Images de page
PDF
ePub

SECTION III.

quième sous laquelle nous vivons ». Combien plus aurait de force une observation analogue faite en comparant le commencement du XIXe siècle avec sa fin prochaine!

286. Comme on vient de le voir, les intérêts sont dus à partir du soixante et unième jour du dépôt jusques et non compris celui du remboursement. Lorsqu'il s'agit de cautionnements pour soumissions de fournitures, marchés ou travaux publics (V. suprà, n. 194 et s.), il n'est pas dû d'intérêts; mais si le soumissionnaire, devenu adjudicataire, affecte son dépôt provisoire au cautionnement définitif de son entreprise, le point de départ des intérêts de ce dernier cautionnement est du soixante et unième jour de l'affectation souscrite.

287. Dans les cas les plus fréquents de consignations les intérêts suivent le sort du capital; soumis aux mêmes causes litigieuses, à la même indivision ou à la même incertitude par rapport à l'attribution finale, ils ne peuvent être payés qu'avec le capital lui-même. Mais il n'est pas rare de rencontrer des circonstances dans lesquelles la consignation n'a sa raison d'être que pour le capital. Tel est le cas des sommes consignées pour servir de cautionnements; les intérêts qu'elles produisent ne sont grevés d'aucun obstacle; il en est de même lorsqu'une somme est déposée en matière de minorité, de dotalité, jusqu'à ce qu'un emploi puisse être opéré, ou lorsqu'elle est affectée au service d'un usufruit ou d'une rente viagère, etc. Dans ces diverses éventualités pour lesquelles la consignation du capital suffit, les parties auxquelles les intérêts reviennent ou qui ont incontestablement le droit de les percevoir peuvent les réclamer annuellement (Arr. min. fin., 1er juin 1839; Inst. gén., 1er déc. 1877, art. 129). Nous examinerons plus loin dans quelles conditions la prescription des intérêts ainsi payables annuellement pourrait être invoquée par la Caisse des dépôts et consignations. V. infrà, n. 788 et s.

288. Lorsque les sommes consignées sont retirées partiellement, l'intérêt des portions restantes continue de courir sans interruption (Ord. 3 juill. 1816, art. 14). Mais la Caisse des dépôts et consignations doit, comme un débiteur ordinaire, im- | puter, conformément à l'art. 1254, C. civ., les paiements partiels qu'elle fait, d'abord sur les intérêts de la somme déposée, et subsidiairement sur le capital. Cette jurisprudence est fondée sur ce qu'il s'agit pour la caisse non pas du remboursement partiel d'un dépôt ordinaire, mais du paiement sur un capital productif d'intérêts et comme tel soumis à la règle générale dudit art. 1254. Paris, 20 mars 1830, Liénard, [S. et P. chr.]; 7 janv. 1831, Lepescheux, [S. 31.2.219, P. chr.]

289. Il a été reconnu, toutefois, par la Cour de cassation, que des paiements à-compte faits par un débiteur à son créancier ne se compensent ou ne s'imputent de plein droit sur les intérêts de la créance, de préférence au capital, qu'autant que ces intérêts sont liquides et exigibles au moment des paiements. Si cette condition n'existe pas, les à-compte payés doivent être imputés sur le capital de la créance, de manière à diminuer ou éteindre les intérêts de ce capital d'une somme précisément égale aux intérêts qu'auraient produits, en faveur du débiteur, les àcompte payés, en les considérant comme avances faites au créancier. — Cass., 18 janv. 1832, Vauver, [S. 33.1.74, P. chr.] 290. On est donc fondé à soutenir, en s'appuyant sur cet arrêt, que l'imputation sur les intérêts des sommes consignées ne peut être imposée à la Caisse des dépôts qu'autant qu'il s'agit d'intérêts dus pour plus d'une année, car cette caisse étant débitrice d'intérêts au taux de 3 p. 0/0 par an, sans indication de périodes d'exigibilité dans le cours d'une année, subirait, en réalité, une surcharge d'intérêts si elle était obligée de les payer par fractions avant l'expiration de l'année.

291. — Les intérêts des sommes déposées volontairement à la Caisse des dépôts et consignations cessent de courir au profit du déposant, du jour où, sur sa demande en retrait, ces sommes ont été tenues à sa disposition, et cela alors même que, par suite d'oppositions ou saisies-arrêts formées par des tiers, elles n'ont été réellement versées, soit entre les mains du dépo-, sant, soit en celles des opposants, qu'à une époque postérieure. Cass., 12 juill. 1858, Cie des Docks, [S. 59.1.165, P. 58.1058, D. 58.1.422]

292. Il va sans dire que si des oppositions ou saisies-arrêts étaient formées avant toute demande en retrait et de mise des sommes déposées à la disposition du déposant, les intérêts | continueraient à courir au profit de qui de droit. — V. Dumesnil, Lois et règlements de la Caisse des dépôts, n. 85.

[ocr errors]

[blocks in formation]

293. Indépendamment des formalités qu'entraîne la réception du numéraire quant à la constatation régulière de la consignation, il en a été prescrit une particulière aux valeurs mobilières ayant pour but d'augmenter les garanties du contrôle établi par la loi de 1833 (V. suprà, n. 252); il a été enjoint aux préfets et sous-préfets de mentionner sur un registre spécial le nombre et la nature des valeurs comprises sur chaque récépissé et d'adresser un relevé mensuel de ce registre à la direction générale (Décr. 15 déc. 1875, art. 2 et 3).

D'autres dispositions spéciales ont été prises pour la conservation des valeurs consignées; elles ont été motivées par la nature mème des consignations de l'espèce.

