étendue en surface, une traînée de points éclatants ressemblant jusqu'à un certain point à des follicules muqueux hypertrofiés, mais s'en distinguant par leur blancheur. M. Boulay fait administrer à un cheval 250 à 300 gram. d'acétate de plomb liquide; il survient des coliques de peu de durée, et, comme symptôme le plus remarquable, la paralysie des muscles laryngés et pharyngés. Ces conduits semblent être convertis en tubes inertes; les liquides passent en partie dans l'estomac et les poumons; l'insensibilité de la muqueuse laryngée est telle que l'animal ne semble pas avoir conscience de l'erreur du lieu, ne manifeste pas la moindre toux, le moindre signe dyspnéique, asphyxique; quelquefois cependant, lorsque la dose du sel est un peu forte, l'animal tombe d'une seule masse, au bout de quelques minutes, les poumons alors ne pouvant opérer l'hématose. Lorsque la mort n'est pas immédiate, il survient des symptômes généraux en rapport avec l'étendue de la lésion de l'appareil respiratoire. A l'autopsie, muqueuse pharyngée, glottique et épiglottique sèche, ridée, jaunâtre et recouverte d'un coagulum de même couleur, adhérent; poumons infiltrés du sel plombique, plus durs, plus friables, offrant, à la coupe, des marbrures jaunâtres que l'acide sulfhydrique colore immédiatement en noir. Les intestins sont aussi tapissés d'un coagulum jaunâtre adhérent, et le diamètre des intestins grêles diminué à ce point que c'est à peine s'il est possible d'y introduire le doigt. Nous devons ces détails à l'obligeance de M. Lassaigne. L'injection, dans la veine jugulaire d'un chien, de 65 centigram. (13 grains) d'acétate de plomb du commerce dissous dans 6 gram. d'eau, ont produit trois ou quatre inspirations profondes et une mort immédiate sans douleurs ni convulsions. Ouvert sur-le-champ, le cœur, qui battait avec force, renfermait, dans ses deux cavités, du sang fluide; les poumons étaient roses et crépitants. 25 centigram. (5 grains) du même sel ont déterminé la mort en cinq jours. Les effets se sont déclarés seulement le troisième jour. Il y a eu de l'abattement, refus d'aliments, difficulté de marcher; de temps en temps de très-légers mouvements convulsifs, une grande faiblesse. Les poumons et l'estomac étaient sains. 50 centigram (10 grains) du même poison ont occasionné immédiatement de la suffocation, une grande gêne de la respiration, un écoulement de sérosité roussâtre par la bouche, et la mort en trente-cinq minutes, sans vertiges, ni convulsions, ni paralysie. Poumons livides par plaques, plus denses, peu crépitants; cœur vide se contractant à peine; les autres organes sains. M. Gaspard ayant injecté dans la veine jugulaire, en une ou deux fois, une dose insuffisante d'acétate de plomb dissous, pour tuer un chien, 5 à 10 centigram. (1 à 2 grains), il s'est manifesté, dès les premiers jours, un état de malaise, puis de la fièvre avec soif, narines sèches, perte d'appétit, de l'abattement, ensuite de l'amaigrissement, une espèce d'état scorbutique avec hémorragies passives des muqueuses intestinale et vésicale. Les matières fécales, les urines étaient noires, fétides. L'animal a succombé du cinquième au septième jour. Les poumons étaient ecchymosés par plaques, de même que les intestins grêles, lesquels, ainsi que les gros et la vessie offraient un enduit muqueux noirâtre. Quant aux faits recueillis chez l'homme, Dupuytren, MM. Fouquier, Gendrin ont donné l'acétate de plomb cristallisé, à la dose de 60 centigram. à 1 gram. sans accidents, sans déterminer l'empoisonnement aigu, et Rivière et Gardner, à celle de 4 à 8 gram. (1 ou 2 gros). Desbois de Rochefort parle d'un Anglais qui aurait pris un verre d'eau de Goulard assez concentrée pour de l'orgeat, sans être incommodé. Dussaussoy cite un fait semblable. Nous verrons cependant des doses moindres de ce sel, mais fractionnées, produire l'empoisonnement lent. Un soldat, pour se guérir d'une diarrhée, prit, dans da lait, 2 dragnes d'acétate de plomb, en deux fois; peu de temps après la première dose, douleurs intestinales avec sentiment de distension autour de l'ombilic; après la seconde, ces symptômes deviennent plus aigus; le malade est pris aussitôt de vomissements bilieux, de perte de la parole, de délire, de sueurs abondantes, de ralentissement du pouls, quarante pul sations. Il s'est rétabli, à l'aide des délayants et des cathartiques (Christison). Dans les trois observations que nous rapportons aux faits pratiques, la dose du poison n'est pas déterminée; mais on peut la fixer, à priori, à celle de 20 à 50 gram. Un seul a succombé. Les symptômes observés sont : pâleur, défaillance syncopale, précédés ou suivis de vomissements; anxiété précordiale; pouls faible, filiforme, ralenti; altération des traits; douleurs, coliques abdominales avec sentiment de constrictions, de distension; abattement général; lassitudes, engourdissement des membres; pas de selles, et même constipation; et enfin quelquefois aphonie, trismus, convulsions. Un seul malade a succombé, le troisième jour de l'intoxication; le corps était d'un jaune pâle, le ventre fort dur et très-contracté, presque la totalité du tube intestinal et autres viscères abdominales étaient enflammés (Observ. V). Ces lésions n'étaient probablement que des congestions sanguines passives. Cependant, dans un empoisonnement crimine! (questions médico-légales), la muqueuse gastrique était