Images de page
PDF
ePub

mitif et donné 6 millions pour l'annexe, il consentit à rembourser les actions de 100 fr. à 80 fr., et il garda l'immeuble que vous connaissez dans les Champs-Élysées.

En résumé, l'Exposition universelle a-t-elle réussi? Oui, beaucoup mieux qu'on ne s'y attendait, car tous les peuples ont pu fraterniser entre eux. Si le gouvernement eût voulu faire tous les frais, alors seulement les entrées et tous les monopoles dont on se plaint auraient dû être gratis. Mais a-t-il voulu, du consentement des Chambres, en faire les frais? N'aurait-on pas dit partout que l'argent était gaspillé et que les curieux pouvaient bien payer un droit d'entrée.

On l'a bien appelée la foire aux curieux; alors pourquoi donc ne pas faire payer les curieux : c'est certes un impôt bien légal.

Le gouvernement y perdra-t-il ? Non. Il a donné un monument à l'industrie qui le lui payera. La ville de Paris rentrera, et bien au delà, dans son argent, par l'augmentation du produit des octrois. Et, comme c'était une entreprise particulière en participation avec le gouvernement, il fallait des produits, qui ont peu coûté aux curieux, car la grande dépense n'a pas été celle payée à la porte de l'Exposition, c'est le prix d'une course de voiture. Seulement le peuple, à qui 40 sous peuvent faire faute, s'est peu plaint. Ce sont ceux qui peuvent payer bien au delà qui en ont fait un objet de critique. Ne seraient-ils venus apporter leurs capitaux que pour faire une entreprise particulière qui n'eût rien produit? Non sans doute.

On a fait ce qu'on a pu. Le gouvernement, en donnant 6 millions; la Ville, en donnant également 6 millions, ont engagé les actionnaires à donner 8 millions.

Ce qui a été fait a donc été bien fait, sauf de petites erreurs ou de petites omissions, car les hommes ne sont pas des dieux; et l'Exposition universelle de 1867 restera dans la mémoire des peuples comme la merveille unique des temps modernes.

M. BATBIE fait observer qu'il ne s'agit pas de savoir si l'Exposition a réussi ou non, mais uniquement de rechercher les conséquences économiques de ce fait. Les plus grands événements de l'histoire, les croisades, la Révolution française et d'autres d'une moindre importance sont tous les jours étudiés dans leurs conséquences économiques. Pourquoi l'Exposition universelle, qui est un bien petit fait à côté de ceuxlà, échapperait-elle au jugement scientifique? M. Michel Chevalier est un ardent ami du progrès; mais l'honorable M. Batbie, tout en reconnaissant qu'à d'autres égards l'éminent économiste a droit à son respect, ne croit devoir le céder à personne quand il s'agit d'attachement à la grande question du progrès. Cependant n'y a-t-il qu'une manière de la servir et faut-il ranger ceux qui signalent les inconvénients à côté du

bien parmi les charançons et les tardigrades? Comment! Les uns croient que l'industrie retirerait des résultats meilleurs d'expositions spéciales ; ce système, à leurs yeux, imprimerait au progrès un mouvement plus fécond. M. Michel Chevalier pense, au contraire, que le système de l'Exposition universelle est préférable. Cette divergence n'est certes pas assez importante pour servir de base à une séparation dans l'école économiste. Comment pourrait-on, sur un aussi léger dissentiment, appuyer la distinction entre le parti des économistes rétrogrades et celui des économistes progressistes?

M. LAMÉ FLEURY vu l'heure très-avancée, demande une seconde fois la parole, non pour se plaindre du spirituel apologue des charançons qu'a raconté M. Michel Chevalier, à qui toutefois il pourrait demander s'il n'y a pas lieu de faire une distinction entre les diverses sortes de mouvement et de proscrire, par exemple (en restant dans les comparaisons tirées du règne animal), l'inutile agitation de l'écureuil.

Il croit seulement devoir protester contre cette nécessité d'une excitation universelle, dans laquelle un des préopinants voit le principal avantage de l'Exposition internationale. En entendant émettre cette assertion, il ne pouvait s'empêcher de se rappeler la lettre, classique. parmi les économistes, que M. Biot écrivait, en 1828, au directeur de la Revue Britannique et où est dépeinte, en termes si éloquents et si pratiques, la puissance de l'intérêt individuel abandonné librement à ses instincts de production. Là est la vérité économique et non ailleurs!

