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semblables taxes est dans la proportion de 2 liv. 78 pour chaque habitant.

« La différence provient non-seulement des quotités moindres de taxes, appliquées par les lois parmesanes aux contrats principaux et les plus fréquents, mais encore des fraudes qui se pratiquent sur une large échelle, par suite de l'admission de l'écriture privée, non enregistrée en temps utile, comme preuve de la translation de propriété ou d'usufruit d'un immeuble: les contractants, sûrs de la validité de leurs stipulations, quand même elles manqueraient de la formalité du contrôle, n'y présentent pas l'écrit qui est soumis à cette obligation, et ne s'effraient pas de cette contravention, dans l'espoir de frauder les finances de la taxe et de l'amende, s'ils réussissent à tenir caché leur contrat.

A cet égard, les dispositions des art. 1412 et 1413 du Code civil sarde paraissent excellentes, elles enlèvent la possibilité de semblables contraventions, et il conviendrait de les étendre à toutes les provinces de l'Emilie, ou d'y suppléer par une autre mesure qui forcerait, sous peine de nullité, à rendre publiques les mutations de propriété ou d'usufruit des immeubles, de manière à ce que tout le monde pût facilement les reconnaître.

« Un autre défaut de la loi parmesane existe dans la base de perception, établie pour la taxe sur les donations, qui est la rente cadastrale calculée au cinq pour cent. Cette rente est dans la généralité des cas inférieure à la moitié de la rente nette, et il en résulte souvent l'inconvénient que le contrat de donation d'un immeuble paie une taxe moindre que celle due pour la vente du même immeuble, quoique l'estimation en soit plus élevée.

Il serait facile d'y porter remède, en adoptant, en rapport avec ce qui est établi pour les ventes, la base de la valeur réelle, déclarée par les parties, avec la faculté pour l'Administration de la faire vérifier par experts, si la valeur déclarée lui semblait au-dessous de la vérité.

Dans les provinces de Modène, sont sujets à la formalité de l'enregistrement et au paiement de la taxe de 3 0/0 sur la valeur indiquée dans l'acte, les seuls contrats qui opèrent mutation de propriété ou d'usufruit d'immeubles, sous les titres suivants : Ventes, — Echanges,Donations, Rentes viagères constituées, soit sur la propriété, soit sur l'usufruit d'un fonds, Affranchissements (affrancazioni), Adjudications, Déclarations de command hors le terme,— Parlages, s'ils emportent pour l'un des copartageants une cession supérieure à la quote-part qui lui est due.

2 SÉRIE. T. XX/X. — 15 février 1861.

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<< En sont exemptées les dots (bien qu'elles suivent, quand il s'agit de biens immeubles), les règles des cessions et des donations pour cause de mariage, et les restitutions des mêmes dots, ainsi que les donations ou les cessions à titre gratuit d'immeubles entre ascendants et descendants, entre frères et entre conjoints.

La base de perception est, comme on l'a dit, la valeur indiquée dans les actes, c'est-à-dire le prix; à son défaut, on y supplée par l'estimation au double de la valeur des fonds, suivant le chiffre de la province.

La loi peut être et est facilement éludée dans les actes de cession ou de renonciation de droits héréditaires, parce que, dans ce cas, la déclaration des dettes et charges que doit supporter celui qui prend l'hérédité n'existant pas, on réussit à soustraire une bonne partie des biens de cette hérédité au paiement de la taxe, sans que l'agent fiscal ait aucun moyen de l'appliquer. Le produit annuel, en moyenne, de ce revenu est de 300,000 livres, et ne s'élève pas à 50 centimes par tête.