294. C'est ainsi que les valeurs mobilières consignées dans les départements doivent être immédiatement transmises à Paris au caissier général qui les centralise, qui en a la garde et la responsabilité et est chargé de suivre les mouvements journaliers du portefeuille, de se tenir au courant des diverses échéances de revenus ou d'exigibilité du capital qui surviennent pendant la durée du dépôt, et de pourvoir aux encaissements multiples que peuvent comporter les valeurs consignées. L'envoi des titres a lieu le jour même du dépôt, et est fait par les trésoriers généraux directement ou comme intermédiaires des receveurs particuliers, selon qu'il s'agit de consignations reçues au chef-lieu du département ou de consignations effectuées dans un autre arrondissement (Décr. 15 déc. 1875, art. 4; Inst. gén., 1er déc. 1877, art. 151).

295. Pour ne pas exposer les bénéficiaires déterminés ou éventuels des consignations de valeurs, à subir des déchéances, il a fallu songer aux encaissements divers auxquels les valeurs donneraient lieu pendant la durée de la consignation, soit à titre d'arrérages, intérêts ou dividendes, soit à titre de remboursement du capital par suite de tirages ou d'échéances fixes. Il appartient au caissier général de pourvoir sous sa responsabilité à ces encaissements, soit par lui-même à Paris, soit par l'intermédiaire des comptables dans le ressort desquels est établi le siège des sociétés et des compagnies (Décr. 15 déc. 1875, art. 6, § 1; Inst. gén., 1er déc. 1877, art. 159). 296. Mais, en ce qui concerne les valeurs étrangères, la caisse n'est dans l'obligation d'effectuer les recouvrements d'arrérages, dividendes ou intérêts dont elles peuvent être l'objet qu'autant qu'il existe en France des agents accrédités pour les paiements; quant au capital, elle se borne à faire le nécessaire. et, en aucun cas, elle n'est pas responsable de l'impossibilité du recouvrement (Décr. 15 déc. 1875, art. 6, § 2).

297. Des règles particulières ont été posées à l'égard des effets de commerce dont la consignation était à prévoir, car ils rentrent incontestablement sous la dénomination générale des titres et valeurs mobilières en vue desquels la loi de 1875 est intervenue; il a été tenu compte tout à la fois des exigences de la loi commerciale et de la limite rationnelle qu'il convenait d'assigner au rôle de la Caisse des dépôts et consignations en cette matière.

La condition primordiale et essentielle pour que la Caisse soit tenue, à l'échéance, de réclamer le paiement d'un effet de commerce est qu'il soit passé à son ordre ou accepté par qui de droit, à moins qu'il ne soit payable au porteur sans endossement (Décr. 15 déc. 1875, art. 7).

298.- Quant aux poursuites à exercer en cas de non paiement, on ne devait pas obliger la caisse à agir comme pourrait le faire le créancier ou ses cessionnaires qui, seuls, sont en mesure de connaitre la situation pécuniaire du débiteur et d'apprécier l'utilité, la convenance et les résultats probables de l'emploi des voies judiciaires et des moyens d'exécution contre le tireur ou l'oblige. La caisse doit donc se borner à faire dresser un protèt et à le dénoncer aux endosseurs, souscripteurs ou autres dans les délais de la loi. Il est donné immédiatement avis de l'accomplissement de ces formalités au déposant et les parties intéressées auront alors à examiner les suites qu'elles devront donner à la procédure (Décr. 15 déc. 1875, art. 7)

299. Une autre condition nécessaire pour que la Caisse des dépôts puisse être astreinte à faire constater le défaut de | paiement pour protèt, est que provision existe en numéraire, au

CAISSE DES DÉPOTS ET CONSIGNATIONS.

compte de la consignation, d'un chiffre suffisant pourf aire face aux frais de protêt et de dénonciation; cette condition n'est que l'application du principe en vertu duquel le dépositaire doit rester indemne de tous frais et risques occasionnés par le dépôt. En conséquence, la Caisse refuse de recevoir les effets de commerce pour chacun desquels il n'est pas fait un versement préalable de 5 fr. 93 pour le protêt simple et de 7 fr. 53 pour chaque dénonciation, plus les frais de l'enregistrement préalable du titre au droit fixe de 1/2 p. 0/0, avec double décime et demi, soit au total 0 fr. 625 p. 0/0. Toutefois, ce versement préalable ne serait pas exigé dans le cas où le dépôt comprendrait en même temps du numéraire, et encore dans le cas où la déclaration de consignation contiendrait dispense formelle de protèt à défaut de paiement (Circ. directeur gén. Caisse des dépôts et consignations, 24 juin 1890, § 7).

300. Certaines valeurs mobilières peuvent ne pas être, au moment de la consignation, entièrement libérées de leur capital d'émission; la Caisse des dépôts n'est obligée de satisfaire aux appels de fonds sur les titres qu'elle détient qu'autant que des provisions spéciales lui ont été versées ou, s'il existe des ressources suffisantes au compte de la consignation, qu'autant que ces ressources ont été spécialement affectées à cet emploi par une déclaration formelle du déposant ou des parties intéressées, auxquels il appartient de décider s'il y a lieu ou non de compléter leurs versements sur les titres (Décr. 15 déc. 1875, art. 7).

301.- La caisse se charge de négocier les titres consignés, par ministère d'agent de change, toutes les fois que les parties intéressées sont d'accord pour le demander ou que cela est prescrit par une décision judiciaire passée en force de chose jugée. L'ordre de négociation est donné le lendemain du jour de l'enregistrement de la demande au secrétariat de l'administration ou de la notification de la décision judiciaire (Mème décret, art. 8).

Les titres étant centralisés à Paris, les négociations seront faites le plus généralement à la Bourse de Paris; elles n'auraient lieu dans une autre Bourse que s'il s'agissait de valeurs qui y seraient exclusivement cotées.

