Images de page
PDF
ePub

de fon cœur ; & faint Paul difoit que nous vivons, nous nous mouvons, & sommes en Dien. En la confideration donc de cette verité, vous exciterez une grande reverence en vôtre cœur à l'endroit de Dieu', qui lui eft fi intimement present.

Le troifiéme moien, c'eft de confiderer Nôtre Sauveur, lequel en fon humanité regarde dés le Ciel toutes les perfonnes du monde; mais particulierement les Chreftiens qui font fes enfans, & plus fpecialement ceux qui font en priere,'defquels il remarque les actions & déportemens. Or ceci n'eft pas une fimple imagination, mais une vraie verité: car en core que nous ne le voïons pas, fi cft-ce que de là-haut il nous confidere. Saint Éstienne le vit ainfi au temps de fon mar tyre: fi que nous pouvons bien dire avec l'Efpoufe: Le voilà qu'il eft derriere la paroy, voyant par les feneftres, regardant par les treillis.

La quatrième façon confifte à fe fervir de la fimple imagination, nous reprefentant le Sauveur en fon humanité sacrée, comme s'il étoit prés de nous: ainfi que nous avons accoûtumé de nous reprefenter nos amis, & de dire, je m'imagine de

voir un tel qui fait ceci & cela, il me femble que je le vois, ou chofe femblable. Mais fi le tres-faint Sacrement de l'Autel êtoit prefent, alors cette prefence feroit réelle, & non purement imaginaire; car les efpeces & apparences du pain feroient comme une tapifferie, derriere laquelle Nôtre-Seigneur réellément prefent nous voit & confidere, quoi que nous ne le voions pas en fa propre forme. Vous uferez donc de l'un de ces quatre moiens pour mettre vôtre ame en la prefence de Dieu avant l'Oraifon, & ne faut pas les vouloir emploier tous enfemblement, mais feulement un à la fois, & cela brićvement & fimplement.

De l'invocation, fecond point de la preparation.

CHAPITRE III.

'INVOCATION fe fait en cette marie

LI

L'e, votre ame le fentant en la presen

ce de Dieu, fe profterne en une extrême reverence, fe connoiffant tres-indigne de demeurer devant une fi fouveraine Majefté : & neanmoins fçachant que cette même bonté le veut, elle lui demande la

2

grace de la bien fervir & adorer en cette Meditation. Que fi vous le voulez, vous pourrez ufer de quelques paroles courtes & enflammées, comme font celles-ci de David: Ne me rejettez point, ô mon Dieu, de devant vôtre face, & ne môtez point la faveur de vôtre faint Efprit. Efclairez votre face fur vôtre fervan te, & je confidererai vos merveilles; Donnez-moi l'entendement, je regarderai vôtre Loy, & la garderai de tout mon. cœur fe fuis votre fervante, donnezmoi l'efprit; & telles paroles femblables à cela. Il vous fervira encore d'ajoûter l'invocation de vôtre bon Ange, & des facrées perfonnes qui fe trouveront au Myftere que vous meditez: comme en ce-/ lui de la Mort de nôtre Seigneur, vous pourrez invoquer Notre-Dame, S. Jean, la Magdelaine, le bon Larron, afin que les fentimens & mouvemens interieurs qu'ils y receurent, vous foient communiquez; & en la meditation de vôtre mort, vous pourrez invoquer vôtre bon Ange, qui fe trouvera prefent, afin qu'il vous infpire des' confidertions convenables, & ainfr des autres Myfteres.

De la propofition du Myftere, troisième point de la preparation.

CHAPITRE IV.

AR
PRE'S ces deux points ordinaires de
la meditation, il y en a un troifiéme
qui n'eft pas commun à toutes fortes de
meditations, c'eft celui que les uns ap-
pellent fabrication du lieu; & les autres,
leçon interieure. Or ce n'eft autre chose
que de propofer à fon imagination le corps
du Myftere que l'on veut mediter, com-
me s'il fe paffoit réellement, & de fait em
nôtre prefence. Par exemple, Si vous
voulez méditer Nôtre-Seigneur en Croix,
Vous vous imaginerez d'être au Mont
de Calvaire, & que vous votez tout ce
qui fe fit, & fe dit an jour de la Paffion:
ou fi vous voulez ( car c'est tout un ) vous
vous imaginerez, qu'au lieu même où
vous êtes, fe fait le crucifiement de Nô-
tre-Seigneur, en la façon que les Evangeli-
ftes le décrivent. J'en dis de même, quand
vous mediterez la mort, ainfi que je l'ai
marqué en la meditation d'icelle", comme
auffi à celle de l'Enfer, & en tous sembla-
bles Myfteres, où il s'agit des chofes vili

[ocr errors]

bles & fenfibles? car quant aux autres Myfteres de la grandeur de Dieu, de l'excellence des vertus, de la fin pour laquelle nous fommes créez, qui font des chofes invifibles, il n'eft pas queftion de vouloir fe fervir de cette forte d'imagination. Il eft vrai que l'on peut bien emploier quelque fimilitude & comparaison, pour aider à la confideration; mais cela est aucunement difficile à rencontrer; & je ne veux traiter avec vous que fort fimplement & en forte que vôtre efprit ne foit pas beaucoup travaillé à faire des inventions. Or par le moien de cette imagination, nous enfermons nôtre efprit dans le Myftere que nous voulons méditer afin qu'il n'aille pas courant çà & là, ne plus ne moins que l'on enferme un oifeau dans une cage, ou bien comme l'on attache l'Efpervier à fes longes, afin qu'il demeure deffus le poing. Quelques-uns vous diront neanmoins, qu'il eft mieux d'ufer de la fimple penfée de la foi, & d'une fimple apprehenfion toute mentale & fpirituelle, en la representation de ces Myfteres, ou bien de confiderer que les chofes fe font en vôtre propre efprit, mais cela eft trop fubtil pour le commencement ; & jufques

« PrécédentContinuer »