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documents officiels politiques, administratifs, commerciaux, dont plusieurs du plus grand intérêt. On ne nous demandera pas d'en transcrire les titres; mais nous croyons pouvoir dire que chaque fois qu'on éprouvera le besoin de consulter un document important relatif à l'empire ottoman (avec les principautés danubiennes) et anté-rieur à l'année 4860, on aura beaucoup de chances de le trouver dans le livre de M. Heuschling.

MAURICE BLOCK.

L'ALGÉRIE, tableau historique, descriptif et statistique, avec une carte de la colonisation algérienne, par M. J. DuVAL, ancien magistrat, secrétaire du conseil général de la province d'Oran. 1 vol. in-18. Paris. Hachette, libraire.

L'Algérie, cette autre France, ou plutôt ce complément de la France, l'Algérie, qui est appelée à de brillantes destinées commerciales par suite de la fertilité de son sol et de son admirable climat, l'Algérie, qui ouvre à l'activité de notre pays des horizons immenses, n'est pas encore suffisamment connue de la nation qui la possède et qui déjà, par ses sacrifices nombreux, a commencé l'œuvre d'assimilation qui doit un jour se réaliser complétement (1). Aussi les publications destinées à révéler ce qu'est et ce que pourra être cette belle contrée doivent-elles être accueillies avec faveur, lorsqu'elles sont faites consciencieusement, au seul point de vue du vrai.

A ce titre, nous signalons à l'attention de nos lecteurs le livre de M. Jules Duval, qui s'est fait un nom dans la presse par ses remarquables travaux sur notre belle conquête.

Le livre de M. Jules Duval est plein de faits qui éclairent le lecteur sur la situation de l'Algérie. Il commence par une introduction historique, bien faite, qui résume tout le passé de l'Algérie, et la montre successivement sous les périodes mythique, libyque, carthaginoise, romaine, vandale, arabe, turque et française; c'est un tableau plein d'intérêt, où chaque époque est habilement caractérisée. Cette première partie prépare très-bien le lecteur aux développements successifs de l'ouvrage : on prévoit mieux l'avenir d'un pays lorsqu'on en connait

(1) Même en tenant compte de la substitution du terme d'assimilation à celui de colonie, nous ne pouvons nous dispenser de remarquer la contradiction qui existe entre cet article et tel autre beaucoup moins favorable à la domination française en Algérie, inséré dans le Journal des Économistes. Le sujet est de ceux qui nous paraissent autoriser les dissidences et les controverses au sein dù même recueil, pourvu que la réhabilitation du vieux système colonial, cette hérésie économique bien dûment condamnée, n'y soit pas essayée contrairement aux principes que nous y soutenons. (Note de la Rédaction.)

bien le passé ; les fautes commises par les dominateurs antérieurs peuvent éclairer la marche des conquérants civilisateurs.

La deuxième partie est consacrée à mettre en relief le caractère général de l'Algérie, située en face de la France, de l'Espagne et de l'Italie, sur le rivage méridional de la Méditerranée, et déployant un vaste et splendide amphithéâtre de côtes, de collines, de plaines, de montagnes et de plateaux, formant avec la Tunisie et le Maroc la péninsule atlantique. L'Algérie termine au nord-ouest l'extrémité du continent africain, et semble moins appartenir à l'Afrique qu'à l'Europe, vers laquelle inclinent ses pentes, et qu'elle rejoint par des ramifications sous-marines dont les Baléares, la Sardaigne, la Corse, la Sicile, Malte sont les cimes culminantes.

Et puis, entre nous et l'Algérie, la mer est un lien que les progrès de la vapeur et les fils électriques resserrent chaque jour davantage, pour arriver à cette grande unification qui est dans notre pensée et qui ne ressort peut-être pas assez du livre que nous annonçons; c'est le seul reproche que nous voulions lui faire. Ce livre est colonisateur, et nous. nous sommes assimilateur.

L'auteur donne les limites de la possession, sa position astronomique, son étendue superficielle, sa topographie, son système hydrographique, sa division agricole, sa population, dont il décrit parfaitement les races diverses; son climat, qu'il venge des calomnies dont il a été l'objet; son sol; puis il arrive à parler des productions et de la colonisation d'une contrée admirablement appropriée aux besoins de l'homme par la pureté du ciel, par la vertu vivifiante de ses eaux, par la richesse de sa végétation, par le nombre et l'élève facile de ses animaux domestiques, réunissant, d'ailleurs, les principaux éléments d'installation la pierre, la terre à brique, la chaux, le plâtre, le bois, etc.