--

302. Tous les encaissements opérés sur les valeurs consignées, soit à titre de dividendes, intérêts ou arrérages, soit à titre de remboursements de capitaux ou du montant d'effets de commerce, soit enfin à titre de produit de négociations, sont portés au compte de la consignation et, comme tels, bénéficient d'un intérêt à 3 p. 0/0 par an, à partir du 610 jour de chaque encaissement (Même décret, art. 10).

Le rapport présenté à l'Assem303.- Droits de garde. blée nationale par M. Cochery, au nom de la commission chargée de l'examen du projet de loi sur les consignations de valeurs mobilières s'était ainsi exprimé : « Elle (la direction générale de la Caisse des dépôts et consignations) a la conviction que, sans être pour l'Etat une source de bénéfices, ce nouveau service le laissera cependant indemne de toutes les dépenses qui pourront en résulter; elle compte surtout trouver sa rémunération dans la jouissance des sommes dont elle opérera l'encaissement ». La pensée d'indemniser la caisse des dépenses et de la responsabilité qu'allaient entrainer pour elle la réception, la garde, le maniement et la restitution des titres s'était donc fait jour dès le principe, et elle a trouvé sa traduction dans l'art. 2, L. 28 juill. 1875, qui a fait figurer le mode de rémunération parmi les points dont la réglementation était réservée au pouvoir exécutif.

304. - Mais la jouissance des sommes encaissées à laquelle avait fait allusion le rapport précité n'a pas paru de nature à procurer une rémunération équitable et suffisante; la charge aurait été inégalement supportée par les diverses consignations, et, un certain nombre de revenus encaissés étant susceptibles d'être retirés dans une courte période, la privation d'intérêts sur ces entrées de fonds aurait été absolument insignifiante et aurait procuré à la caisse un produit à peu près nul. Le système, suivi par la Banque de France et adopté par les grandes sociétés de crédit, d'un droit de garde fixe par titre ou par fractions de rentes, selon la valeur nominale où la quotité des rentes n'a pas non plus prévalu parce qu'il avait l'inconvénient de ne pas suffisamment tenir compte de l'importance réelle des titres au moment du dépôt. En tout cas, la base du droit à percevoir devait être nécessairement plus élevée que celle fixée par la Banque; car, tandis que celle-ci n'accepte que les valeurs dont le déposant a la libre disposition, la caisse, au contraire, devait recevoir des valeurs litigieuses ou indivises dont la garde et la

restitution donnent lieu à des appréciations contentieuses et
engagent plus fortement la responsabilité de l'établissement
V. suprà, vo Banque d'émission, n. 303 et s.
305. On s'est donc arrêté au système d'un droit de garde
dépositaire.
proportionné soit à la valeur réelle du titre, au moment du dé-
pôt, toutes les fois que cette valeur peut être révélée par une
cote de Bourse, soit à sa valeur nominale à défaut de cotation.
En conséquence, la Caisse des dépôts et consignations a été
autorisée à percevoir un droit de garde annuel, dù intégrale-
ment pour la première année, et seulement par trimestres pour
les années suivantes. Ce droit, fixé par arrêté du directeur gé-
néral pris sur l'avis de la commission de surveillance et ap-
prouvé par le ministre des Finances, ne peut, en aucun cas,
s'élever au delà de 25 cent. p. 0/0 de la valeur de chaque titre
déposé (Décr. 15 déc. 1875, art. 11, §§ 1 et 2).

306. La valeur des titres consignés est calculée savoir : pour les titres cotés en Bourse, sur le cours moyen de la veille du jour du dépôt (pour les cautionnements V. suprà, n. 200), et, à défaut de cours à cette date, sur celui de la précédente cote constatée aux Bulletins officiels. Le cours de la Bourse de Paris est pris de préférence si les titres sont cotés à la fois à cette Bourse et à d'autres dans les départements.

Quant aux titres non cotés en Bourse, la valeur nominale forme la seule base d'appréciation (Même décret, art. 11, § 3).

307.-Les parties intéressées ont la faculté, au moment du dépôt, de demander une réduction du droit de garde sur les valeurs non cotées en Bourse et improductives de revenus. Le directeur général statue sur les demandes de cette nature d'après les renseignements qui lui ont été fournis, qu'il possède ou qu'il a recueillis sur la situation de l'affaire et sur les perspectives probables qu'il est permis d'entrevoir sur son avenir.

Le droit est du pour chaque année de garde tel qu'il a été fixé au moment de la consignation, la première année commencée comptant comme année entière; pour les années subséquentes, le droit est liquidé par trimestre (Décr. 15 déc. 1875, art. 11, § 4; Arr. dir. gén. 22 mai 1890, art. 3)

308. Le droit est perçu au moment du dépôt si la consignation de valeurs est accompagnée de numéraire; il est prélevé, au besoin, sur les premiers fonds disponibles au compte par suite d'encaissements d'intérès, arrérages ou dividendes, ou de capitaux; enfin, il est réclamé aux parties intéressées, au plus tard avant le retrait des titres pour ceux des dépôts qui n'auraient donné lieu à aucun encaissement ou qui ne comprendraient que des sommes insuffisantes.

Mais le droit est toujours exigible au moment même de la consignation lorsqu'il s'agit de titres qui, n'étant pas régulièrement cotés en Bourse, sont, en même temps, improductifs de revenus. Cette dernière disposition s'applique, notamment, aux billets, effets de commerce, reconnaissances, bons à échéances fixes et bons de sociétés en liquidation qui ne comporteraient le paiement d'aucun revenu périodiquement exigible (Décr. 15 déc. 1875, art. 12; Arr. dir. gén., art. 2; Circ. Caisse des dépôts et consignations, 24 juin 1890, § 4).