« Le système du dépôt aux archives et de l'enregistrement en vigueur dans les provinces de Romagne, tel qu'il a été établi par les lois pontificales du 6 juillet 1816, du 22 novembre 1826, du 19 décembre 1827 et du 24 décembre 1832, se rapproche beaucoup du système de l'insinuation adopté dans les anciennes provinces du royaume; les prescriptions des lois pontificales sont en effet analogues aux dispositions des art. 1422 et 1436 du Code civil sarde en ce sens :

« 1° Qu'il doit être laissé au préposé, c'est-à-dire au receveur des taxes d'enregistrement, copie d'archive des actes notariés, et qu'on est regardé comme n'ayant pas satisfait à l'obligation de l'enregistrement si ladite copie n'est pas remise dans le terme, et si elle n'est pas conforme à l'original et revêtue du sceau. (Art. 28 du règlement du 29 décembre 1827.)

« 2o Que l'enregistrement est le moyen de donner une date certaine aux actes et contrats, et que nul écrit ne peut l'acquérir et être opposable aux tiers que du jour qui suit l'enregistrement ou le dépôt aux archives.

« A la différence cependant des lois sardes sur l'insinuation, les lois pontificales établissent que les copies des actes notariés doivent, après deux ans, être transmises aux archives notariales, autre administration publique tout à fait distincte de celle de l'enregistrement, et indépendante du décastère des finances.

« Le règlement du pape Léon, en date du 24 décembre 1832, dans

lequel fut refondue la plus grande partie des dispositions portées par les précédentes lois sur l'enregistrement, commença par l'énumération des actes exempts de cette formalité, embrassa ensuite dans une rédaction générale ceux qui ont été fournis à une taxe fixe et à une taxe proportionnelle, ayant ainsi évidemment en vue de frapper d'une manière générale tous les actes de la vie civile constatés par écrit, moins ceux qui ont été nommément exclus; c'est pour cela que dans les Romagnes la loi a une extension encore plus grande que dans les provinces parmesanes, ou elle comprend déjà un nombre d'actes supérieur à celui des anciennes provinces. >

M. Pepoli termine en critiquant la rédaction compliquée et prolixe, ainsi que l'application injuste et arbitraire qu'avaient faite les préposés du gouvernement pontifical.

Le timbre et l'enregistrement semblent, comme nous l'avons vu, se remplacer mutuellement dans diverses législations de l'Europe. Sous le rapport fiscal exiger un droit d'enregistrement de 6 p. 0/0 sur un acte de vente, ou imposer à cet acte un papier timbré de prix correspondant, équivaut au même résultat, sauf la difficulté de réaliser dans les prix du papier timbré une proportionnalité rigoureuse, proportionnalité qui est remplacée habituellement par des variétés de timbre applicables à des séries de valeurs déterminées.

Mais il en est très-différemment sous le rapport des garanties du droit civil qui résultent de l'une et de l'autre de ces prescriptions, et qui sont surtout nécessaires dans les pays où le ministère du juge n'est point requis pour la constatation des contrats.

La formalité du timbre, imposée à un acte, ne permet guère que d'entraver les antidates assez considérables, celles qui consistent, par exemple, à reporter un acte à une année antérieure à celle de la souscription réelle, puisque, dans divers pays, la marque de l'année peut être constatée dans la pâte du papier timbré. Mais rien n'empêche absolument l'approvisionnement de quelques feuilles anciennes servant à protéger des antidates préméditées avec soin, ou même la contrefaçon qui est à craindre pour des papiers timbrés d'une valeur très-élevée.

Il en est bien différemment de l'enregistrement, qui prescrit la constatation d'une date fixe par un officier public, et qui, de plus, renferme l'analyse de l'acte enregistré.

Une pareille formalité assure la date des actes sous seing privé, et elle confirme souverainement l'autorité des notaires relativement aux

actes publics. Un écrivain hollandais a très-bien démontré cette supériorité de l'enregistrement sur le timbre dans un écrit de 1817 (1).

« La loi relative à l'organisation du notariat, dit-il, trace des règles pour la forme des actes notariés ; l'enregistrement en assure l'observation par le contrôle du préposé, qui doit dénoncer les contraventions à la loi commises par l'officier public, porter l'extrait de l'acte dans un registre et y faire mention de la date et du nombre de rôles et de renvois portés par l'acte, et qui est obligé de parafer ces derniers.

