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l'erreur, et que vous ne rendiez un culte d'adoration à des créatures que le Seigneur votre Dieu a faites pour le service de toutes les nations qui sont sous le ciel. » Quoique ce Pentateuque ne soit en grande partie qu'un recueil de contes, du genre des contes arabes, cependant on y voit que l'auteur quel qu'il soit, était un spiritualiste, et qu'il ne rappelle son peuple au culte de la cause invisible, que parce que tous les peuples au milieu desquels il vivait, adoraient le monde et ses parties les plus brillantes et les plus actives. Il avait à les défendre contre la séduction du spectacle imposant de l'Univers, et contre celle de l'exemple des nations les plus civilisées de l'Orient, qui n'avaient point d'autre culte sans cela, cette défense paraîtrait assez inutile; et, malgré cette précaution, la force impérieuse de l'exemple, et celle de l'action de tous les sens, ramenaient toujours le juif aux pieds des images et des autels de la Nature: tant est grand son empire sur l'homme, tant les abstractions mé– taphysiques auront toujours de peine à détruire le témoignage des sens! C'est contre ce culte, si naturel aux hommes, que les spiritualistes et les prétendus inspirés de la secte judaïque, élevaient continuellement la voix, en s'efforçant de contenir dans le spiritualisme des disciples toujours prêts à leur échapper. L'auteur d'un de ces ouvrages, connu sous le nom de Livre de la Sagesse, s'exprime ainsi : « Tous les hommes qui n'ont point la con

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naissance de Dieu, ne sont que vanité; ils n'ont pu comprendre, par la vue des choses qu'ils admirent, celui qui est, ni reconnu le créateur dans ses ouvrages; mais ils se sont imaginé que le feu, ou le vent, ou l'air le plus subtil, ou la multitude des étoiles, ou l'abîme des eaux, ou le soleil et la lune étaient les Dieux qui gouvernaient tout le monde; que s'ils les ont crus des Dieux, parce qu'ils ont pris plaisir à en voir la beauté, qu'ils conçoivent de là combien celui qui en est le dominateur doit être encore plus beau; car c'est l'auteur de toute beauté qui a donné l'être à toutes ces choses; que s'ils ont admiré le pouvoir et les effets de ces créatures, qu'ils comprennent de là combien est encore plus puissant celui qui les a créées : car la grandeur et la beauté de la créature peuvent faire connaître et rendre en quelque sorte visible le créateur. » L'auteur cependant excuse ceux qui s'en tiennent à la puissance visible, et ne sentent pas le besoin d'en imaginer une autre hors de la Nature. « Et néanmoins, dit-il, ces hommes sont un peu plus excusables que les autres; car, s'ils tombent dans l'erreur, on peut dire que c'est en cherchant Dieu, et en s'efforçant de le trouver; ils le cherchent parmi ses ouvrages, et ils sont séduits par la beauté des choses qu'ils voient.» Cet aveu marque plus de franchise que le raisonnement ne renferme de logique; car, avant de remonter à la beauté de l'auteur invisible, en voyant la beauté de la cause visible, il fallait prouver que cette cause était un effet, un ouvrage (ce qui précisément fait le sujet

de la question), et non pas le supposer. Il résulte toujours de ce passage que, excepté un petit nombre d'hommes plus clairvoyans que les autres, et qui devinaient ce que ni eux, ni d'autres, n'avaient jamais vu, et ne devaient jamais voir, le reste des hommes ne connaissait d'autre cause universelle, et d'autre divinité que la Nature et ses parties; l'Univers, à leurs yeux, semblait renfermer en luimême, primitivement et par essence, le principe de vie, de mouvement et d'harmonie, qu'on y remarque.