309. Pour les consignations effectuées antérieurement au 1er juill. 1890, le droit de garde est de 1,8 p. 0/0 de la valeur calculée d'après les bases sus-indiquées (Arr. dir. gén., 15 déc. 1875). 310. Mais pour toutes les consignations postérieures au 1er juill. 1890, les valeurs sont divisées en trois catégories pour chacune desquelles le droit de garde est fixé actuellement ainsi qu'il suit:

Rentes sur l'Etat et valeurs du Trésor, Première catégorie. actions de la Banque et valeurs françaises sur lesquelles la Banque de France est autorisée à faire des avances droit de Deuxième catégorie. garde, 0 fr. 05 p. 0/0.

Valeurs françaises cotées à la Bourse de Paris ou à une bourse des départements, mais sur lesquelles la Banque de France ne consent pas d'avances; fonds d'Etats étrangers droit de garde, 0 fr. 10 p. 0/0.

--

Valeurs étrangères autres que les Troisième catégorie. fonds d'Etats, cotées à la Bourse de Paris; valeurs quelconques non cotées en Bourse (Paris ou départements): droit de garde, 0 fr. 25 p. 0,0 (Arr. dir. gén. 22 mai 1890, art. 1).

311. Indépendamment des énonciations qu'ils doivent contenir comme lorsqu'il s'agit de numéraire (V. suprà, n. 252), les récépissés de consignations de titres et valeurs mobilières doivent désigner exactement les numéros des titres et indiquer le montant du droit de garde qui sera dù (Circ. 24 juin 1890, § 9).

[blocks in formation]

312. - Le Code de procédure a tracé les règles générales suivant lesquelles les huissiers procèdent aux saisies-arrêts sur les sommes dues au débiteur du saisissant; ces articles tracent également les suites qui doivent être données à la saisie-arrêt pour qu'elle puisse produire effet sur tout ou partie des biens meubles de la partie saisie, tant à l'encontre de celle-ci qu'au regard de ses autres créanciers (art. 557 à 582).

313. Les lois des 19 févr. 1792 et 30 mai 1793 avaient tracé des règles spéciales pour les saisies-arrêts ou oppositions signifiées au Trésor; après la promulgation du Code de procédure civile, en 1806, on s'était demandé si ces lois rentraient dans les dispositions de l'art. 1041 de ce Code, portant que <«< toutes lois, coutumes, usages et règlements relatifs à la procédure civile seront abrogés ». Le Conseil d'Etat, consulté sur ce point, ayant émis l'avis que l'abrogation ainsi prononcée ne s'étendait pas aux affaires intéressant le gouvernement, pour lesquelles il a toujours été jugé nécessaire de se régir par des lois spéciales simplifiant la procédure «ou produisant des formes différentes », il est intervenu le 18 août 1807 un décret destiné à réunir et rappeler toutes les dispositions relatives aux saisies-arrêts ou oppositions formées entre les mains des receveurs, dépositaires ou administrateurs de caisses ou de deniers publics.

[ocr errors]

314. Mais des doutes s'étaient élevés sur le point de savoir si le décret de 1807 devait lui-même être appliqué lorsqu'il s'agit d'oppositions signifiées à la Caisse des dépôts et consignations qui est incontestablement une administration publique, mais qui, en réalité, reçoit et administre des deniers privés. La question a été tranchée par voie législative, en 1837; les dispositions du décret du 18 août 1807 sur les saisies-arrêts ou oppositions sont applicables à la Caisse des dépôts et consignations (L. 8 juill. 1837, art. 11).

315. Pour déterminer le régime auquel sont soumises les saisies-arrêts formées à cette caisse, dans leur origine et dans leurs suites, il convient donc de combiner entre elles les dispositions générales du Code de procédure sur la matière, et celles plus spéciales du décret de 1807.

SECTION II.

Formalités de droit commun.

316. Lorsqu'un créancier veut saisir-arrêter entre les mains d'un tiers quelconque, particulier ou administration publique, les sommes ou effets mobiliers appartenant à son débiteur, il doit d'abord invoquer contre ce dernier un droit de créance exigible; mais il n'est pas nécessaire qu'il soit porteur d'un acte authentique et revêtu de la formule exécutoire; un titre privé suffit. Il peut même être suppléé au défaut de titre par une autorisation du juge du domicile, soit du débiteur, soit du tiers saisi (C. proc. civ., art. 557 et 558).

La saisie-arrêt n'est pas, en effet, un mode d'exécution; elle constitue seulement une mesure conservatoire servant d'acheminement à une exécution ultérieure.

317. — A cette condition de titre ou d'ordonnance en tenant lieu s'ajoute l'obligation d'énoncer dans l'exploit, qu'il soit signifié à un particulier ou à une administration publique, le titre ou l'ordonnance en vertu desquels il est procédé, ainsi que le montant de la créance, ou de la somme évaluée par le juge dans le cas où la créance n'est pas liquide; l'ordonnance doit être copiée en tête de l'exploit; enfin, élection de domicile doit être faite dans le lieu du domicile du tiers saisi, si le saisissant n'y demeure pas; le tout à peine de nullité (C. proc. civ., art. 359). Cette double condition est applicable aux saisies-arrêts formées entre les mains des représentants légaux de la Caisse des dépôts et consignations.

SECTION III.

Formalités particulières.

318. La saisie-arrêt formée entre les mains des receveurs ou administrateurs des caisses ou deniers publics doit exprimer clairement les noms et qualités de la partie saisie, contenir la désignation de l'objet saisi et être précédée d'une copie ou extrait en forme du titre du saisissant ou de l'ordonnance du juge tenant lieu de titre (Décr. 18 août 1807, art. 1 et 2).