M. Lamé Fleury revient sur la distribution des récompenses dont il trouve le principe même très-vicieux, eu égard à la nature des concours, au nombre excessif des concurrents, à l'impossibilité où se trouve forcément un jury, quelque bien composé qu'il soit, de procéder, dans la plupart des cas, autrement qu'au hasard. Non! le mécontentement des exposants évincés (pour ne pas parler du personnel déçu de la Commission et des jurys) ne se produit pas seulement comme dans toute réunion d'hommes qu'il faut partager en élus et en exclus; il a trèssouvent une cause légitime. Il est, dit en terminant M. Lamé Fleury, un propos tenu par le principal personnage d'une pièce en vogue qui lui semble être la satire, fort exacte et fort spirituelle, de la question des récompenses à l'Exposition universelle. M. Benoîton, ancien fabricant de sommiers élastiques, s'étonne que le gouvernement ne décore pas ceux qui donnent l'exemple de la fortune! L'ambitieux fabricant doit regretter de s'être retiré des affaires avant 1867, car il aurait pu espérer être au nombre de ceux qui n'avaient absolument d'autre titre que la richesse à figurer parmi les récompensés de l'exhibition du Champde-Mars.

BIBLIOGRAPHIE

ANNUAIRE DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE ET DE LA STATISTIQUE, par MM. Guillaumin, Joseph Garnier, Maurice Block.- 1867, par M. Maurice BLOCK, etc. 24° année. Paris, Guillaumin et C. 1867. Fort in-18. TABLE GÉNÉRALE alphabétique et analytique des matières contenues dans les vingt-quatre volumeș parus de 1844 à 1864. Paris, Guillaumin et Ce. In-18 de 232 p.

Quand les nationalités sont remaniées, alors que des circonscriptions nouvelles surgissent, que des établissements s'élèvent et tombent si vite, comme nous venons de voir s'élever et tomber l'empire du Mexique, avec un si douloureux drame pour péripétie, on aime à pouvoir se rendre compte de la situation respective des États, de leur puissance militaire, de leur force commerciale, de leurs ressources financières; quand la presse si vive et si alerte d'une part, et les corps publics d'autre part, se livrent à des études dont la profondeur est l'un des caractères de notre époque, ou éprouve le besoin de s'entourer des documents officiels qui doivent servir de base au contrôle que l'on veut exercer soi-même.

Comment faire, en présence des collections énormes de toute nature qui formeraient à elles seules une bibliothèque des plus nombreuses ? Le courage le plus éprouvé pálit devant cet amas de chiffres entassés comme Pélion sur Ossa. Mais, grâce à la fructueuse initiative prise par le regrettable M. Guillaumin et par M. Joseph Garnier, il existe un petit volume qui concentre chaque année tous les chiffres, tous les documents nécessaires au publiciste, à l'homme d'État, à l'administrateur, à tous ceux qui veulent juger par eux-mêmes, et appuyer leurs appréciations sur la base sûre et non chimérique des réalités.

L'Annuaire de l'Économie politique et de la statistique a obtenu un succès mérité, car il rend de vrais services à la science, en fournissant, à ceux qui s'occupent à propager ses saines doctrines, les plus précieux éléments pratiques qui les empêchent de s'égarer dans les folles rêveries de l'imagination.

L'Algérie, dont nous avions provoqué ici même l'introduction dans le cadre élargi de l'œuvre, constitue actuellement la troisième partie; nous en constatons la population, la navigation, la statistique judiciaire, nous pouvons prendre une idée de la vente des terres domaniales, et des grands travaux d'utilité publique qui s'y accomplissent et qui s'y préparent.

Parmi les États dont nous pouvons apprécier les forces, nous devons signaler particulièrement la Prusse, dont l'article, on le conçoit, est neuf et des plus intéressants.

En un mot le petit volume, gros de faits, que nous annonçons, est digne de ses aînés.

Mais ce que nous avons surtout à signaler cette année, c'est l'excel

lente idée qu'ont eue les éditeurs, de publier la table générale et alphabétique de toute la collection. Cette table, qui forme un volume à elle seule, le vingt-cinquième de la série, est un nouveau service rendu à la science et à tous ceux qui ont à consulter cette mine de documents. Elle est précédée d'une préface contenant l'historique de cette œuvre et des indications qu'on ne lira pas sans intérêt, à en juger par le sentiment que nous avons éprouvé nous-même :

« Il y a vingt-trois ans, en 1844, lorsque pour la première fois paraissait l'Annuaire de l'économie politique, qui, en 1867, arrive à son vingt-quatrième volume, les éditeurs disaient dans leur courte préface: « Les principales branches des connaissances humaines ont leur Annuaire. Désormais l'économie politique aura également le sien. Le temps est arrivé pour cette science, véritable physiologie sociale, de vulgariser ses principes, de populariser ses enseignements. A cette époque de paix, d'industrie et de réformes, au moment où la science de l'économie politique est étudiée par ceux qui sont appelés à se prononcer sur toutes les questions relatives au bien-être matériel et moral des populations, cette vulgarisation est devenue un devoir pour les publicistes autant qu'un besoin pour la société.»