Il ne lui manquait que la sécurité et la civilisation: la France les lui apporte, et, depuis la publication du livre de M. Duval, le Gouvernement a montré sa sollicitude pour l'Algérie en préparant un vaste système de voies de communication et d'amélioration de ses ports. L'ère nouvelle de la liberté commerciale dans laquelle nous venons d'entrer présage aussi de belles destinées à l'Algérie. Pour nous, nous désirons, non pas qu'elle forme un royaume à part comme apanage du prince impérial, ainsi que paraissent l'avoir demandé quelques personnes lors du voyage de l'Empereur, mais qu'elle accroisse directement la superficie de son futur empire, qu'elle soit arrivée au point que l'on puisse faire dominer l'élément civil dans son gouvernement, y diminuer de plus en plus l'élément militaire, et y arriver à la division départementale, vraiment administrative, pour réaliser une annexion et une assimilation complètes. Là seulement est l'avenir de l'Algérie, sa grandeur et sa force; elle accroîtra ainsi, et ainsi seulement,

la force et la grandeur de la France; autrement, ce n'est plus qu'une colonie, et l'on sait ce que deviennent infailliblement les colonies: demandez à l'Angleterre.

Le livre de M. Duval est de nature à faire comprendre l'importance de cette grande question; c'est à la condition seule de l'assimilation que l'on obtiendra les émigrations nécessaires, qui manquent faute de sécurité dans l'avenir de l'Algérie française.

M. Duval a étudié l'Algérie sous toutes ses faces; il la connaît à fond, et la fait comprendre et aimer. On s'intéresse à elle, et quand on a lu le travail de l'auteur, on se dit : Ce n'est point une colonie de plus que nous avons, mais une extension glorieuse du territoire de la France.

JULES PAUTET.

QUESTION DE L'ÉMANCIPATION DES PAYSANS DE LA POLOGNE, par M. H. NAKWASKY, ancien nonce à la diète. Broch. in-8° de 64 pages. Genève. Henri Georg, éd. 1860.

La question de l'émancipation des serfs de Russie a été abordée ici même plusieurs fois, au point de vue élevé des principes et de la science pure, et non pas avec la préoccupation des intérêts individuels. Nous avons dit notre pensée nettement, et nous avons conseillé, dans la sphère de nos attributions, à la noblesse de Russie de suivre le grand exemple de celle de France et de chercher dans les services rendus et le plus honorable travail les compensations qu'elle réclame à propos de la situation qui lui est faite par la féconde pensée d'Alexandre II.

Bien que le servage n'existe plus de nom en Pologne, il y a toujours des hommes corvéables et dont la position est bien rapprochée de celle des serfs bientôt émancipés de la Russie.

M. Nakwaski, ancien nonce à la diète de Pologne, grand propriétaire de domaines, dont la corvée est l'âme et la raison d'être, est-il bien dans une situation d'impartialité suffisante pour juger des mesures les plus propres à régulariser la position des paysans, glæbæ adscripti, de la Pologne? Nous ne le croyons pas. M. Nakwaski est certainement l'un de ces hommes qui donnent un rang élevé, dans l'estime publique, à l'émigration polonaise; mais il doit résulter de sa position vis-à-vis des paysans de ses domaines une certaine force de chose jugée qui lui permette difficilement de dégager la vérité sur la grave question qu'il aborde.

Dans ses lettres à divers journaux suisses, qu'il voulait voir paraître dans le Journal des Débats, qui s'était déclaré incompétent sur la question et auquel il avait dit : Laissez donc la parole à celui qui est compétent; » dans ses lettres à divers journaux suisses, disons-nous, l'auteur de la brochure qui nous occupe donne un historique plein

d'intérêt des différentes transformations sociales qui sont venues modifier la situation des paysans de la Pologne, et il reconnaît, avec M. Tourgueneff, que l'on n'a accompli que l'émancipation personnelle et non l'émancipation avec une partie de la terre occupée par les paysans. La situation de ces derniers ne s'améliora guère, et si quelques seigneurs adoucirent le sort de leurs villageois, ce fut l'exception.

Lelewel disait « En Pologne, le peuple des campagnes, bien que sujet des seigneurs, n'en était pas moins libre, et ne fut jamais qu'illégalement exposé à leur arbitraire.

Que dire, hélas! d'une législation qui livre des millions de citoyens à l'arbitraire des seigneurs? Si de grandes améliorations ont été apportées à la situation des paysans dans quelques domaines, il n'est que trop vrai de dire qu'en général leur sort a été et est encore des plus déplorables.