319. Sur les deux premiers points qui se rapportent à la personne et à l'objet saisis, les dispositions du décret s'expliquent aisément par la multiplicité des opérations qu'embrasse une administration publique, et la grande quantité de comptes et de titulaires de ces comptes à l'égard desquels il faut connaitre la portée exacte de la saisie-arrêt, tandis que, pour un particulier, il est facile de savoir immédiatement à quelle personne s'appli que l'acte, et quelle est la créance, la somme ou la chose qui viennent à être frappées d'opposition entre ses mains. Mais on comprend moins la nécessité d'une copie du titre, pour la caisse publique, alors qu'une simple énonciation suffit vis-à-vis du particulier tiers saisi.

320. — Quoi qu'il en soit, la saisie-arrêt ou opposition pour laquelle les formalités des art. 1 et 2, Décr. de 1807, n'ont pas été observées, est regardée comme nulle et non avenue et l'administration est fondée à la rejeter (Même décr., art. 3). 321. Mais cette nullité est la seule que la Caisse des dépôts et consignations puisse opposer en refusant le visa dont il va être parlé au numéro ci-après. Si rien n'empêche la caisse de faire l'application d'une saisie-arrèt formée entre ses mains à une consignation et contre une personne nettement désignées, les autres moyens de nullité édictés par les lois et notamment, par T'art. 559, C. proc. civ. (V. suprà, n. 317), ne peuvent plus être invoqués que par les parties intéressées; la caisse n'a pas à se faire juge elle-même du mérite de la saisie-arrêt ou des causes qui peuvent la rendre nulle.

322. La saisie-arrêt formée entre les mains des receveurs, dépositaires ou administrateurs de caisses ou deniers publics, en cette qualité, n'est point valable si l'exploit n'est fait à la per

sonne préposée pour le recevoir, et s'il n'est visé par elle sur l'original et, en cas de refus, par le procureur de la République, Ce magistrat doit donner de suite aux chefs des administrations respectives avis du visa qu'il aura été ainsi amené à apposer C. proc. civ., art. 361; Décr. 18 août 1807, art. 5`.

-

323. Au surplus, les oppositions et significations doivent toujours, d'après les règles de comptabilité publique, être formées entre les mains des payeurs, agents ou préposés sur les caisses desquels les ordonnances ou mandats sont délivrés, c'est-à-dire par lesquels le paiement doit être effectué (L. 9 juill. 1836, art. 13).

324. Les consignations restant localisées sous la responsabilité directe du préposé, en ce sens qu'elles ne peuvent être retirées que dans le lieu du dépôt (V. infrà, n. 334) et qu'elles sont restituées directement par le préposé qui les a reçues, les oppositions et significations sur une somme ou sur une valeur consignée doivent, par voie de conséquence, être également faites au lieu du dépôt. C'est ce qui résulte d'ailleurs implicitement des art. 5, L. 28 niv. an XIII et 16, Ord. 3 juill. 1816, d'après lesquels les préposés ne peuvent refuser les restitutions réclamées d'eux que dans le cas d'irrégularités de pièces justificatives ou sur le fondement d'oppositions entre leurs mains, soit sur la généralité de la consignation, soit sur la portion réclamée, soit sur la personne qui requiert le paiement.

325. Pour les consignations du département de la Seine, les exploits sont remis, à Paris, à la division du contentieux qui a mission de les examiner et de les apprécier; ils restent déposés pendant vingt-quatre heures au bureau désigné à cet effet, pour être ensuite rendus à l'huissier revêtus du visa du chef de la division du contentieux ou accompagnés d'une note faisant connaitre les motifs de rejet. Ce visa seul engage la responsabilité de l'administrateur, quant aux suites de l'acte en ce qui le concerne (L. 19 févr. 1792, art. 9; Décr. 24 août 1793, art. 194; Décr. 1er pluv. an XI, art. 3; L. 23 niv. an XIII, art. 3; Arr. min. fin., 28 oct. 1837, art. 9). On remarquera que toutes les dispositions auxquelles nous renvoyons ne s'occupent directement que de sommes dues par le Trésor. Seule, la loi de niv. an XIII parle de la caisse d'amortissement à propos des cautionnements

[ocr errors]

CAISSE DES DÉPOTS ET CONSIGNATIONS.

de toute nature qu'elle recevait exclusivement; mais l'application de ces mesures a été généralement étendue à toutes les administrations publiques, par identité de motifs.

326. Quant aux consignations formées dans les autres départements, c'est entre les mains des préposés qui les ont reçues que les saisies-arrêts doivent être pratiquées, conformément aux principes que nous venons de rappeler. Dans ce cas, il importe de faire exactement connaitre au comptable qu'il est pris comme - Trib. Nice, préposé de la caisse et non comme agent du Trésor; autrement on s'exposerait à voir prononcer la nullité de l'acte. 19 nov. 1878, [Gaz des trib., 6-7 janv. 1879]

327. Le préposé de la Caisse des dépôts qui refuse son visa est susceptible d'être condamné, sur les conclusions du ministère public, à une amende qui ne pourrait être moindre de 5 fr. (C. proc. civ., art. 1039). Mais il est évident qu'une semblable condamnation ne saurait être encourue qu'autant que l'agent chargé du visa aurait mis dans son refus une mauvaise volonté patente ou une négligence coupable, en un mot que ce refus ne serait justifié en rien. 328. Bien que le décret de 1807 ne reproduise pas les dispositions des art. 563, 564 et 565, C. proc. civ., relatives à la dénonciation et à la contre-dénonciation des exploits de saisiesarrêts, il n'a jamais été contesté que ces formalités dussent être remplies d'après les règles du droit commun à l'égard des saisies-arrêts formées entre les mains des administrations publiques; il suffit qu'aucune dérogation n'ait été apportée aux principes généraux en cette matière, et la partie saisie a le même intérêt à connaitre les mesures prises et la procédure suivie à son encontre, que le tiers saisi soit un simple particulier ou qu'il soit le représentant d'une administration publique.