«Le succès ne tarda pas à couronner l'entreprise. Cette petite encyclopédie annuelle fut bientôt adoptée par les hommes d'études, et l'une de nos illustrations statistiques, M. Villermé, constatait ce succès dans un rapport à l'Académie des sciences morales et politiques (sur le 6o volume) qui concluait ainsi : « MM. Joseph Garnier et Guillaumin rendent un véritable service en publiant tous les ans, depuis 1844, leurs annuaires qui, je ne crains pas de l'affirmer, méritent des éloges et toute la bienveillance de l'Académie. »

« L'idée de cette utile publication revient au fondateur du Journal des Économistes et au créateur de la Librairie économique, M. Guillaumin, qui, pendant vingt-cinq ans, y a consacré ses soins et une partie notable de son temps. Il s'était assuré dès la première année le concours de M. Joseph Garnier, qui commençait à cette époque à se faire un nom dans la science. Les deux premières années se composent d'une série d'articles sur divers sujets dus en grande partie à des rédacteurs du Journal des Économistes. Les Notices statistiques commencent à paraître dans la troisième année, et, dès la quatrième, la publication prend définitivement le caractère de résumé manuel de statistique, qu'elle a conservé, en se perfectionnant successivement dans la classification et l'élaboration des documents, de plus en plus nombreux et variés.

« Les trois premières années ont paru sous ce titre : Annuaire de l'Économie politique, par les rédacteurs du Journal des Économistes. La quatrième année (1847) est intitulée: Annuaire de l'Économie politique et de la statistique, par MM. Joseph Garnier et Guillaumin, avec des articles de MM. Bastiat, A. Blaise, Michel Chevalier, etc. C'est à partir de la cinquième année (1848) que le volume commence à être divisé en quatre parties relatives - à la France, à la Ville de Paris, aux Pays étrangers, et aux Variétés, Mélanges, Revues et Suppléments. La partie relative aux pays

[ocr errors]

[ocr errors]
[ocr errors]

étrangers a pris d'année en année plus d'extension. Le nombre des divisions est de cinq depuis l'année 1865 :

«1re partie. France, documents officiels. - 2 partie. Ville de Paris3 partie. Algérie et Colonies. 4° partie. Pays étrangers. 5e partie. Variétés.

Dès le deuxième volume, l'Annuaire contient une Revue des événements économiques de l'année dans les divers pays. La première est de M. Legoyt. De 1845 à 1855, ce travail a été fait par M. Joseph Garnier (1), et de 1855 à ce jour, par M. Maurice Block qui est devenu, à partir de la mème époque, le collaborateur de M. Guillaumin, ainsi que l'indique le titre de la publication depuis 1856, et qui, depuis trois ans, en est le rédacteur principal. Une autre Revue doit être signalée ici, c'est la Revue financière rédigée, avec le plus grand soin, depuis 1849, par M. A. Courtois. Nous devons aussi rappeler l'article annuel sur le mouvement de la population de la France par M. Moreau de Jonnès, de 1849 à 1852, et par M. Legoyt, de 1833 à ce jour; le résumé des travaux de l'Académie des sciences morales et politiques, rédigé successivement par MM. Joseph Garnier, Ch. Vergé et Jules Duval; et le Bulletin bibliographique énumérant les publications économiques de l'année.

La Collection des Annuaires de l'économie politique et de la statistique se compose à présent de vingt-quatre volumes. Le premier de ces volumes ne dépassait guère le chiffre de 250 pages. Parmi les derniers, il en est plusieurs qui ont presque atteint le chiffre de 700. En commençant, on ne voulait que recueillir, sans s'astreindre à un plan, des notions d'une utilité générale sur tel ou tel point des études économiques. Peu à peu l'ordre s'est établi de lui-même dans la publication, et l'Annuaire a fini par être l'inventaire méthodique et continu des forces productives du monde civilisé. Il n'est pas un peuple, dès que, par un lien quelconque, il se rattache à la communion des nations laborieuses et commerçantes, qui n'y figure maintenant; et, dans les grandes notices consacrées aux pays les plus considérables, la moisson des matériaux recueillis frappe les yeux par sa régulière abondance. Pour ce qui concerne en particulier la France, il n'est pas de partie intéressante de son système économique et financier qui, chaque année, n'y voie constater et résumer les résultats des faits accomplis, et une large place a été donnée à la ville de Paris elle-même, ce centre intellectuel du monde, de l'aveu de tous les peuples en lutte ou en concurrence avec la France.

« Après avoir parcouru une période d'existence déjà longue, l'Annuaire, qui n'a point de rival ni en France ni à l'étranger, peut être considéré comme un centre de renseignements exacts et de notions utiles qui, une fois le chemin ouvert, n'ont plus qu'à le suivre en se renouvelant, pour se réunir et se féconder par le contact, comme les eaux d'un réservoir qui sont ensuite dirigées de toute part, et de toute part distribuent leur fécondité.

«Nous avons cru ajouter à l'utilité et à la valeur de ce livre si connu

(1) Auteur des Éphémérides publiées dans les volumes de 1845 à 1848.

« PrécédentContinuer »