux ». Il falloit une marine refpectacle pour feconder les projets du Tzar, & le Fort choifit de jeunes Officiers qui furent envoyés à Venife, en Angleterre & en Hollande, pour y apprendre tout ce qui concerne la marine, pour s'inftruire dans l'artillerie, le

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génie, & revenir à Mofcou faire part de leurs lumières à leurs compatriotes.

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On ne peut diffimuler que Pierre, avec le courage d'Alexandre, n'eût les défauts du Roi de Macédoine; dans un de fes voyages en Allemagne, il se mit dans une furieuse colère contre le Chancelier de l'Electeur de Brandebourg, & le chaffa de fa table, parce qu'il ne pouvoit imiter fon intempérance; l'Amiral voulut excufer le Chancelier, le Tzar, aveuglé par l'emportement tire fon épée pour en percer le Fort; celui-ci peu épouvanté de l'air menaçant du Tzar s'ar» rête devant lui, ouvre fon juste au-corps, découvre fa poitrine, & lui dit avec beaucoup de fang» froid, qu'il pouvoit le tuer, que » la mort feule pouvoit mettre fin » au chagrin qu'il avoit continuelle»ment pour fon fervice. Pierre éton» né de fa fermeté, rougit d'avoir » outragé un homme qui l'avoit fi » bien fervi, lui faute au col & l'em» braffe ».

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Le Czar brûloit d'arriver en Hol

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lande; ce fut à Saardam qu'il donna à l'Europe étonnée le fpectacle fi rare d'un Souverain, voulant s'inf truire des moindres détails de l'architecture navale se faire enrôler parmi les charpentiers de la Compagnie des Indes, fous le nom de Baas Petter, (Maître Pierre.) (1) & devenir bientôt un des plus habiles ouvriers & un excellent pilote.

Le Tzar fe difpofoit à partir pour Vienne, lorfqu'il apprit la nouvelle d'une révolte occafionnée, comme les précédentes, par la Princefle Sophie, qui, du fond de fon cloître, avoit féduit les Streltsi & foufflé le feu de la difcorde.

A l'ouverture de fes dépêches le Tzar fentant tout le danger où fes états étoient exposés, fe jetta dans les bras de fon favori, en criant: François Jacobevitz, apprends-moi le moyen de me rendre bientôt à Moscou, pour cha

(1) La maifon, ou plutôt la chaumière, qu'occupoit le Tzar fubfifte encore; elle fut visitée avec vénération par le grand

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tier l'infolence de mes Streltsi: (1) je te jure qu'aucun des coupables n'échappera ma vengeance. Il partit, & arrivé à Moscou fa préfence rétablit le calme. Pierre, irrité contre fa fœur, vouloit faire inftruire son procès, à l'exemple d'Elifabeth; » le Fort ofa » feul lui donner des leçons de vé

ritable gloire, & par fa modéra» tion lui épargna un crime ». En vain le Tzar fe plaignit qu'elle avoit confpiré plufieurs fois contre fa vie. » N'importe, repliqua le Fort, Votre

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Majefté ne doit pas la faire mou> rir, à moins, Sire, que votre ➜ vengeance ne vous foit plus chère » que votre gloire; c'est à faire aux

Turcs à tremper leurs mains dans » le fang de leurs frères; mais un » Prince chrétien doit avoir d'autres » fentimens ». Le Tzar pardonna a

Duc de Ruffie & fon augufte épouse: on nomme aujourd'hui cette maison Wors temberg. Château du Prince. )

(1) C'étoit une foldatefque indifcipli nable tels que les Janiffaires.

Sophie; il fe contenta de lui faire les reproches les plus fanglantes; tous les autres coupables périrent, & le corps des Streltsi fut entièrement détruit,

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» Pendant fon fejour en Hollande, "Pierre avoit pris en affection un » Sardamois, nommé Mus, & l'avoit fait venir en Ruffie. Ce Mus étoit » un habile marin; il aida le Tzar » à construire un vaiffean de guerre » à la hollandoife, & ce Prince l'en » fit capitaine. Ce fut fur ce vaisseau, » prefque bâti de fes propres mains, » que Pierre voulut paffer par les emplois les plus vils de la marine. » Il demanda à Mus quel étoit l'of»fice le plus bas fur un navire ? Le Capitaine lui repartit que c'étoit celui » de Mouffe. Hé! bien, pourfuivit le » Tzar, je veux te fervir aujourd'hui » de Mouffe. En même temps il grimpe » au haut d'un mât pour en détacher » une corde; Mus, étonné de cette » action, trembloit de frayeur que »le Monarque ne fût renversé dans la mer, car le vent étoit violent, & auroit pu facilement le faire tom

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