329. Les receveurs dépositaires ou administrateurs de caisses ou deniers publics ne sont pas, comme les particuliers, assujettis à la déclaration affirmative dont il est question aux art. 568 et 570 à 578, C. proc. civ.; le saisissant est seulement autorisé à requérir du fonctionnaire public, accrédité à cet effet, la délivrance d'un certificat constatant s'il est dû quelque chose à la partie saisie et énonçant l'importance de cette dette, si elle est liquide; si elle n'est pas liquide, le certificat l'énoncera. Dans le cas où il ne serait rien dù, la déclaration en serait faite. Ce certificat tient lieu de tous autres actes et formalités prescrites par Code de procédure à l'égard des tiers saisis (C. proc. civ., art. 569; Décr. 18 août 1807, art. 6).

le

330. Les mêmes receveurs dépositaires sont tenus, dans les certificats qui leur sont demandés, de faire mention des saisies-arrêts ou oppositions frappant sur la même partie et sur la même somme, en indiquant les noms et élection de domicile des saisissants et les causes des exploits. Pareilles mentions et désignations doivent être faites en ce qui concerne les nouvelles saisies-arrêts ou oppositions qui seraient survenues depuis la délivrance d'un certificat, si la demande d'un nouveau certificat ou d'annotations complémentaires était adressée aux fonctionnaires compétents (Décr. 18 août 1807, art. 7 et 8). Ce qui précède doit s'entendre de toutes les significations quelconques dont serait grevée une somme due par l'administration publique.

à

331. En droit commun, le tiers saisi qui ne satisfait pas la demande en déclaration affirmative ou n'appuie pas son dire de pièces suffisamment probantes, devient, à titre de pénalité, débiteur pur et simple des causes de la saisie-arrêt.

[blocks in formation]

pas nulle de plein droit; il faut que cette nullité soit prononcée en justice (Inst. gén. du 1er déc. 1877, art. 93).

333. La Caisse des dépôts ne procède donc au remboursement des sommes ou à la restitution des valeurs frappées de saisies-arrêts ou oppositions même non contre-dénoncées qu'avec le consentement des parties intéressées ou sur le vu d'une décision judiciaire régulièrement intervenue entre elles, autorisant le paiement nonobstant l'opposition ou prononçant mainlevée (L. 28 niv. an XIII, art. 5; Décr. 18 août 1807, art. 9; Ord. 3 juill. 1816, art. 36). 334. En un mot, la question de la validité ou de la nullité d'une saisie-arrêt ne saurait être tranchée par le fonctionnaire public auquel incombe la responsabilité du paiement. - Dumesnil et Pallain, Traité de la législation spéciale du Trésor public, n. 63, p. 64.

[ocr errors]

335. Cette administration ne doit pas davantage se faire juge du mérite respectif des créances, privilégiées ou non, que T'on entendrait faire valoir sur des consignations par elle reçues; une décision récente de la Cour suprême, rendue contre un huissier à propos de fonds qu'il avait eus entre les mains comme provenant de la vente qu'il avait faite des meubles d'un débiteur, doit servir de règle pour toute remise par la Caisse des dépôts ou par un tiers quelconque, lorsque des prétentions diverses ont été soulevées et notifiées. En effet, il a été jugé que le créancier entre les mains de l'huissier instrumentaire était fondé à le pourqui avait formé opposition sur le produit d'une vente mobilière suivre afin qu'il opérat la consignation des sommes par lui touchées, sans que cet huissier pút lui opposer qu'il avait remis les fonds au propriétaire, en vertu d'un jugement consacrant son privilège; cette décision judiciaire n'est, en effet, pas obligatoire pour le créancier qui n'y a pas été partie et qui invoque un priCass., 6 août 1890, vilège préférable à celui du propriétaire et dont l'appréciation ne peut appartenir au détenteur des fonds. Contra, Rouen, 26 juill. 1888, Gaz. des trib., 7 août 1890] cassé par l'arrêt ci-dessus. 336. L'art. 1944, C. civ., aux termes duquel le dépôt doit être remis aussitôt qu'il est réclamé par le déposant, à moins qu'il n'existe entre les mains du dépositaire une saisie-arrêt ou opposition, semble, par la généralité de ses termes, créer une indisponibilité absolue de la somme grevée de la saisie-arrêt. Déjà l'art. 1242 du même Code avait déclaré que le paiement fait par le débiteur à son créancier au préjudice d'une saisie-arrêt ou d'une opposition n'étant pas valable à l'égard des créanciers saisissants ou opposants, ceux-ci étaient en droit de le contraindre à payer de nouveau, sauf son recours contre le créancier. Donc, en droit commun, les articles que nous venons de citer n'apportant aucune limitation de chiffre à l'effet de la saisie-arrêt, il semble qu'on soit fondé à soutenir que le tiers saisi ne saurait, sans risquer d'engager sa responsabilité, se libérer d'aucune partie de sa dette au mépris de la saisie-arrêt qui lui a été signi V. infra, v Saisie-arrêt.

fiée.

[ocr errors]

Mais il en est différemment des caisses du Trésor public et de la Caisse des dépôts et consignations; à leur égard, la saisiearrêt ou opposition ne doit avoir effet que jusqu'à concurrence de la somme portée en l'exploit (Décr. 18 août 1807, art. 4).