« Cette opération sert de frein à tout officier public dont la moralité pourrait chanceler; elle sert d'égide contre la calomnie à ceux de ces officiers dont la carrière est sans tache; elle fait la tranquillité du notaire mourant, parce qu'elle lui garantit qu'un successeur inconnu, qui sera le dépositaire de ses actes, ne pourra les altérer après son décès et déshonorer sa mémoire. »

L'auteur reconnaît en faveur du timbre l'avantage d'un secret que l'enregistrement découvre; mais il pense que l'intérêt du citoyen exige plutôt des formalités conservatrices de l'intégrité de ses transactions qu'un secret absolu. (P. 103.)

L'écrit que nous citons fut publié alors qu'il s'agissait de remplacer par l'ancien timbre batave, renouvelé notamment d'une loi de 1805 et accompagné quelquefois d'un droit de mutation, l'enregistrement établi en Hollande en 1812, et remis en question après la cessation de la domination française.

Les efforts de M. de Rovère van Breugel furent couronnés de succès, puisque l'enregistrement, organisé par diverses lois, du 29 janvier 1818, du 31 mai 1824 et du 16 juin 1832, paraît avoir été toujours, depuis lors, assis sur les bases générales résultant en France de la loi du 22 frimaire an VII. C'est ce qui nous paraît au moins résulter de ce qui est rapporté à cet égard par Engels (2).

M. Rau a émis diverses critiques (§ 238) contre les droits d'enregistrement.

Il leur reproche leur inégalité en ce sens qu'ils ne frappent les biens qu'à raison de leur transmission, ceux qui restent longtemps exploités par les mêmes mains ne payant rien au trésor.

Il ajoute que ces droits atteignent en réalité le capital dans sa circu

(1) Des hypothèques, du droit de timbre ou de greffe, etc., par de Rovère van Breugel. Bruxelles, 1817, p. 30 et suivantes.

(2) Pages 266 à 270.

lation, à cause de leur poids considérable, et qu'ils peuvent entraver certaines mutations.

Il pense que ces inconvénients de la taxe d'enregistrement (dans laquelle il ne comprend pas les transmissions par décès qu'il traite sous une autre rubrique) ne sont pas observés dans la vie commune, mais seulement par une soigneuse attention, ce qui explique la conservation de cette taxe dans les pays où elle existe, et où elle donne au trésor des ressources précieuses.

M. Courcelle-Seneuil, dont les observations semblent peut-être à tort porter sur toute sorte de mutations sans distinction, n'est pas plus indulgent pour les droits analogues à nos taxes d'enregistre

ment.

«En réalité, dit-il, il n'existe aucun motif raisonnable pour imposer la transmission des propriétés, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, puisque cette transmission n'entraîne pas après elle de consommation, et que l'importance des propriétés transférées n'a aucun rapport nécessaire avec les revenus de ceux qui les transfèrent. Cet impôt est donc irrationnel et injuste; il peut d'ailleurs donner lieu à la fraude, et par suite de la fraude, à des procès, au grand dommage de la perception; le paiement en est réclamé bien souvent au moment où le contribuable a le moins de fonds disponibles, parce que l'événement qui donne lieu à la perception survient à l'improviste. Que de dettes contractées pour payer des droits de succession, et qui ont commencé la ruine des familles!

« La transmission des propriétés, soit à titre onéreux, soit à titre gratuit, ne cause aucune diminution des forces productives: le plus souvent même la transmission à titre onéreux par l'achat-vente augmente ces forces en faisant passer les terres aux mains de ceux qui sont le mieux en état de les faire valoir. La suppression de l'impôt des mutations est donc, en tout cas, désirable. Son produit pourrait être remplacé, dans le pays où il existe, par la diminution du nombre des degrés de parenté donnant lieu à succéder ab intestat et par un accroissement de l'impôt foncier.

Qu'est en effet l'impôt sur les mutations d'immeubles, sinon un impôt mal réparti, et d'une perception coûteuse sur la propriété foncière (1)? »

Traité théorique et pratique d'Economie politique, t. II, p. 230,

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