Les regrettables excès de la Gallicie, résultats de l'administration autrichienne, durent éloigner les grands propriétaires de leurs domaines et laissèrent le peuple des campagnes, abandonné à lui-même, sans pain, sans appui et sans travail, chercher dans l'abus des liqueurs fortes l'oubli de ses maux, qu'il aggravait encore ainsi.

La situation des paysans du duché de Posen, échu à la Prusse, fut quelque temps plus supportable que celle des villageois des autres parties de l'ancien royaume de Pologne; mais le désir incessant du gouvernement prussien de germaniser le duché afin de l'incorporer moralement, si nous pouvons nous exprimer ainsi, à la monarchie, ne tarda pas à rendre la position des paysans aussi dure et aussi insupportable qu'elle l'est ailleurs.

Nous admettons, avec l'honorable ancien nonce à la diète, que si l'état des paysans polonais fut misérable à une certaine époque, des voix généreuses s'élevèrent pour l'améliorer; mais ces voix généreuses ne sauraient suffire à l'allégement des souffrances des malheureux paysans.

Et puis, qui donc ignore que le plus grand bien pour l'homme, c'est la libre possession de lui-même : « Ah! disait un serf de Russie enrichi << dans le commerce, je donnerais ma maison et mes 600,000 roubles à << mon maître pour être libre ! »

Les paysans de la Pologne ne sont plus serfs, nous le voulons bien; mais ils sont corvéables et glæbæ adscripti, ce qui ressemble trop au servage, que les nobles Polonais ne se le dissimulent pas! Alors que faut-il faire? nous l'avons dit ici même, à propos de la Russie : il faut suivre le noble, l'admirable exemple donné par la noblesse de Charcow, il faut rendre les paysans propriétaires à titre gratuit.

M. Nakwaski reproche amèrement à M. B..., auteur d'une brochure sur cet objet capital, de désigner les grands propriétaires par le titre de seigneurs. Eh! mon Dieu, c'est la force des choses qui a entraîné M. B...

à les désigner ainsi. Tant que les paysans seront corvéables, les propriétaires seront des seigneurs.

Quel projet M. Nakwaski met-il en avant pour élever la condition des paysans? Le voici. Après avoir discuté les dernières ordonnances promulguées dans le royaume de Pologne pour régler les relations réciproques des paysans et des propriétaires, l'auteur développe les propositions qu'il avait déjà faites antérieurement et par lesquelles, dans toute l'étendue de la Pologne, les paysans de chaque village posséderaient en propriété une certaine étendue de terrain avec les bâtiments nécessaires à leur établissement. La valeur de ces terres serait payée aux propriétaires des villages par des lettres de gage donnant un intérêt de 3 p. 100. Les paysans, nouveaux propriétaires, formeraient une association pareille à la Société du crédit foncier; la nation paierait 1 p. 100 pour l'amortissement de cette dette et le trésor garantirait le paiement de l'intérêt de 3 p. 100, qui serait celui des lettres de gage.

Le paysan, selon nous, serait transformé, d'après ce projet, en propriétaire obéré et bientôt insolvable; sa position ne serait pas tenable, il retomberait promptement dans les angoises de la misère et du désespoir.

Nous le répétons donc en terminant, et ce sera notre conclusion à nous, les paysans de la Pologne, comme ceux de la Russie, ont assez fait pour les seigneurs et pour les grands propriétaires dans les siècles passés; ils ont arrosé d'assez de sueur les champs qu'ils ont cultivés, pour qu'il soit de toute justice et de la plus stricte logique, pour qu'il soit aussi de la dignité de tous que le terrain dont ils ont besoin pour vivre, eux et leurs familles, leur soit accordé à titre gratuit.

Tous y gagneront, les grands propriétaires comme les paysans, car la liberté du travail est la seule condition désormais possible pour assurer le repos des peuples.

JULES PAUTET.

DROIT MUNICIPAL DANS L'ANTIQUITÉ, par F. BÉCHARD. 1 vol. in-4°. Paris, Durand, 1860.

Parmi les adversaires de la centralisation, M. Béchard est l'un des plus anciens, des plus constants. Il a compris que le débat, entre ceux qui attaquent la centralisation et ceux qui la défendent, n'aboutirait à aucun résultat, aussi longtemps que les adversaires ne donneraient à leurs thèses ennemies que le fondement fragile des habiletés syllogistiques et des lieux communs oratoires. Il a senti que l'idée de la décentralisation menaçait de dégénérer en thème d'amplifications banales, et il a conçu le projet de la faire entrer dans la voie d'une étude sérieusement scientifique.

L'ouvrage, dont un premier volume a été publié cette année, est la

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