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tendent à faire croire que le cuivre et le plomb proviennent des aliments, qui le reçoivent eux-mêmes des ustensiles de cuisine, du terrain etc. Dans tous les cas, la quantité du cuivre a été plus forte que celle du plomb, si ce n'est chez les personnes qui ont succombé à une encephalopathie saturnine. Outre ces deux métaux, ils ont toujours trouvé du manganèse. M. Barse a rencontré aussi presque constamment du fer; nous avons fréquemment trouvé ce métal.

Les procédés en usage pour déceler le cuivre normal, ou plutôt qui peut se rencontrer naturellement dans nos organes, dans les aliments, les boissons, etc. sont, ceux de l'incinération simple, de la carbonisation par l'acide azotique et le chlorate de potasse, ou par l'acide sulfurique, poussés jusqu'à incinération. MM. Barse, Lanneau et Follin, en agissant, par ces trois procédés, sur le tube intestinal de deux personnes, dont l'une était morte après 3 heures de séjour à l'hôpital, et l'autre après trois mois, à la suite d'une affection chronique des organes pulmonaires, ont obtenu des résultats négatifs, en poussant l'opération seulement jusqu'à carbonisation, et affirmatifs en la portant jusqu'à incinération. M. Barse cependant, dit ne pas avoir retiré du cuivre, du plomb normaux de tous les cadavres. Four obtenir à la fois le cuivre et le plomb, après avoir lavé les cendres, on les traite par de l'eau régale étendue de 3 ou 4 parties d'eau; on filtre et on évapore les liqueurs à siccité. Le résidu est repris par l'eau distillée aiguisée d'acide chlorhydrique; les liqueurs sont filtrées et soumises à un courant d'acide sulfhydrique. Il se forme un précipité roussâtre, composé de sulfure de plomb et de cuivre, d'un peu de soufre et de fer. Après l'avoir bien lavé, on le dissout dans l'acide azotique étendu et on précipite le soluté par un excès d'ammoniaque. La liqueur ammoniacale évaporée à siccité laisse un résidu cuivrique, qui est dissous dans de l'eau aiguisée pour constater les caractères des sels du cuivre. Le précipité obtenu par l'ammoniaque ou l'oxyde de plomb, chauffé avec un peu d'acide chlorhydrique, puis desséché lentement, laisse un résidu, qui

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brunit par l'acide sulfhydrique et se colore en jaune par l'iodure de potassium.

Les non-partisans du cuivre et du plomb normaux, ou plutôt les chimistes qui nient que ces métaux fassent partie de nos organes, ne sont pas moins nombreux et moins marquants dans la science. Ains Christison n'a pas retiré du cuivre du sang, des muscles, de la moelle vertébrale, même des animaux auxquels il donnait une préparation cuivreuse. M. Chevreul n'en a pas obtenu non plus de la viande du bœuf, du mouton, ainsi que du blé. M. Koperynschy, qui a publié un travail intéressant sur la sophistication du pain n'en a pas trouvé des traces dans les graines céréales. Tout récemment MM. Flandin et Danger ont nié non-seulement l'existence du cuivre normal, mais encore, comme Christison, ils n'ont pas obtenu ce métal de la chair, des os, des viscères, des urines des animaux, soumis, pendant 9 mois, à l'usage des aliments mêlés à des proportions croissantes d'acétate, de sulfate cuivriques, de manière à porter la dose à 2 centigr. par repas de 24 en 24 heures. La quantité, employée en 276 jours, a été de 25 gram. D'où ils concluent que le cuivre, et en général les poisons ne sont point assimilables, que, par conséquent, ils ne peuvent se rencontrer naturellement dans nos organes, étant incompatibles avec l'état de santé. Ces conclusions nous paraissent par trop absolues; car plusieurs poisons sont employés comme médicaments, et l'analyse, en ce cas, les a décelés dans nos tissus; ensuite il resterait à démontrer si les sels de cuivre ne sont pas revivifiés par nos organes et rendus ainsi inertes. Nous verrons ci-après que l'argent a été retiré du pancréas et autres organes des personnes qui, depuis plusieurs années, avaient cessé l'usage du nitrate d'argent, comme médicament.

En n'ayant égard qu'aux opinions si contradictoires des artisans et non partisans du cuivre normal, la question paraîtrait être non résolue, et, dans un cas d'expertise, il serait difficile de se prononcer. Mais par un examen attentif des faits, on voit que les premiers admettent que le cuivre ne se rencontre pas constamment dans tous les cadavres, dans les organes,

qu'il ne s'y trouve qu'accidentellement; c'est ce qu'admettent aussi leurs adversaires; par conséquent, sauf les opinions si absolues de MM. Flandin et Danger, il n'y a plus sujet à contestation, cette question devient une question de toxicologie générale, et s'applique aussi bien à l'arsenic qu'au cuivre, et qu'à la plupart des autres poisons métalliques. Nous pensons la commission de l'Institut arrivera aux mêmes conclusions que M. Chevreul: : que le cuivre ne fait pas partie constituante de nos organes, comme le fer, la chaux, etc., mais qu'il peut s'y trouver accidentellement, par l'intermédiaire des aliments, des boissons, des médicaments, etc. C'est encore par conséquent une cause d'erreur à signaler.

que

Faits pratiques:

Le cuivre et les accidents qu'il peut déterminer, par suite de son emploi comme ustensile de cuisine et dans les arts, étaient connus dès la plus haute antiquité. Une loi de Moïse prescrivait la propreté des vases en cuivre destinés aux Lévites; les Egyptiens, les Hébreux en faisaient des vases sacrés; les Grecs, les Romains, des alliages pour des instruments d'art, de guerre, pour les outils, les médailles. De tout temps, ce métal ou les alliages ont servi comme ustensiles de cuisine, de pharmacie, etc. Allié à l'or, à l'argent, à titre légal, il fait partie des monnaies, des vases, afin de rendre ces métaux moins malléables et plus usuels. Il entre dans la composition du laiton ou cuivre jaune, du bronze, du maillechort et autres alliages si fréquemment usités les acétates, le sulfate, l'arsenite, les oxydes, les carbonates, les cendres bleues, etc., servent dans la teinture, la peinture, quelquefois et malheureusement à colorer les bonbons, les liqueurs.

