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ni des considérations qui auraient motivé de sa part la demande d'un crédit extraordinaire? Restait la question de savoir comment l'état exercerait le recouvrement d'une somme payée par le trésor pour une dépense que les Chambres auraient refusé d'admettre dans les comptes des ministres, sans les frapper cependant d'accusation sur cette question, la législation était muette, ainsi que le prouvaient les deux projets de loi sur la responsabilité ministérielle, soumis à cette époque à la Chambre des députés.

La Chambre des pairs, après une courte discussion, adopta le projet de loi des comptes avec les amendemens proposés par sa commission (1 avril). Ces amendemens obligèrent de le reporter à la Chambre des députés, qui le vota une seconde fois tel que le lui avait renvoyé la Chambre des pairs (23 avril ).

Cette dernière Chambre consacra plusieurs de ses séances à l'examen d'un projet de loi sur la police du roulage, qui lui avait été présenté par le ministre du commerce et des travaux publics (12 décembre). Depuis long-temps, l'excès des chargemens des voitures circulant sur les routes du royaume excitait les plaintes les plus vives. Chaque année, la plupart des conseils généraux demandaient avec instance que les tarifs autorisés par le décret du 23 juin 1806 fussent modifiés, et que la destruction des chaussées cessât d'être en quelque sorte légalement organisée. Vainement, en effet, des sommes considérables étaient dépensées annuellement, si les routes devaient être aussitôt détruites que réparées. Les sacrifices qui pourraient encore être réclamés du trésor, soit pour ouvrir de nouvelles routes, soit pour mettre en état de viabilité des routes déjà ouvertes, seraient complètement perdus. Mais à côté de l'importance, de la nécessité de soulager les routes, se trouvait le danger de porter atteinte à l'industrie du roulage et à tous les intérêts qui s'y rattachent. Tels étaient les deux termes du problème que dans son projet de loi le gouvernement avait essayé de ré

soudre. Posant d'abord le principe de la limitation des chargemens, il avait fixé les proportions dans lesquelles cè principe devait être appliqué, et déterminé le mode le plus efficace pour en vérifier et en prévenir l'excès.

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Dans un rapport très-étendu, M. le baron Mounier rendit compte des nombreux amendemens dont la commission chargée de l'examen du projet, l'avait jugé susceptible (ti février). La discussion, s'ouvrit quelques jours après, et sa durée suffirait pour attester à quel point elle fut scrupuleuse et sévère (20, 21, 22, 25, 26 et 27 février). Le principe restrictif du projet de loi fut d'abord légèrement contest par deux orateurs, MM. de Montlosier et Roederer. M. de Montalivet se plaignit de ce que sa présentation n'eût pas été accompagnée de tous les documens nécessaires. Le ministre de l'intérieur répondit à ce reproche ainsi qu'aux autres attaques dirigées contre le projet le rapporteur, M. Mounier, se joignit au ministre, en développant la méthode suivie par le gouvernement pour arriver à la rédaction de sa loi. Ensuite la Chambre aborda la discussion des articles, discussion trop minutie se, trop spéciale pour que l'analyse en offre quelque intérêt et quelque fruit. Lorsqu'on en vint au titre IV, relatif à. la forme des procédures en cas de contravention, M. de Pontécoulant rappela ce qu'avait dit M. de Montlosier dans la discussion générale, que la loi sur la police du roulage semblait le ramener à la loi sur l'état de siége. L'honorable membre voyait dans ce titre IV. un empiétement sur les droits garantis par l'article 53 de la Charte, qui défend de distraire personne de ses juges naturels. Il pensait que maintenir dans la loi la juridiction des conseils. de préfecture, ce serait établir une exception étrange dans la législation française. Le débat s'engagea donc sur la prétendue inconstitutionalité du titre IV. M. le président Boyer avait proposé un amendement tendant à conférer aux tribunaux de simple police la connaissance des contraventions que le projet de loi attribuait aux maires et aux conseils de

préfecture. Cet amendement, appuyé par MM. de Pontécoulant, Grouchy, de Bastard; de Barante, et combattu par MM. Girod (de l'Ain), Villemain, qui s'entoura d'une masse imposante d'argumens et d'autorités, notamment de celle de M. de Cormenin, auteur des Questions administratives, fut enfin écarté au moyen de l'adoption de l'article 27 du projet amendé par la commission. En résultat la Chambre admit le projet de loi à une immense majorité (113 voix contre 14).

Communiqué à la Chambre des députés (26 mars), M, Piscatory en fit le rapport (23 avril), quelques jours seulement avant la clôture de la session, ce qui empêcha de l'examiner; et depuis cette époque la discussion n'en a pas été reprise.