Les nations savantes de l'Orient, les Égyptiens et les Phéniciens, deux peuples qui ont le plus influé sur les opinions religieuses du reste de l'Univers, ne connaissaient d'autres Dieux, chefs de l'administration du monde, que le soleil, la lune, les astres, et le ciel qui les renferme, et ne chantaient que la Nature dans leurs hymnes et leurs théogonies. Diodore de Sicile, Eusèbe et tous les auteurs qui ont parlé de la religion de ces peuples, n'ont làdessus qu'un même sentiment '. « Les Phéniciens et les Egyptiens, dit Eusèbe, ont les premiers attribué la divinité au soleil, à la lune et aux étoiles, et les ont regardés comme les seules causes de tous les êtres produits et détruits. Ce sont eux qui ensuite ont répandu dans l'Univers toutes les opinions qu'on y trouve sur la génération et la filiation des Dieux. On n'avait point encore porté son esprit au-delà des causes visibles de la Nature et

1 Euseb, Præp. év., l. 1, c. 6..... c. g.

des phénomènes célestes, excepté un petit nombre d'hommes connus chez les Hébreux, qui, à l'aide des yeux de l'âme, s'élevant au-dessus du monde visible, ont reconnu et adoré le fabricateur et l'architecte souverain du monde. Frappés de la sagesse et de la puissance qu'ils crurent apercevoir dans son ouvrage, persuadés qu'il est le seul Dieu, ils firent du dogme de l'unité de Dieu la base de la théologie qu'ils transmirent à leurs enfans, qui la conservèrent comme la véritable, la première et l'unique doctrine qu'on dût avoir de la divinité..... Le reste des hommes, séduits par le spectacle des cieux, regardèrent comme Dieux ces corps lumineux qui brillent au firmament, leur offrirent des sacrifices, se prosternèrent devant eux, et n'élevèrent pas leur ame ni leur culte au-delà du ciel visible. Les erreurs des Phéniciens et des Égyptiens ont passé chez les Grecs avec les mystères d'Orphée et avec la connaissance des lettres. » Le même Eusèbe dit ailleurs 1 « que les Hébreux furent les seuls mortels qui regardèrent les premiers élémens, la terre, l'eau, l'air et le feu, le soleil, la lune, les astres, et toutes les parties qui composent l'Univers, non comme autant de Dieux, mais comme les ouvrages de la Divinité, et qu'ils imaginèrent une substance intelligente supérieure à tout cela, qui en dirigeait les mouvemens, en réglait l'ordre; et entretenait cette admirable économie. »

Mais ils sont forcés de convenir, ces Hébreux,

1 L. 7, c. 3.

que cette religion des spiritualistes n'était pas leur culte primitif, et que leur Abraham, s'il est vrai qu'il ait jamais existé, naquit et fut élevé dans le sabisme et dans la religion des adorateurs du feu et de la Nature entière. Les Chaldéens, les Cananéens, les Syriens, au milieu desquels ils vivaient, et dont on cherchait à les séparer par le spiritualisme, n'avaient point d'autres Dieux 1. Les Cananéens avaient consacré des chevaux et des chars au soleil, leur grande divinité. Les habitans d'Émesa, en Phénicie, adoraient ce Dieu sous le nom d'Héliogabale, et lui avaient élevé un magnifique temple, où brillait l'or, l'argent et les pierres les plus précieuses 2. Non-seulement les habitans du pays, mais les rois, les chefs des nations voisines, y allaient porter tous les ans les plus riches offrand es, nous dit Hérodien. Hercule était la grande divinité des Tyriens; et les traditions sacrées du pays portaient qu'il était le même que le soleil 3, le soleil 5, et que la fable des douze travaux exprimait la course de cet astre dans les douze signes du zodiaque. Nous aurons occasion de prouver ailleurs que les auteurs de cette tradition avaient raison.

Les Syriens adoraient les étoiles de la constellation des poissons 4, et en avaient consacré les images dans leurs temples 5. Le culte d'Adonis était établi à Byblos et dans le voisinage du Li

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1 Hyde. de Vet. Pers. Rel., p. 117. .2 Hérodien, 1. 5, p. 201. .3 Euseb., Præp. évang., l. 3, c. 11. —- Hygin, l. 2, c. 42. 5 German. Cæs., c. 36.

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