Le conseil de salubrité a constaté que la plupart des accidents survenus à la suite d'un repas étaient dus aux aliments, aux boissons préparés ou conservés dans des vases en cuivre. Ce métal ne pouvant être remplacé que très-difficilement par d'autres métaux, afin d'obvier à ces accidents, de les prévenir, on a eu recours à l'étamage, qui consiste à couvrir les vases

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de cuivre d'une couche d'étain. Ce dernier étant plus oxydable, s'oppose à l'oxydation du cuivre, à sa transformation en sel conditions nécessaires pour qu'il agisse comine poison. Mais, les vases étamés ne peuvent servir à tous les usages, par exemple, à lá cuisson, à la préparation des aliments qui demandent une température un peu élevée, celle des confitures, des sirops, de la graisse, parce qu'autrement l'étain fondrait. Ensuite, l'étamage s'use assez promptement par l'écurage, les frottements les met's acides, de sorte qu'il ne peut guère préserver une casserole en cuivre que pour 1 mois et demi, en supposant qu'on s'en serve journellement. En effet, la couche d'étain est si légère qu'une casserole de 0,244 mètres (9 pouces) de diamètre, sur 0,086 mètres (3 pouces, 3 lignes) de profondeur, n'acquiert en poids, par l'étamage, que 105 centigr. (21 grains), d'après Bagen et Charlard. D'ailleurs, les acides végétaux attaquent facilement l'étain. Enfin, dans un but d'économie, on se sert quelquefois d'un étamage où entre beaucoup de plomb, métal qui, comme le cuivre, n'est pas sans inconvé nient. Malouin a proposé de remplacer l'étain par un plaqué de zinc; mais ce métal est trop facilement attaqué par les aliments. Le doublé d'argent proposé par Navier serait certainement préférable, s'il n'était d'un prix trop élevé. Espérons que la galvanoplastie parviendra à couvrir les vases en cuivre d'une couche d'or, d'argent ou de platine, de manière à rendre ces vases inoffensifs, en les mettant à la portée de toutes les fortunes. En attendant cet heureux résultat, il importe de les tenir dans la plus grande proprete, et toujours bien secs, bien brillants, de renouveller souvent l'étamage, d'éviter enfin toutes les circonstances qui pourraient oxyder le cuivre, le faire passer à l'état de sel. C'est probablement en se conformant à ces preceptes, que les anciens peuples ont pu se servir des vases en cuivre non étamé sans accident; usage encore suivi en Bohème, d'après Fodéré, et dans quelques départements de la France, etc. Ainsi, dans plusieurs parties du département de l'Aveyron, on conserve encore l'eau dans ces sortes de vases, sans influence fàcheuse. Les alliages de cuivre,

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quoique, en général, moins dangereux, doivent être surveillés avec le mêmé soin. Le Dr Tassereau nous a communiqué qu'une dame avait éprouvé les symptômes d'intoxication cuivreuse, pour avoir laissé une cuiller en maillechort dans de l'anguille préparée au beurre et au vinaigre et renfermée dans un vase en faïence. La même cuiller, bien nettoyée, déposée dans un mélange de choux, de pain, de beurre et de vinaigre, offrait, après 12 heures de contact, des taches verdâtres, manifeste'ment cuivreuses aux réactifs chimiques. Comme, d'après Darcet, le véritable maillechort serait préférable à l'argent à bas titre, cette cuiller était probablement du faux maillechort. Ayant déjà indiqué les circonstances dans lesquelles les vases en cuivre pouvaient acquérir des propriétés toxiques, il nous reste maintenant à appuyer ces assertions de quelques faits.

Les épinards, l'oseille et autres herbes, préparés dans des vases en cuivre, les cornichons conservés dans du vinaigre auquel on a ajouté à dessein quelques sous, offrent une couleur verte, plus foncée et plus agréable que lorsqu'ils sont préparés ou conservés dans des vases de terre, de porcelaine, etc. Cette couleur est due aux sels de cuivre, qui s'y trouvent quelquefois en assez grande quantité pour occasionner des accidents; alors, une aiguille bien décapée, plongée daus ces aliments, se couvre bientôt d'une couche cuivreuse. Dupuytren a vu des personnes éprouver des coliques, des vomissements, pour avoir mangé de la salade, assaisonnée avec du vinaigre, vendu dans de petits tonneaux dont les robinets étaient en cuivre. Drouart eut, pendant trois jours, des coliques, de la diarrhée, pour avoir mangé un ragoût assaisonné avec du vin conservé dans des tonneaux dont le robinet était aussi en cuivre. Dans ces deux cas, le robinet, s'est oxydé à l'intérieur sous l'influence de l'air humide, et la couche d'oxyde s'est dissoute dans l'acide acétique du vin ou du vinaigre. Il nous vient en souvenir de notre jeune âge, que, lorsqu'on soutirait du vin dans des vases en cuivre, on mettait dans ces vases une clef, et que celle-ci devenait toute rouge en se couvrant d'une couche cuivreuse. C'est en effet un bon préservatif. Les

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