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La loi du 22 mars 1831 avait prévu que l'organisation des gardes nationales pourrait ne pas présenter immédiatement dans tout le royaume les mêmes conditions d'opportunité; aussi son article 124 contenait-il une disposition exceptionnelle qui confiait au roi le droit de suspendre cette organisation pendant trois ans dans les communes rurales, et pour une année dans les communes formant un ou plusieurs cantons. Le gouvernement n'avait eu besoin d'user de cette faculté qu'à l'égard de six communes, savoir : en Corse, Ajacio, Bastia, Bonifacie et Corte; dans les Bouchesdu Rhône, Arles et Tarascon. Mais les considérations qui avaient motivé cette mesure parurent en exiger le renouvellement, et le ministre de l'intérieur soumit à la Chambre des députés un projet de loi tendant à en obtenir une prorogation d'une année (21 janvier). La commission, dans son rapport (15 février), fit observer que l'organisation de la garde nationale avait été suspendue non-seulement dans les quatre villes de la Corse, mais encore dans toutes les autres communes du département. Elle pensa qu'on ne pouvait, sans une nécessité clairement démontrée, maintenir un département entier sous ce régime exceptionnel. En conséquence, et comme le ministère n'avait allégué, pour appuyer sa demande, qu'un fait unique relatif à la ville de

Corte, elle proposa de limiter la faculté de prorogation aux communes de Corte, d'Arles et de Tarascon.

22 et 25 février. Un député de la Corse, M. Limpérani, ouvrit la discussion en prenant hautement la défense du pays qu'il représentait il invoqua les comptes rendus de l'administration criminelle, dont la balance prouvait que d'année en année le jury avait exercé son action répressive avec une énergie croissante, honorable pour le courage et le patriotisme des habitans; il invoqua les résultats satisfaisans qu'avait produit l'exécution de la loi sur l'organisation municipale; il attesta les progrès de l'instruction primaire, et enfin les services rendus par la Corse dans les diverses crises par lesquelles la nation française avait passé. Il rappela que la Corse avait déjà plusienrs fois fait l'essai d'une garde nationale en 1790, en 1815 et en 1830. A cette dernière époque, et durant les deux mois que la Corse resta sans préfet, sans lieutenant-général, sans procureur-général, en un mot sans direction, sans chef, la garde nationale, subitement organisée en face d'un régiment suisse, avait seule été chargée de maintenir la paix publique, et l'on ne pouvait citer un crime commis pendant ce temps dans une des quatre villes dont il était question au projet de loi. L'orateur faisait ensuite valoir tous les motifs qui militaient en faveur de l'organisation de la garde nationale de Corse.

Le ministre de l'intérieur répondit à l'orateur, et au général Tiburce Sébastiani, qui avait parlé dans le même sens. Plusieurs orateurs furent encore entendus. Le rapporteur, M. Péan, termina le résumé de la discussion par ces mots, qui s'appliquaient à M. Limpérani: « Je ne serai démenti par aucun de vous, messieurs, en disant que le pays qui a trouvé dans son sein un tel organe de ses sentimens et de ses vœux, a montré qu'il était digne de toutes les institutions destinées à consolider la liberté ».

La Chambre des députés adopta le projet avec les res

trictions que la commission y avait mises, et la Chambre des pairs sanctionna ce vote sans discussion (28 mars).

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La Charte de 1830 avait posé les bases d'une réforme dans la législation coloniale. L'application du grand principe de l'égalité devant la loi et de la participation des citoyens à l'administration de leurs intérêts communs devait être faite sans retard aux hommes de couleur libres, trop long-temps exclus de la jouissance des droits politiques, et même de la plénitude des droits civils. Le perfectionement des idées morales ayant détruit en Europe et affaibli jusque dans les colonies. les traces du préjugé, autrefois invincible, qui s'attachait au souvenir de l'esclavage; l'état exceptionnel des hommes de couleur n'avait plus de prétexte. On pouvait sans péril les arracher au cercle vicieux dont les entouraient les lois anciennes. Dans la session précédente, le gouvernement avait soumis à la Chambre des députés deux lois ayant pour objet, l'une d'admettre les hommes de couleur libres et les affranchis à la jouissance des droits civils et politiques, l'autre de déterminer les bases du régime législatif aux colonies. Ces deux lois avaient été renvoyées à des commissions qui firent leur rapport; mais la clôture de la session survint avant que ni l'une ni l'autre pussent arriver jusqu'à la discussion .Dans l'intervalle de la session de 1831 à de celle 1832, le gouvernement eut le temps de profiter des lumières émanées du travail des deux commissions, de recueillir celles que lui fournirent concurremment les conseils généraux, les gouverneurs, les conseils privés, les délégués des colonies, la presse; et les deux lois ainsi perfectionnées furent portées à la Chambre des pairs par le ministre de la marine (28 décembre),

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M. Gautier en présenta le rapport ( 13 février ).

« Bien que ces deux lois, dit-il, aient deux objets tout-à-fait distincts, elles ont pourtant entre elles une intime connexité.

« L'une reconnaît aux gens de couleur libres et aux affranchis d'abord la plénitude des droits civils, ensuite les mêmes droits politiques à l'exercice desquels seront admis, après l'adoption de la seconde loi, les citoyens de naissance ou d'origine européenne.

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