rouge de feu et corrodée en certains points; contractée, ratatinée, plissée, ecchymosée en d'autres ; la muqueuse duodénale et des petits intestins brune noirâtre, les valvules conniventes, les muqueuses cœcale, rétale couleur lie de vin ou rouge cerise. De quelques observations chez l'homme et des expériences sur les animaux, on peut conclure, je crois, que les préparations plombiques sont des poisons peu actifs et fort peu irritants, qu'elles donnent lieu aux mêmes effets dans l'empoisonnement lent et aigu, effets variant seulement dans leur plus ou moins grande intensité; qu'elles agissent spécialement sur le système nerveux de la vie organique et de la vie de relation, et probablement aussi sur le sang. Pour valider ces conclusions, nous pourrions nous étayer des symptômes gastro-intestinaux qui ne sont pas inflammatoires, de même nature en fin que ceux qu'on observe dans l'empoisonnement par les autres poisons minéraux, et qu'il en est probablement de même quant aux lésions, lesquelles ne nous paraissent être que des phénomènes congestionnels. Ajoutons enfin que les sels plombiques solubles sont fréquemment usités pour combattre les inflammations externes. B. Empoisonnement lent. Les préparations plombiques, en pénétrant peu à peu dans l'organisme, donnent lieu à un empoisonnement lent, à ́une affection spéciale, appelée colique ou plutôt maladie șaturnine. Il n'est pas démontré que cette maladie puisse se produire exclusivement par la peau; les auteurs sont en désaccord sur ce point, comme nous le verrons aux faits pratiques. La science possède au contraire un grand nombre de faits de cette espèce d'intoxciation: 1o par l'acétate de plomb donné à l'intérieur comme médicament dans les cas de gonorrhée, de leucorrhée, de catharre, de phthisie, etc.; 20 par l'application du sparadrap, du cérat saturnisé sur une plaie (Observation I) ou par l'emploi de l'eau de goulard, en fomentation, en collyre, en injection dans le vagin (Observation II); 3° par l'usage des aliments, des boissons, des condiments, des eaux distillées, devenus accidentellement plombiques. 4° Enfin, cette affection s'observe surtout chez les ouvriers qui travaillent les prépara tions plombiques, qui sont exposés aux émanations plombiferes (Observation III et suivantes). Prédisposition. Toutes choses égales d'ailleurs, l'affection saturnine est plus fréquente dans les saisons chaudes que dans les saisons froides. Les animaux y sont sujets comme l'homme. Les enfants paraissent la contracter plus facilement que l'adulte, et celui-ci plus facilement que les vieillards; les femmes au contraire y seraient moins sujettes que l'homme. On ne l'a pas observée chez les enfants à la inamelle, quoique, d'a près Chaussier, la poudre de céruse, dont on saupoudre quelquefois les excoriations des aines, puisse la produire; mais, il faut l'avouer, on a fort peu de données à cet égard, et ce sont en général des hommes de trente à quarante ans qui sont occupés à ces travaux. Nous en dirons autant quant à la constitution, au tempérament. Les personnes adonnées aux boissons, aux écarts de régime, y sont plus prédisposées et souvent même l'affection saturnine éclate après une ribote. L'invasion de cette maladie est aussi très-variable. Les uns en sont atteints après un travail de quelques jours, de quelques mois, d'une ou plusieurs années, tandis que chez d'autres ce n'est qu'après un travail de dix, vingt et trente ans. Chez celui-ci elle est légère, chez celui-là très-intense, quoique, dans les deux cas, les circonstances soient les mêmes. Une première attaque prédispose à une autre. Les récidives sont plus ou moins nombreuses; tel en est atteint tous les mois, tous les ans ; il en est même qui l'ont eu six, huit et même vingt, vingt-trois fois et plus. Les rechutes sont fréquentes et se manifestent chez le vingtième des malades; elles ont lieu ordinairement après des écarts de régime et dans l'intervalle de un ou plusieurs jours après la guérison. M. Tanquerel des Planches, à qui nous empruntons ces détails et la plupart de ceux qui vont suivre, cite un peintre qui a eu tous les ans et pendant sept ans une attaque de la maladie saturnine, quoique, pendant tout ce temps, il ne se soit pas exposé à l'influence des préparations plombiques. Symptômes prodromiques. L'affection saturnine, avant le développement des symptômes spécifiques, et quelle que soit sa forme, s'annonce, le plus souvent, surtout chez les personnes qui ont été soumises pendant quelque temps à l'influence des préparations saturnines, par quatre caractères particuliers: 1° la coloration des dents et de la muqueuse buccale; 2o la saveur et l'haleine saturnine; 3o l'ictère saturnine; 4o l'amaigris sement. Le premier et le plus fréquent de ces symptômes prodromiques, est la coloration d'abord violacée, puis bleuâtre ou gris-ardoisé et dans l'étendue de une à deux lignes de la portion gengivaire la plus voisine des dents, surtout des canines et des incisives. Cette couleur contraste avec la teinte rosée des autres parties de la muqueuse gengivaire on buccale, qu'elle envahit cependant quelquefois. Les dents, le plus ordinairement, deviennent brunâtres, surtout au collet, se déchaussent par l'usure des gencives, se carient et se cassent facilement. Cette coloration paraît être due à la formation du sulfure de plomb, car elle disparaît par l'eau oxygénée ou par des layages |