337.- Cette obligation de ne retenir sur la somme consignée que le montant des causes de la saisie-arrêt présente, sans doute, pour le cas où d'autres oppositions surviendraient après le retrait de l'excédant des causes de la première saisie, le grave inIl n'en serait pas de même pour le fonctionnaire public qui refuserait de délivrer les certificats destinés à tenir lieu de décla- convénient de réduire à un prélèvement contributoire le droit du ration affirmative. La dette, objet du certificat requis, n'étant pas premier saisissant. En libérant ainsi une portion de la somme personnelle au fonctionnaire, on ne pourrait, en pareil cas, cher- frappée d'opposition, le décret aurait dû, au moins, affecter au cher à triompher de sa résistance qu'en s'adressant à ses supé-profit du premier saisissant la somme non payée par l'adminisrieurs (Arg. anal., Décr. 18 août 1807, art. 5 in fine). — Guillemot, Traité des consignations, p. 208.

SECTION IV.

Effets de la saisie-arrêt.

332. Les paiements faits par le tiers saisi jusqu'à la dénonciation à ce dernier de la demande en validité sont inattaquables (art. 565, C. proc. civ.). Mais la Caisse des dépôts et consignations est liée par la saisie-arrêt dès le moment même où celle-ci a été visée par l'agent compétent et elle suspend tout paiement même alors que la contre-dénonciation ne lui a pas été signifiée. D'ailleurs, une saisie-arrêt, faute de dénonciation, n'est

[ocr errors]

tration publique. Il serait à souhaiter que cette lacune fùt comblée lorsque les propositions de loi actuellement soumises au Parlement sur la procédure des saisies-arrêts viendront en discussion. Mais, dans l'état actuel de la législation, le texte est formel; il limite aux causes exprimées l'effet de la saisie-arrêt lorsqu'elle frappe sur des sommes dues par une administration publique, et la disposition insérée en ce sens dans le décret-loi de 1807 semble confirmer l'opinion qui soutient l'indisponibilité intégrale des sommes saisies-arrêtées en toutes autres mains tierces. 338.- La règle exceptionnelle de l'art. 4, Décr. 18 août 1807, doit être limitée aux saisies-arrêts ou oppositions formées entre les mains des receveurs ou administrateurs des caisses ou deniers publics. Il en résulte, en ce qui concerne la Caisse des dépôts et consignations, que les oppositions à elle directement signifiées ou

celles dont les effets tiennent entre ses mains du chef des comptables ou administrateurs de deniers publics, peuvent seules bénéficier de cette disposition. On ne saurait en faire l'application aux oppositions qui, bien que signalées a la caisse comme charges d'un dépôt, auraient été formées entre les mains de particuliers : pour celles-ci, le droit commun reprend son empire.

339. Nous ajouterons, toutefois, que souvent les oppositions ne mentionnent que le capital de la créance et contiennent des réserves pour intérêts, frais ou autres sommes dues sans que la quotité en soit indiquée. Les instructions données aux payeurs du Trésor portent qu'ils doivent, dans un cas pareil, inviter l'huissier à évaluer en sommes ces réserves; s'il s'y refuse, le payeur vise l'original ainsi qu'il suit Vu pour le capital seulement, les accessoires n'étant pas déterminés (Inst. Contentieux des finances, 11 déc. 1879, art. 12). Ces instructions n'ont pas été reproduites par la Caisse des dépôts vis-à-vis de ses préposés; mais rien ne s'oppose à ce qu'il soit procédé de même par ces derniers. En tout cas, si, la somme à conserver n'étant pas déterminée entièrement, l'opposition avait été reçue sans observations, la partie saisie qui voudrait invoquer le bénéfice de l'art. 4, Décr. 18 août 1807, devrait faire fixer le chiffre auquel devrait être limité l'effet de la saisie-arrêt, soit d'accord avec le créancier opposant, soit par une décision judiciaire rendue contre lui.

340.

Ce qui vient d'être dit à l'égard des saisies-arrêts s'applique également aux significations de transports, de jugements et autres; les unes et les autres sont soumises aux mêmes formalités et forment obstacle au paiement en dehors du consentement des requérants tant qu'un désistement ou une mainlevée ne seront pas survenus. C'est ainsi que lorsqu'une consignation est frappée tout à la fois d'une signification de transport et d'une saisie-arrêt même postérieure en date, la caisse n'a pas à se faire juge de la situation privilégiée que l'art. 1690 du Code civil peut créer en faveur du cessionnaire.-Cass., 13 janv. 1832. — Trib. civ. Châteauroux, 20 juill. 1871 - V. l'instruction du ministre des Finances concernant les oppositions, saisies-arrêts et significations du 11 déc. 1879, p. 18, 93 et 103.

341. Le saisissant a seul qualité pour apprécier si, en présence d'une signification qui est de nature à primer son opposition, il doit ou non maintenir celle-ci. Il est possible qu'il ait des critiques à soulever contre la cession; si elles ne sont pas fondées, le cessionnaire trouvera dans l'art. 1690 une arme qui lui permettra de réclamer par les voies amiables ou judiciaires la mainlevée de la saisie-arrêt postérieure en date à celle de la signification de son transport.

[blocks in formation]

342. Selon les règles de droit commun, les significations de cession ou autres et les saisies-arrêts doivent produire leur effet pour toute la durée du temps pendant lequel le tiers saisi reste débiteur ou détenteur des sommes ou choses frappées de l'un ou l'autre de ces actes; tout au moins, pour se dispenser d'en tenir compte, ne pourrait-il invoquer que la péremption trentenaire.

Il n'en est pas de même lorsqu'il s'agit du Trésor public ou de la Caisse des dépôts et consignations; des mesures particulières ont été adoptées à leur égard en considération du mouvement continuel des deniers qu'ils doivent ou détiennent, du nombre considérable et successif d'ayants-droit vis-à-vis desquels ils sont engagés et de la multiplicité de dossiers et de pièces qu'ils sont appelés à manipuler, toutes circonstances qui mettraient leurs responsabilités en trop grand péril și le terrain n'était de temps à autre déblayé, dans un intérêt d'ordre public, au profit de l'Etat débiteur direct ou garant éventuel des opérations de la Caisse des dépôts et consignations.

1

343. Déjà une loi du 19 févr. 1792 avait limité pour le Trésor le droit que possède le créancier de saisir les biens de son débiteur récalcitrant, en fixant à trois années l'effet des oppositions faites directement à ses caisses; mais, d'une part, cette loi ne s'étendait pas aux sommes dues par l'Etat ou engageant sa responsabilité qui étaient payables ailleurs qu'à la caisse centrale du Trésor; d'autre part, comme il n'était pas formellement exprimé que les saisies-arrêts seraient, après cette date, rayées des registres, elles étaient, en fait, conservées indéfiniment.

Quant à la Caisse des consignations, aucune disposition législative ne la protégeait à cet égard, et, pour elle, qui ne peut jamais acquérir par prescription les capitaux dont elle est détentrice, la situation était encore plus périlleuse.

Pour prémunir le Trésor, puis la Caisse des dépôts, contre les dangers d'une conservation indéfinie des exploits de saisies-arrêts et significations, des dispositions spéciales ont été insérées dans deux lois successives de finances intervenues en 1836 et 1837.

344. Toutes saisies-arrêts ou oppositions sur des sommes dues par l'Etat, toutes significations de cession ou transport desdites sommes et toutes autres ayant pour objet d'en arrêter le paiement n'ont d'effet que pendant cinq années à compter de leur date si elles n'ont pas été renouvelées dans ledit délai quels que soient, d'ailleurs, les actes, traités ou jugements intervenus sur lesdites oppositions et significations. En conséquence, elles doivent être rayées d'office des registres sur lesquels elles ont été inscrites et ne sont plus comprises dans les certificats prescrits par l'art. 14, L. 19 févr. 1792, et par les art. 7 et 8, Décr. 18 août 1807 (L. 9 juill. 1836, portant règlement définitif de l'exercice 1833, art. 14).

345. Les mêmes dispositions sont applicables aux saisiesarrêts, oppositions et autres actes ayant pour objet d'arrêter le paiement des sommes versées, à quelque titre que ce soit, à la Caisse des dépôts et consignations ou à celles de ses préposés.

Toutefois, le délai de cinq années ne court, pour les oppositions ou significations faites ailleurs qu'à la caisse où à celle de ses préposés, que du jour du dépôt des sommes grevées desdites oppositions et significations (L. 8 juill. 1837 portant règlement définitif du budget de l'exercice 1834, art. 11).

-

346. On remarquera qu'il existe une différence entre le texte de la loi de 1836 et celui de la loi de 1837: celui qui concerne le Trésor comprend expressément dans la péremption quinquennale les significations de transport, tandis que ces derniers actes ne sont pas assujettis au renouvellement vis-à-vis de la Caisse des dépôts et consignations. L'omission desdites significations dans la loi de 1837 a été intentionnelle. Lors de la discussion de la première loi devant la Chambre des députés et devant la Chambre des pairs, la déchéance de cinq années, en tant que proposée contre les significations de transport, avait été critiquée comme trop rigoureuse, attendu qu'elle soumettait à une manifestation réitérée un droit de propriété régulièrement et immuablement acquis dans les conditions de l'art. 1690, C. civ.: néanmoins, les motifs d'ordre supérieur auxquels nous avons fait allusion (suprà, n. 343), avaient fait englober dans la formalité du renouvellement ces sortes de significations.

347. Dans la discussion de la loi de 1837 les mêmes objections se sont reproduites à la Chambre des pairs. M. le comte Roy attaquait le principe même de la péremption introduite au profit de la Caisse des consignations qui, soumise selon lui aux règles et à la juridiction du droit commun, ne pouvait être assimilée au Trésor et ne pouvait réclamer une législation spéciale exorbitante du droit commun et subversive des droits des tiers: au moins demandait-il que l'on se gardât de comprendre dans cette mesure exceptionnelle les significations de cession et de transport. Appuyant les considérations développées par son collègue, M. Tripier, sans aller jusqu'à refuser la péremption quinquennale des saisies-arrêts s'est borné à demander la suppression des mots «< cession ou transport » que la Chambre a, en effet, rejetés (Moniteur officiel, année 1837, 1er sem.'. — V. Séance du 2 juin à la Chambre des pairs.

348. Ainsi, les significations de transport faites au Trésor public se périment par cinq années à partir de leurs dates faute de renouvellement, tandis que celles faites à la caisse ne sont pas sujettes à renouvellement. Aussi a-t-il a été jugé qu'au cas de cession d'un cautionnement déposé à la Caisse des dépôts et consignations, le cessionnaire n'est pas tenu de renouveler son opposition dans les cinq ans : le renouvellement n'est nécessaire qu'en cas de saisie-arrèt ou opposition. - Douai, 14 janv. 1865, Théry, [S. 65.2.206, P. 65.849, D. 65.2.212]

349. L'application de la péremption des saisies-arrêts formées ailleurs qu'à la caisse est simple lorsqu'il s'agit d'un dépôt unique; cinq ans après sa date il se trouve dégrevé des oppositions à la charge desquelles il avait été effectué et qui n'ont pas été renouvelées, soit qu'elles aient été formées primitivement entre les mains du particulier déposant qui n'aurait pu appliquer cette péremption ou s'en prévaloir s'il eût conservé les fonds,

« PrécédentContinuer »